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29/09/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946462

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0012, 29 septembre 2005, JURITEXT000006946462


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 D.C./P.G. ARRET N° Code nac : 39C contradictoire DU 29 SEPTEMBRE 2005 R.G. N° 04/02843 AFFAIRE : S.A.R.L. PUB'ACTION C/ S.A. ORANGE FRANCE anciennement dénommée FRANCE TELECOM MOBILES Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Février 2004 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE N° Chambre : 2ème N° Section : N° RG : 11104/02 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à : Me Claire RICARD SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT NEUF SEPTEMBRE DE

UX MILLE CINQ, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivan...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 D.C./P.G. ARRET N° Code nac : 39C contradictoire DU 29 SEPTEMBRE 2005 R.G. N° 04/02843 AFFAIRE : S.A.R.L. PUB'ACTION C/ S.A. ORANGE FRANCE anciennement dénommée FRANCE TELECOM MOBILES Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Février 2004 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE N° Chambre : 2ème N° Section : N° RG : 11104/02 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à : Me Claire RICARD SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE CINQ, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.R.L. PUB'ACTION ayant son siège Le Plessis 53370 GESVRES, représentée par son gérant Monsieur Christian X... ... par Me Claire RICARD, avoué - N° du dossier 240221 Rep/assistant : Me Rosny MINVIELLE DE GUILHEM DE LATAILLADE, avocat au barreau de PARIS APPELANTE S.A. ORANGE FRANCE anciennement dénommée FRANCE TELECOM MOBILES ayant son siège 41/45 boulevard Romain Roland 92120 MONTROUGE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avoués - N° du dossier 439885 Rep/assistant : Me Marguerite BILALIAN, avocat au barreau de PARIS (T.0700). INTIMEE Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Juin 2005 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Denis COUPIN, conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Françoise LAPORTE, Président, Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse GENISSEL, F AITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES La société PUB'ACTION est

titulaire, pour l'avoir régulièrement déposée à l'Institut National de la Propriété Industrielle le 23 juillet 1997 et auprès le l'Organisation Mondiale de la Propriété Industrielle le 28 janvier 1998, d'une marque semi-figurative associant la photographie d'un personnage portant une barbe blanche, des lunettes et un chapeau melon, assis profondément sur une sorte de rouleau auquel sont associés les deux mots LUTIN MALIN inscrits au- dessous en calligraphie manuscrite de type scolaire. Les services visés par le dépôt en France sont "services d'impression sur les emballages des produits de grande consommation alimentaire ou non et plus particulièrement sur le papier hygiénique en feuilles ou en rouleaux. Les impressions se font sur le papier même ainsi que son emballage. Les impressions et informations sont à caractère culturel, et ont trait à l'histoire, la géographie, la culture et les traditions, l'écologie et le tourisme des régions françaises européennes et mondiales. Services d'impression et de publicités, de jeux et concours à caractère publicitaire, d'histoires drôles sur le papier toilette. Service d'impression à caractère pédagogique pour l'apprentissage des langues et dialectes". Faisant à la société FRANCE TELECOM MOBILES, aujourd'hui dénommée ORANGE, le grief d'avoir utilisé sa marque LUTIN MALIN pour la promotion commerciale de ses services ITINERIS, MOBICARTE et OLA dans le cadre d'une campagne publicitaire à la période des fêtes de fin d'année 2000, la société PUB'ACTION a saisi le tribunal de commerce du Mans pour obtenir réparation du préjudice qu'elle estimait avoir subi. Le 17 décembre 2001, cette juridiction s'est déclarée incompétente au profit du tribunal de grande instance de Nanterre devant lequel la société PUB'ACTION a réclamé 450.000 euros de dommages et intérêts pour des faits de contrefaçon sur le fondement des articles L.713-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle et 7.500 euros pour

ses frais irrépétibles. Par un jugement rendu le 02 février 2004, cette juridiction a débouté la société PUB'ACTION de toutes ses demandes en relevant que la marque litigieuse n'avait été utilisée que dans une de ses composantes, n'était déposée pour aucun produit ou service de télécommunication et limitée à ceux de publicité sur le papier-toilette, qu'au surplus les mots LUTIN MALIN constituent une expression d'usage courant et que leur insertion dans les messages publicitaires de la société FRANCE TELECOM SERVICE ne pouvait entraîner aucun risque de confusion. Elle a en revanche considéré l'action de la société PUB'ACTION comme abusive et a condamnée celle-ci à payer à la société ORANGE FRANCE 2.000 euros de dommages et intérêts. Elle a alloué à cette dernière 3.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Appelante de cette décision, la société PUB'ACTION rappelle la nature et l'étendue des dépôts de sa marque dont elle souligne la spécificité et la renommée acquise qui, selon elle, sont établies pour pouvoir bénéficier de la protection de l'article 713-5 alinéa 1 du code de la propriété intellectuelle. Elle soutient que sa marque a pris son autonomie par rapport au produit et que celui-ci a été dépassé par le concept lui-même de LUTIN MALIN. Elle relève que la société ORANGE FRANCE a employé la marque LUTIN MALIN à partir de novembre 2000 nonobstant une mise en demeure adressée le 12 décembre 2000. Elle considère que la faute de la société ORANGE FRANCE est caractérisée par la volonté d'employer la marque en dépit de la mise en demeure, le choix conscient de la période de Noùl car les lutins font partie de la mythologie des fêtes de fin d'année et car le marché touche les enfants et les adolescents qui y sont sensibles, ainsi que par l'utilisation associée des deux mots LUTIN et MALIN. Elle considère que son préjudice résulte de la diminution de l'effet attractif de sa marque en raison de l'utilisation de celle-ci par une

autre personne et, notamment, dans l'altération des négociations contractuelles qui étaient en cours, fin 2000, avec LECLERC, ANNUNZIATA FRANCE et OM Conception. Elle le chiffre, selon une note communiquée en pièce 601, à 457.000 euros avec intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 12 décembre 2000 et demande à la cour de condamner la société ORANGE FRANCE à lui payer cette somme outre celles de 7.622 et 8.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour ses frais irrépétibles respectivement de première instance et d'appel. La société ORANGE FRANCE réplique que la société PUB'ACTION n'établit pas que sa marque ait pu jouir d'une quelconque renommée, au sens de l'article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle, au moment des faits litigieux. Elle observe que s'agissant des investissements qui auraient été réalisés, la société PUB'ACTION ne procède que par voie d'affirmations, sans en justifier. Elle critique l'objectivité, voire la véracité, des pièces produites par la société PUB'ACTION et relève le caractère tardif des attestations délivrées. Elle rappelle que, même si la marque invoquée par la société PUB'ACTION pouvait être considérée comme renommée, au sens de l'article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle, ce texte ne sanctionne pas l'usage d'une marque comme indication d'origine de produits et/ou de services. Elle souligne que l'usage des mots LUTIN MALIN n'a pas été fait à titre de marque, pour distinguer des produits ou des services, mais dans leur sens courant et tels qu'ils sont habituellement associés. Elle rappelle que la protection des marques ne peut avoir pour effet de s'opposer à l'utilisation par des tiers, dans le langage commun, des termes qui la constituent, comme c'est le cas en l'espèce. Elle sollicite ainsi la confirmation du jugement, sauf à porter à 20.000 euros le montant de l'indemnité due en réparation du préjudice résultant de cette action judiciaire abusive. Elle réclame en outre

10.000 euros pour le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 07 avril 2005 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 14 juin 2005. MOTIFS DE LA DECISION Considérant que la société PUB'ACTION fonde, en cause d'appel, son action sur les dispositions de l'article L.713-5 du code de la propriété intellectuelle qui édictent que "l'emploi d'une marque jouissant d'une renommée pour les produits ou services non similaires à ceux désignés dans l'enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur s'il est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cet emploi constitue une exploitation injustifiée de cette dernière" ; Considérant que la société PUB'ACTION soutient que sa marque semi- figurative de l'image photographiée du bonhomme assis sur un rouleau accompagnée des deux mots LUTIN MALIN est renommée, donc susceptible de bénéficier de la protection prévue par ce texte et qu'elle peut s'opposer à son usage pour tous produits ou services, même ceux non visés par le dépôt ; Considérant que pour être qualifiée de renommée et pouvoir ainsi échapper au principe de spécialité, la marque revendiquée doit être connue d'une partie significative du public concerné par les produits ou services couverts par elle ; Considérant que la société PUB'ACTION produit, à l'appui de son affirmation, douze pièces dont il convient d'examiner le caractère probant ; - les pièces n° 301A et 301B, respectivement datées de 2001 et de 2004 font seulement référence à la notoriété régionale, en basse Normandie et plus précisément dans le département de l'Orne, de monsieur Christian X... et citent inexactement LUTIN MALIN comme le nom d'une société, - la pièce n° 302, non datée, est un texte rédigé par la société PUB'ACTION elle-même sur son propre papier à entête, lequel comporte un slogan "Vu à la Télé CANAL + France 2 France 3 TF1", - la pièce n°303, non datée, est constituée

de l'exposé d'un concept d'animation établi par les CENTRES LECLERC consistant à associer un logo LUTIN MALIN à des marques de produits exclusivement destinés aux enfants, - la pièce n° 304, non datée, est un livret individuel destiné aux enfants établi par les CENTRES E.LECLERC dans le cadre du concept d'animation. Il comporte en première page la marque semi-figurative LUTIN MALIN, - la pièce n°305, non datée, est un programme de spectacle de cirque destiné aux enfants, Il comporte en première page la marque semi-figurative LUTIN MALIN, - la pièce n° 306, non datée, est un catalogue édité par une société O.M CONCEPTION présentant des mobiliers récréatifs pour enfants dont certains sont à la marque LUTIN MALIN ou reproduisent, en l'adaptant, l'image du bonhomme au chapeau melon, - la pièce n°307 est une notification de subvention accordée à la société PUB'ACTION par le CENTRE FRANCAIS DU COMMERCE EXTERIEUR pour un site "internet" pour la création duquel est présenté un devis non daté assorti d'une étude de sa fréquentation rédigée sur 28 pages en langue anglaise et non traduite. Ces documents sont datés de 1999, - la pièce n° 308, datée du 16 septembre 1999, est un accord de partenariat passé entre la Ligue Nationale Contre le Cancer et la société PUB'ACTION relative à un projet de mise sur le marché d'un "essuie tout" imprimé de l'an 2000, - les pièces n°309A et 309B, sont un accord de participation daté du 1 octobre 1999 avec l'Association Nationale d'Education de Chiens d'Assistance pour Handicapés et une attestation datée du 19 juillet 2004 délivrée par la directrice de cette association, - les pièces n° 310 et 312 sont des certificats de médailles du concours Lépine décernées en 1998 et - les pièces n° 310 et 312 sont des certificats de médailles du concours Lépine décernées en 1998 et 1999 à monsieur X... pour du papier toilette illustré mais ne font aucune mention de la marque litigieuse, - la pièce n°311 est un document en langue allemande non traduite qui ne fait pas mention de

la marque ; Considérant que ces éléments, dont plusieurs sont dépourvus de date, établissent que la marque semi-figurative LUTIN MALIN est exploitée, de manière suivie, par la société PUB'ACTION ; qu'ils sont, en revanche, inopérants pour démontrer qu'elle serait connue d'une partie significative du public concerné par le papier-toilette imprimé et les mobiliers récréatifs pour enfants et aurait ainsi acquis une renommée ; Considérant que les affirmations de la société PUB'ACTION, portées sur son papier à entête, selon lesquelles la marque aurait fait l'objet de communication télévisée ne sont appuyées d'aucune facture ni certificat des supports ; que la société PUB'ACTION ne fait pas mention d'enquête, même régionale, mesurant la notoriété de sa marque auprès du public et de nature à démontrer que celle-ci jouirait d'une quelconque renommée ; Qu'il suit de là que la société PUB'ACTION n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 713-5 du code de la propriété intellectuelle ; Considérant que la société PUB'ACTION ne peut davantage faire grief à la société ORANGE FRANCE d'avoir utilisé les seuls mots LUTIN et MALIN, pris dans leur sens commun, à l'exclusion de la partie figurative de la marque litigieuse, pour déployer une campagne de communication publicitaire, à l'occasion des fêtes de fin d'année 2000, sur des produits de téléphonie non visés par le dépôt ; Qu'il convient en conséquence de débouter la société PUB'ACTION de son appel et de confirmer le jugement ; Considérant que la société ORANGE FRANCE ne démontre pas le caractère abusif du comportement de la société PUB'ACTION qui a exercé une voie de recours que lui réserve la loi, ni ne justifie du préjudice qu'elle allègue ; que sa demande en paiement de dommages et intérêts doit être rejetée ; Considérant en revanche qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge des frais qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel ; que la société PUB'ACTION sera condamnée à lui payer une indemnité

complémentaire de 3.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que l'équité ne commande pas d'allouer des sommes sur le fondement du même texte à l'appelante qui, succombant dans l'exercice de son recours, doit être condamnée aux dépens d'appel ; PAR CES MOTIFS Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Y ajoutant, Déboute la société ORANGE FRANCE de sa demande en paiement de dommages et intérêts, Condamne la société PUB'ACTION à payer à la société ORANGE FRANCE la somme complémentaire de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Dit n'y avoir lieu à application de ce même texte au bénéfice de la société PUB'ACTION, Condamne cette dernière aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS-BOCCON-GIBOD, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, Président et par Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier, présent lors du prononcé Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0012
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946462
Date de la décision : 29/09/2005

Analyses

MARQUE DE FABRIQUE - Protection - Marque renommée ou notoire

Le bénéfice des dispositions de l'article L 713-5 du Code de la propriété intellectuelle, dérogatoires au principe de spécialité de la protection, est subordonné à la preuve de la renommée de la marque, laquelle suppose sa connaissance par une partie significative du public concerné par les produits ou services pour lesquels elle a été déposée, Le seul fait d'établir que la marque revendiquée fait l'objet d'une exploitation suivie est inopérante pour démontrer qu'elle serait connue d'une partie significative du public concerné par les produits et services pour laquelle elle a été déposée et, par conséquent, qu'elle aurait acquis une renommée au sens de l'article L 713-5 précité


Références :

Code de la propriété intellectuelle, article L713-5

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2005-09-29;juritext000006946462 ?
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