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30/09/2004 | FRANCE | N°2003-00934

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 septembre 2004, 2003-00934


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 J.F.F./P.G. ARRET Nä Code nac : 39H contradictoire DU 30 SEPTEMBRE 2004 R.G. Nä 03/00934 AFFAIRE : S.A. GAP FROID GROUPE MAJA C/ S.A.R.L. PRO GLACE Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Janvier 2003 par le Tribunal de Commerce NANTERRE Nä de chambre : 7ème chambre RG nä :

2002F00725 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à :

représentée par Me Jean-Pierre BINOCHE représentée par Me Farid SEBA E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE TRENTE SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La

cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : APPEL...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 J.F.F./P.G. ARRET Nä Code nac : 39H contradictoire DU 30 SEPTEMBRE 2004 R.G. Nä 03/00934 AFFAIRE : S.A. GAP FROID GROUPE MAJA C/ S.A.R.L. PRO GLACE Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Janvier 2003 par le Tribunal de Commerce NANTERRE Nä de chambre : 7ème chambre RG nä :

2002F00725 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à :

représentée par Me Jean-Pierre BINOCHE représentée par Me Farid SEBA E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE TRENTE SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : APPELANTE S.A. GAP FROID GROUPE MAJA ayant son siège 122 rue Vaillant Couturier 93136 NOISY LE SEC CEDEX et actuellement 11 rue de Courtalin, Bâtiment A, 77700 MAGNY LE HONGRE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par Me Jean-Pierre BINOCHE, avoué. assistée de Me Jérôme GIUSTI, avocat au barreau de PARIS (A.0902). INTIMEE S.A.R.L. PRO GLACE ayant son siège 16/20 rue de l'Agent Sarre 92700 COLOMBES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par Me Farid SEBA, avoué. assistée de Me Jean-Pierre AUFFRET, avocat au barreau de NANTERRE. Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Juin 2004 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de : Madame Françoise LAPORTE, Président, Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse GENISSEL, 5FAITS ET PROCEDURE : La Société GAP FROID CLIMATISATION est, depuis plus de trente ans,

distributeur exclusif sur le territoire français de machines à faire de la glace en écailles, fabriquées par la société allemande Mashinenfabrik Herman Schill GmbH (MAJA). La Société PRO GLACE, dont le gérant est Monsieur X... Y..., a pour activité l'étude, la fabrication, la transformation, la commercialisation d'équipements industriels mécaniques; elle vend les machines ZIEGRA et WEBER, concurrentes de la machine MAJA, ainsi que les pièces détachées de cette dernière. La Société PRO GLACE a, dans la revue professionnelle Marée de janvier-février 2001, fait paraître une publicité rédigée comme suit : "Comparez !!! Achetez au juste prix - pièces de rechange pour MAJA". Estimant que cette publicité constituait un dénigrement des prix pratiqués par elle, une publicité trompeuse et comparative illicite ainsi qu'un rattachement parasitaire à son activité, la Société GAP FROID a, par lettre recommandée du 14 juin 2001, mis la Société PRO GLACE en demeure de cesser la commercialisation des produits litigieux. Cette mise en demeure étant restée sans effet, la Société GAP FROID a, par acte du 29 novembre 2001, assigné en référé la Société PRO GLACE aux fins de cessation du trouble constitué par la vente des pièces en cause, de versement d'une indemnité provisionnelle et de remise de l'intégralité des stocks en sa possession. Par ordonnance du 28 décembre 2001, le Président du Tribunal de Commerce de NANTERRE a : - donné acte à la Société PRO GLACE de son offre de mettre à la disposition de la Société GAP FROID la totalité des stocks en sa possession, tels que décrits par constats d'huissier des 28, 30 août et 11 octobre 2001 ; - dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus ; - condamné la Société PRO GLACE au paiement de la somme de 15.000 F (2.286,74 ) au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens. C'est dans ces circonstances que, par acte du 1er février 2002, la Société GAP FROID CLIMATISATION a assigné la Société PRO

GLACE, aux fins de voir interdire à cette dernière, sous astreinte, de faire une quelconque référence ou d'utiliser une quelconque mention se référant à l'activité de la demanderesse, et de la voir condamner à des dommages-intérêts pour actes de concurrence déloyale et de parasitisme. Par jugement du 15 janvier 2003, le Tribunal de Commerce de NANTERRE a : - débouté la Société GAP FROID CLIMATISATION de l'ensemble de ses demandes ; - rejeté la demande reconventionnelle de la Société PRO GLACE ; - ordonné que la Société PRO GLACE retrouve la libre disposition du stock de pièces détachées remises à la Société GAP FROID CLIMATISATION dans les huit jours suivant la signification du jugement ; - condamné la Société GAP FROID CLIMATISATION au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens. La Société GAP FROID CLIMATISATION, désormais dénommée GAP FROID GROUPE MAJA, a interjeté appel de cette décision. Elle fait valoir que la publicité diffusée dans la revue Marée de janvier- février 2001, et reproduite dans la grille de tarifs établie par la Société PRO GLACE "à l'attention du service pièces détachées", afin de vendre les produits litigieux, constitue un dénigrement des prix pratiqués par la société appelante, destiné à détourner la clientèle de cette dernière dans le but de tirer facilement profit de sa notoriété par la vente de pièces détachées, et de proposer ensuite à cette clientèle, après l'avoir captée, des machines concurrentes. Elle soutient que la publicité litigieuse est une publicité comparative illicite au sens de l'article L 121-8 ancien du Code de la consommation, dès lors qu'elle invite explicitement ses destinataires à effectuer une comparaison entre les prix pratiqués par elle et ceux pratiqués par la partie adverse. Elle relève que les publicités diffusées par elle en faveur des machines MAJA dans les différentes revues professionnelles et dans l'annuaire des

hyper-marchés démontrent que les professionnels du secteur frigorifique étaient en mesure de rattacher la comparaison litigieuse aux produits distribués par la société appelante. Elle allègue que ces actes de concurrence déloyale et de parasitisme sont aggravés par le fait que la Société PRO GLACE s'est rendue complice de la violation de la clause de non-concurrence à laquelle Monsieur Paul Y..., père du gérant de la société intimée, est tenu envers la Société GAP FROID en vertu de son contrat de travail en date du 07 février 1991. Elle en déduit que la Société PRO GLACE, créée le 21 mars 2000, profite indûment des connaissances que Monsieur Paul Y... a acquises au cours de ses années passées au service de la société appelante, concernant notamment les produits de celle-ci et sa clientèle. Elle constate que la partie adverse lui a volontairement remis, sans contrepartie ni réserve, les stocks litigieux, et n'a nullement fait appel de l'ordonnance de référé qui lui a donné acte de cette remise. Elle précise que les prix de vente des articles vendus par la société intimée sont très inférieurs à ceux pratiqués par elle, et que ces articles sont de mauvaise qualité et de faible résistance, ce qui accroît encore la confusion et nuit à l'image de marque de la Société GAP FROID, et a pour principal effet une totale désorganisation du marché. Elle ajoute que son préjudice est constitué à la fois par le manque à gagner correspondant aux gains réalisés par la société intimée laquelle s'est située dans son sillage en vendant à un prix inférieur des pièces de rechange pour machines MAJA sans préciser qu'elles n'étaient pas d'origine, et par l'atteinte portée à sa notoriété et à son image de marque. Par voie de conséquence, elle demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré, et de : - interdire à la Société PRO GLACE de faire une quelconque référence ou utiliser une quelconque mention se référant à l'activité de la Société GAP FROID CLIMATISATION pour les besoins de son

commerce, de façon expresse ou tacite, par quelque moyen et sur quelque support que ce soit, sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée ; - autoriser la société appelante à procéder à la destruction des stocks remis par la Société PRO GLACE à la Société GAP FROID le 14 janvier 2002 ; - condamner la société intimée à lui payer la somme de 46.000 euros, à titre de dommages-intérêts, tous préjudices confondus ; - ordonner la publication de l'arrêt à intervenir, aux frais de l'intimée, dans trois journaux ou revues au choix de l'appelante, sans que le coût de ces insertions ne soit inférieur à la somme HT de 23.000 euros ; - condamner la Société PRO GLACE au versement de la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens. La Société PRO GLACE conclut à la confirmation du jugement déféré, hormis en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts. Elle fait valoir que la Société GAP FROID CLIMATISATION ne démontre pas que la clause de non-concurrence assortissant le contrat de travail de Monsieur Y... remplit les conditions exigées par la jurisprudence pour être déclarée valable. Elle conteste l'existence d'un prétendu dénigrement, dès lors que le message publicitaire incriminé n'identifie pas de façon certaine un concurrent visé et ne concerne que les pièces de rechange et non les machines fabriquées par la Société MAJA. Elle relève qu'elle ne s'est en aucun cas rendue coupable de publicité trompeuse en entretenant une quelconque confusion sur l'origine des produits, ni ne s'est livrée à un rattachement parasitaire à l'activité de la société appelante. Elle allègue qu'elle a exercé une activité parfaitement identifiée consistant à proposer en toute clarté des pièces neuves de bonne qualité destinées à réparer des machines souvent anciennes, et sans créer en aucune manière le moindre trouble dans l'esprit de la clientèle, laquelle a toujours su pertinemment qu'elle était une

entité différente de la Société GAP FROID, et que les pièces offertes par elle à la vente étaient d'origine distincte. Elle précise que la société appelante est mal fondée à lui imputer un manque à gagner ainsi qu'une atteinte à sa notoriété et à son image de marque, dans la mesure où plusieurs clients se sont déclarés satisfaits de la qualité des pièces vendues par elle. Elle stigmatise la mauvaise foi de la partie adverse, laquelle prétend qu'elle aurait remis volontairement les stocks et aurait renoncé à continuer à les vendre, reconnaissant ainsi le caractère illicite de ses agissements, alors qu'elle s'est vu interdire par la société appelante de continuer la commercialisation des produits litigieux. Elle demande à la Cour, en ajoutant à la décision entreprise, de condamner la Société GAP FROID CLIMATISATION à lui laisser retrouver la libre disposition du stock de pièces détachées remises à cette dernière, dans les huit jours suivant la signification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard. Se portant incidemment appelante de cette décision, elle sollicite la condamnation de la partie adverse à lui payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive. Elle réclame en outre la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 mai 2004. Par conclusions du 17 mai 2004, la Société GAP FROID GROUPE MAJA a demandé à la Cour de rejeter des débats les pièces nä 14 et 15 communiquées par la Société PRO GLACE le 11 mai 2004, soit deux jours seulement avant la clôture, ce qui n'a pas permis d'assurer le principe du contradictoire. La Cour a ordonné la jonction de cet incident au fond. MOTIFS DE LA DECISION : SUR L'INCIDENT DE REJET DES DEBATS : Considérant que les deux pièces communiquées par la Société PRO GLACE le 11 mai 2004, soit deux jours seulement avant le prononcé de l'ordonnance de clôture, sont: - la notice du procédé et

dispositif pour congeler une denrée alimentaire à consistance liquide (pièce nä 14) ; - la lettre de licenciement en date du 30 juin 2003 (pièce nä 15) ; Considérant que, toutefois, la pièce nä 14 tend uniquement à justifier que seul le cylindre de la machine MAJA commercialisée par la Société GAP FROID a fait l'objet du dépôt d'un brevet ; Considérant que, par ailleurs, la pièce nä 15 concerne le licenciement pour motif économique notifié le 30 juin 1993 par la Société GAP FROID à Monsieur Hocine Z... ; Considérant que ces éléments d'information, à défaut d'étayer utilement l'argumentation de la société intimée au soutien de ses prétentions, ne justifiaient pas qu'il y soit apporté une réponse par la société appelante ; Considérant qu'il y a donc lieu de débouter la Société GAP FROID GROUPE MAJA de sa demande tendant à voir écarter ces pièces des débats. SUR LA PUBLICITE TROMPEUSE ET ILLICITE : Considérant qu'aux termes de l'article L 121-1 du Code de la consommation, "est interdite toute publicité comportant, sous quelque forme que ce soit, des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur lorsque celles-ci portent sur un ou plusieurs éléments ci-après : existence, nature, composition, qualités substantielles, teneur en principes utiles, espèce, origine..." ; Considérant qu'à titre préalable, il doit être rappelé que les machines MAJA commercialisées par la Société GAP FROID, en particulier auprès de la clientèle des supermarchés et hypermarchés, sont vendues sous diverses références : RVE 160, RVE 310, RVE 660, RVE 700 TL, RVE 1210, RVE 1500 TL, RVE 2510... ; Considérant qu'en l'occurrence, il est constant que la publicité litigieuse, rédigée comme suit : "Comparez !!! Achetez au juste prix - Pièces de rechange pour MAJA", énumère un certain nombre de pièces de rechange destinées à être montées sur les machines distribuées par la société appelante, avec indication de leurs références : "série 160 - 310 - 660 - 1210

et 2510" ; Considérant que la désignation de la Société "MAJA", associée aux références des machines fabriquées par cette dernière et diffusées par la Société GAP FROID, peut laisser penser à une clientèle mal informée que les articles proposés à la vente par la Société PRO GLACE sont des produits authentiques, alors que ces articles ne sont pas des pièces d'origine, ce qui n'est nullement précisé dans le message publicitaire incriminé ; Considérant que la circonstance que celui-ci comporte la mention : "Pièces de rechange pour MAJA", et non "Pièces de rechange MAJA", n'est pas de nature à supprimer tout risque de confusion dans l'esprit de la clientèle des installateurs et utilisateurs de machines à glace écailles, alors même que cette clientèle est constituée au moins partiellement de professionnels spécialisés dans la réfrigération ; Considérant que, de surcroît, ce message publicitaire, en tant qu'il vise expressément les machines fabriquées par la Société MAJA, identifie implicitement mais nécessairement la Société GAP FROID, laquelle justifie être le distributeur exclusif en France des produits de la Société MAJA dont elle est désormais la filiale ; Considérant que, par ailleurs, selon l'article L 121-8 du Code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à l'époque de la publicité litigieuse, "La publicité qui met en comparaison des biens ou services... n'est autorisée que si elle est loyale, véridique et qu'elle n'est pas de nature à induire en erreur le consommateur..." ; Considérant qu'en vertu de cette disposition légale : "Lorsque la comparaison porte sur les prix, elle doit concerner des produits identiques vendus dans les mêmes conditions et indiquer la durée pendant laquelle sont maintenus les prix mentionnés comme siens par l'annonceur..." ; Considérant que l'article L 121-12 du même code, dans sa rédaction alors applicable, fait en outre obligation à l'annonceur, "avant toute diffusion", de "communiquer l'annonce comparative aux professionnels visés, dans un

délai au moins égal à celui exigé, selon le type de support retenu, pour l'annulation d'un ordre de publicité" ; Considérant qu'en l'occurrence, la publicité incriminée invite clairement ses destinataires à procéder à une comparaison entre les prix pratiqués par la Société PRO GLACE et ceux pratiqués par la Société GAP FROID, laquelle commercialise à titre exclusif les produits fabriqués par la Société MAJA ; Considérant que cette comparaison est explicitée sur la grille de tarifs diffusée par la société intimée "à l'attention du service pièces détachées", laquelle, tout en reproduisant la même publicité que celle diffusée dans la revue Marée de janvier-février 2001 : "Comparez !!! Achetez au juste prix", comporte le détail du prix de vente des "Pièces de rechange pour MAJA" ; Considérant qu'elle vise des produits concurrents parfaitement identifiables, dans la mesure où les pièces détachées proposées à la vente par la Société PRO GLACE sont assorties des références du constructeur des machines de marque MAJA dont la Société GAP FROID assure en France la commercialisation à titre exclusif ; Considérant que, pour autant, elle ne concerne pas des "produits identiques" au sens de la disposition légale susvisée, dès lors qu'il est constant que les pièces de rechange vendues par la Société PRO GLACE sont différentes de celles fabriquées par la Société MAJA et commercialisées par la Société GAP FROID ; Considérant qu'elle ne remplit pas davantage les conditions de forme et de durée imposées par les articles L121-8 et L 121-12 en vigueur à l'époque de la diffusion incriminée ; Considérant qu'il y a donc lieu, en infirmant le jugement déféré, de dire que celle-ci constitue, non seulement une publicité trompeuse, mais également une publicité comparative illicite. SUR LES AGISSEMENTS DE CONCURRENCE DELOYALE ET DE PARASITISME : Considérant que l'examen des documents produits aux débats met en évidence que la Société PRO GRACE, créée le 21 mars 2000, a pour gérant Monsieur X...

Y..., dont le père, Monsieur Paul Y..., a indiqué dans plusieurs écrits intervenir en tant que représentant de la société intimée ; Considérant qu'il apparaît également qu'après avoir occupé un emploi d'attaché technico-commercial de 1979 à 1991, Monsieur Paul Y... a exercé au sein de la Société GAP FROID, à laquelle il était lié par une clause de non-concurrence, la fonction d'inspecteur commercial, et ce du 07 février 1991 jusqu'au 29 juin 1999, soit quelques mois seulement avant la création de la société intimée ; Considérant que, dès lors, la publicité litigieuse est révélatrice du comportement déloyal de la Société PRO GLACE, laquelle a mis à profit les connaissances acquises durant de nombreuses années par Monsieur Paul Y... auprès de la Société GAP FROID pour s'informer des produits de cette dernière et ainsi tenter de capter sa clientèle; Considérant qu'au demeurant, le détournement de clientèle qui a résulté des agissements fautifs de la société intimée se trouve caractérisé par les factures produites aux débats, établissant que cette dernière a vendu des pièces de rechange à diverses entreprises appartenant au groupe MC INTERNATIONAL, lequel était un client de la société appelante ; Considérant qu'il est également justifié, et d'ailleurs non contesté par la Société PRO GLACE, que ces ventes ont été réalisées à des prix sensiblement inférieurs à ceux pratiqués par la Société GAP FROID ; Considérant qu'il est au surplus acquis aux débats que cette dernière a été appelée à intervenir en juin 2001 pour diligenter une expertise technique sur des pièces défectueuses ayant pour origine un approvisionnement auprès de la Société PRO GLACE ; Considérant qu'il s'ensuit que les agissements de la société intimée ont contribué à créer dans l'esprit de la clientèle une confusion de nature à altérer l'image de marque de la société appelante et à désorganiser son activité ; Considérant que, par ailleurs, la Société PRO GLACE, en vendant des pièces de rechange

pour machines MAJA, à un prix très inférieur à celles vendues par sa concurrente, sans préciser qu'elles n'étaient pas d'origine, a cherché à se situer dans le sillage de la Société GAP FROID, ce qui l'a dispensée d'assumer le coût des investissements nécessaires au développement de son activité encore très récente ; Considérant qu'il y a donc lieu de lui faire interdiction, sous astreinte de 300 euros par infraction constatée, d'utiliser toute référence ou mention se rapportant à l'activité de la Société GAP FROID, et ce façon expresse ou implicite, et par quelque moyen et sur quelque support que ce soit ; Considérant qu'elle doit en outre répondre envers la Société GAP FROID, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code civil, des conséquences dommageables des agissements de concurrence déloyale et de parasitisme qui lui sont personnellement imputables. SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES-INTERETS PRESENTEE PAR LA SOCIETE GAP FROID : Considérant que les constats d'huissier diligentés à la requête de la Société GAP FROID ont mis en évidence que la Société PRO GLACE a pu vendre un nombre égal à au moins 32 pièces de rechange pour des machines MAJA, lesquelles, si elles avaient été vendues par la société appelante, auraient rapporté à cette dernière un chiffre d'affaires égal à 30.958,70 F (4.719,62 euros) ; Considérant qu'il apparaît également que les agissements reprochés à la Société PRO GLACE ont généré pour la Société GAP FROID un détournement de sa clientèle et une atteinte à sa notoriété et à son image de marque, ayant nécessairement contribué à désorganiser son activité commerciale et à lui faire perdre des marchés ; Considérant qu'à défaut d'éléments permettant d'apprécier précisément l'ampleur du trouble commercial qui a résulté pour la Société GAP FROID des actes de concurrence déloyale et de parasitisme dont elle a été victime, il convient de limiter à 20.000 le montant des dommages-intérêts auxquels la société appelante peut prétendre, toutes causes de

préjudice confondues, et de débouter cette dernière du surplus de sa réclamation de ce chef. SUR LA DEMANDE RELATIVE AUX STOCKS DE PIECES ET SUR LES DEMANDES ANNEXES : Considérant qu'il doit être rappelé que, par ordonnance du 28 décembre 2001, non frappée d'appel, le juge des référés du Tribunal de Commerce de NANTERRE a donné acte à la Société PRO GLACE de son offre de mettre à la disposition de la Société GAP FROID CLIMATISATION la totalité des stocks en sa possession, tels que décrits par constats d'huissier des 28, 30 août et 11 octobre 2001, et ce à première demande de cette dernière; Considérant que, dans la mesure où il est fait droit aux prétentions formulées dans le cadre de la présente procédure par la Société GAP FROID, il convient, à la suite du prononcé de l'ordonnance susvisée, d'autoriser la société appelante à procéder, aux frais de la partie adverse, à la destruction des stocks de pièces qui lui ont été remis le 14 janvier 2002 ; Considérant qu'il y a lieu en outre d'ordonner la publication de l'arrêt, aux frais de la société intimée, dans trois journaux ou revues au choix de la société appelante, sans que le coût global de ces publications n'excède la somme de 10.000 euros HT ; Considérant que l'équité commande par ailleurs d'allouer à la Société GAP FROID GROUPE MAJA une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Considérant que la Société PRO GLACE, dont l'argumentation en défense est pour l'essentiel écartée, ne peut qu'être déboutée de ses demandes de dommages-intérêts pour action abusive et d'indemnité de procédure ; Considérant qu'il convient également de la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, DIT n'y avoir lieu de rejeter des débats les pièces nä 14 et 15 communiquées par la Société PRO GLACE ; DECLARE recevable l'appel interjeté par la Société GAP FROID CLIMATISATION, nouvellement

désignée GAP FROID GROUPE MAJA, le dit bien fondé ; INFIRME le jugement déféré, et statuant à nouveau : FAIT INTERDICTION à la Société PRO GLACE, sous astreinte de 300 euros par infraction constatée, d'utiliser toute référence ou mention, explicite ou implicite, se rapportant à l'activité de la Société GAP FROID GROUPE MAJA, et ce par quelque moyen et sur quelque support que ce soit ; CONDAMNE la Société PRO GLACE à payer à la Société GAP FROID GROUPE MAJA la somme de 20.000 euros, à titre de dommages-intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme ; AUTORISE la Société GAP FROID GROUPE MAJA à procéder, aux frais de la Société PRO GLACE, à la destruction des stocks de pièces qui lui ont été remis par cette dernière le 14 janvier 2002 ; ORDONNE la publication du présent arrêt, aux frais de la société intimée, dans trois journaux ou revues au choix de la société appelante, sans que le coût global de ces publications n'excède la somme de 10.000 euros HT ; CONDAMNE la Société PRO GLACE à payer à la Société GAP FROID GROUPE MAJA la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; DEBOUTE la Société PRO GLACE de ses demandes de dommages-intérêts et d'indemnité de procédure ; CONDAMNE la Société PRO GLACE aux dépens de première instance et d'appel, et AUTORISE Maître BINOCHE, Avoué, à recouvrer directement la part le concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, Président et par Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2003-00934
Date de la décision : 30/09/2004

Analyses

PUBLICITE COMMERCIALE - Publicité mensongère - Vente - Slogan publicitaire - Allégation, indication ou présentation fausse ou de nature à induire en erreur

Au sens de l'article L 121-1 du Code de la consommation relatif à la publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, la mention " Comparez ! Achetez au juste prix - pièces de rechange" et non pas "pièces détachées", caractéri- se une publicité trompeuse dès lors qu'en l'absence de précision du message sur le caractère non authentique des pièces proposés une telle mention n'est pas de nature à supprimer tout risque de confusion sur leur caractère véritable, même à l'égard de la clientèle de professionnels spécialisés qu'elle vise et concerne. De même, un tel message se heurte aux dispositions des articles L 12168 et L 121-12 du Code précité, régissant la publicité comparative, dans leur rédaction applicable au moment de la parution de la publicité litigieuse, dès lors que le message vise des produits concurrents parfaitement identifiabl- es sans pour autant concerner des produits identiques ni respecter les con- ditions de forme et de durée alors imposées, notamment la communication préalable de l'annonce comparative aux professionnels visés


Références :

code de la consommation, articles L. 121-1, L .121-8 et L. 121-12

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-09-30;2003.00934 ?
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