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09/03/2005 | FRANCE | N°03/01363

France | France, Cour d'appel de Versailles, 09 mars 2005, 03/01363


Nä du 09 MARS 2005 9ème CHAMBRE RG : 03/01363 AN

LL/BF COUR D'APPEL DE VERSAILLES Arrêt prononcé publiquement le NEUF MARS DEUX MILLE CINQ, par Madame RACT-MADOUX, Président de la 9ème chambre des appels correctionnels, en présence du ministère public, Nature de l'arrêt : CONTRADICTOIRE Sur appel d'un jugement du tribunal correctionnel de Nanterre, 14ème chambre du 06 mai 2003. COMPOSITION DE X... COUR lors des débats, du délibéré, et au prononcé de l'arrêt, Président



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Mademoiselle Y..., Monsieur BRISSET-FOUCAULT

, Bordereau Nä MINISTÈRE PUBLIC : Madame BRASIER DE Z..., Substitut général GREFFIER : Mademoiselle A... P...

Nä du 09 MARS 2005 9ème CHAMBRE RG : 03/01363 AN

LL/BF COUR D'APPEL DE VERSAILLES Arrêt prononcé publiquement le NEUF MARS DEUX MILLE CINQ, par Madame RACT-MADOUX, Président de la 9ème chambre des appels correctionnels, en présence du ministère public, Nature de l'arrêt : CONTRADICTOIRE Sur appel d'un jugement du tribunal correctionnel de Nanterre, 14ème chambre du 06 mai 2003. COMPOSITION DE X... COUR lors des débats, du délibéré, et au prononcé de l'arrêt, Président

:

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Mademoiselle Y..., Monsieur BRISSET-FOUCAULT, Bordereau Nä MINISTÈRE PUBLIC : Madame BRASIER DE Z..., Substitut général GREFFIER : Mademoiselle A... PARTIE EN CAUSE AN né le à (71) de René et de L Jacqueline Conseiller infographie et informatique, de nationalité française, célibataire, demeurant 78 Jamais condamné, libre, Comparant, assisté de Maître LANCRENON, avocat, substituant Maître FEDIDA Jean Marc, avocat au barreau de PARIS. PARTIES CIVILES L'ASSOCIATION DE RECHERCHE POUR B... CANCER, agissant en qualité de légataire universel de Mme C...
D... veuve E... (décédée) Demeurant 25, Rue Kellog - 92150 SURESNES Représentée par Maître DENIS Hervé, avocat au barreau de PARIS X...
F... Chez Maître MAUGENDRE Stéphane - 2 bis, Rue Jean Mermoz - TourRosny 2 - 93110 ROSNY SOUS BOIS Représentée par Maître AZRIA Henri, avocat, substituant Maître MAUGENDRE, avocat au barreau de BOBIGNY 5 RAPPEL DE X... PROCÉDURE :

B... JUGEMENT : Par jugement contradictoire en date du 06 mai 2003, le tribunal correctionnel de Nanterre : SUR L'ACTION PUBLIQUE : A relaxé AN des faits qualifiés de : DEUX ABUS DE L'IGNORANCE OU DE X... FAIBLESSE D'UNE PERSONNE VULNERABLE POUR L'OBLIGER A UN ACTE OU A UNE ABSTENTION NEFASTE, de 1998 à 2001, dans les Hauts de Seine, infraction prévue par l'article 223-15-2 AL.1 du Code pénal et réprimée par les articles 223-15-2 AL.1, 223-15-3 du Code pénal commis au préjudice de D...
C... veuve E... et de Mme G... concernant la rédaction le 20 mars 2000 d'un testament l'instituant légataire universel. A déclaré AN coupable pour les faits qualifiés de : ABUS DE CONFIANCE PAR PERSONNE RECOUVRANT DES FONDS OU DES VALEURS POUR B... COMPTE DE TIERS, de 1998 à 2001, dans les Hauts de Seine, infraction prévue par les articles 314-1 AL.1, 314-2 2ä du Code pénal et réprimée par les articles 314-2, 314-10 du Code pénal ABUS DE L'IGNORANCE OU DE X... FAIBLESSE D'UNE PERSONNE VULNERABLE POUR L'OBLIGER A UN ACTE OU A UNE ABSTENTION NEFASTE, de 2000 à 2001, dans les Hauts de Seine, infraction prévue par l'article 223-15-2 AL.1 du Code pénal et réprimée par les articles 223-15-2 AL.1, 223-15-3 du Code pénal L'a condamné à 2 ans d'emprisonnement dont 1 an avec sursis et mise à l'épreuve pendant 3 ans avec les obligations prévues aux articles 132-45 al 5 et 13 du code pénal L'a condamné à l'interdiction d'exercer la profession de conseiller financier pour une durée de 5 ans. SUR L'ACTION CIVILE : A reçu la constitution de partie civile de Mme C... et de l'établissement X...
F... A condamné M. AN à payer à Mme C... la somme de 68 030 à titre de dommages et intérêts et celle de 5 000 au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale avec intérêt légal à compter du 06 mai 2003 A condamné M. AN à

payer à X...
F... la somme de 1 500 à titre de dommages et intérêts et celle de 1 000 au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale A rejeté le surplus des demandes des parties civiles A condamné M. AN aux dépens A dit la demande de restitution des scellés présentée par la partie civile C... veuve E... fondée. A ordonné la restitution des scellés nä 7 à 11.

A dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement. H... APPELS : Appel a été interjeté par :

Monsieur AN, le 16 mai 2003, sur les dispositions pénales uniquement, M. le Procureur de la République, le 16 mai 2003, Madame C...
D... veuve E..., le 21 mai 2003. DÉROULEMENT DES DÉBATS : A l'audience publique du 02 février 2005, Madame le président a constaté l'identité du prévenu qui comparaît assisté de son conseil ;Ont été entendus : Monsieur BRISSET-FOUCAULT, Conseiller, en son rapport, Madame RACT-MADOUX, Président, en son interrogatoire, Monsieur AN, en ses explications, Maître DENIS, avocat, en ses plaidoirie et conclusions, Maître AZRIA, avocat, en ses plaidoiries et conclusions, Madame BRASIER DE Z..., substitut général, en ses réquisitions, Maître LANCRENON, avocat, en sa plaidoirie, B... prévenu a eu la parole en dernier. Madame le président a ensuite averti les parties que l'arrêt serait prononcé à l'audience du 09 MARS 2005 conformément à l'article 462 du code de procédure pénale. DÉCISION X... Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant : B... RAPPEL DES FAITS ET DE X... PROCEDURE Sur les faits, il y a lieu de se rapporter à l'exposé qui figure au jugement et que la cour adopte. ääää À l'issue de l'information, M. AN a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Nanterre pour avoir : " dans le département des Hauts de Seine, courant 1998 et 2001 " : - " en sa qualité de conseiller financier de X...
F..., faisant appel au public pour obtenir la remise de fonds, détourné à son profit des bons anonymes

de X...
F..., à concurrence de 300 000 francs soit 45 454,55 euros et des espèces à concurrence de 50 000 francs, soit 7 575,76 euros qui ne lui avaient été remis qu'à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé, et ce au préjudice de D...
E..., faits prévus et réprimés par les articles 314-1, 314-2, 314-10 du Code pénal, " - " frauduleusement abusé de la situation de faiblesse de D...
E..., personne majeure qu'il savait particulièrement vulnérable en raison de son âge, de son invalidité et de sa fragilité psychologique due à sa grande solitude, pour l'obliger à des actes qui lui sont gravement préjudiciables, en l'espèce à lui consentir une donation d'un montant de 83 333,33 euros, à établir un testament en sa faveur, à signer des formulaires en blanc ayant permis le retrait de la somme de 35 000 euros," - " frauduleusement abusé de la situation de faiblesse de Jeanne G..., personne majeure qu'il savait particulièrement vulnérable en raison de sa fragilité psychologique, de son état de santé précaire, pour l'obliger à des actes qui lui sont gravement préjudiciables, en l'espèce établir un testament en sa faveur, déposer à son domicile personnel des bons du Trésor, faits prévus et réprimés par les articles 313-4, 313-7 anciens et par l'article 223-15-2 du nouveau Code pénal ". Par jugement contradictoire du tribunal correctionnel de Nanterre du 6 mai 2003, M. AN a été : - relaxé "des faits qualifiés d'abus de faiblesse commis au préjudice de D...
C... veuve E...," - relaxé "du fait qualifié d'abus de faiblesse commis au préjudice Mme G... concernant la rédaction le 20 mars 2000 d'un testament l'instituant légataire universel" - déclaré coupable "du délit d'abus de confiance commis par une personne faisant appel public à l'épargne pour obtenir la remise de fonds au préjudice de Mme C... veuve E... à raison des détournements suivants : - trente bons anonymes courant les années 1999 et 2000 pour un montant de 45 454,55 euros, - les sommes

de 6 060,60 euros et 1 515,16 euros débitées de ses comptes courants les mois de juin et juillet 1999 ", - déclaré coupable" du délit d'abus de faiblesse au préjudice Mme G... à raison de la détention courant les années 2000 et 2001 de 25 bons anonymes capiposte, propriété de Mme G...". M. AN a été condamné à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans comprenant l'obligation d'indemniser la victime et celle de s'abstenir de rentrer en relation avec Mme E...
B... tribunal a en outre condamné M. AN à la peine complémentaire de l'interdiction d'exercer la profession de conseiller financier pendant cinq ans. Sur l'action civile, le tribunal a condamné M. AN à verser : - à Mme E... : la somme de 68 030 à titre de dommages et intérêts et celle de 5 000 au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, avec intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2003, - à l'établissement X...
F..., la somme de 1 500 à titre de dommages et intérêts et celle de 1 000 au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. B... tribunal a rejeté le surplus des demandes des parties civiles. B... tribunal a en outre ordonné la restitution à Mme E... des scellés numérotés 7 à 11. M. AN a interjeté appel des dispositions pénales de cette décision le 16 mai 2003, suivi le même jour par le le procureur de la République et le 21 mai 2003 par Mme E...
B... ministère public requiert la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré coupable d'une partie des faits qui lui étaient reprochés. Il s'en rapporte sur les faits qualifiés abus de faiblesse concernant les testaments pour lesquels les premiers juges sont entrés en voie de relaxe. Concernant les faits qualifiés abus de faiblesse relatifs à la donation consentie en 1999 par Mme E..., qui porte sur la somme de 550 000 francs, le représentant du ministère public requiert l'infirmation de la relaxe prononcée en première instance. Il souligne que l'un des rapports

d'expertise a relevé la vulnérabilité affective de la victime, l'autre son état de faiblesse. B... ministère public estime que le retrait à vue de la somme de 231 000 francs (35 000 ), qualifié abus de faiblesse par la prévention, est constitutif du délit d'abus de confiance. Il requiert requalification en ce sens et la condamnation de M. AN de ce chef. B... ministère public estime par ailleurs que la remise, par Mme G... de ses bons anonymes à M. AN est constitutif d' un abus de faiblesse. Il s'en rapporte sur le testament. L'ASSOCIATION POUR X... RECHERCHE SUR B... CANCER (ARC) se présente devant la cour en lieu et place de Mme E...
I... association agit en vertu d'un testament du 20 mai 2000 l'ayant instauré légataire universel de Mme E..., décédée le 17 mai 2004. L'ARC demande à la cour de constater son intervention de confirmer le jugement entrepris sur les déclarations de culpabilités prononcées et de l'infirmer sur les relaxes, en déclarant M. AN coupable de l'ensemble des faits visés par l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. J... demande à la cour de : [* confirmer les dispositions civiles de la décision entreprise en ce que celle-ci portait condamnation de M. AN à payer à Mme E... la somme de 68 030 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 5 000 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, *] de condamner en outre M. AN à lui verser les sommes suivantes: - "83 333, 33 euros correspondant au chèque établi à son profit avec intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 1999, date d'encaissement du chèque," - "35 000 euros correspondant à un second chèque établi à son profit avec

intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2000, date du retrait," - "10 000 euros au titre du préjudice moral," - "10 000 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale". L'ARC expose, sur la rédaction des testaments par lequel Mme E...

désignait M. AN comme légataire universel, que les éléments du dossier, notamment les expertises, démontrent que l'état de santé de la victime et sa grande solitude avaient placé cette dernière dans un état de faiblesse, de vulnérabilité et de dépendance qui ne pouvait échapper au prévenu. X... partie civile estime que, Mme E... étant à présent décédée, le préjudice est établi. Concernant la donation du 24 décembre 1999, la partie civile considère que l'abus de faiblesse est constitué du fait de l'état de sujétion psychologique dans laquelle Mme E... se trouvait au moment de la remise du chèque de 550 000 francs à M. AN. H... manipulations auxquelles s'était livré le prévenu avaient en effet, selon l'ARC, diminué la résistance psychologique de la victime, qui n'était plus en mesure de faire face aux sollicitations dont elle était l'objet. X... partie civile estime qu'il en est de même pour la remise des bons anonymes que le prévenu a fait souscrire par Mme E... en juin 1999 et qu'il a revendu à X...
F... à son profit en décembre 1999 et en mai 2000. L'ARC considère que le retrait à vue de 231 000 francs (35 000 euros) du 14 janvier 2000 destiné à payer les droits de mutation afférents à la donation de la somme de 550 000 francs constitue un abus de faiblesse et non un abus de confiance, comme l'a estimé le tribunal. Il est en effet évident, selon la partie civile, que le chèque n' a pas été remis à M. AN dans un but précis mais que cette remise a été obtenue par le prévenu grâce la sujétion psychologique dans laquelle il avait placé Mme E... en abusant de la particulière vulnérabilité de cette dernière. Sur les préjudices, l'ARC fait valoir que le préjudice financier s'élève aux montants des sommes indûment obtenus par le prévenu et que les faits, notamment l'obtention frauduleuse de testaments, ont causé, par leur nature même, un préjudice moral à Mme E...
X...
F... demande à la cour de confirmer la décision entreprise et se réfère aux motifs de cette dernière. Son conseil

indique que le préjudice causé par les faits reprochés au prévenu réside dans l'atteinte à l'image causée à cet établissement. M. AN demande à la cour de prononcer sa relaxe. Il fait valoir que l'état de faiblesse de Mme E... et celui de Mme G... ne sont pas établis par les éléments du dossier. MOTIFS DE X... COUR SUR L'ACTION PUBLIQUE Sur les faits concernant Mme E...
B... docteur PASCAL, premier expert désigné dans le cadre de l'information pour examiner Mme E..., a écarté dans son rapport "tout processus psycholopathologique significatif et susceptible d'avoir pu influencer son comportement lors des faits dont elle dit avoir été victime" Il a indiqué qu'il "n'y avait pas chez elle de maladie mentale constituée " et qu'" on pouvait éliminer toute pathologie de type démentielle, voire même tout affaiblissement intellectuel significatif, en dehors d'un très léger affaiblissement naturel dû à son très grand âge". Il a noté cependant "une certaine vulnérabilité affective qui s'est accentuée au cours des années (...) secondaire au grand isolement affectif qui semble être le sien". L'expert ajoute que Mme E... a effectué un "transfert affectif massif sur Monsieur AN dont le comportement n'aurait jamais été ambigu, Madame E... se plaignant même d'une certaine froideur de celui qu'elle considérait comme son conseiller et son soutien". B... docteur PASCAL a estimé en conclusion qu'il ne pouvait être reconnu à Mme E... "le caractère de vulnérabilité que pourrait avoir une personne déficiente intellectuellement ou présentant une pathologie psychiatrique voir même somatique majeure". Il a néanmoins relevé "chez elle une certaine vulnérabilité et un certain état de faiblesse dus à son isolement et sa quête affective qui, s'ils entraînent une certaine dépendance vis à vis d'autrui, ne constituent pas toutefois ce que l'on pourrait considérer comme un état de vulnérabilité particulière sur le plan juridique". B... docteur K..., deuxième expert commis par le magistrat instructeur a

constaté que Mme E..., née en 1913, était, au cours de l'année 1999, dans un état de "dépendance psychologique majoré par l'isolement induit par ses problèmes de santé physique". Il a relevé que l'état de Mme E... s'était détérioré en décembre 1999, période au cours de laquelle elle "s'est retrouvée isolée, incapable de sortir". L'expert a noté dans ses conclusions que l'état de santé de Mme E... en 1999 "et plus particulièrement pour la période de décembre 1999 (...) la plaçait dans un état de faiblesse et de dépendance vis-à-vis d'autrui, tant sur le plan somatique que sur le plan psychologique mais qu'elle ne présentait pas de processus déterioratif de type Alzeimer et que son quotient intellectuel se situait cliniquement dans la zone de normalité compte tenu de son âge". Il se déduit de ce qui précède que, même s'il est exact que Mme E... n'était pas atteinte, au moment des faits, d'une pathologie mentale, elle se trouvait, dans un état de grande dépendance affective qui l'a amenée à faire une confiance aveugle à M. AN, conseiller financier à X...
F..., dont elle était la cliente. M. AN a ainsi su exploiter à son avantage la solitude de Mme E... et son grand âge, et provoquer le phénomène de transfert affectif évoqué par les experts. X... qualité d'agent de X...
F... et le titre de conseiller financier de M. AN conféraient en outre à ce dernier un prestige et une image de compétence et de probité, lié au statut de cet établissement public et à son image sécurisante de gardien de l'épargne, particulièrement développée chez les personnes âgées. X... combinaison de ces facteurs ont induit chez Mme E... une situation de particulière vulnérabilité vis à vis de M. AN qui en a abusé pour obtenir d'elle des remises de fonds ou valeurs et des testaments en sa faveur. M. AN ne pouvait ignorer la situation de faiblesse dans laquelle Mme E... se trouvait dans sa relation avec lui puisque, outre le grand âge et l'isolement évidents de la victime et

l'ascendant que lui procurait sa situation professionnelle, c'est le prévenu lui-même qui avait créé lagrand âge et l'isolement évidents de la victime et l'ascendant que lui procurait sa situation professionnelle, c'est le prévenu lui-même qui avait créé la situation de dépendance affective évoquée plus haut, qu'il a ensuite exploitée. B... prévenu a d'ailleurs lui- même décrit aux gendarmes qui l'interrogeaient la genèse de cette situation - dont il savait nécessairement qu'elle sortait complètement du cadre normal des relations qu'un employé d'un établissement financier doit entretenir avec la clientèle et des règles déontologiques auxquelles il était soumis : "J'ai décidé de l'aider comme j'avais essayé d'aider mon père (...) Nous avons sympathisé, ce n'était pas une cliente mais une amie. Mes visites à son domicile se sont fait de plus en plus fréquentes ; Je lui faisais les courses (...) elle me considérait comme son fils et moi comme ma mère". X... cour considère par ailleurs que les montants des sommes obtenues par M. AN, directement par la donation en décembre 1999 de la somme de 550 000 francs, ou grâce à la signature du formulaire de retrait à vue ayant permis, en janvier 2000, le retrait du compte de Mme E... de la somme de 231 000 francs destinée à payer les droits inhérents à cette donation, suffisent à établir la gravité du préjudice matériel et moral causé à Mme E..., dont le patrimoine, avant les faits, s'élevait à environ trois millions de francs.. Sur les testaments successifs établis par Mme E... en faveur de M. AN, entre avril 1999 et mai 2000 il apparaît, d'une part qu'ils ont été obtenu par le prévenu grâce à l'ascendant qu'il exerçait sur la victime qui ne disposait plus à cette époque de son libre arbitre vis-à-vis de M. AN et, d'autre part, que leur rédaction a nécessairement causé un grave préjudice moral à Mme E..., résultant de l'atteinte ainsi causée à la liberté de son consentement, et du sentiment de trahison généré par ce

comportement et ce, même en l'absence de tout préjudice matériel. X... cour dira en conséquence M. AN coupable d'abus de faiblesse au préjudice de Mme E.... Il est également reproché à M. AN des faits d'abus de confiance commis au préjudice de Mme E... pour avoir "en sa qualité de conseiller financier de X...
F..., faisant appel au public pour obtenir la remise de fonds, détourné à son profit des bons anonymes de X...
F..., à concurrence de 300 000 francs soit 45 454,55 euros et des espèces à concurrence de 50 000 francs, soit 7 575,76 euros qui ne lui avaient été remis qu'à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé, et ce au préjudice de D...
E...". Mme E... avait souscrit auprès de la poste trente bons anonymes de 10 000 francs chacun en avril et juin 1999. Ces souscriptions avaient réalisées au bureau de Suresnes avec le "code guichet" de M. AN. Il est établi par la procédure que ces bons ont été conservés par M. AN et qu'il en a obtenu lui-même , soit le remboursement à son profit par X...
F..., pour 200 000 francs (le "remboursement" d'un bons signifie dans la terminologie de X...
F... que le porteur en touche le montant en le revendant à X...
F...), soit en les échangeant avec des tiers contre des objets de valeur (pierres, antiquités chinoises), objets qu'il a conservés. M. AN a affirmé que ces bons lui avaient été confiés par Mme E... et a reconnu en avoir utilisé le produit pour son usage personnel. Par ailleurs, il résulte du dossier que M. AN, qui n'a pas contesté ces faits, a procédé en juin 1999 à des retraits en espèces d'un montant total de 50 000 francs, en débitant le compte chèque postal de Mme E... et qu'il a conservé ce montant. Il résulte de ce qui précède d'une part que, mandaté par Mme E... pour conserver les bons anonymes de cette dernière, M. AN les a détournés en les revendant à X...
F... à son profit ou en les échangeant contre divers objets destinés à son usage personnel, et, d'autre part, que le prévenu a

détourné des fonds dont il avait la garde pour le compte de X...
F..., établissement exerçant une activité bancaire dont il était l'employé, ces sommes ne pouvant être employées qu'au profit de la cliente dont le compte était ainsi débité. Dans un cas comme dans l'autre, M. AN s'est rendu coupable du délit d'abus de confiance en détournant au préjudice d'autrui des fonds ou valeurs qui lui avaient été remis à charge de les rendre ou d'en faire un usage déterminé. Sur les faits concernant Mme G...
B... docteur K..., expert judiciaire désigné par le magistrat instructeur a conclu "qu'à partir de 1998 et surtout pendant l'année 2000, ayant une personnalité pathologique de type dépendante et son état de santé s'étant dégradé, Mme G... avait été placée dans un état de vulnérabilité particulière, de faiblesse psychologique et de dépendance psycho-affective vis-à-vis d'autrui". X... faiblesse psychologique de Mme G... a par ailleurs été constatée par le magistrat instructeur et les enquêteurs lors des auditions auxquelles il a été procédé. Comme l'ont relevé les premiers juges, il est établi "contrairement à ce que le prévenu soutient, que Mme G... ne s'est pas de sa propre initiative ou volonté dépossédée de ses bons au porteur". Il résulte du dossier que le prévenu a abusé de la détresse psychologique de Mme G..., aggravé par la mort survenue en 1998 du frère de cette dernière, et de la solitude dont elle souffrait pour, se prévalant de sa qualité de conseiller financier de X...
F..., inciter sa cliente "devenue son amie" à se faire confier par Mme G... vingt-deux bons au porteur de X...
F..., souscrits selon les cas en 1993 et en 1997, d'une valeur nominale de 10 000 francs chacun, en prétextant le risque de vol. M. AN a touché cinq de ces bons le 17 février 2001 sans aviser Mme G... et a conservé leur montant. H... autres ont été gardés au domicile de M. AN jusqu'au printemps 2001, époque à laquelle, apprenant par Mme G..., qui était alors sous son emprise psychologique, qu'une enquête était en cours,

il les a restitués à leur propriétaire. C'est à juste titre, que le tribunal a relevé que "l'abus de faiblesse était caractérisé par la dépossession par Mme G... des bons anonymes et de leur conservation durant les années 2000 et 2001, cet acte étant de nature à occasionner un grave dommage à Mme G...". Par ailleurs, il a été découvert que Mme G..., qui, atteinte d'un cancer, avait subi en 1999 une opération chirurgicale, avait, le 20 mars 2000, institué M. AN comme légataire universel, sur l'insistance de celui-ci. Il convient de préciser que Mme G... disposait d'un patrimoine d'environ 1,5 MF placé sur différent compte ouverts à X...
F... et qu'elle était propriétaire du studio qu'elle occupait. Il ressort de ce qui précède sur l'état de Mme G... et de la narration que celle-ci a fait des pressions affectives exercées sur elle par M. AN pour obtenir la rédaction de ce testament, que le prévenu a abusé de la faiblesse psychologique de Mme G... pour obtenir d'être désigné légataire universel d'une personne disposant d'un patrimoine conséquent dont il connaissait parfaitement l'état de faiblesse psychologique et la situation patrimoniale. H... montants des sommes concernés et la nature des faits ont nécessairement causé un grave préjudice financier et moral à Mme G... , y compris, comme cela a été mentionné précédemment pour Mme E... en ce qui concerne le testament rédigé en faveur de M. AN. M. AN sera donc déclaré coupable du délit d'abus de faiblesse commis au préjudice de Mme G... qui lui est reproché. Sur les peines H... faits dont M. AN s'est rendu coupable sont d'une particulière gravité, compte tenu à la fois de la vulnérabilité des victimes, des préjudices causés et des fonctions qu'exerçait le prévenu au sein de X...
F..., dont il doit être attendu des agents une probité exemplaire. Par ailleurs, il importe d'assurer l'indemnisation des préjudices causés. X... cour condamnera en conséquence M. AN à trois ans d'emprisonnement dont dix-huit mois

avec sursis avec mise à l'épreuve pendant trois ans comprenant notamment l'obligation d'indemniser la victime et l'interdiction d'entrer en relation avec Mme G...
J... prononcera en outre, en application des articles 313-7 (4ä) devenu 223-15-3 (4ä) et 314-10 (6ä) du Code pénal, la confiscation des objets produits des infractions (scellés 7 à 11 qui sont les objets saisis par les gendarmes que M. AN a acquis grâce au produit de ses délits) et non leur restitution à la partie civile, déjà indemnisée par les montants accordés à titre de dommages et intérêts. X... cour prononcera en outre à l'égard de M. AN pour une période de cinq ans l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle dans le cadre de laquelle les infractions ont été commises, en l'espèce toute activité consistant à détenir, manipuler ou à gérer, directement ou indirectement, en tout ou partie, même occasionnellement, des fonds, valeurs ou produits d'épargne appartenant à autrui. SUR L'ACTION CIVILE Sur les demandes de l'ARC, venant aux droits de Mme E...
X... cour déclarera recevable la constitution de partie civile de l'ASSOCIATION POUR X... RECHERCHE SUR B... CANCER (ARC), venant aux droits de Mme E..., décédée le 17 mai 2004, ayant institué cette association légataire universel. X... cour considère que M. AN, est, redevable envers cette association du montant des sommes détournées, ainsi que des dommages et intérêts dus au titre du préjudice moral subi par la victime, qui a fait naître dans le patrimoine de celle-ci, une créance intégrée à son patrimoine. Néanmoins, la cour limitera les montants des sommes allouées à titre de dommages et intérêts aux montants demandés tels qu'exprimés en euros par la partie civile qui reproduit les erreurs de conversion contenues dans la prévention et le jugement entrepris. Pour le détournement des bons anonymes de 300 000 francs (45 734,71 ), souscrits en avril et juin 1999, M. AN sera condamné à verser à l'ARC la somme de 45 454,55 , montant accordé par les premiers juges

dont la confirmation de la décision est demandée. Pour le détournement de 50 000 francs (7 622,45 ), correspondant au retrait en espèces de juin 1999, M. AN sera condamné à verser à l'ARC la somme de 7 575,76 , montant accordé par les premiers juges dont la confirmation de la décision est demandée Pour le chèque de 550 000 francs ( 83 846,96 ) établi le 24 décembre 1999, la cour condamnera M. AN à verser à l'ARC la somme demandée, soit 83 333, 33 , Pour le retrait de 231 000 francs (35 215,72 ) de janvier 2000 destinée à payer les droits inhérents à la donation; la cour condamnera M. AN à verser à l'ARC la somme de 35 000 , montant de la demande, Par ailleurs, la cour évalue à 10 000 le préjudice moral subi par Mme E..., dont M. AN sera condamné à verser le montant à l'ARC. X... cour dira que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jour où le présent arrêt sera définitif. X... cour condamnera en outre M. AN à verser à l'ARC la somme de 4 000 au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale pour les frais irrépétibles engagés en première instance par Mme E... et par cette association en cause d'appel. Sur les demandes de X...
F...
X... cour estime que X...
F... a nécessairement subi un préjudice moral du fait des agissements de son employé, qui a trahi sa confiance et celle de ses clients. J... évaluera à un euro ce préjudice moral de cet établissement, dont il est apparu au cours de l'audience qu'il continuait à verser le salaire de M. AN, bien qu'il ait été suspendu de ses fonctions à la suite des faits. X... cour estime équitable de laisser à X...
F... la charge des frais irrépétibles qu'elle a engagés en première instance et en cause d'appel. PAR CES MOTIFS X... COUR, après en avoir délibéré, Statuant publiquement, et contradictoirement, EN X... FORME : Déclare recevables les appels de M. AN, du ministère public et de Mme E..., AU FOND : Sur l'action publique :

Confirmant le jugement entrepris sur les déclarations de culpabilité et l'infirmant sur les relaxes,

Déclare M. AN coupable d'abus de faiblesse commis au préjudice de Mme E... et de Mme G..., faits prévus et réprimés, à l'époque des faits, par les articles 313-4, 313-7 du Code pénal et actuellement par les articles 223-15-2 et 223-15-3 du Code pénal, Déclare M. AN coupable d'abus de confiance commis au préjudice de Mme E..., faits prévus et réprimés par les articles 314-1 et 314-10 du Code pénal, Condamne M. AN à 3 ans d'emprisonnement dont 18 mois avec sursis avec mise à l'épreuve pendant trois ans, L... l'article 132-45 (5ä) et (13ä) du code pénal, Dit que M. AN devra réparer, en fonction de ses facultés contributives, les dommages causés par l'infraction et qu'il devra s'abstenir d'entrer en relation avec Mme G..., Dit que l'avertissement prévu à l'article 132.40 du code pénal

a été donné à M. AN L... les articles 131-27 et 314-10 du Code pénal, Prononce à l'égard de M. AN, pour une période de cinq ans l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle dans le cadre de laquelle les infractions ont été commises, en l'espèce toute activité consistant en tout ou partie, même occasionnellement, à détenir, manipuler ou à gérer, directement ou indirectement, des fonds, valeurs ou produits d'épargne appartenant à autrui, Ordonne la confiscation des scellés nä 7 à 11, Sur l'action civile : Déclare recevable la constitution de partie civile de l'ASSOCIATION POUR X... RECHERCHE SUR B... CANCER (ARC), venant aux droits de Mme E..., décédée le 17 mai 2004, ayant institué cette association légataire universel. Condamne M. AN à verser à l'ASSOCIATION POUR X... RECHERCHE SUR B... CANCER : Pour le détournement des bons anonymes souscrits en avril et juin 1999, la somme de 45 454,55 , Pour le retrait en espèces de juin 1999, la somme de 7 575,76 , Pour le chèque de 550 000 francs établi le 24 décembre 1999, la somme de 83 333, 33 , Pour le retrait de janvier 2000 la somme de 35 000 , Pour le préjudice moral, la somme de 10 000 , Dit que ces sommes porteront intérêts au

taux légal à compter du jour où le présent arrêt sera définitif. Condamne en outre M. Noùl AN à verser à l'ARC la somme de 4 000 au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, pour les frais irrépétibles engagés en première instance par Mme E... et par l'ARC en cause d'appel. Déboute l'ARC du surplus de ses demandes, Condamne M. AN à verser à X...
F... la somme de un euro à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, Déboute X...
F... de sa demande fondée sur l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Rappelle que le montant du cautionnement versé dans le cadre du contrôle judiciaire dont M. AN a fait l'objet est affecté à hauteur de 40 000 francs soit 6 097,96 , à l'indemnisation des victimes Et ont signé le présent arrêt, Madame Martine RACT-MADOUX, Président et Mademoiselle Stéphanie A..., Greffier.

B... GREFFIER,

B... PRÉSIDENT. Décision soumise à un droit fixe de procédure (article 1018A du code des impôts) :120,00


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 03/01363
Date de la décision : 09/03/2005
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2005-03-09;03.01363 ?
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