COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 41Z 13ème chambre ARRET No101 CONTRADICTOIRE DU 16 FEVRIER 2006 R.G. No 05/06252 AFFAIRE : MDVA ... C/ X... Décision déférée à la cour :
Jugement rendu le 19 Juillet 2005 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES No chambre : 2 No Section : No RG : 05/02408 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP BOITEAU PEDROLETTI SCP BOMMART MINAULT REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE SEIZE FEVRIER DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : S.A.R.L. MONFORT DEPOT VENTE ANTIQUITES MDVA Madame Katherine Y... née le 24 Décembre 1947 à SAINT MAUR DES FOSSES (94100) 2 place Maurice Richard 78940 MILLEMONT représentées par la SCP BOITEAU PEDROLETTI, avoués - N du dossier 0016693 assistées de Maître BELICHA, avocat au barreau de Paris APPELANTES [****************] Monsieur Dominique X... né le 08 Mai 1941 à VERSAILLES Madame Sophie Z... épouse X... née le 09 Avril 1954 à BEAUMARCHES c/o SCI SOMARDO NORMANDE, xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx xxxxxxxxxreprésentés par la SCP BOMMART MINAULT, avoués - N du dossier 00032278 assistés de Maître VILLEFAYOT, avocat au barreau de Versailles INTIMES VISA DU MINISTERE PUBLIC LE 1/12/2005 [****************]
Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Janvier 2006 devant la cour composée de :
Monsieur Jean BESSE, président,
Madame Dominique ANDREASSIER, conseiller,
Monsieur Bruno DEBLOIS, conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Agnès A...
La société MONFORT DEPOT VENTE ANTIQUITES, dite MDVA et Madame Katherine B... épouse Y... sont appelantes d'un jugement rendu le 19 juillet 2005 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES qu'elles avaient saisi par assignation à jour fixe du 28 février 2005 d'une action principale en responsabilité contre Monsieur et Madame X... respectivement gérants de fait et de droit de la société MODEVE en redressement judiciaire à raison de fautes détachables de leurs fonctions par suite de l'annulation pour dol de la cession d'un fonds de commerce d'antiquités, et qui, rejetant les exceptions de procédure, les a déboutées de toutes leurs prétentions, aux motifs qu'elles ne démontraient ni la faute personnelle de Madame Sophie Z... épouse X..., détachables de ses fonctions de gérante susceptibles d'engager sa responsabilité en tant que personne physique, ni la qualité alléguée de gérant de fait en ce qui concerne Monsieur X..., ni enfin la prétendue organisation frauduleuse d'insolvabilité de la société MODEVE. Le Tribunal a en outre débouté les défendeurs de leur demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive. Il a enfin laissé à chaque partie la charge de leurs frais irrépétibles et condamné les demanderesses aux dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 2 décembre 2005, la société MDVA en liquidation amiable d'une part, et Madame Katherine B... épouse Y..., son ancienne gérante d'autre part, rappellent d'abord les termes du litige les ayant opposées à la société MODEVE, alors in bonis, par suite de l'acquisition d'un fonds de commerce, finalement annulée pour dol, s'agissant d'un local qui s'est révélé impropre à l'exercice du commerce d'antiquités auquel il était destiné. Poursuivie alors en exécution forcée, notamment en
réalisation du gage dont disposait sa créancière sur son second fonds de commerce, la société MODEVE procédait par l'intermédiaire de ses gérants à une déclaration de cessation des paiements. La société MDVA était enfin admise au passif du redressement judiciaire à hauteur de 132.617,38 ç à titre privilégié. Les appelantes soutiennent la recevabilité de leur action en responsabilité personnelle des dirigeants de droit et de fait de la société MODEVE : d'une part Madame Katherine B... épouse Y... n'est pas créancière de la société MODEVE; d'autre part les fautes invoquées par la société MDVA seraient d'une nature différente de simples fautes de gestion relevant des dispositions de l'article L.624-3 du Code de commerce. Enfin leur préjudice excèderait largement celui déclaré au passif du redressement judiciaire. Sur le fond, elles prétendent que le dol ayant engendré l'annulation de la vente du fonds de commerce, constituerait par nature une faute séparable des fonctions de gérant, dont les éléments sont caractérisés au jugement d'annulation rendu le 2 décembre 2002 par le Tribunal de Commerce, confirmé par arrêt du 29 janvier 2004. Elles invoquent également l'ouverture le 1er juin 2004 d'une procédure collective sur déclaration frauduleuse de cessation des paiements considérée comme une organisation d'insolvabilité commise par Monsieur X... qui était en réalité gérant de fait de la société MODEVE. Elles demandent donc à la cour d'infirmer le jugement déféré et, statuant à nouveau : - de condamner solidairement Monsieur et Madame X... à payer :
1) à la société MDVA les sommes de :
o
132.617 ç correspondant au montant de son admission au passif du redressement judiciaire ;
o
63.873 ç pour le préjudice afférant à l'exercice social suivant celui couvert par la déclaration de créance ;
2) à Madame Katherine B... épouse Y... les sommes de :
o
62.603 ç en réparation de son préjudice lié à la perte de son investissement dans la société MDVA et à son engagement de caution ; o
12.000 ç de préjudice moral ;
o
159.607 ç de perte de salaire et de retraite ; - d'ordonner les intérêts de ces condamnations à compter du 7 avril 2004, outre une majoration de 5 points et la capitalisation des intérêts échus ; - de débouter les intimés de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ; - et de les condamner au paiement d'une indemnité de 5.000 ç pour chaque appelante, ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions signifiées le 4 janvier 2006, Monsieur X... et son épouse, Madame Sophie Z... forment appel incident visant à titre principal à voir déclarer irrecevable l'action en responsabilité engagée contre eux au titre de l'article L.223-22 du Code de commerce ou de l'article 1382 du Code civil sur la base de prétendues fautes de gestion relevant des seules dispositions de l'article L.624-3 du Code de commerce, et pour la réparation d'un préjudice en réalité strictement identique à celui déclaré et admis au passif de la procédure collective de la société MODEVE. Ils
sollicitent en outre la condamnation des appelantes au paiement de la somme de 50.000 ç de dommages-intérêts pour procédure abusive. Subsidiairement, ils poursuivent la confirmation du jugement qui a débouté la société MDVA et Madame Y... de leurs prétentions, constatant qu'elles ne démontraient ni la faute personnelle de Madame X..., détachables de ses fonctions de gérante susceptibles d'engager sa responsabilité en tant que personne physique, ni la qualité alléguée de gérant de fait en ce qui concerne Monsieur X..., ni enfin la prétendue organisation frauduleuse d'insolvabilité de la société MODEVE. Encore subsidiairement, ils contestent chaque poste de préjudice, tant dans son principe que dans son montant. Enfin, ils sollicitent une indemnité de 10.000 ç pour frais irrépétibles. MOTIFS
Il est constant que le 31 décembre 2000, la société MODEVE, alors in bonis, a vendu à la société MDVA son fonds de commerce d'antiquités et brocante à Montfort l'Amaury, moyennant le prix de 91.725 ç. Le fonds s'est avéré impropre à l'exercice du commerce auquel il était destiné. Par jugement du 20 décembre 2002, le Tribunal de Commerce de VERSAILLES a annulé avec exécution provisoire la cession pour dol. Cette décision était confirmée par arrêt rendu le 29 janvier 2004. Entre temps, pour le règlement de sa créance la société MDVA a alors tenté de mettre à exécution le gage dont elle disposait sur le second fonds de commerce de la société MODEVE. Mais sa gérante procédait le 30 mars 2004 à une déclaration de cessation des paiements. Par jugement du 6 avril 2004, le Tribunal de Commerce ouvrait à son égard une procédure de redressement judiciaire. Par jugement subséquent du 1er juin 2004 le même Tribunal déboutait la société MDVA de sa tierce opposition au jugement d'ouverture concernant la société MODEVE. Enfin, la créance de la société MDVA était admise au passif du
redressement judiciaire de la société MODEVE à hauteur de 132.617,38 ç. C... règlement échelonné est prévu au plan de continuation, récemment arrêté par jugement du 15 novembre 2005.
En ce qui la concerne, la société MDVA est en en liquidation amiable depuis sa dissolution anticipée décidée le 3 juin 2003 par ses associés. Elle est dûment représentée par son liquidateur amiable, également contrôleur à la procédure collective de la société MODEVE, en la personne de Monsieur Y...
C... épouse, ancienne gérante salariée de droit, est en arrêt maladie de longue durée depuis cette époque. Sur la recevabilité
Les appelantes ne contestent pas le caractère irrecevable, au regard des dispositions de l'article L.624-3 du Code de commerce, d'une action en responsabilité engagée contre les dirigeants d'une société faisant l'objet d'une procédure collective à raison de fautes de gestion qu'ils auraient commises et visant à la réparation d'un préjudice résultant du non paiement d'une créance antérieure au jugement d'ouverture, pour le recouvrement de laquelle les poursuites individuelles sont interrompues, qui a été déclarée conformément à l'article L.621-43 du même code, et qui est admise au passif du redressement judiciaire. Mais elles prétendent articuler leur action au titre de l'article 1382 du Code civil (en réalité L.223-22 du Code de commerce) sur des faits et des chefs de préjudice distincts. La question de la recevabilité de leur action ne se pose donc pas, sauf à vérifier si, sur le fond, les fautes invoquées sont bien distinctes des fautes de gestion et si les préjudices dont elles sollicitent réparation ne sont pas ceux dont seul le représentant des créancier pourrait se prévaloir. Sur le fond
A l'appui de son action, Madame Katherine B... épouse Y... n'invoque aucune faute directement commise à son égard. Elle ne se prévaut que des faits ayant opposé la société MODEVE à la société MDVA qu'elle dirigeait. Elle n'en déduit d'ailleurs elle-même qu'un préjudice indirect à son égard, mais qui procède en réalité directement de la situation actuelle de la société MDVA en liquidation amiable, à savoir : la perte vraisemblable de ses apports ; la mise à exécution de son engagement de caution ; la dépression qui s'en est suivie; et les difficultés économiques qui en découleront. Les conditions de son action au titre de l'article 1382 du Code civil ne sont donc pas réunies.
En ce qui concerne la société MDVA les fautes invoquées reposent d'une part sur le dol qui révèlerait nécessairement le caractère intentionnel et malveillant des gérants de la société MODEVE à son égard et d'autre part sur l'organisation de l'insolvabilité de la société MODEVE par l'effet d'une déclaration frauduleuse de cessation des paiements interrompant l'exercice des poursuites individuelles. Enfin le préjudice dont elle sollicite réparation correspond à celui déclaré au passif du redressement judiciaire, outre une créance supplémentaire.
Or sur la première faute, la société MDVA n'invoque ni ne prouve aucun fait distinct de ceux énoncés au jugement et à l'arrêt d'annulation de la vente du fonds de commerce. Comme l'ont justement relevé les premiers juges, l'argumentation de la société MDVA est la reprise de celle de la Cour d'appel qui a confirmé la faute de la société MODEVE et l'a sanctionnée pour dol, sans caractériser l'exceptionnelle gravité de la faute alléguée à l'encontre de Madame Sophie Z... épouse X..., gérante de droit. Il en est de
même à l'égard de Monsieur X..., poursuivi de manière antinomique en qualité de gérant de fait pour des fautes qui ne relèveraient d'aucun mandat social.
La société MDVA n'est par ailleurs pas fondée à contester l'état effectif de cessation des paiements de la société MODEVE, initialement chiffré à - 181.111 ç au jour du jugement ouvrant à son égard une procédure de redressement judiciaire : la société MDVA a en effet été débouté de sa tierce opposition au jugement d'ouverture par jugement subséquent du 1er juin 2004. Enfin l'insuffisance d'actif a été chiffrée à - 168.000 ç par jugement du 15 novembre 2005 arrêtant le plan de continuation pendant 8 ans, prévoyant notamment le règlement progressif, mais intégral, des créances privilégiées. Les griefs tenant à l'organisation d'insolvabilité ne sont donc pas non plus établis.
Enfin le préjudice invoqué n'est autre que celui déclaré et admis au passif du redressement judiciaire, auquel la société MDVA a cru devoir ajouter une somme complémentaire au titre d'une créance dont la déclaration a été omise.
Les conditions de la responsabilité n'étant pas non plus réunies en ce qui concerne l'action de la société MDVA, il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré. Sur les demandes annexes
A l'appui de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, les intimés ne démontrent pas en quoi l'exercice par la société MDVA et Madame Y... des voies ordinaires de droit ait pu dégénérer en un abus. Le jugement qui les en a déboutés doit donc également être confirmé sur ce point.
Enfin, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge des frais irrépétibles qu'elles ont engagés dans le cadre de
Enfin, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à chaque partie la charge des frais irrépétibles qu'elles ont engagés dans le cadre de cette procédure dont les dépens suivent le principal. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort, Confirme dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 juillet 2005 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES, Y ajoutant, Déboute les appelantes et les intimés de leurs demandes au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne la société MDVA et Madame Katherine B... épouse Y... aux entiers dépens, dont distraction au profit des avoués à la cause qui peuvent y prétendre, conformément aux dispositions de l'article 699 du même code. Arrêt prononcé par Madame Dominique ANDREASSIER, Conseiller et signé par Madame Dominique ANDREASSIER, Conseiller et par Madame Sophie D..., faisant fonction de greffier, présent lors du prononcé. Le FAISANT FONCTION DE GREFFIER,
Le CONSEILLER,