COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 12Z 0A 1ère chambre 1ère section ARRET Nä CONTRADICTOIRE DU 30 SEPTEMBRE 2004 R.G. Nä 03/04955 AFFAIRE : Association MAISON DE X... BLANQUEFORT ... C/ S.A. TFI ... Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Avril 2003 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE Nä chambre : 1ère Nä Section : a Nä RG : 01/08642 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : Me TREYNET SCP LISSARRAGUE Me BINOCHE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE TRENTE SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : APPELANTES Association MAISON DE X... BLANQUEFORT association sans but lucratif régie par les dispositions de la loi du 1er juillet 1901 ayant son siège 69 rue de Chabrol - 75010 PARIS agissant poursuites et diligences de son Président Monsieur Y... de X...
... par Me Jean-Michel TREYNET Avoué assistée de Me Yolande PAULZE D'IVOY substitué par Me JACOB Jean avocat au barreau de PARIS Madame Z... DE X... épouse A... 4 rue Mornay 75004 PARIS représentée par Me Jean-Michel TREYNET Avoué assistée de Me Yolande PAULZE D'IVOY substitué par Me JACOB Jean avocat au barreau de PARIS [**][**][**][**][**][**][**][**] INTIMEES S.A. TFI Société anonyme inscrite au RCS sous le nä B 326.300.159 ayant son siège 1 Quai du Pont du Jour - 92100 BOULOGNE BILLANCOURT prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD Avoués assistée de Me Philippe MONCORPS, avocat au barreau de PARIS S.A. PEGASUS TELEVISION Société anonyme ayant son siège 53 rue Boissière - 75116 PARIS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège représentée par Me Jean-Pierre BINOCHE Avoué assisté de Me ALDEANO GALIMARD Vincent avocat au Barreau de PARIS [**][**][**][**][**][**][**][**] Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Juin 2004 devant la cour composée de : Madame Francine BARDY, Président, Madame Lysiane LIAUZUN, Conseiller, Madame Françoise SIMONNOT, Conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Sylvie B... 5Reprochant à la société TF1 et à la société PEGASUS Télévision d'avoir fait usage, sans autorisation, du nom de "de X..." et du prénom "Z..." dans l'un des épisodes d'une série intitulée "Divorce" diffusée au cours du mois de juillet 2000, l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT et madame Z... de X... épouse A... les ont fait assigner, par acte du 6 juillet 2001, devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de les voir condamner à payer, sur le fondement de l'article 1382 du code civil, 150000 F. (22867,35 ) à l'association et 200000 F. (30489,8 ) à madame Z... de X... Par jugement du 2 avril 2003, le tribunal a déclaré l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT irrecevable en ses demandes, débouté madame de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT de toutes ses demandes, déclaré sans objet l'appel en garantie formé par la société TF1 contre la société PEGASUS Télévision, débouté la société PEGASUS Télévision de sa demande de dommages-intérêts et condamné in solidum l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT et madame Z... de X... épouse A... à payer à la société TF 1 et à la société PEGASUS Télévision 1525 chacune par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT et madame Z... de X... épouse A... ont relevé appel de ce jugement. Ils font valoir que l'association est valablement représentée par monsieur C... de X..., président de droit de l'association en sa qualité de "chef de maison", et qu'elle a qualité pour agir, s'agissant d'une association familiale chargée de maintenir les règles de légitimité
familiale et d'initier toutes mesures présentant un intérêt pour ses membres, au nombre desquelles figure la protection du nom patronymique. Sur le fond, ils exposent que le nom de "de X..." est exempt de banalité et soutiennent qu'il existe un risque de confusion entre le personnage de fiction et madame Z... de X... et que ce risque de confusion est dommageable, le fait de dire qu'une femme a accepté l'homosexualité de son mari étant désobligeant pour elle et pour les membres de sa famille. Ils estiment que l'absence de recherche d'un minimum de renseignements à l'effet de déterminer si le nom donné à l'héro'ne n'était pas porté par une personne existante caractérise la faute et allèguent que l'affirmation par le scénariste de l'émission de l'utilisation fortuite du nom "de X..." procède d'une déclaration de complaisance et que l'usage du nom de "de X..." associé à celui du prénom "Z..." ne peut être le fruit du hasard. C'est pourquoi, ils sollicitent la réformation du jugement déféré et demandent à la cour, statuant à nouveau, de déclarer l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT recevable en son action et de condamner solidairement ou in solidum la société TF1 et la société PEGASUS Télévision à payer 1 symbolique à l'association et 30489,80 à madame Z... de X..., outre 4500 sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Ils sollicitent le rejet des demandes dirigées contre eux par la société TF 1 et par la société PEGASUS Télévision. La société TF1 conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation solidaire de l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT et de madame Z...
A... à lui verser 4 000 en indemnisation des frais de procédure non inclus dans les dépens engagés en cause d'appel. A titre subsidiaire, elle sollicite la garantie de la société PEGASUS Télévision. Elle relève que, d'après les statuts de l'association, son président de droit est le
"Chef de Maison" et soutient que monsieur C... de X... n'établit pas comment il pourrait se prévaloir de cette qualité, d'où son moyen d'irrecevabilité tiré du défaut de qualité de ce dernier à représenter l'association ; elle oppose ensuite l'absence de qualité à agir de l'association, l'action tendant à voir respecter un nom ne pouvait être exercée que par la personne qui porte ce nom. Elle conteste tout risque de confusion entre le personnage réel et le personnage de fiction, affirme que le personnage n'est pas présenté sous un jour antipathique, odieux ou ridicule et soutient que le fait que le mari de fiction soit homosexuel n'est pas infamant . Elle dénie avoir commis une faute en ayant utilisé un nom qui s'est révélé par la suite être le nom d'une personne existante. Subsidiairement, elle forme un appel en garantie contre la société PEGASUS Télévision, producteur de la série, en application de l'article 18 de la convention de production du 2 décembre 1999. La société PEGASUS Télévision conclut à l'irrecevabilité et, subsidiairement, au mal fondé des demandes de l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT, au rejet des demandes de madame Z...
A... et à la condamnation solidaire de l'association et de madame A... à lui verser 8000 à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du nouveau code de procédure civile et 6000 par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle soutient que les statuts de l'association ne lui permettent pas d'agir pour faire respecter les intérêts collectifs de ses membres et que son président n'était pas habilité à intenter la présente instance. Elle allègue que le nom de "de X..." n'est pas rare et conteste tout risque de confusion entre le personnage de la série et un membre de la famille de X... ; elle fait valoir que l'acceptation par le personnage de l'homosexualité de son mari n'est pas en soi préjudiciable, l'homosexualité n'étant pas illicite. Elle
conteste également avoir commis une faute dans le choix du nom de "de X...". L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 10 juin 2004. SUR CE SUR L'ACTION ENGAGEE PAR L'ASSOCIATION Qu'en application des dispositions de l'article 648 du nouveau code de procédure civile, l'assignation précise que l'association est représentée par son président, monsieur C... de X... ; Qu'il résulte des statuts de l'association, déclarés à la préfecture de police le 9 juillet 1992, que le président, qui représente l'association, est le chef de maison ; Qu'il ressort de l'assemblée générale constitutive que monsieur C... de X... en était le président de droit ; Qu'il a toujours cette qualité dès lors qu'un extrait de l'assemblée générale du 18 novembre 2000 fait mention comme président de "C..." et que monsieur D... de X... certifie, dans une attestation du 16 octobre 2002 répondant aux exigences de l'article 202 du nouveau code de procédure civile, que monsieur C... de X... et du Bousquet est le chef de la branche aînée et le président de l'association ; qu'il a donc qualité pour représenter l'association en justice ; Qu'en application de l'article 31 du nouveau code de procédure civile, une association peut ester en justice à la condition d'invoquer un préjudice certain, personnel et direct en rapport avec la spécificité de son objet ; Que l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT est une association familiale qui a essentiellement pour objet de maintenir entre les membres les règles de légitimité familiale, de resserrer les liens entre chacun d'entre eux, de promouvoir les recherches sur l'histoire de la maison et sa généalogie et d'en assurer la diffusion entre ses membres ; Que le fait qu'entre également dans son objet, l'initiation de toutes mesures et activités présentant un intérêt pour ses membres n'inclut pas l'autorisation d'agir en justice en cas d'utilisation prétendument fautive du nom de
"de X...", le droit au nom étant un droit de la personnalité, attaché par sa nature même à la personne qui le porte en sorte que seule celle-ci bénéficie d'une protection en cas d'atteinte ; Que c'est donc à juste titre que le tribunal a retenu que l'association ne justifiait pas d'un préjudice personnel et direct et l'a déclarée irrecevable à agir ; SUR L'ACTION ENGAGEE PAR MADAME DE X... Considérant que madame Z... de X..., pour triompher en son action qui tend à voir sanctionner l'utilisation de son nom à des fins artistiques, doit rapporter la triple démonstration d'un risque de confusion, d'un préjudice et d'une faute ; Que, même si le nom de "de X..." est exempt de banalité, il est cependant répandu, le seul annuaire téléphonique de la ville de Paris portant mention d'une vingtaine de personnes portant ce nom ; Qu'aucun rapprochement n'est possible entre le personnage de l'oeuvre de fiction qui est une femme âgée de trente-deux ans, n'a pas enfant, vit à Aix-en-Provence où elle exerce l'activité de décoratrice d'intérieur et demande le divorce aux torts de son mari, Hervé de X..., notaire, en raison de l'homosexualité de ce dernier, et madame Z... de X..., âgée de 45 ans lors de la diffusion de l'épisode, mère de deux enfants, sans profession, vivant à Paris, remariée avec monsieur A... après son divorce d'avec monsieur E..., portant son nom de femme mariée, ainsi qu'il ressort de l'annuaire téléphonique et de l'intitulé de son adresse électronique, même si elle avait elle aussi trente-deux ans lorsqu'elle a divorcé ; Que le personnage de l'oeuvre de fiction ne saurait entacher l'honorabilité de madame Z... de X..., ce personnage n'étant ni odieux, ni ridicule, ni désagréable, la circonstance qu'il ait supporté pendant sept ans l'homosexualité du mari ne pouvant rejaillir sur sa réputation et la ternir, même si en son for intérieur elle considère une telle attitude désobligeante, l'homosexualité, compte tenu de l'évolution
de la société, ne suscitant plus l'opprobre ; Qu'aucune faute n'a été commise dans le choix du nom de "de X...", même rapproché du prénom d'Isabelle, n'étant nullement établi que ce choix procédait d'une intention délibérée de faire usage d'un nom que le scénariste savait appartenir à un tiers ; Que c'est donc à juste titre que le tribunal a débouté madame Z... de X... de ses demandes ; Que le droit d'agir en justice est une prérogative légalement reconnue et que la société PEGASUS Télévision ne démontre pas qu'en exerçant cette prérogative d'abord devant le tribunal, puis devant la cour, l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT et madame Z... de X... ont commis un abus ; que sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ne peut donc prospérer ; Qu'en indemnisation des frais de procédure non compris dans les dépens exposés en cause d'appel, il convient d'allouer à la société TF1 et à la société PEGASUS Télévision une somme de 1 500 chacune ;F1 et à la société PEGASUS Télévision une somme de 1 500 chacune ; PAR CES MOTIFS LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, CONFIRME le jugement déféré, ET Y AJOUTANT, CONDAMNE in solidum l'association Maison de ROQUEFEUIL-BLANQUEFORT et madame Z... de X... épouse A... à payer : - 1500 à la société TF 1, - 1500 à la société PEGASUS Télévision ; LES CONDAMNE également in solidum aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS-BOCCON-GIBOD, société titulaire d'un office d'avoué, et par maître BINOCHE, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Francine BARDY, Président, et signé par Madame Francine BARDY, Président et par Madame Sylvie B..., Greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER,
Le PRESIDENT,