COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 59B 4A 1ère chambre 1ère section ARRET Nä CONTRADICTOIRE DU 16 DECEMBRE 2004 R.G. Nä 03/07471 AFFAIRE : S.A. BIOTONIC C/ Brigitte CHAULIAC épouse X...
Y... déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 15 Septembre 2003 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE Nä Chambre : 6 Nä Section : B Nä RG : 234/03 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP BOMMART SCP DEBRAY REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE SEIZE DECEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : S.A. BIOTONIC Société anonyme inscrite au RCS de CANNES sous le numéro B 351 830 104 ayant son siège 1570 Chemin de la Plaine - 06250 MOUGINS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP BOMMART MINAULT Avoués Rep/assistant : Me Pierre LUMBROSO (avocat au barreau de PARIS) APPELANTE [**][**][**][**][**][**][**][**] Brigitte CHAULIAC épouse X... née le 30 mai 1955 à LEVALLOIS PERRET 5 Villa des Lauriers - 92270 BOIS COLOMBES représentée par la SCP DEBRAY-CHEMIN Avoués Rep/assistant : Me Isabelle DIESBECQ (avocat au barreau de PARIS) INTIMEE [**][**][**][**][**][**][**][**] Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Novembre 2004 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise SIMONNOT, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Françoise BARDY, Président, Madame Lysiane LIAUZUN, Conseiller, Madame Françoise SIMONNOT, Conseiller, Greffier, lors des débats : Madame Sylvie Z..., 5Par arrêt du 16 septembre 2004 auquel il convient de se reporter pour exposé des faits et de la procédure antérieure, la Cour a ordonné la réouverture des débats, les parties étant invitées à s'expliquer sur l'applicabilité au
présent litige des dispositions de l'article 1371 du code civil. Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 12 novembre 2004, la société BIOTONIC conclut à la réformation du jugement, à l'incompétence territoriale du tribunal de grande instance de Nanterre au profit de celui de Grasse. Elle s'oppose à la demande d'évocation et sollicite la condamnation de madame X... à lui payer 1500 sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle soutient que la responsabilité de sociétés de vente par correspondance dans le cadre de l'organisation de loteries publicitaires ne peut être recherchée que sur un fondement quasi-contractuel. Elle se prévaut à cet égard des arrêts rendus par la chambre mixte de la Cour de cassation le 6 septembre 2002. Elle fait valoir que l'arrêt de la CJCE du 11 juillet 2002 invoqué par madame X... n'est pas transposable à la présente espèce dès lors que le litige était relatif à l'application de la convention de Bruxelles. Elle conteste l'existence d'un contrat, affirmant n'avoir pris aucun engagement ferme de délivrer un prix à madame X... mais lui ayant seulement donné la possibilité de participer à une opération promotionnelle intitulée "9.750 euros par chèque bancaire". Elle ajoute qu'en l'absence de livraison effective, l'option de compétence ouverte à l'article 46 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile ne trouve pas à s'appliquer. Elle s'oppose à la demande d'évocation. Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 26 octobre 2004, madame X... conclut à la confirmation de l'ordonnance déférée et demandant à la Cour d'évoquer, sollicite la condamnation de la société BIOTONIC à lui payer 9750 , avec intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2002 et capitalisation des intérêts, ainsi que 5000 en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Faisant sienne l'analyse de la CJCE dans son arrêt du 11 juillet 2002, elle soutient que l'action qu'elle a
engagée est une action contractuelle qui tend à l'exécution de l'engagement pris par la société BIOTONIC, à savoir l'attribution du lot constitué d'une somme de 9750 payable par chèque. Elle considère que les dispositions de l'article 1371 du code civil n'auraient pu être applicables que si elle n'avait pas été saisie d'une offre de contrat ou, en étant saisie, elle n'y aurait pas donné suite. Elle fait valoir que la société BIOTONIC doit compléter sa livraison par l'envoi du chèque promis. SUR CE Considérant que la société BIOTONIC a envoyé un publipostage à madame X... comportant plusieurs documents ; Que l'un de ces documents est intitulé "Attestation de garantie d'envoi d'un règlement" ; Qu'il y est dit que madame X... est officiellement bénéficiaire d'un règlement de " 9750 Euros par Chèque Bancaire" sous contrôle d'un huissier de justice assermenté ; qu'il est précisé que le directeur financier s'engage formellement à procéder à la remise de ce règlement dès réception de la commande autorisant ladite remise conformément aux clauses obligatoires ; qu'en face de la signature du directeur financier se trouve la mention suivante : "Toutes mes plus vives félicitations !" ; qu'au bas de ce document, en petits caractères, il est écrit "Département des Pré-Tirages Gratuits - ceci n'est pas un jeu... Si vous ne comprenez pas tout, contactez-nous, nous sommes là pour vous aider. Règlement du jeu 1555 -AS 207;: Qu'un autre document intitulé "Acte légal de remise" contient les énonciations suivantes : "Dernier avertissement - madame Brigitte X... - vous avez la garantie formelle de recevoir le règlement de "9 750 Euros par Chèque Bancaire" en respectant scrupuleusement les clauses obligatoires ; Qu'il n'est pas contesté que madame Brigitte X... a passé une commande en respectant les clauses obligatoires ; Qu'elle a reçu livraison du produit amincissant commandé ainsi que du bracelet offert gratuitement à l'exception du chèque de 9 750
euros qui n'était pas joint à l'envoi ; Que la circonstance que la Cour de justice de la communauté européenne, par arrêt du 11 juillet 2002, ait jugé que l'action par laquelle un consommateur vise à faire condamner dans l'Etat contractant sur le territoire duquel il est domicilié et en application de la législation de cet Etat, une société de vente par correspondance, établie dans un autre Etat contractant, à la remise d'un gain lorsque celle-ci lui avait adressé personnellement un envoi de nature à donner impression qu'un prix lui sera attribué à la condition qu'il commande des marchandises pour un montant déterminé et que ce consommateur passe effectivement une telle commande sans cependant obtenir le versement dudit gain est de nature contractuelle au sens de l'article 13 premier alinéa point 3 de la convention de Bruxelles, ne saurait lier la cour de céans, la Cour de justice s'étant prononcée dans le cadre de sa mission d'interprétation de ladite convention, afin de déterminer la juridiction internationalement compétente, alors que le présent litige concerne deux parties domiciliées en France et ne met en jeu aucun élément d'extrané'té ; Considérant que, pour que le contrat se forme, il faut que chacune des parties ait consenti à celui-ci ; Que l'ambigu'té rédactionnelle des documents rédigés par la société BIOTONIC, qui laisse entendre au consommateur moyen qu'il va recevoir un chèque de 9 750 euros alors qu'en réalité il va être destinataire du règlement du jeu intitulé "9 750 euros par chèque bancaire", suffit à établir que cette société n'a pas eu la volonté de s'engager définitivement à remettre le chèque à la simple demande de madame X... ; Que l'action engagée par cette dernière ne peut donc avoir un fondement contractuel; Qu'aux termes de l'article 1371 du code civil, les quasi-contrats sont les faits purement volontaires de l'homme, dont il résulte un engagement quelconque envers un tiers, et quelquefois un engagement réciproque des deux parties ; Que la
société BIOTONIC ayant annoncé un gain à madame X... sans avoir mis en évidence l'existence d'un aléa, sa responsabilité doit être recherchée sur un fondement quasi-contractuel ; Que madame X... ne peut donc se prévaloir de l'option de compétence ouverte en matière contractuelle à l'article 46 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile ; Que la société BIOTONIC ayant son siège social à Mougins (Alpes-Maritime), il convient, réformant l'ordonnance entreprise, de se déclarer incompétent au profit du tribunal de grande instance de Grasse ; Que, par conséquent, la Cour ne peut évoquer le fond ; Qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, RÉFORME l'ordonnance entreprise, ET STATUANT À NOUVEAU, DÉCLARE le tribunal de grande instance de Nanterre incompétent territorialement, RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de grande instance de Grasse, REJETTE la demande d'évocation, DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, CONDAMNE madame X... aux dépens de l'appel qui pourront être recouvrés directement par la SPC BOMMART-MINAULT, société titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Francine BARDY, Président, et signé par Madame Francine BARDY, Président et par Madame Sylvie Z..., Greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER,
Le PRESIDENT,