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09/02/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006948477

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0017, 09 février 2006, JURITEXT000006948477


COUR D'APPEL DE VERSAILLES AC/KP Code nac : 55A OA 12ème chambre section 1 ARRET No CONTRADICTOIRE DU 09 FEVRIER 2006 R.G. No 05/00341 AFFAIRE : Société COMPAGNIE DE TRANSPORTS COMMERCIAUX LTD C/ S.A.S. SAGATRANS Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Décembre 2004 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE No chambre : 9 No RG :

1148F/03 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP LEFEVRE-TARDY etamp; HONGRE-BOYELDIEU Me BINOCHE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a re

ndu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Société COMPAGNIE DE TRAN...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES AC/KP Code nac : 55A OA 12ème chambre section 1 ARRET No CONTRADICTOIRE DU 09 FEVRIER 2006 R.G. No 05/00341 AFFAIRE : Société COMPAGNIE DE TRANSPORTS COMMERCIAUX LTD C/ S.A.S. SAGATRANS Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Décembre 2004 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE No chambre : 9 No RG :

1148F/03 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP LEFEVRE-TARDY etamp; HONGRE-BOYELDIEU Me BINOCHE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE SIX, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : Société COMPAGNIE DE TRANSPORTS COMMERCIAUX LTD, dont le siège est 13 rue Albion Dock Trou Fanfaron - PORT LOUIS (ILE MAURICE), agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par la SCP LEFEVRE-TARDY etamp; HONGRE-BOYELDIEU, avoués - N du dossier 250018 Plaidant par Me Sébastien COURTIER, avocat au barreau de PARIS APPELANTE S.A.S. SAGATRANS, dont le siège est 31/32 Quai de Dion Bouton, 92811 PUTEAUX CEDEX, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. Concluant par Me Jean-Pierre BINOCHE, avoué - N du dossier 78/05 Plaidant par Me Philippe GODIN, avocat au barreau de PARIS INTIMEE Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Décembre 2005 devant la cour composée de :

Madame Sylvie MANDEL, président,

Madame Marie-José VALANTIN, conseiller,

Monsieur André CHAPELLE, conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Monsieur Didier X...

La société Sagatrans, commissionnaire de transport, a entretenu depuis 1990 des relations commerciales avec la Compagnie de Transports Commerciaux, ci-après CTC, dont le siège est situé à l'Ile Maurice, laquelle a été chargée d'effectuer des opérations de réception, transit et livraisons de marchandises expédiées à destination de l'Ile Maurice. L'ensemble des expéditions était réalisé en port dû, leur coût étant facturé à la société CTC qui devait faire son affaire personnelle de leur recouvrement contre remise des marchandises aux différents destinataires, la société CTC étant rémunérée par une commission de 25 % de la marge brute réalisée par la société Sagatrans sur ces opérations.

Reprochant à la société CTC de n'avoir pas respecté les échéances de règlement en dépit de multiples relances et rappels, la société Sagatrans, par courrier du 7 décembre 2001, a confirmé à la société CTC sa décision d'interrompre leurs relations à compter du 28 février 2002, cette décision lui ayant été exposée de vive voix le 30 novembre 2001, lors d'un voyage sur place.

C'est dans ces conditions que par acte du 2 janvier 2003, la société Sagatrans a fait assigner la société CTC devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins d'obtenir sa condamnation avec exécution provisoire à lui payer la somme de 211.390,60 ç avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, outre une indemnité de 8.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Le 12 mars 2004, elle a sollicité le bénéfice de la capitalisation des intérêts.

En défense, la société CTC a tout d'abord conclu à la prescription de l'action de la société Sagatrans et subsidiairement à son débouté. A

titre reconventionnel, elle a sollicité sa condamnation à lui payer les sommes de 3.000 ç à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que 3.500 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Dans des écritures ultérieures, reprochant à la société Sagatrans d'avoir rompu brutalement leurs relations commerciales, la société CTC, se fondant sur les dispositions de l'article L 442-6 du Code de commerce, a demandé la condamnation avec exécution provisoire de la société Sagatrans à lui payer la somme de 240.000 ç à titre de dommages et intérêts.

Par jugement du 10 décembre 2004, le tribunal de commerce de Nanterre a jugé que la société CTC, qui intervenait sur instructions de la société Sagatrans, avait le statut juridique de mandataire et non celui de commissionnaire substitué, si bien qu'elle ne pouvait bénéficier de la prescription abrégée d'un an qu'elle revendiquait, la prescription de droit commun de dix ans étant applicable en l'espèce.

Le tribunal a ensuite fait droit à la demande de la société Sagatrans en condamnant la société CTC à lui payer la somme de 211.390,60 ç avec intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 2003, et capitalisation des intérêts à compter du 12 mars 2004.

Statuant ensuite sur la demande reconventionnelle de la société CTC, le tribunal a constaté que la société CTC avait gravement manqué à ses obligations contractuelles en ne respectant pas les délais de paiement convenus et en procédant à des compensations unilatérales

non justifiées. Il a jugé que la résiliation était justifiée et a débouté la société CTC de sa demande en dommages et intérêts pour résiliation brutale et abusive.

Déboutant la société CTC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, le tribunal a ordonné l'exécution provisoire de sa décision et a condamné la société CTC à payer à la société Sagatrans une indemnité de 3.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

* Appelante, la société CTC conclut à l'infirmation du jugement entrepris et, comme en première instance, conclut à la prescription de la demande de la société Sagatrans et à sa condamnation, à titre reconventionnel, à lui payer les sommes de 280.000 ç pour rupture abusive de relations contractuelles, 3.000 ç pour procédure abusive et 4.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Au soutien de son appel, elle fait valoir qu'elle est intervenue en qualité de commissionnaire substitué de la société Sagatrans, qu'elle a toujours eu le choix d'organiser les transports qui lui étaient confiés sans recevoir d'instruction et qu'elle a elle-même veillé au post acheminement des marchandises vers leur destination finale qu'elle organisait elle-même. Elle ajoute que le 28 octobre 1998, la société Sagatrans lui a proposé de formaliser leurs relations par un projet de contrat qui reconnaissait sa qualité de commissionnaire de transport, qualité qu'elle a mentionnée à nouveau dans la lettre de rupture du 7 décembre 2001. Elle poursuit en soutenant que c'est la société Sagatrans qui est intervenue en qualité de sous-traitant pour son compte pour la partie du transport entre la France et Port Louis

à l'Ile Maurice. Elle en conclut qu'ayant eu le statut de commissionnaire de transport, la prescription d'un an doit recevoir application, si bien que, s'agissant de transports réalisés en 2001, la demande de la société Sagatrans, formée par assignation du 2 janvier 2003, doit être déclarée irrecevable.

S'agissant de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts, la société CTC fait valoir que la société Sagatrans a mis fin unilatéralement et de manière brutale à plus de vingt cinq années de collaboration sans respecter un préavis raisonnable, alors qu'aucun reproche ne peut lui être fait, ainsi que la société Sagatrans l'a reconnu dans sa lettre de rupture du 7 décembre 2001. A titre de dommages et intérêts, la société CTC réclame une indemnité représentant trois ans de marge brute, soit 280.000 ç.

* Intimée, la société Sagatrans conclut à la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et à la condamnation de la société CTC à lui verser une indemnité de 10.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle reprend son argumentation développée en première instance et retenue par le tribunal selon laquelle la société CTC est intervenue en qualité de transitaire, c'est à dire de mandataire pour le compte de la société Sagatrans dont elle n'était que le correspondant. Elle considère qu'il importe peu que dans ses courriers, elle ait utilisé l'expression de commissionnaire alors que dans les faits, comme d'ailleurs dans le projet de contrat intitulé "contrat d'agence", la nature des obligations de la société CTC était bien celle découlant d'un contrat de mandat, la société CTC étant chargée de percevoir des destinataires le montant de ses frais qu'elle lui facturait pour le

compte de ces derniers, et de les lui reverser, ce qui est précisément l'objet de sa demande au fond.

S'agissant de la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour rupture abusive, la société Sagatrans fait valoir que la société CTC n'a pas protesté contre la durée de trois mois du préavis qui lui a été donné, et que si la société Sagatrans n'a pas mis en cause la qualité de ses services, elle a en revanche contesté les conditions financières de l'exécution de ses prestations, compte tenu des rétentions abusives des encaissements devant lui revenir et des compensations unilatérales et non justifiées qu'elle a indûment pratiquées, dont la mesure est donnée par le montant des sommes dont elle poursuit le recouvrement (211.390,60 ç).

Elle conteste enfin le montant des dommages et intérêts réclamés par la société CTC, lesquels n'ont pas d'autre objet que de tenter de faire échec à la demande formée à titre principal.

SUR QUOI :

1) Sur la demande de la société Sagatrans :

Considérant que la demande de la société Sagatrans concerne le paiement de frais d'expédition que la société CTC a encaissé mais ne lui a pas restitués ;

Considérant que pour s'opposer à la demande la société Sagatrans, la société CTC prétend qu'elle est intervenue en qualité de commissionnaire substitué et qu'à ce titre, elle est fondée à se prévaloir de la prescription d'un an prévue par l'article 133-6 du

Code de commerce ou l'article 103 du Code de commerce mauricien ;

Mais considérant que si ces deux sociétés de transport ont pendant de nombreuses années convenu d'une représentation mutuelle selon que le transport était à destination de l'Ile Maurice ou de la France, il convient d'observer que s'agissant des transports litigieux, sur les avis d'expédition émis en France par la société Sagatrans à destination de l'Ile Maurice, la société CTC était désignée comme "agent" ou comme "correspondant", cet avis étant accompagné d'une copie du titre de transport et de la facture de la société Sagatrans ainsi que des documents douaniers ;

Considérant que les avis d'expédition comportaient les instructions de la société Sagatrans, et mentionnaient l'Incoterm applicable ainsi que des prescriptions particulières concernant notamment l'existence d'un crédit documentaire ou un mode de paiement spécifique ;

Considérant que s'agissant de ventes en port dû, le destinataire devait payer les frais de transport dont la société Sagatrans faisait l'avance aux compagnies maritimes, la société CTC facturant au destinataire le post acheminement ainsi que les frais de l'expédition des marchandises sur lesquels elle percevait un pourcentage de 25 % ; Considérant que la prestation caractéristique de la société CTC était donc de percevoir les frais de transport pour le compte de la société Sagatrans et de réexpédier les marchandises vers leur destinataire final, conformément aux instructions reçues de la société Sagatrans ;

Considérant que quels que soient les termes employés par les parties dans leurs correspondances ou dans un projet de contrat auquel il n'a pas été donné suite, la société CTC ne peut donc soutenir être intervenue en qualité de commissionnaire substitué ;

Considérant que compte tenu de la nature et de l'étendue du mandat qui lui a été confié, la société CTC est donc intervenue dans les opérations de transport litigieuses comme un transitaire, personnellement débiteur des frais dont se trouve grevée l'expédition, et par voie de conséquence soumis à la prescription de droit commun, et non à la prescription abrégée d'un an applicable au commissionnaire de transport, qu'il s'agisse du droit français ou du droit mauricien, lesquels contiennent des dispositions identiques ;

Considérant que la société CTC n'a pas restitué les commissions dues à la société Sagatrans et a effectué des compensations indues pour un montant total de 211.390,60 ç, lequel n'est pas contesté par la société CTC ;

Qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris qui a condamné la société CTC à payer cette somme à la société Sagatrans avec intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 2003 et capitalisation des intérêts à compter du 12 mars 2004 ;

2) Sur la demande reconventionnelle de la société CTC :

Considérant que la société CTC reproche à la société Sagatrans d'avoir mis fin à plus de vingt cinq années de collaboration de

manière brutale sans respecter un préavis raisonnable ;

Mais considérant que si la société Sagatrans n'a pas contesté les conditions matérielles dans lesquelles la société CTC s'acquittait de ses prestations et a rendu hommage à son professionnalisme, il n'en demeure pas moins que les conditions financières dans lesquelles la société CTC a exécuté ses obligations en procédant de manière répétée à des rétentions abusives d'encaissements et à des compensations unilatérales non justifiées, pour un montant cumulé de 211.390,60 ç constituent un manquement grave de la société CTC à ses obligations, de nature à justifier la résiliation du contrat par la société Sagatrans ;

Considérant que la société CTC ne peut donc réclamer des dommages et intérêts à ce titre ;

Considérant que la décision des premiers juges, qui l'a déboutée de la demande formée de ce chef, sera donc confirmée ;

3) Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :

Considérant que la société CTC succombant, sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive sera rejetée ;

4) Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Considérant que la société CTC sera condamnée à payer à la société Sagatrans une indemnité complémentaire de 3.000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant publiquement et contradictoirement,

- CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

- DÉBOUTE la société CTC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- CONDAMNE la société CTC à payer à la société Sagatrans une indemnité complémentaire de 3.000 ç (trois mille euros) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

- CONDAMNE la société CTC aux dépens de l'instance, lesquels pourront être recouvrés directement part Maître Binoche, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

- arrêt prononcé publiquement par

- arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Sylvie MANDEL, président et par Marie SAUVADET, greffier en chef, auquel le magistrat signataire a rendu la minute. Le GREFFIER,

Le PRESIDENT, PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Statuant publiquement et contradictoirement,

- CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

- DÉBOUTE la société CTC de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- CONDAMNE la société CTC à payer à la société Sagatrans une indemnité complémentaire de 3.000 ç (trois mille euros) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

- CONDAMNE la société CTC aux dépens de l'instance, lesquels pourront être recouvrés directement part Maître Binoche, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

- arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Sylvie MANDEL, président et par Marie SAUVADET, greffier en chef, auquel le magistrat signataire a rendu la minute. Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0017
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006948477
Date de la décision : 09/02/2006

Analyses

Une société dont la prestation caractéristique est de percevoir les frais d'expédition pour le compte du commissionnaire et de ré-expédier les marchandises à leur destinataire final,intervient dans les opérations de transport en tant que transitaire personnellement tenu des frais grevant l'expédition, et ne peut soutenir qu'elle a la qualité de commissionnaire substitué. Il s'ensuit que l'action engagée par le commissionnaire à son encontre est soumise au délai de prescription de droit commun de dix ans et non au délai de prescription d'un an fixé par l'article L 133-6 du Code de commerce.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2006-02-09;juritext000006948477 ?
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