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14/10/2004 | FRANCE | N°2003-08572

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14 octobre 2004, 2003-08572


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 J.F.F./P.G. ARRET Nä Code nac : 4A contradictoire DU 28 OCTOBRE 2004 R.G. Nä 03/08572 AFFAIRE : Matthieu LE X... C/ S.A. DES ETABLISSEMENTS NICOLAS Expéditions délivrées le : à : Monsieur Matthieu LEMOINE S.A. DES ETABLISSEMENTS NICOLAS Y... de Commerce de NANTERRE + retour dossier Expéditions exécutoires délivrées le : à : Me André JOULIN Me G. Henri CHARPENTIER E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT HUIT OCTOBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant sur le CONTREDIT DE C

OMPETENCE, dans l'affaire entre : DEMANDEUR AU CONTREDIT form...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 J.F.F./P.G. ARRET Nä Code nac : 4A contradictoire DU 28 OCTOBRE 2004 R.G. Nä 03/08572 AFFAIRE : Matthieu LE X... C/ S.A. DES ETABLISSEMENTS NICOLAS Expéditions délivrées le : à : Monsieur Matthieu LEMOINE S.A. DES ETABLISSEMENTS NICOLAS Y... de Commerce de NANTERRE + retour dossier Expéditions exécutoires délivrées le : à : Me André JOULIN Me G. Henri CHARPENTIER E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT HUIT OCTOBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant sur le CONTREDIT DE COMPETENCE, dans l'affaire entre : DEMANDEUR AU CONTREDIT formé à l'encontre d'un Jugement rendu par le Y... de Commerce de NANTERRE, en date du 25 Novembre 2003, 3ème chambre. Monsieur Matthieu LE X... demeurant 4 Rue des Princes 92100 BOULOGNE BILLANCOURT. assisté de Me André JOULIN, avocat au barreau de PARIS (E.1135). DEFENDERESSE AU CONTREDIT S.A. DES ETABLISSEMENTS NICOLAS ayant son siège 2, rue du Courson Sénia 109 94517 THIAIS CEDEX, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. assistée de Me G. Henri CHARPENTIER de la SCP VILLARD ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS. Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Septembre 2004 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de : Madame Françoise LAPORTE, Président, Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse GENISSEL, 5FAITS ET PROCEDURE : Selon contrat à durée déterminée d'une durée de six mois en date du 24 novembre 2000, Monsieur Matthieu LE X... a été engagé par la Société

des Etablissements NICOLAS en qualité de gérant mandataire non salarié; il devait assurer la gérance du magasin NICOLAS situé 60 Boulevard Mortier 75020 PARIS. Aux termes d'un avenant, ce contrat a été prorogé pour une durée de six mois supplémentaires, soit jusqu'au 23 novembre 2001; par lettre recommandée du 24 octobre 2001, la Société NICOLAS a fait savoir à Monsieur LE X... qu'elle mettait fin au contrat à l'expiration de la période d'essai renouvelée. Invoquant le solde débiteur révélé par l'inventaire des marchandises et des recettes effectué sous contrôle d'huissier au départ de son gérant, la Société des Etablissements NICOLAS a, par acte du 10 décembre 2002, assigné Monsieur Matthieu LE X... en paiement de la somme de 20.143,18 , augmentée des intérêts de droit et d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Par jugement du 25 novembre 2003, le Y... de commerce de NANTERRE: - a reçu la demande de Monsieur Matthieu LE X..., l'a dit mal fondée, l'en a débouté et s'est dit compétent ; - a renvoyé les parties pour conclure au fond, tous droits, moyens et dépens réservés. Le 28 novembre 2003, Monsieur Matthieu LE X... a formé un contredit à l'encontre de cette décision. Il fait valoir que seul le Conseil de prud'hommes est compétent pour régler les litiges afférents aux manquants de marchandises ou de recettes après la rupture d'un contrat de gérant non salarié. Il soutient que les fonctions exercées par lui pour le compte de la Société NICOLAS s'inscrivaient dans le cadre d'une dépendance économique, financière, sociale et fonctionnelle caractérisant un lien de subordination, excluant de sa part toute initiative de quelque nature que ce soit. Il relève que la dénomination du contrat choisie et imposée par l'une des parties, en l'occurrence par la Société NICOLAS, ne saurait faire obstacle aux dispositions d'ordre public régissant en particulier le contrat de travail. Il précise qu'en sa qualité de gérant mandataire,

il ne pouvait, ni dans son activité commerciale, ni dans ses conditions de travail (durée minimum de travail, répartition des horaires, congés payés, clause de non-concurrence), disposer de la moindre autonomie ou initiative compte tenu des contraintes et obligations qui lui étaient imposées par son cocontractant. Il conclut que les conditions dans lesquelles il a pu collaborer avec la Société NICOLAS sont caractérisées par l'existence d'un lien de subordination résultant du pouvoir de direction, de gestion, de sanction de la société mandante, dans des conditions caractérisant l'existence d'un contrat de travail. Par voie de conséquence, il demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de déclarer le Y... de Commerce de NANTERRE incompétent ratione materiae pour connaître du litige l'opposant à la Société des Etablissements NICOLAS, et de renvoyer celle-ci à mieux se pourvoir devant le Conseil de Prud'hommes de PARIS. Il réclame en outre la somme de 1.525 sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. La Société NICOLAS SA conclut à la confirmation du jugement. Elle expose que la réclamation présentée par elle dans le cadre de cette instance est relative aux modalités commerciales d'exploitation des succursales, et relève donc, en application de l'article L 782-5 du Code du travail et de l'accord collectif national du 18 juillet 1963, de la compétence des tribunaux de commerce. Elle observe que les conditions de travail de Monsieur LE X..., non seulement n'ont à aucun moment été contestées par celui-ci lorsqu'il était gérant mandataire, mais n'ont aucun rapport avec l'ampleur du solde débiteur de son compte tiers, creusé par lui en moins d'un an de gestion. Elle allègue que, si le litige portant sur la résiliation du contrat de travail relève du juge prud'homal, tel n'est pas le cas du présent contentieux, lequel ne porte pas sur la rupture du contrat de gérance, dont la partie adverse n'a jamais

contesté les causes et le bien fondé. Elle fait valoir que les rapports entre les parties ont découlé d'un contrat de gérant mandataire non salarié, dont le cadre juridique, très spécifique, est propre aux maisons d'alimentation à succursales multiples. Elle soutient que ce cadre juridique exclut tout lien de subordination à l'égard du gérant, lequel peut librement embaucher du personnel pour le remplacer, et n'est tenu à aucun horaire de travail minimum. Elle relève que Monsieur LE X... prétend à tort qu'elle fixerait unilatéralement les quantités à livrer et la date des livraisons, alors que c'est le gérant qui connaît l'état de ses stocks, les demandes des clients et les besoins de la succursale et qui accepte et contrôle chaque livraison. Elle précise qu'en application des méthodes comptables parfaitement contradictoires et transparentes pratiquées par elle, le gérant était régulièrement informé, mois par mois, de la comptabilité de la succursale qui lui avait été confiée, toutes possibilités de contestation lui étant ouvertes. Elle demande à la Cour d'évoquer le fond du litige, et d'inviter en conséquence les parties à constituer avoué et à conclure au fond. Elle réclame en outre la somme de 5.000 en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. MOTIFS DE LA DECISION : SUR L'EXCEPTION D'INCOMPETENCE RATIONE MATERIAE :

Considérant qu'aux termes de l'article L 782-1 du Code du travail, "les personnes qui exploitent, moyennant des remises proportionnelles au montant des ventes, les succursales des maisons d'alimentation de détail ou des coopératives de consommation sont qualifiées "gérants non salariés", lorsque le contrat intervenu ne fixe pas les conditions de leur travail et leur laisse toute latitude d'embaucher du personnel ou de se substituer des remplaçants à leurs frais et sous leur entière responsabilité"; Considérant qu'en l'occurrence, il s'infère de la rubrique "rémunération du gérant" du "contrat de gérance mandataire non

salarié" conclu par les parties le 24 novembre 2000 que le gérant a droit, sur les recettes provenant des ventes, aux commissions précisées par un avenant à ce contrat ; Considérant qu'il est précisé, à la rubrique : "responsabilité du gérant", que le gérant :

"engagera à ses frais et sous sa seule responsabilité le personnel qu'il estimera utile de s'adjoindre", qu'il : "devra assurer à ce personnel le bénéfice de toutes les lois sociales et se conformer aux obligations fiscales et autres à la charge des employeurs", et que :

"le personnel du gérant n'aura aucun lien de droit avec les Etablissements NICOLAS" ; Considérant qu'au demeurant, il ne résulte nullement des stipulations contractuelles que Monsieur LE X... était tenu de se conformer à des horaires de travail autres que ceux en vigueur dans la zone de chalandise ; Considérant que, par ailleurs, les clauses de ce contrat, en tant qu'elles imposent au gérant, d'une part de respecter les instructions données par les Etablissements NICOLAS en ce qui concerne les conditions de stockage, de vente et de livraison des marchandises à la clientèle, d'autre part de se soumettre à une procédure particulière concernant la tenue de la comptabilité de la succursale et l'établissement des inventaires contradictoires des marchandises, ne dérogent pas aux obligations habituellement imposées aux gérants mandataires des maisons d'alimentation à succursales ; Considérant qu'au regard de ces éléments, lesquels mettent suffisamment en évidence que Monsieur LE X... n'était nullement privé de toute autonomie dans la gestion de la succursale à laquelle il était affecté, la demande de requalification en contrat de travail du contrat de gérance mandataire non salarié liant les parties ne saurait prospérer et doit donc être écartée ; Considérant qu'en vertu de l'article L 782-5 du Code du travail : "Les différends survenus entre les entreprises mentionnées à l'article L 782-1 et leurs gérants non salariés

relèvent, lorsqu'ils concernent les modalités commerciales d'exploitation des succursales, de la compétence des tribunaux de commerce. Ils relèvent de celle des tribunaux habilités à connaître des litiges survenus à l'occasion de louage de services lorsqu'ils concernent les conditions de travail des gérants non salariés telles qu'elles résultent du présent titre"; Considérant qu'en l'espèce, il est constant que le litige soumis au Y... de commerce de NANTERRE a trait à l'existence d'un manquant en marchandises et/ou en recettes de 20.143,18 constaté lors de l'inventaire de fin de gestion établi à la suite du départ de Monsieur LE X... ; Considérant qu'à cet égard, la Société NICOLAS explique que la créance dont elle se prévaut à l'encontre de ce dernier est née à l'occasion des ventes des marchandises qui lui étaient confiées, dont les recettes correspondantes n'ont pas été versées à l'entreprise ; Considérant que sa réclamation se rapporte donc à l'exploitation commerciale de la succursale à laquelle Monsieur LE X... était affecté, et non aux conditions de travail de celui-ci à l'époque où il était gérant mandataire, ni aux circonstances de la résiliation du contrat de gérance, lesquelles n'ont à ce jour donné lieu à aucune contestation de sa part, y compris par la voie judiciaire ; Considérant qu'il s'ensuit que les premiers juges ont fait une exacte application des dispositions légales susvisées et de la Convention Collective Nationale des gérants mandataires en date du 18 juillet 1963 en retenant que le présent litige relève de la juridiction commerciale ; Considérant que, par voie de conséquence, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence ratione materiae soulevée par Monsieur LE X..., et en ce qu'il a renvoyé les parties à conclure sur le fond. SUR LES DEMANDES COMPLEMENTAIRES ET ANNEXES : Considérant qu'aucune circonstance tirée de l'urgence ou de la nécessité d'une bonne administration de la justice ne justifie que

la Cour use de son pouvoir d'évocation, lequel, s'il était exercé, aurait pour effet de priver les parties du double degré de juridiction ; Considérant que, dès lors, il convient de renvoyer les parties devant le Y... de commerce de NANTERRE, afin qu'il soit statué sur le fond du litige les opposant ; Considérant que l'équité commande d'allouer à la Société des Etablissements NICOLAS une indemnité de 1.000 sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Considérant qu'il n'est cependant pas inéquitable que Monsieur LE X... conserve la charge des frais non compris dans les dépens exposés par lui dans le cadre de la présente instance ; Considérant que les dépens du contredit doivent être mis à la charge de Monsieur LE X... PAR CES MOTIFS Z... publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, DECLARE recevable le contredit formé par Monsieur Matthieu LE X..., le dit mal fondé ; CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Y ajoutant : DIT n'y avoir lieu à évocation ; CONDAMNE Monsieur Matthieu LE X... à verser à la Société des Etablissements NICOLAS la somme de 1.000 sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; CONDAMNE Monsieur Matthieu LE X... aux dépens du contredit. Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, Président et par Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier présent lors du prononcé LE GREFFIER,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2003-08572
Date de la décision : 14/10/2004

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - FORMATION - Définition - Lien de subordination - Gérant d'un magasin d'alimentation de détail.

Le contrat de gérance d'un magasin qui laisse libre le gérant d'engager du personnel à ses frais sous sa seule responsabilité, lui permet de fixer librement ses horaires de travail en ne lui imposant pour seules contraintes que le respect des horaires de la zone de chalandise concernée et des instructions particulières aux conditions de stockage, de vente et de livraison des marchandises à la clientèle ainsi que la procédure particulière de tenue de la comptabilité et d'établissement d'inventaires contradictoires, ne caractérise aucune privation d'autonomie de gestion du gérant, au sens de l'article L. 782-1 du Code du travail, de nature à justifier la requalification du contrat de gérant mandataire non salarié en contrat de travail

PRUD'HOMMES - Compétence matérielle - Gérant non salarié.

S'il résulte des dispositions de l'article L 782-5 du Code du travail que les litiges nés de la mise en gérance non salariée d'une entreprise à succursale relèvent soit de la compétence matérielle des tribunaux de commerce lorsque le litige à trait aux modalités d'exploitation commerciale, soit de celle des juridictions prud'homales, lorsque ce litige porte sur les conditions de travail du gérant, c'est à juste titre que le tribunal de commerce a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par un gérant non salarié attrait devant cette juridiction pour trancher un différend portant sur un manquant de marchandises relevé lors de l'inventaire de fin de gestion


Références :

Code du travail, articles L. 782-1 et L. 782-5

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-10-14;2003.08572 ?
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