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09/09/2004 | FRANCE | N°2003-07101

France | France, Cour d'appel de Versailles, 09 septembre 2004, 2003-07101


COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 64B 0A 1ère chambre 1ère section ARRET Nä CONTRADICTOIRE DU 09 SEPTEMBRE 2004 R.G. Nä 03/07101 AFFAIRE : Thierry X... C/ HACHETTE FILIPACCHI ASSOCIES Décision déférée à la cour : d'un jugement rendu rendu le 01 Octobre 2003 par le Tribunal de Grande Instance NANTERRE Nä de chambre : 1ère A RG nä : 02/09396 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP TUSET SCP LEFEVRE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affai

re entre : APPELANT Monsieur Thierry Marie Didier X... né le 18 Ma...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES Code nac : 64B 0A 1ère chambre 1ère section ARRET Nä CONTRADICTOIRE DU 09 SEPTEMBRE 2004 R.G. Nä 03/07101 AFFAIRE : Thierry X... C/ HACHETTE FILIPACCHI ASSOCIES Décision déférée à la cour : d'un jugement rendu rendu le 01 Octobre 2003 par le Tribunal de Grande Instance NANTERRE Nä de chambre : 1ère A RG nä : 02/09396 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : SCP TUSET SCP LEFEVRE REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : APPELANT Monsieur Thierry Marie Didier X... né le 18 Mai 1957 à TALENCE (33) demeurant 8 rue Auguste Blanqui - 93200 ST DENIS représenté par la SCP TUSET-CHOUTEAU Avoués assisté de Me Bernard JOUANNEAU, avocat au barreau de PARIS INTIMEES SOCIETE HACHETTE FILIPACCHI ASSOCIES société en nom collectif ayant son siège 149 Rue Anatole France - 92300 LEVALLOIS PERRET prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Madame Anne-Marie Y... directeur de publication du magazine PARIS MATCH demeurant 149 Rue Anatole France - 92300 LEVALLOIS PERRET représentées par la SCP LEFEVRE TARDY etamp; HONGRE BOYELDIEU Avoués assistées de Me Marie-Christine DE PERCIN, avocat au barreau de PARIS Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Juin 2004 devant la cour composée de : Madame Francine BARDY, Président, Madame Lysiane LIAUZUN, Conseiller, Madame Françoise SIMONNOT, Conseiller, qui en ont délibéré, Greffier, lors des débats : Madame Sylvie Z... LA PRESENTE CAUSE A ETE COMMUNIQUEE AU MINISTERE A.... 5Monsieur Thierry X... a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nanterre par acte en date du 5 juillet 2002 la SNC HACHETTE FILIPACCHI ASSOCIES, éditrice du magazine Paris Match et madame Anne Marie Y... directrice de publication sur le fondement de l'article 29 alinéa 1

et 32 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881 aux fins d'entendre dire et juger que l'article paru dans le numéro daté du 11 avril 2002 est constitutif d'une diffamation à son égard à raison des propos attentatoires à son honneur et sa considération et de condamnation des défendeurs à lui payer la somme de 15000 de dommages et intérêts , ordonner une mesure de publication judiciaire. Par le jugement déféré prononcé contradictoirement le 1er octobre 2003, le tribunal de grande instance de Nanterre a déclaré irrecevable la demande comme prescrite et a débouté du surplus des demandes. Aux termes de ses dernières écritures en date du 25 mai 2004 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, monsieur Thierry X... qui a interjeté appel du jugement le 13 octobre 2003 conclut à l'infirmation du jugement et prie la cour, statuant à nouveau, de déclarer son action recevable, de dire que l'article pour les passages expressément visés dans son assignation et ses conclusions est attentatoire à son honneur et sa considération et constitutif d'une diffamation publique envers lui, de condamner les intimés à réparer le préjudice causé par le versement de la somme de 15000 de dommages et intérêts et d'ordonner une mesure de publication judiciaire à titre de réparation complémentaire, de débouter les intimés de leurs demandes et les condamner in solidum à lui payer la somme de 3000 sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Aux termes de leurs dernières écritures en date du 19 mars 2004 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, les intimés concluent au constat de la prescription de l'action, subsidiairement au fond, au débouté de l'appelant, plus subsidiairement qu'il soit dit que la vérité des faits est rapportée, encore plus subsidiairement que la preuve de leur bonne foi est rapportée, en tout état de cause, de condamner l'appelant à leur payer la somme de 10000 de dommages et intérêts et celle de 6000

au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Le ministère public a visé la procédure. SUR CE I : SUR L'EXCEPTION DE PRESCRIPTION DE L'ACTION Considérant que les premiers juges ont déclaré l'action prescrite comme tardive pour avoir été engagée plus de trois mois depuis la date de parution du magazine contenant l'article incriminé, soit le 4 avril 2002, estimant que la date de publication du 11 avril 2002 ne saurait être retenue comme point de départ du délai de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 . Mais considérant qu'en matière de délit de presse pénal comme civil, lorsque l'écrit est inséré dans un journal périodique portant la date précise de sa publication, cette date sauf erreur ou fraude, non invoqués en l'espèce, doit être tenue à l'égard de la personne visée comme étant celle de la commission du délit, qu'elle constitue à l'exclusion de la date réelle de mis en vente antérieure à la date de publication mentionnée sur le journal ,comme dans le cas d'espèce selon l'usage commercial de la société HACHETTE FILIPACCHI ASSOCIES, le point de départ de la prescription prévue à l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, étant relevé que la société HACHETTE FILIPACCHI ASSOCIES a d'ailleurs renoncé à la pratique d'une mise en vente antérieurement à la date de publication, ainsi que soutenu par l'appelant non démenti sur ce point . Que dès lors l'assignation délivrée le 5 juillet 2002 l'a été dans le délai de prescription qui courrait depuis le 11 avril 2002, que l'action n'est pas prescrite, la prescription ayant été depuis régulièrement interrompue , ce qui n'est pas contesté. Que le jugement sera en conséquence infirmé ; II : SUR LE FOND : Considérant que Thierry X... est l'auteur de deux ouvrages respectivement intitulés "l'effroyable imposture" et "le pentagate", consacrés aux attentats survenus le 11 septembre aux Etats-Unis ; Considérant que le magazine Paris Match daté du 11 avril 2002 a publié en pages 108 à 111 un article intitulé "Pentagone La

Rumeur Pulvérisée" comportant un commentaire en forme d'enquête sous la signature de Saveria ROJEK ; Considérant que l'article a vocation à réfuter la thèse soutenue par Thierry X... dans ses ouvrages, et notamment le fait qu'aucun avion ne se serait écrasé sur le pentagone le 11 septembre 2001 ; Considérant que Thierry X... vise dans son assignation plus particulièrement certains passages ainsi rapportés : "Thierry X... n'est même pas un piètre enquêteur puisqu'il n'a pas enquêté du tout et que son livre n'est qu'un tissu d'approximations, de mensonges et de semi vérités ", "dans le cas de l'avion du Pentagone, il n'a plus qu'un choix : persister dans le honteux ou s'excuser et se faire oublier dans le ridicule ", "Thierry X... : l'effroyable imposteur ", "le seul à se frotter les mains est Patrick PAIN, patron des éditions Carnot. Il tient enfin un best-seller avec " l'effroyable imposture ". Un ouvrage qui porte bien son nom " ; Considérant que ces propos portent indiscutablement atteinte à l'honneur et à la considération professionnelle de Thierry X... qui est présenté dans l'article comme un imposteur, auteur d'une thèse défendue sans véritable enquête préalable, reposant sur le mensonge et des vérités tronquées, qu'ils sont constitutifs d'une diffamation publique au sens de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ; Considérant que la société HACHETTE FILIPACHI ASSOCIES et madame Y... ne sont plus recevables à faire la preuve de la vérité des faits incriminés, faute d'avoir dénoncé dans le délai et les formes de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 une offre de preuve de la vérité des faits argués de diffamatoires ; Considérant que la société HACHETTE FILIPACCHI ASSOCIES et madame Y... sont recevables à solliciter le bénéfice de la bonne foi ; Considérant qu'il incombe aux intimés pour échapper à leur responsabilité d'établir positivement leur bonne foi ; Considérant d'une part que la thèse éminemment polémique défendue par Thierry X... dans son

ouvrage consacré à des événements dramatiques très présents à l'époque dans la mémoire collective appelait dans le libre exercice du droit à l'information et la liberté d'expression une réponse proportionnée à l'émotion suscitée par la thèse audacieuse défendue par Thierry X..., de la part d'un magazine d'actualité comme Paris Match ; Considérant d'autre part que l'article s'appuyant sur les déclarations de témoins visuels du drame, simples particuliers ou professionnels des médias, s'attache à réfuter point par point la thèse querellée, témoignages dont la fiabilité ne saurait être remise en cause par la contestation et la réfutation que l'appelant en fait ou en a fait dans son second ouvrage "le pentagate", que l'article est en outre illustré d'une photographique montrant les débris d'une carlingue d'avion écrasée devant le bâtiment du Pentagone, qui renforce d'autant le sérieux du reportage et la volonté de rétablir la véracité des faits face à la thèse de Thierry X... ; Considérant que dans un tel contexte, le ton polémique et le choix des mots "imposture" et "imposteur", réplique volontaire au mot d'imposture employé par l'appelant dans son ouvrage pour contester la véracité de l'écrasement d'un avion sur le bâtiment du pentagone causant des centaines de morts, ne dépassent pas le seuil de prudence et d'objectivité dont doit faire preuve tout journaliste ; Considérant que les intimés sont dès lors fondés à invoquer le bénéfice de la bonne foi qui doit leur être reconnu ; Considérant qu'il convient en conséquence de débouter Thierry X... de ses demandes ; Considérant qu'eu égard aux situations respectives des parties, aucun motif tiré de l'équité commande l'application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties ; Considérant que l'appelant qui succombe dans ses prétentions, doit supporter la charge des entiers dépens ; PAR CES MOTIFS LA COUR, statuant publiquement, par

arrêt contradictoire et en dernier ressort, REOEOIT l'appel, INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, STATUANT À NOUVEAU, DÉCLARE l'action recevable comme non prescrite, ACCORDE aux intimés le bénéfice de la bonne foi, EN CONSÉQUENCE, DÉBOUTE Thierry X... de ses demandes, DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, CONDAMNE l'appelant aux entiers dépens de première instance et d'appel avec faculté de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Francine BARDY, Président, et signé par Madame Francine BARDY, Président et par Madame Sylvie Z..., Greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2003-07101
Date de la décision : 09/09/2004

Analyses

PRESSE - Procédure - Prescription - Point de départ - Publication périodique - Date précisée dans la publication - /.

En matière de délit de presse pénal ou civil, s'agissant d'un écrit inséré dans un journal périodique portant la date précise de sa publication, le jour de commission du délit, constitutif du point de départ de la prescription prévue par l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, est réputé être, sauf erreur ou fraude, celui de la date de publication à l'exclusion de la date réelle de mise en vente

PRESSE - Abus de la liberté d'expression - Bonne foi - Prudence dans l'expression de la pensée.

Des propos tels que "X n'est même pas un piètre enquêteur puisqu'il n'a pas enquêté du tout et que son livre n'est qu'un tissu d'approximations, de mensonges et de semi vérités", "X : l'effroyable imposteur", "le seul à se frotter les mains est .., patron des éditions . Il tient enfin un best-seller avec "l'effroyable imposture". Un ouvrage qui porte bien son nom. " constituent, au sens de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, une diffamation publique engageant la responsabilité de leur auteur, sauf preuve positive de sa bonne foi. Le bénéfice de la bonne foi doit être reconnu aux auteurs qui établissent que le ton polémique et le choix des mots "imposture et imposteur", en écho au titre d'un ouvrage éminemment polémique contestant la véracité de l'écrasement d'un avion sur le bâtiment du pentagone y causant des centaines de mort, ne dépassent pas le seuil de prudence et d'objectivité dont doit faire preuve tout journaliste, alors que la remise en cause pour partie d'événements dramatiques très présents à l'époque dans la mémoire collective, appelait dans le cadre du libre exercice du droit à l'information et de la liberté d'expression une réponse proportionnée à l'émotion suscitée et que l'article incriminé tendait par ses témoignages et illustration à rétablir la véracité des faits


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-09-09;2003.07101 ?
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