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03/03/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946780

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ct0012, 03 mars 2005, JURITEXT000006946780


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12me chambre section 2 J.F.F./P.G. ARRET Nä Code nac : 39C contradictoire DU 03 MARS 2005 R.G. Nä 03/08308 AFFAIRE : S.A. EVAFLOR C/ Soci t MUELHENS GMBH CO KG, repr sent e par la Soci t de droit allemand EAU DE COLOGNE ET PARFUMERIE - FABRIK ... D cision d f r e Ë la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2003 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE Nä Chambre : 2me Nä Section : Nä RG : 02/10518 Exp ditions ex cutoires Exp ditions d livr es le :

Ë : Me Farid SEBA SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD SCP BOMMART MINAULT E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU N

OM DU PEUPLE FRANCAIS LE TROIS MARS DEUX MILLE CINQ, La cour...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12me chambre section 2 J.F.F./P.G. ARRET Nä Code nac : 39C contradictoire DU 03 MARS 2005 R.G. Nä 03/08308 AFFAIRE : S.A. EVAFLOR C/ Soci t MUELHENS GMBH CO KG, repr sent e par la Soci t de droit allemand EAU DE COLOGNE ET PARFUMERIE - FABRIK ... D cision d f r e Ë la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2003 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE Nä Chambre : 2me Nä Section : Nä RG : 02/10518 Exp ditions ex cutoires Exp ditions d livr es le :

Ë : Me Farid SEBA SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD SCP BOMMART MINAULT E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE TROIS MARS DEUX MILLE CINQ, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arr t suivant dans l'affaire entre : S.A. EVAFLOR ayant son sige 11, rue Henri Barbusse 92230 GENNEVILLIERS, agissant poursuites et diligences de son Pr sident Directeur G n ral domicili en cette qualit audit sige. repr sent e par Me Farid SEBA, avou - Nä du dossier 10281 Rep/assistant : Me Claude BARANES avocat au barreau de PARIS (G.10) APPELANTE Soci t MUELHENS GMBH CO KG, Soci t de droit allemand, repr sent e par la Soci t de droit allemand EAU DE COLOGNE ET PARFUMERIE - FABRIK, prise en la personne de ses repr sentants l gaux domicili s en cette qualit audit sige, ayant son sige Venlocer Strasse 241-245 COLOGNE 50823 (ALLEMAGNE). repr sent e par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avou s - Nä du dossier 0339218 Rep/assistant : Me Ga lle BLORET de la SCP BARBE CARPENTIER THIBAULT GROENER avocats au barreau de PARIS (T.01). S.A. LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER - ayant son sige Croix des Archers 56201 LA GACILLY, prise en la personne de ses repr sentants l gaux domicili s en cette qualit audit sige. INTERVENANTE VOLONTAIRE repr sent e par la SCP BOMMART MINAULT, avou s - Nä du dossier 29793. Rep/assistant : Me Marie SONNIER du cabinet LE STANC, avocat au barreau de MONTPELLIER. INTIMES Composition de la cour : En application des

dispositions de l'article 786 du nouveau code de proc dure civile, l'affaire a t d battue Ë l'audience publique du 17 Janvier 2005 les avocats des parties ne s'y tant pas oppos s, devant Monsieur X... ois FEDOU, conseiller charg du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le d lib r de la cour, compos e de : Madame Y... oise LAPORTE, Pr sident, Monsieur X... ois FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des d bats : Monsieur Didier Z..., 5FAITS ET PROCEDURE : La Soci t MUELHENS GmbH et Co. KG est propri taire de la marque internationale "DESIRE", enregistr e le 8 f vrier 1992 sous le num ro 582 142 par l'OMPI en vertu de l'Arrangement de Madrid; cette marque d signe 46 pays dont la France, et a t d pos e pour d signer les produits de la classe internationale 3, et plus pr cis ment "Parfumerie, huiles essentielles, cosm tiques, dentifrices, savons, lotions pour les cheveux". Par ailleurs, elle a acquis les 08 d cembre 1997 et 13 janvier 1998 diverses marques de la Soci t CHYPRON, parmi lesquelles : - la marque fran aise "DESIR", nä 1 691 602, d pos e le 04 novembre 1971 ; - la marque fran aise "DESIR", nä 1 211 298, d pos e le 13 ao t 1982 ; - la marque internationale "DESIR" nä R 323 366, d pos e en 1966 ; le contrat de cession des marques a t enregistr au Registre national des marques le 17 f vrier 1998. Pour sa part, la Soci t EVAFLOR, entreprise sp cialis e dans la fabrication et la distribution de parfums destin s Ë la grande distribution, est titulaire de la marque fran aise nä 93 497 797, d pos e le 22 d cembre 1993 en classes 3, 21 et 25 pour d signer notamment des produits de parfumerie. Elle a galement d pos le 19 f vrier 1999 une demande d'enregistrement Ë titre de marque communautaire portant sur la d nomination "DESIR", pour d signer des produits relevant de la classe 3; la Soci t MUELHENS a fait opposition Ë l'enregistrement de cette marque communautaire; la proc dure d'opposition est

actuellement toujours pendante devant l'OHMI. Estimant que la marque "DESIR" constituait la reproduction quasi-servile, ou, Ë tout le moins, l'imitation illicite de sa marque ant rieure "DESIRE", la Soci t MUELHENS GmbH et Co.KG a, par acte du 4 septembre 2002, assign la Soci t EVAFLOR aux fins de voir interdire Ë cette dernire de faire usage de la d nomination DESIR pour d signer des produits relevant des classes 3, 21 et 25 et de voir prononcer l'annulation de la marque DESIR nä 93 497 797 et la radiation de celle-ci du Registre national des marques. La Soci t LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER est intervenue volontairement aux d bats de premire instance en vue de conforter l'action introduite par la Soci t MUELHENS. Par jugement du 13 octobre 2003, le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE a : - re u la Soci t LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER en son intervention volontaire ; - rejet l'exception de forclusion par tol rance soulev e par la Soci t EVAFLOR; - dit que la marque nä 93 497 797 d pos e par la Soci t EVAFLOR constitue l'imitation illicite partielle de la partie fran aise de la marque internationale ant rieure "DESIRE" nä 582142 dont le titulaire est la Soci t MUELHENS ; - prononc l'annulation de la marque "DESIR" nä 93 497 797 pour d signer les produits suivants : "savons, parfumerie, huiles essentielles, cosm tiques, lotions pour les cheveux, dentifrices, pr parations cosm tiques pour le bain, savons pour le bain sous forme liquide ou de gel, d sodorisants Ë usage personnel, huiles Ë usages cosm tiques pour le bain, huiles de toilette, laits de toilette, produits cosm tiques pour le soin de la peau, shampooings, talc pour la toilette, produits de toilette, parfums, eaux de toilette, eaux de senteur" ; - autoris la Soci t MUELHENS Ë faire inscrire cette annulation au Registre national des marques en vertu de l'article R 714-3 du Code de la propri t intellectuelle aux frais de la Soci t EVAFLOR, faute pour

cette dernire d'y avoir proc d dans un d lai de quinze jours Ë compter du jour o la d cision deviendra d finitive ; - interdit Ë la Soci t EVAFLOR de faire usage de la d nomination "DESIR" pour d signer les produits susvis s, sous astreinte de 150 par infraction constat e pass le d lai de deux mois Ë compter du jour o la d cision deviendra d finitive; - condamn la Soci t EVAFLOR Ë payer Ë la Soci t MUELHENS la somme de 5.000 Ë titre de dommages-int r ts ; - d bout la Soci t EVAFLOR de sa demande en d ch ance des marques "DESIR" enregistr es sous les nä 1 691 602, nä 1 211 298 et nä 323 366 ; - condamn la Soci t EVAFLOR Ë payer Ë la Soci t MUELHENS la somme de 3.000 au titre de l'article 700 du nouveau Code de proc dure civile ; - condamn la Soci t EVAFLOR aux d pens. La Soci t EVAFLOR a interjet appel de cette d cision. Elle fait valoir que la Soci t MUELHENS, qui ne justifie pas exploiter ses marques "DESIR", est d chue de ses droits sur lesdites marques, par application de l'article L 714-5 du Code de la propri t intellectuelle. Elle relve que la partie adverse ne saurait se pr valoir de l'exploitation par elle de la marque "DESIRE", ds lors que l'exploitation d'une marque enregistr e, analogue Ë une autre marque enregistr e, ne vaut pas exploitation de cette dernire. Elle estime qu'une soci t aussi importante que la soci t intim e ne peut valablement soutenir que le d pÂt de la marque "DESIR" en 1993 serait pass inaper u Ë ses yeux. Elle explique qu'en acqu rant les 8 d cembre 1997 et 13 janvier 1998 l'ensemble de ses marques DESIR, la Soci t MUELHENS a n cessairement pris connaissance ds cette poque de l'existence de la marque DESIR d pos e le 22 d cembre 1993 par la soci t appelante. Elle pr cise que la partie adverse ne pouvait non plus ignorer l'exploitation de la marque DESIR, laquelle remonte au d but de l'ann e 1994, soit Ë une poque ant rieure au 4 septembre 1997, point de d part maximum de la forclusion par tol rance. Elle

invoque l' troitesse du march de la grande distribution de parfums, impliquant que les acteurs de ce march se connaissent, alors surtout qu'ils ont un distributeur commun, la Soci t BROCARD. Elle se pr vaut d'un faisceau suffisant de pr somptions pour tablir que la soci t intim e connaissait l'existence de la marque DESIR bien avant 1999, et qu'elle en a tol r l'exploitation pendant plus de cinq ann es, soit au moins pendant presque neuf ann es, jusqu'Ë ce que la Soci t MUELHENS l'assigne par acte du 04 septembre 2002. Elle allgue que cette dernire, en proc dant Ë un second d pÂt distinct du premier pour des produits identiques ou similaires, a manifest son intention d'obtenir des droits privatifs distincts sur deux d nominations, et elle observe qu'en laissant libre le signe DESIR, la partie adverse ne peut plus s'en pr valoir, m me Ë travers le signe DESIRE. Elle souligne qu'en enregistrant la marque DESIRE, alors qu'elle tait d jË titulaire de plusieurs marques DESIR, la soci t intim e d montre que ces deux d nominations sont diff rentes, et qu'il ne peut y avoir de confusion entre elles. Par voie de cons quence, la Soci t EVAFLOR demande Ë la Cour d'infirmer le jugement entrepris, et, statuant Ë nouveau, de : - prononcer la d ch ance des droits de la Soci t MUELHENS sur les marques DESIR suivantes : - la marque fran aise "DESIR", nä 1 211 298, d pos e le 13 ao t 1982; - la marque fran aise "DESIR", nä 1 691 602, d pos e le 06 septembre 1991 ; - la marque internationale "DESIR", nä 323 366 R, d pos e en1966 ; - constater que la Soci t EVAFLOR exploite la marque DESIR depuis plus de cinq ans et que la Soci t MUELHENS en a tol r son usage ; - d clarer irrecevable l'action en contrefa on Ë l'encontre de la marque DESIR nä 93 497 797, d pos e le 22 d cembre 1993 et exploit e par la soci t appelante depuis janvier 1994 ; - subsidiairement, d bouter la Soci t MUELHENS de sa demande en contrefa on pour imitation illicite de la marque DESIRE ; - condamner

la Soci t MUELHENS Ë lui payer la somme de 10.000 en application de l'article 700 du nouveau Code de proc dure civile, et Ë supporter les entiers d pens. La Soci t MUELHENS GmbH et Co. KG conclut Ë la confirmation du jugement d f r , hormis en ce qu'il a statu sur le montant des dommages-int r ts allou s du chef de contrefa on. Elle fait valoir qu'elle est parfaitement recevable Ë agir en contrefa on, en l'absence de preuve qu'elle aurait eu n cessairement connaissance, cinq ans avant la date de l'assignation, soit avant le 4 septembre 1997, de l'existence et de l'exploitation de la marque fran aise DESIR d pos e le 22 d cembre 1993 par la Soci t EVAFLOR. Elle expose que la diffusion mondiale d'environ 420.000 produits marqu s "DESIR" sur une p riode de neuf ans constitue une exploitation extr mement limit e, laquelle a pu, ds lors, trs l gitimement chapper aux autres acteurs du march . Elle se r fre aux conclusions de l'enqu te d'usage effectu e par la Soci t COMPUMARK, selon lesquelles la marque DESIR de la soci t appelante n'a fait l'objet en France que d'une exploitation trs r duite, voire nulle. Elle maintient que c'est seulement en 1999, Ë l'occasion du d pÂt par la soci t appelante de la marque communautaire DESIR, que, proc dant Ë des recherches approfondies, elle a eu connaissance de l'existence de la marque fran aise contrefaisante DESIR nä 93 497 797. Elle estime que la marque DESIR de la Soci t EVAFLOR constitue une imitation illicite de la marque ant rieure DESIRE d pos e par la Soci t MUELHENS, ce qui justifie parfaitement son annulation partielle prononc e par le Tribunal. Elle ajoute qu'elle est bien fond e Ë invoquer l'usage non contest de la marque internationale DESIRE nä 582142, pour faire obstacle Ë la demande adverse de d ch ance de ses droits sur les marques DESIR nä 1 691 602, 1 211 298 et R 323 366 du chef de d faut d'exploitation. Se portant incidemment appelante de la d cision entreprise, elle demande Ë la Cour de porter Ë 15.000 le

montant des dommages-int r ts devant lui tre allou s pour contrefa on par imitation illicite. Elle r clame en outre la somme de 6.000 en application de l'article 700 du nouveau Code de proc dure civile. La Soci t LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER indique avoir le plus grand int r t Ë intervenir volontairement Ë la pr sente instance, exclusivement aux fins, Ë titre accessoire, d'appuyer les pr tentions de la Soci t MUELHENS Ë l'encontre de la Soci t EVAFLOR afin que soit confirm e l'annulation de la marque d pos e par cette dernire. Sur le fond, elle conclut Ë la confirmation de la d cision entreprise et au d bout de la soci t appelante de ses pr tentions. Elle explique qu'aucun imp ratif conomique, ni aucune obligation juridique, n'imposaient Ë la Soci t MUELHENS d'effectuer des recherches d'ant riorit avant le commencement effectif de l'exploitation de la marque DESIRE intervenu Ë la fin de l'ann e 1999, et en particulier au moment de l'acquisition par elle en 1997 des marques de la Soci t CHYPRON. Elle fait valoir que les pices vers es aux d bats par la Soci t EVAFLOR mettent en vidence une exploitation essentiellement confidentielle par cette dernire de sa marque d pos e en d cembre 1993. Elle pr cise que les modes de distribution, peu courants, utilis s par la soci t appelante pour commercialiser ses parfums permettent d'exclure que la Soci t MUELHENS ait eu les moyens de conna"tre les sporadiques actes de vente relatifs au parfum "DESIR". Elle en d duit que les premiers juges ont Ë bon droit rejet l'exception de forclusion soulev e par la Soci t EVAFLOR et d clar recevable l'action de la Soci t MUELHENS. Elle considre que c'est galement Ë bon droit que le Tribunal a nonc que le signe "DESIR" constitue l'imitation de la marque ant rieure "DESIRE", et qu'il a cons cutivement prononc l'annulation de la marque d pos e par la soci t appelante. Elle r itre que la demande de d ch ance des

droits de la Soci t MUELHENS sur ses marques "DESIR" ne saurait prosp rer, ds lors que cette dernire a uniquement rachet lesdites marques dans le seul but de consolider ses droits sur la marque "DESIRE". Elle souligne que, m me dans l'hypothse o son argumentation serait accueillie de ce chef, la Soci t EVAFLOR n'a aucun int r t Ë persister dans sa demande de d ch ance, ds lors qu'elle a d pos sa marque "DESIR" le 22 d cembre 1993, soit Ë une poque Ë laquelle, eu gard aux dispositions transitoires d'application de la loi nouvelle, les marques litigieuses acquises par la Soci t MUELHENS ne pouvaient tre d chues. L'ordonnance de clÂture a t prononc e le 16 d cembre 2004. MOTIFS DE LA DECISION : SUR LA RECEVABILITE DE L'INTERVENTION VOLONTAIRE : Consid rant qu'en application de l'article 325 du nouveau Code de proc dure civile, l'intervention volontaire est recevable si elle se rattache aux pr tentions des parties par un lien suffisant ; Consid rant qu'en l'occurrence, la Soci t LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER justifie qu'elle a, par assignation d livr e le 03 septembre 2002 Ë la requ te de la Soci t EVAFLOR, t attraite devant le Tribunal de Grande Instance de PARIS, afin qu'il soit jug que la marque fran aise "PUR DESIR DE" d pos e par elle constitue l'imitation de la marque fran aise ant rieure DESIR nä 93 497 797 dont la Soci t EVAFLOR est titulaire ; Consid rant que l'action en contrefa on dont cette dernire a pris l'initiative est pr cis ment fond e sur la marque dont la Soci t MUELHENS sollicite l'annulation dans le cadre de la pr sente instance ; Consid rant que, ds lors, la Soci t YVES ROCHER a int r t Ë intervenir volontairement en cause d'appel, afin d'appuyer les pr tentions formul es dans la pr sente proc dure par la Soci t MUELHENS Ë l'encontre de la Soci t EVAFLOR ; Consid rant que son intervention volontaire accessoire doit donc tre d clar e recevable. SUR L'ABSENCE DE FORCLUSION PAR TOLERANCE : Consid rant

qu'aux termes de l'article L 716-5 alin a 4 du Code de la propri t intellectuelle, est irrecevable toute action en contrefa on d'une marque post rieure enregistr e dont l'usage a t tol r pendant cinq ans, Ë moins que son d pÂt n'ait t effectu de mauvaise foi ; Consid rant qu'il r sulte galement de l'article L 714-3 alin a 3 du m me code que le titulaire d'un droit ant rieur n'est pas recevable Ë agir en nullit sur le fondement de l'article L 711-4 s'il a tol r pendant cinq ans l'usage d'une marque d pos e de bonne foi et portant atteinte Ë son droit ; Consid rant que le point de d part du d lai de cinq ans est la connaissance qu'a pu avoir le titulaire du droit ant rieur de l'usage de la marque enregistr e ; Consid rant qu'il y a donc lieu de rechercher si, en l'occurrence, la Soci t MUELHENS tait en mesure de conna"tre cinq ans avant la date de l'assignation, soit avant le 4 septembre 1997, le d pÂt de la marque "DESIR" nä 93 497 797 enregistr e le 22 d cembre 1993 et son exploitation par la Soci t EVAFLOR ; Consid rant qu'Ë cet gard, aucune cons quence juridique ne saurait tre tir e de l'affirmation de la soci t appelante, suivant laquelle, lorsqu'a t d pos e en d cembre 1993 la marque DESIR, la Soci t MUELHENS, deuxime grand groupe mondial de parfums et cosm tiques, en a t n cessairement aussitÂt avertie par son service juridique et de surveillance ; Consid rant qu'au demeurant, la soci t intim e indique, sans tre contredite sur ce point par des l ments probants, n'avoir pas proc d Ë des recherches d'ant riorit Ë l'occasion de la cession des marques de la Soci t CHYPRON, dont elle a d'ailleurs fait l'acquisition les 08 d cembre 1997 et 13 janvier 1998, soit Ë une date post rieure Ë la p riode de r f rence Ë prendre en compte pour l'appr ciation de la tol rance ; Consid rant que, ds lors, rien n'autorise Ë r futer son all gation suivant laquelle c'est seulement Ë l'occasion du d pÂt en 1999 par la Soci t EVAFLOR de la marque communautaire DESIR nä EM 10 81 454

qu'elle a appris l'existence de la marque fran aise DESIR nä 93 497 797 ; Consid rant qu'il est galement admis que la tol rance est une question de fait soumise Ë l'appr ciation des juges du fond, lesquels doivent d terminer si, en raison des circonstances propres Ë chaque espce, le titulaire de la marque premire a pu ou au contraire n'a pas pu ignorer l'usage par un tiers, pendant plus de cinq ans, d'une marque seconde presque identique Ë la sienne ; Or consid rant qu'il ressort des factures produites aux d bats que, sur la p riode de 1994 Ë 1997 seule susceptible d' tre prise en compte, l' quivalent de 25.324 produits DESIR, soit une moyenne de 6.331 par an, a t vendu en France par la Soci t EVAFLOR, les autres produits ayant t livr s Ë l' tranger, en particulier en Russie et aux Etats-Unis ; Consid rant qu'il appara"t en outre qu'une part non n gligeable des produits DESIR vendus en France l'a t Ë la Soci t CATHY CARDEN, laquelle aConsid rant qu'il appara"t en outre qu'une part non n gligeable des produits DESIR vendus en France l'a t Ë la Soci t CATHY CARDEN, laquelle a une activit de "ventes ambulantes" ; Consid rant qu'une exploitation aussi limit e de la marque litigieuse au cours de la p riode de r f rence, alors surtout que les produits concurrents sont distribu s dans des r seaux de distribution trs diff rents, n'est pas de nature Ë tablir la connaissance que pouvait avoir la soci t intim e, avant le 04 septembre 1997, de l'existence et de l'usage de cette marque par la soci t appelante ; Consid rant que la m me observation doit tre faite en ce qui concerne les catalogues diffus s par cette dernire en 1996 et en 1997, tant pr cis que le premier catalogue imprim en 1996 a t tir au nombre trs modeste de 5.061 exemplaires, tandis que le second, en date de novembre 1997, a t imprim post rieurement Ë la p riode de r f rence ; Consid rant que la circonstance que les parties en cause aient le m me distributeur en 2004 pour la Russie et l'Ukraine est

galement indiff rente dans l'appr ciation de la connaissance que la Soci t MUELHENS tait susceptible d'avoir de l'exploitation de la marque DESIR ant rieurement au 04 septembre 1997 ; Consid rant que cette exploitation r duite est confirm e par les r sultats de l'enqu te d'usage r alis e courant 2000 par l'organisme COMPUMARK, celui-ci ayant conclu, aprs recherche effectu e en France dans le domaine des cosm tiques, que l'usage en France de la marque DESIR par la Soci t EVAFLOR s'est exerc Ë une chelle trs limit e ; Consid rant qu'en l'absence d' l ments suffisants pour d duire que la soci t intim e ne pouvait ignorer, durant les ann es 1994 Ë 1997, l'existence et l'exploitation de la marque post rieure DESIR d pos e le 22 d cembre 1993 par la soci t appelante, cette dernire est mal fond e Ë opposer la forclusion par tol rance tir e des articles L 716-5 et L 714-3 du Code de la propri t intellectuelle ; Consid rant qu'il y a donc lieu, en confirmant le jugement d f r , de d clarer recevable l'action en contrefa on diligent e par la Soci t MUELHENS GmbH et Co. KG. SUR LA CONTREFA ON : Consid rant qu'en application de l'article L 713-3 du Code de la propri t intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propri taire, s'il peut en r sulter un risque de confusion dans l'esprit du public, l'imitation d'une marque et l'usage d'une marque imit e, pour des produits ou services identiques ou similaires Ë ceux d sign s dans l'enregistrement ; Consid rant qu'Ë titre pr alable, aucune cons quence ne saurait tre tir e du pr tendu abandon par la Soci t MUELHENS du signe "DESIR", ds lors que l'action en contrefa on initi e par elle tend Ë la protection des droits privatifs dont elle est titulaire sur la marque internationale "DESIRE" d pos e par elle et enregistr e le 08 f vrier 1992 sous le nä 582 142 ; Consid rant que, sur le fond, le Tribunal a justement appr ci que les deux signes "DESIRE" et "DESIR" se distinguent uniquement par la lettre "e" terminant le nom de la

marque de la soci t intim e, que les deux signes sont crits en lettres majuscules bÈtons gras, et que, prononc s en fran ais, ils ont une sonorit identique malgr une terminaison diff rente, et ont galement le m me sens intellectuel ; Consid rant qu'il appara"t en outre que les deux marques voquent la notion de d sir, sans que rien n'autorise Ë rattacher la marque "DESIRE", d pourvue d'accent, au pr nom "D sir " ; Consid rant que, de surcro"t, il doit tre observ que les deux marques sont actuellement exploit es pour d signer un parfum, et que les produits vis s dans le d pÂt effectu par la soci t appelante sont pour partie identiques ou similaires Ë ceux sp cifi s dans le d pÂt de la marque d pos e ant rieurement par la soci t intim e ; Consid rant qu'il s'ensuit que les ressemblances visuelles, phon tiques et intellectuelles entre les deux signes en pr sence, largement pr pond rantes par rapport aux l ments permettant de les distinguer, g nrent un risque certain de confusion pour le consommateur d'attention moyenne ; Consid rant qu'il y a donc lieu, en confirmant le jugement d f r , de dire que la marque nä 93 497 797 "DESIR" d pos e par la Soci t EVAFLOR constitue l'imitation illicite partielle, pour les produits de la classe 3, de la partie fran aise de la marque internationale ant rieure "DESIRE" nä 582 142 dont le titulaire est la Soci t MUELHENS ; Consid rant que le Tribunal a en outre fait une exacte application des dispositions de l'article L 714-3 du Code de la propri t intellectuelle en pronon ant l'annulation de cette marque pour d signer les produits vis s dans la d cision entreprise, et en interdisant Ë la Soci t EVAFLOR de faire usage de la d nomination "DESIR" pour d signer ces m mes produits, sous astreinte de 150 par infraction constat e pass le d lai de deux mois Ë compter du jour o cette d cision sera devenue d finitive ; Consid rant qu'aux termes de ses critures r capitulatives, la Soci t MUELHENS justifie l'ignorance dans

laquelle elle s'est trouv e de l'existence et de l'usage de la marque DESIR par l'exploitation particulirement restreinte de celle-ci sur le territoire fran ais ; Consid rant que, devant la Cour, elle ne communique aucun document de nature Ë tablir que les premiers juges auraient sous-estim le pr judice subi par elle par suite de l'exploitation de la marque contrefaisante ; Consid rant qu'il y a donc lieu, en la d boutant de son appel incident, de confirmer le jugement d f r en ce qu'il a limit Ë 5.000 le montant des dommages-int r ts auxquels elle peut pr tendre du chef de contrefa on. SUR LA DEMANDE DE DECHEANCE : Consid rant qu'aux termes de l'article L 714-5 du Code de la propri t intellectuelle, "encourt la d ch ance de ses droits le propri taire de la marque qui, sans justes motifs, n'en a pas fait un usage s rieux, pour les produits et services vis s dans l'enregistrement, pendant une dur e ininterrompue de cinq ans" ; Consid rant que l'article L 714-5 alin a 3 dispose que : "la d ch ance peut tre demand e en justice par toute personne int ress e" ; Consid rant qu'en l'occurrence, il n'est pas contest que la Soci t MUELHENS n'exploite pas les marques "DESIR", respectivement nä 1 211 298, nä 1 691 602 et nä R 323 366, acquises par elle auprs de la Soci t CHYPRON les 8 d cembre 1997 et 13 janvier 1998 ; Consid rant que, toutefois, m me si la d ch ance devait tre prononc e, elle ne rendrait pas disponible le signe "DESIR" que la Soci t EVAFLOR a, en vertu de la d cision entreprise confirm e par la Cour, interdiction d'utiliser ; Consid rant que, dans la mesure o, pour les raisons pr c demment expos es, la marque nä 93 497 797 "DESIR" d pos e le 22 d cembre 1993 est annul e pour les produits et services relevant de la classe 3, la soci t appelante est d pourvue d'int r t Ë solliciter la d ch ance des trois marques "DESIR" de la Soci t MUELHENS, lesquelles portent sur les m mes produits et services ; Consid rant qu'Ë titre surabondant, il

r sulte de l'article L 714-5 alin a 2 b) qu'est assimil Ë un usage s rieux de la marque : "l'usage de la marque sous une forme modifi e n'en alt rant pas le caractre distinctif" ; Consid rant que la Soci t EVAFLOR allgue que cette disposition l gale vise l'hypothse o une seule marque est en cause, alors qu'en l'espce, sont concern es plusieurs marques ayant fait l'objet d'un enregistrement distinct, de sorte que l'exploitation de la marque DESIRE ne saurait tre assimil e Ë l'usage des marques DESIR, au demeurant inexploit es ; Mais consid rant que les marques litigieuses DESIR n'ont pas t d pos es par la soci t intim e, laquelle en a fait l'acquisition dans le seul but de conforter ses droits sur la marque internationale DESIRE nä 582 142 ; Consid rant que, dans ces circonstances, l'existence de plusieurs d pÂts portant sur des signes trs l grement diff rents ne procde nullement d'une volont de protection sp cifique pour chacun d'eux ; Consid rant que les premiers juges ont donc Ë bon droit nonc que l'exploitation de la marque "DESIRE", qui constitue un signe l grement modifi des marques "DESIR" ayant donn lieu Ë un enregistrement distinct, fait obstacle Ë la d ch ance de ces marques. SUR LES DEMANDES COMPLEMENTAIRES ET ANNEXES : Consid rant qu'il convient, en confirmant la d cision entreprise, d'autoriser la Soci t MUELHENS Ë faire inscrire l'annulation partielle de la marque "DESIR" nä 93 497 797 au Registre national des marques en vertu de l'article R 714-3 du Code de la propri t intellectuelle aux frais de la Soci t EVAFLOR, faute pour cette dernire d'y avoir proc d dans un d lai de quinze jours Ë compter du jour o cette annulation deviendra d finitive ; Consid rant que l' quit commande d'allouer Ë la Soci t MUELHENS la somme compl mentaire de 3.000 sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de proc dure civile ; Consid rant qu'il n'est cependant pas in quitable que la soci t appelante conserve la charge des frais

non compris dans les d pens expos s par elle dans le cadre de la pr sente instance ; Consid rant que le jugement d f r doit tre confirm en ce qu'il a condamn la Soci t EVAFLOR aux d pens de premire instance ; Consid rant que cette dernire, qui succombe en son recours, doit tre condamn e aux d pens d'appel. PAR CES MOTIFS Statuant en audience publique, par arr t contradictoire et en dernier ressort, DECLARE recevable l'intervention volontaire en cause d'appel de la Soci t LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER ; DECLARE recevable l'appel interjet par la Soci t EVAFLOR, le dit mal fond ; DECLARE mal fond l'appel incident de la Soci t MUELHENS GmbH et Co. KG ; CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement d f r ; Y ajoutant : CONDAMNE la Soci t EVAFLOR Ë payer Ë la Soci t MUELHENS GmbH et Co. KG la somme compl mentaire de 3.000 sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de proc dure civile ; AUTORISE l'inscription de la d cision d'annulation partielle de la marque "DESIR" nä 93 497 797 au Registre national des marques, conform ment aux dispositions de l'article R 714-3 du Code de la propri t intellectuelle ; CONDAMNE la Soci t EVAFLOR aux d pens d'appel, et AUTORISE la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON-GIBOD et la SCP BOMMART-MINAULT, Soci t s d'Avou s, Ë recouvrer directement la part les concernant, conform ment Ë ce qui est prescrit par l'article 699 du nouveau Code de proc dure civile. Arr t prononc par Madame Y... oise LAPORTE, Pr sident, et sign par Madame Y... oise LAPORTE, Pr sident et par Mme A... rse GENISSEL, greffier pr sent lors du prononc Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ct0012
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946780
Date de la décision : 03/03/2005

Analyses

MARQUE DE FABRIQUE - Contentieux - Action en contrefaçon - Forclusion - Délai - Point de départ - Détermination - /Jdf.

Le point de départ du délai quinquennal de la forclusion par tolérance de l'action en contrefaçon et/ou de l'action en annulation de marque prévues par les articles L. 716-5 alinéa 4 et L. 714-3 alinéa 3 du Code de la propriété intel- lectuelle, est celui de la connaissance par le titulaire du droit antérieur de l'usage de la marque enregistrée. A défaut d'éléments probants contraires rien n'autorise à réfuter l'allégation suivant laquelle le titulaire n'a pas eu connaissance de la marque litigieuse au moment de son dépôt mais seulement plusieurs années plus tard et s'il appartient au juge de déterminer, en fonction des circonstances propres à chaque affaire, le caractère probable ou improbable de l'ignorance de l'usage de cette marque, une exploitation à caractère limité, essentiellement par voie de vente ambulante sur le territoire national, n'est pas de nature à établir la connaissance de l'usage de la marque par le titulaire du droit antérieur, lequel opère à travers des réseaux de distribution classique d'une toute autre ampleur

MARQUE DE FABRIQUE - Perte - Déchéance - /Jdf.

En vertu des dispositions de l'article L. 714-5 du Code de la propriété intellec- tuelle, la déchéance du droit à la marque pour non usage peut être demandée par toute personne intéressée. Il s 'ensuit que celui dont la marque a été annulée pour les produits et services identiques à celle dont il prétend rechercher la déchéance, n'a pas d'intérêt au sens de l'article L. 714-5 précité


Références :

Code de la propriété intellectuelle, articles L. 714-3, L. 714-5, L. 716-5, alinéa 4

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2005-03-03;juritext000006946780 ?
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