COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 80 A 17ème chambre ARRET No CONTRADICTOIRE DU 16 JUIN 2005 R.G. No 04/03107 AFFAIRE : Aymeric X... C/ ADECCO en la personne de son représentant légal SAS CARREFOUR FRANCE Décision déférée à la cour :
Jugement rendu(e) le 09 Juillet 2004 par le Conseil de Prud'hommes de POISSY No Chambre : Section : Activités diverses No RG : 02/00335 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à :
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE SEIZE JUIN DEUX MILLE CINQ, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur Aymeric X... 2 allée des Jonquilles 78540 VERNOUILLET représentée par Me Sophie MARTIN avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 418. APPELANT [****************] ADECCO en la personne de son représentant légal 48 rue du général de Gaulle 78300 POISSY représentée par Me François VACCARO, avocat au barreau de TOURS S.A.S. CARREFOUR FRANCE en la personne de son représentant légal 78240 CHAMBOURCY non comparante - ni représentée - INTIMES [****************] Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 945-1 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Mai 2005, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX chargé d'instruire l'affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de :
Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président,
Madame Catherine Y..., Vice-Président Placé
Madame Patricia DEROUBAIX, Conseiller, Z..., lors des débats : M.
Nyembo MALUTSHI, EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE,
Aymeric X... a été embauché dans le cadre d'un contrat de travail intérimaire par la société ADECCO à laquelle s'applique la Convention Collective des entreprises de travail temporaire.
Un contrat de mise à disposition a été signé entre la société CARREFOUR et ADECCO le 14 septembre 2002, prévoyant la mise à disposition d'Aymeric X... en qualité d'employé libre-service pour la même journée, à l'issue de laquelle il lui a été remis le relevé d'heures.
Le 16 septembre 2002, un second contrat de mise à disposition était signé entre la société ADECCO et la société CARREFOUR, en vertu duquel Aymeric X... a été délégué en qualité d'employé libre-service.
Le 19 septembre 2002, un nouveau contrat de mise à disposition a été signé entre la société CARREFOUR et la société ADECCO pour la même journée, le salarié ayant été délégué en qualité d'inventoriste.
Le salaire brut mensuel d'Aymeric X... était de 1.360 ç.
Aymeric X... a refusé de signer les contrats des 14 et 16 septembre 2002, signant uniquement celui du 19 septembre.
C'est dans ces circonstances que ce dernier a saisi une demande de requalification de contrats de mission d'intérim en contrat à durée indéterminée le Conseil des Prud'hommes de POISSY qui, par décision en date du 9 juillet 2004 a : - débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes, - débouté la société ADECCO de ses demandes, - condamné le salarié aux entiers dépens.
Le Conseil a en effet estimé que la société ADECCO ne justifiait pas du respect des obligations mises à sa charge par l'article L 124-4 du Code du travail mais qu'Aymeric X... n'avait pas fait preuve de bonne foi dans le cadre de ses relations contractuelles en continuant d'accepter des contrats de mission alors qu'il entendait se prévaloir
du non respect des dispositions précitées, et qu'il ne justifiait d'aucun préjudice lié au fit que les contrats lui avaient été remis pour être signés avec un retard de 3 ou 4 jours.
Le Conseil a par ailleurs considéré qu'il n'était pas établi que c'était de manière intentionnelle que la société ADECCO avant mentionné sur le bulletin de salaire un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué et donc que la demande concernant le travail dissimulé devait être rejetée.
Aymeric X... a interjeté appel de la décision.
Il a demandé à la Cour la requalification des contrats de mission d'intérim illégaux en contrat à durée indéterminée et la condamnation de la société ADECCO au paiement des sommes suivantes : - 8.160 ç au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, - 1.360 ç à titre de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée - 2.000 ç à titre d'indemnité pour licenciement abusif, - 1.360 çà titre d'indemnité compensatrice de préavis, - 136 ç au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur le préavis, - 1.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Il a en outre demandé que soit ordonné la rectification et la remise sous astreinte de 60 ç par jour de retard des certificats de travail, attestation ASSEDIC et bulletin de paie et que les condamnations à intervenir soit assorties des intérêts légaux à compter de première convocation de la société ADECCO devant le Conseil des Prud'hommes.
S'agissant du travail dissimulé, le salarié a fait valoir qu'en vertu des articles L 320 et L 324-10 du Code du travail, il suffit que la société ADECCO ait eu l'intention de ne pas déclarer l'embauche préalablement à la prise du poste de travail pour que le délit de travail dissimulé soit caractérisé.
Il a affirmé par ailleurs que l'agence ADECCO située à POISSY est
coutumière de cette pratique et qu'il a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire.
S'agissant de la requalification des contrats de mission d'intérim en contrat de travail à durée indéterminée, le salarié a fait valoir que l'article L 124-4 du Code du travail dispose que le contrat doit obligatoirement être signé par le salarié au plus tard dans les 2 jours ouvrables suivant son embauche, que faute de comporter cette mention, un contrat de mission ne peut être considéré comme ayant été établi par écrit et que dès lors, l'employeur se trouve lié au salarié par contrat à durée indéterminée. Il sollicite par conséquent une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.
S'agissant des conséquences de la rupture, le salarié a estimé que cette dernière lui ayant engendré une situation extrêmement précaire de par la perte injustifiée de son emploi, et de l'assurance chômage et que la procédure de licenciement n'ayant pas été respectée, la société ADECCO doit réparer le dommage subi en lui versant la somme de 2.000 ç au titre du licenciement abusif.
Enfin, Aymeric X... a prétendu que la novation ne peut être déduite de la seule conclusion d'un contrat à durée déterminée après une relation de travail requalifiée à durée indéterminée.
En réplique la société ADECCO demande à la Cour de : - confirmer en tous points la décision du Conseil des Prud'hommes de POISSY en date du 9 juillet 2004, - déclarer en conséquence irrecevable et mal fondé le salarié en son appel, - condamner ce dernier à lui verser la somme de 3.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, - déclarer la décision commune et opposable à la société CARREFOUR FRANCE.
La société ADECCO FRANCE a rappelé que concernant les demandes d'Aymeric X... au titre du travail dissimulé, l'élément intentionnel de la dissimulation d'emploi salarié doit faire l'objet
d'une démonstration par celui qui l'invoque, et qu'en l'espèce, le plaignant dispose d'un contrat de mission, de fiches de paie, d'une attestation ASSEDIC, ainsi que d'un certificat de travail, et qu'il a été réglé de son salaire correspondant à un travail de 3 jours, les charges sociales ayant été réglées aux administrations.
La société a prétendu par ailleurs que même i les déclarations préalables d'embauche ont été enregistrées avec retard, ceci n'est pas susceptible d'entraîner un quelconque droit au profit du salarié. Concernant la demande de requalification du salarié, la société a fait valoir que le salarié, qui tente de tirer un profit financier de la situation, ne saurait se prévaloir de la non-signature des contrats de mission qui lui est exclusivement imputable.
La société prétend également que la signature du dernier contrat de mission en date du 19 septembre 2002 emporte novation de la relation contractuelle et détermine clairement la volonté du salarié de régulariser un contrat à durée déterminée, dit contrat de mission pour un jour et que dès lors, le salarié est mal fondé à solliciter le bénéfice d'un contrat à durée indéterminée.
SUR QUOI, LA COUR,
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L 124-4 du Code du travail le contrat de mission conclu entre une entreprise de travail temporaire et un travailleur doit être écrit, comporter des mentions obligatoires, et être adressé au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant sa mise à disposition ;
Considérant que la signature d'un contrat écrit, imposée par la loi dans les rapports entre l'entreprise de travail temporaire et le salarié est destinée à garantir qu'ont été respectées les diverses conditions, à défaut desquelles toute opération de prêt de main d'oeuvre est interdite ;
Considérant que les prescriptions susvisées sont d'ordre public ; qu'ainsi s'il est constaté que l'entreprise de travail temporaire n'y a pas satisfait, il en résulte qu'elle s'est placée en dehors du champ d'application du travail temporaire et que la relation salariale contractuelle relève du droit commun autorisant le salarié à présenter une requête en requalification du contrat de travail temporaire en contrat à durée indéterminée avec toutes les conséquences liées à la rupture du contrat ;
Considérant dans le cas présent qu'Aymeric X... a sollicité la requalification des contrats temporaires d'une journée ci-avant énumérés en contrat à durée indéterminée ;
Considérant qu'Aymeric X... prétend n'avoir reçu les deux premiers contrats en date des 14 et 16 septembre 2002 que le 19 septembre 2002 donc au-delà du délai de deux jours imparti par la loi ;
Considérant cependant que les trois contrats de missions produits aux débats portent des numéros d'identification spécifiques déterminés en fonction d'un ordre chronologique ; qu'il convient donc de considérer que les contrats ont été établis aux dates spécifiées sur chacun d'eux, s'agissant de la date de chacune des missions confiées à Aymeric X..., et assurées effectivement par celui-ci pour le compte de la société CARREFOUR ;
Considérant que ces contrats sont des contrats écrits répondant aux prescriptions prévues par la loi ; qu'ils comportent toutes les mentions obligatoires spécifiées par la loi ;
Considérant en fait que seule la date de transmission de ces contrats à Aymeric X... reste incertaine dans la mesure où aucune obligation n'est imposée par la loi concernant le mode de transmission ;
Considérant que la société ADECCO a affirmé avoir remis régulièrement les contrats de travail temporaire, mais s'être heurté au refus de
X... d'apposer sa signature, arguant "du fait que cela lui serait utile" ;
Considérant qu'il résulte des éléments à la disposition de la Cour et des débats la preuve que la société ADECCO a effectivement transmis à Aymeric X... les 3 contrats de mission dans les délais impartis par la loi, mais s'est heurté au refus opposé par le salarié de signer les deux premiers, au demeurant exécutés sans aucune critique de l'intéressé, dans le seul but, ultérieurement, de se prévaloir d'une inobservation par l'entreprise de travail temporaire des dispositions légales très contraignantes en la matière ;
Qu'il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Aymeric X... de ses demandes de ce chef ;
Considérant que Aymeric X... fait grief en outre à la SA ADECCO de ne pas déclarer ses salariés temporaires à l'organisme de recouvrement des cotisations du régime général de sécurité sociale avant que ne soit écoulés plusieurs jours après la prise de leur poste de travail, qu'il a sollicité l'équivalent de six mois de salaire en raison de la dissimulation volontaire de son contrat de travail ;
Considérant cependant que la déclaration des embauches en cause ont été enregistrées le 20 septembre 2002, que Aymeric X... a reçu sa fiche de paie, les charges sociales ayant été régulièrement réglées, qu'une attestation ASSEDIC lui a été remise ;
Que dès lors il n'est pas établi que Aymeric X... a été engagé par ADECCO en violation des dispositions résultant de l'article L 324-10 du Code du travail ; que Aymeric X... sera en conséquence débouté de sa demande de ce chef sans fondement ;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société ADECCO la totalité des frais qu'elle a dus exposé en cause d'appel, que toutefois sa demande excessive dans son montant sera
réduite à concurrence de 250 ç ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement déféré ;
Y AJOUTANT :
CONDAMNE Aymeric X... à payer à la société SA ADECCO la somme de 250 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
LE CONDAMNE en outre aux dépens.
Arrêt prononcé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président, et signé par Monsieur Jean-Michel LIMOUJOUX, Président et par Madame Corinne BOHN Z... présent lors du prononcé. Le Z...,
Le PRESIDENT,