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24/11/2004 | FRANCE | N°03/3780

France | France, Cour d'appel de Versailles, 24 novembre 2004, 03/3780


COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 64B 14ème chambre ARRET Nä contradictoire DU 24 NOVEMBRE 2004 R.G. Nä 03/09036 AFFAIRE :

S.A.R.L. OUAPS C/ L'UNION DE FAMILLES DE MALADES MENTAUX ET DE LEURS ASSOCIATIONS (UNAFAM), agissant en la personne de ses représentants légaux domicilié de droit au siège ... Décision déférée à la cour :

appel d'une ordonnance de référé rendue le 17 Décembre 2003 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE Nä chambre : Nä Section : Nä RG : 03/3780 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP GAS Me Jean-

Michel TREYNET REPUBLIQUE FRANCAISE E.D. AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT QUATRE N...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 64B 14ème chambre ARRET Nä contradictoire DU 24 NOVEMBRE 2004 R.G. Nä 03/09036 AFFAIRE :

S.A.R.L. OUAPS C/ L'UNION DE FAMILLES DE MALADES MENTAUX ET DE LEURS ASSOCIATIONS (UNAFAM), agissant en la personne de ses représentants légaux domicilié de droit au siège ... Décision déférée à la cour :

appel d'une ordonnance de référé rendue le 17 Décembre 2003 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE Nä chambre : Nä Section : Nä RG : 03/3780 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP GAS Me Jean-Michel TREYNET REPUBLIQUE FRANCAISE E.D. AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : S.A.R.L. OUAPS 165 avenue Henri Ginoux 92120 MONTROUGE représentée par la SCP GAS, avoués assistée de Me François GREFFE (avocat au barreau de PARIS) APPELANT [**][**][**][**][**][**][**][**] L'UNION DE FAMILLES DE MALADES MENTAUX ET DE LEURS ASSOCIATIONS (UNAFAM), agissant en la personne de ses représentants légaux domicilié de droit au siège 12 Villa Compoint 75017 PARIS représentée par Me Jean-Michel TREYNET, avoué assistée de Me Eric BARON, avocat au barreau de PARIS LA FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE PATIENTS ET DES EX -PATIENTS EN PSYCHIATRIE (FNAP PSY), agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit au siège rue Everiste Galois 75020 PARIS représentée par Me Jean-Michel TREYNET, avoué assistée de Me Eric BARON, avocat au barreau de PARIS Association ARIANE, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés de droit au siège 14 avenue Robert Schuman 59370 MONS EN BAROEUL représentée par Me Jean-Michel TREYNET, avoué assistée de Me Eric BARON, avocat au barreau de PARIS Madame Joùlle X... représentée par sa tutrice Madame Christiane X... 24 rue de l'Annonciation 75016 PARIS représentée par Me Jean-Michel TREYNET, avoué assistée de Me Eric BARON, avocat au barreau de PARIS INTIMES

[**][**][**][**][**][**][**][**] Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 27 Octobre 2004 devant la cour composée de :

Monsieur Michel FALCONE, Président, Madame Chantal LOMBARD, conseiller, Madame Geneviève LAMBLING, Conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre Y... 5FAITS ET PROCEDURE La société OUAPS FRANCE a commercialisé sur l'ensemble du territoire ainsi que son internet une peluche parlante destinée aux enfants de 1 à 11 ans, représentant un singe, présentée dans un carton portant les mentions "Nazo le Skizo", "Skizo comme Yves Lecoq" et faisant référence à cet animateur dont la photographie identitaire est reproduite à l'avant du cartonnage. Equipée de capteurs électroniques, cette peluche reproduit la voix de quinze personnalités connues interprétée par Yves Lecoq et peut être, tour à tour, "tendre", "grognon" ou "joueur" selon le capteur sur lequel on appuie. Estimant que cette peluche constituait une atteinte à la dignité des malades atteints de schizophrénie, L'UNION DES FAMILLE DE MALADES MENTAUX ET DE LEURS ASSOCIATIONS (U.N.A.F.A.M)., la FEDERATION NATIONALE DES ASSOCIATIONS DE PATIENTS et EX-PATIENTS EN PSYCHIATRIE, (F.N.A.P. PSY), L'ASSOCIATION ARIANE et Madame Joùlle X..., ont assigné la société OUAPS devant le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Nanterre, lequel, par ordonnance du 17 décembre 2003, a : - dit que le jouet "Nazo le Skizo" conçu et commercialisé par la société OUAPS FRANCE constitue une atteinte à la dignité des malades atteints de schizophrénie, - ordonné à la société OUAPS FRANCE de cesser, dès signification de l'ordonnance, la commercialisation de tous les objets appelés "Nazo le Skizo" et de retirer ou faire retirer de la vente tous les jouets "Nazo le Skizo" déjà commercialisés par la société OUAPS et proposés à la vente quel que soit la mode de vente, magasin, vente par correspondance, internet, et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et

de 500 euros par infraction constatée, - s'est réservé la liquidation de l'astreinte, - ordonné à la société OUAPS FRANCE de transmettre copie du dispositif de l'ordonnance à tous les détaillants proposant la vente de ladite peluche, - ordonné la publication du disposition de l'ordonnance sur le site internet, - condamné la société OUAPS FRANCE à payer aux demandeurs la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Appelante, la société OUAPS FRANCE sollicite l'infirmation de l'ordonnance entreprise et demande à la Cour de dire les intimés irrecevables en leur action et de les débouter de leurs demandes, subsidiairement de dire que la peluche litigieuse ne porte pas atteinte au droit des malades et/ou des personnes et constater l'existence des constatations sérieuses. Elle réclame la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Les associations U.N.A.F.A.M., F.N.A.P. PSY, l'association ARIANE et Madame X... concluent à la confirmation de la décision déféré et sollicitent reconventionnellement, la liquidation de l'astreinte précédemment ordonnée à la somme de 32 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'arrêt. Elles réclament la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. MOTIFS DE L'ARRÊT Sur la recevabilité de l'action Considérant que la société OUAPS FRANCE soutient que les intimées seraient irrecevables en leur action pour défaut d'intérêt à agir au motif que Madame Joùlle X... ne se trouve nullement mise en cause, à titre personnel et individuel par la commercialisation de la peluche litigieuse et qu'il en est de même en ce qui concerne les trois associations intimées, en l'absence d'infraction pénale et d'atteinte aux intérêts individuels de leurs membres, lesquels ne sont pas davantage recevables à agir en l'absence de textes les y autorisant ; Mais considérant d'une pat, que Madame Joùlle X..., qui souffre de

schizophrénie, a intérêt à agir afin de faire cesser la commercialisation d'une peluche qui porte atteinte à sa dignité ; que d'autre part les trois associations intimées qui ont pour objet d'assurer la défense de l'intérêt collectif de leurs membres en l'espèce, l'intérêt des malades atteints de schizophrénie, lesquels soutiennent qu'ils ont été atteints dans leur dignité par la conception et la réalisation de la peluche "Nazo le Skizo" sont recevables dans leur action ; que l'exception d'irrecevabilité sera donc rejetée ; Sur les causes du référé Considérant qu'à l'appui de son appel, la société OUAPS FRANCE soutient que la peluche litigieuse ne constitue, ni dans sa présentation, ni dans sa configuration, ni dans les paroles qu'elle prononce lorsqu'elle est sollicitée, une "stigmatisation dégradante", pour les malades atteints de schizophrénie ; qu'elle se présente d'allure générale, sympathique, au caractère amusant, dans différentes postures nullement dégradantes ; Que ni la maladie de la schizophrénie, ni les malades atteints de cette pathologie ne sont mis en scène ou visés directement ou indirectement ; Que le terme "skizo" est employé dans son sens courant que tout le monde peut comprendre pour décrire le caractère amusant de la peluche aux "humeurs changeantes" et nullement pour viser les malades atteints de schizophrénie et encore moins pour les stigmatiser ; que l'expression "Nazo le Skizo", ne désigne que la peluche et Yves Lecoq et nulle autre personne ; qu'elle ajoute n'avoir jamais eu l'intention de provoquer ni de heurter quiconque en prénommant sa peluche "Nazo le Sckizo" ; Mais considérant que le droit à la dignité de la personne humaine est notamment consacré par l'article 16 du Code Civil aux termes duquel : "La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci..." ; Considérant, en l'espèce, que la peluche "Nazo le Skizo" se présente sous la forme d'un animal comparable à un singe ;

qu'il est qualifié de "Nazo", (en référence, semble-t-il au nasique, espèce particulière de singe) ; que cette qualification, a, incontestablement, une connotation péjorative puisqu'elle signifie dans le langage familier, "en mauvais état", "fichu" ; que l'association de ce qualificatif péjoratif au mot "schizo" qui renvoie directement à la schizophrénie a pour effet de stigmatiser le malade atteint de schizophrénie en l'associant à un animal dont les "humeurs" sont traduites par quinze voix différentes dès que l'on presse sur les capteurs contenus dans le corps de la peluche ; Considérant ainsi que l'a justement estimé le premier juge que l'accolement des mots "Nazo" et "Schizo" constitue une moquerie ayant pour effet de provoquer à l'encontre des malades atteints de schizophrénie une phénomène de dérision et de discrimination et constitutif comme tel d'une atteinte à leur dignité en contravention avec les dispositions de l'article 16 du Code Civil ; Considérant qu'il y a lieu, par conséquent de dire recevable mais non fondé l'appel formé par la société OUAPS FRANCE et de confirmer l'ordonnance entreprise ; Sur la demande de liquidation d'astreinte Considérant qu'il apparaît que la société OUAPS FRANCE s'est conformée immédiatement à l'ordonnance entreprise, ce qui a eu pour conséquence le retrait de la vente de 12 000 peluches ; Qu'il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte ; Sur les demandes au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure

Civile Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des intimées, créancières solidaires, les frais irrépétibles qu'elles ont été contraintes d'exposer devant la Cour et qu'il y a lieu de leur allouer la somme complémentaire de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Rejette l'exception d'irrecevabilité soulevée par la société

OUAPS FRANCE, Confirme l'ordonnance entreprise, Constate que l'ordonnance entreprise a été exécutée, Dit n'y avoir lieu à liquider l'astreinte, Condamne la société OUAPS FRANCE à payer aux associations U.N.A.F.A.M., F.N.A.P. PSY, ARIANE et à Madame X... la somme de 5 000 euros (cinq mille euros) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, La condamne aux dépens lesquels seront recouvrés directement par Maître TREYNET, avoué, conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Arrêt prononcé et signé par Monsieur Michel FALCONE, Président et par Madame Marie-Pierre Y..., Greffier présent lors du prononcéArrêt prononcé et signé par Monsieur Michel FALCONE, Président et par Madame Marie-Pierre Y..., Greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 03/3780
Date de la décision : 24/11/2004
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2004-11-24;03.3780 ?
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