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27/04/2004 | FRANCE | N°2004-00394

France | France, Cour d'appel de Versailles, 27 avril 2004, 2004-00394


TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE REFERE

27 Avril 2004 DOSSIER Nä: 04/00394 AFFAIRE : Tarik X... C/ M. LE PROCUREUR DE LA Y..., M. L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR DEMANDEUR Monsieur Tarik X... né le 22 Mars 1972 à MEKLA (ALGERIE), de nationalité française, demeurant Chez Mme Z... - 11, rue Jacques Decour - 78210 SAINT CYR L'ECOLE ; représenté par Me Fadila BARKAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 463 DEFENDEURS Monsieur le Procureur de la Y... Tribunal de Grande Instance - 3 avenue de l'Europe - 78000 VERSAILLES ; représenté par M. de CHANV

ILLE, Vice-Procureur de la Y... près le Tribunal de Grande Instance ...

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE REFERE

27 Avril 2004 DOSSIER Nä: 04/00394 AFFAIRE : Tarik X... C/ M. LE PROCUREUR DE LA Y..., M. L'AGENT JUDICIAIRE DU TRESOR DEMANDEUR Monsieur Tarik X... né le 22 Mars 1972 à MEKLA (ALGERIE), de nationalité française, demeurant Chez Mme Z... - 11, rue Jacques Decour - 78210 SAINT CYR L'ECOLE ; représenté par Me Fadila BARKAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire 463 DEFENDEURS Monsieur le Procureur de la Y... Tribunal de Grande Instance - 3 avenue de l'Europe - 78000 VERSAILLES ; représenté par M. de CHANVILLE, Vice-Procureur de la Y... près le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor Ministère de l'Economie et des Finances, Direction des Affaire Juridiques, Sous-Direction du droit privé, 207 rue de Bercy - 75572 - PARIS CEDEX 12 ci-devant et actuellement 6, rue Louise Weiss - 75013 - PARIS, prise en la personne de son représentant légal, domicilié ès-qualité audit siège ; représenté par la SCP BILLON BUSSY-RENAULD et Associés, avocats au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 241 Débats tenus à l'audience du : 06 Avril 2004 Nous, Marc JANIN, Vice-Président, assisté de Régine GREF, Greffier ; 5Après avoir entendu Me BARKAT, pour Monsieur Tarik X..., Monsieur de CHANVILLE, Vice-Procureur de la Y..., la SCP BILLON BUSSY-RENAULD et Associés, pour Monsieur l'Agent Judiciaire du Trésor, l'affaire a été mise en délibéré au 27 avril 2004, date à laquelle l'ordonnance suivante a été rendue ; Par assignations délivrées au Procureur de la Y... près le tribunal de grande instance de Versailles et à l'Agent judiciaire du Trésor le 4 février 2004, puis par dernières conclusions, Tarik X... sollicite du juge des référés de: - en référé et subsidiairement au fond, constater qu'il a de naissance la

nationalité française et ordonner l'établissement, dans les quinze jours de la signification de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte définitive de 200,00 par jour de retard et par document, du certificat de nationalité et de l'acte de naissance français de l'intéressé, - en référé, condamner l'Etat à provision sur dommages-intérêts, tous chefs de préjudice confondus, de 3.000,00 avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, ainsi qu'à la somme de 1.000,00 en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, et dire et juger que l'ensemble des condamnations pécuniaires devra être exécuté dans un délai de trente jours à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir et sous astreinte définitive de 200,00 par jour de retard passé ce délai,- au fond, renvoyer l'affaire devant le tribunal par application des dispositions de l'article 811 du Nouveau code de procédure civile, condamner l'Etat à la somme globale, sauf à parfaire, de 14.880,80 à titre de dommages-intérêts, tous chefs de préjudice confondus, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soustraction faite de la provision ordonnée le cas échéant, ainsi qu'à la somme de 1.500,00 en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, et dire et juger que l'ensemble des condamnations pécuniaires devra être exécuté dans un délai de trente jours à compter de la signification du jugement à intervenir et sous astreinte définitive de 200,00 par jour de retard passé ce délai, ordonner l'exécution provisoire, et condamner l'Etat aux entiers dépens. Tarik X... expose et fait valoir pour l'essentiel qu'il est le fils de Baya REKKAS, elle-même de nationalité française par filiation, ses propres parents ayant accédé à la nationalité française par jugement du tribunal d'instance de Tizi-Ouzou en date du 28 mai 1930; que cependant, malgré de multiples demandes, auprès du consulat de France à Alger comme du

ministère de la Justice, restées sans réponse, puis du greffe du tribunal d'instance de Versailles en date du 7 mars 2002 et du greffe du tribunal d'instance d'Ivry-sur-Seine en date du 8 octobre 2002 en suite de son changement de domicile, il n'a jamais pu obtenir la délivrance d'un certificat de nationalité, alors que ses frères et soeurs ont quant à eux reçu les documents en ce sens sans difficulté; qu'il est sans contestation possible, par application des dispositions des articles 18 et suivants du Code civil, français, ce à quoi l'administration n'est en mesure d'apporter aucune contradiction sérieuse; que les erreurs purement matérielles affectant les décisions de justice algériennes qu'il produit ne sauraient affecter son droit à la nationalité française; que la preuve de la possession d'état qu'on lui réclame n'est nullement exigée par l'article 30-1 du Code civil au cas de nationalité acquise par naturalisation comme en l'espèce; qu'il existe ainsi depuis plus de deux ans une situation de trouble manifestement illicite cause pour lui d'un préjudice matériel, économique et moral résultant d'une faute lourde de l'administration par manquement à son obligation légale de répondre, sur l'indemnisation duquel il est fondé à obtenir une provision. Le Procureur de la Y... a conclu pour voir constater que le récépissé prévu à l'article 1043 du Nouveau code de procédure civile a été délivré, que le juge des référés est incompétent au profit du juge du fond, et voir débouter Tarik X... de toutes ses fins, demandes et conclusions. Il fait valoir que la demande formée par Tarik X... tend à voir reconnaître à celui-ci la nationalité française, et non à voir ordonner l'une des mesures ou la provision que l'article 809 du Nouveau code de procédure civile, invoqué par le demandeur, permet au juge des référés de prescrire; qu'aucune urgence n'est démontrée, et qu'il y a contestation sérieuse sur l'existence d'un droit sur laquelle le juge des référés ne

saurait prendre parti, eu égard en particulier aux incohérences affectant les différentes copies produites du jugement d'admission à la qualité de citoyen français du 28 mai 1930, alors d'autre part que le fait que Tarik X... ait présenté concomitamment deux demandes auprès de deux tribunaux d'instance différents en arguant de deux domiciles distincts en un temps où de nombreuses demandes sont présentées par des personnes originaires d'Algérie lors d'un court séjour en France, nécessitait un examen approfondi de sa demande.; qu'enfin, la faute lourde qui seule pourrait engager la responsabilité de l'Etat ne saurait être caractérisée en l'espèce, et en toute hypothèse relève de l'appréciation du seul juge du fond. L'Agent judiciaire du Trésor a conclu pour voir dire que la loi du 12 avril 2000 n'est pas applicable au cas de l'espèce, dire et juger qu'il n'appartient pas au juge de l'ordre judiciaire de donner des injonctions à l'administration, qu'il existe en la cause une difficulté sérieuse échappant à l'appréciation du juge des référés, voir dire ce juge incompétent au profit du juge du fond et renvoyer Tarik X... à mieux se pourvoir, enfin voir condamner celui-ci aux dépens qui pourront être recouvrés directement par son conseil selon les modalités prévues à l'article 699 du même code. Il soutient que, si l'on ne peut opposer à Tarik X... la prescription prévue à l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 dans la mesure où la demande de celui-ci constitue non un recours contre une décision implicite de rejet mais une action en réparation de dommages en application des dispositions de l'article L 781-1 du Code de l'organisation judiciaire, il demeure que la prétention à voir ordonner la délivrance d'un certificat de nationalité, qui ne peut être assise sur la constatation d'aucune voie de fait, se heurte en principe aux prescriptions de l'article 13 de la loi des 16/24 août 1790 séparant les fonctions judiciaires des fonctions administratives; que le

tribunal de grande instance est seul compétent pour connaître des contestations sur la nationalité des personnes physiques; que non seulement Tarik X... ne justifie d'aucune urgence, mais encore sa demande se heurte à une contestation sérieuse puisque sa nationalité française n'est pas établie, aucun jugement d'admission à la qualité de citoyen français n'étant produit aux noms exacts de ses parents; qu'au regard de la complexité de sa situation, aggravée par son propre fait puisqu'il a saisi deux juridictions différentes dans le même temps, il ne saurait faire valoir l'existence d'un trouble manifestement illicite dans les délais d'instruction de son dossier. SUR QUOI: Tarik X... a saisi le président du tribunal de grande instance statuant en référé de diverses demandes, dont certaines "au fond" à titre subsidiaire ou principal. Il sera rappelé à cet égard et en préalable que le juge des référés ne peut dire le droit ou trancher le fond du litige. Il résulte des articles 808 et 809 du Nouveau code de procédure civile que le président du tribunal de grande instance peut: - en cas d'urgence, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend, - dans tous les cas, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite, - enfin, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier. Le constat qu'il a de naissance la nationalité française auquel Tarik X... prétend, ce qui constitue à l'évidence le principal de sa demande, ne peut s'analyser en l'une des mesures que le juge des référés peut ainsi ordonner ou prescrire; et la prétention à voir ordonner à l'administration l'établissement d'un certificat de nationalité et un acte de naissance français, à supposer qu'elle ne

se heurte pas au principe de la séparation des pouvoirs, se rattache directement à un tel constat. D'autre part, l'appréciation de la faute susceptible d'avoir été commise par l'administration dans les délais de traitement des demandes de Tarik X... incombe exclusivement au juge du fond, et ce n'est que dans le cas où Tarik X... établirait que le préjudice qu'il invoque provient d'un trouble manifestement illicite ou que la créance d'indemnisation dont il se prévaut n'est pas sérieusement contestable, que le juge des référés pourrait lui allouer une provision. Or, ainsi que le relèvent le Procureur de la Y... et L'Agent judiciaire du Trésor, les incohérences entre les diverses versions produites du jugement du tribunal d'instance de Tizi-Ouzou en date du 28 mai 1930, au fondement duquel Tarik X... se revendique de nationalité française, incohérences qui ne relèvent pas seulement d'erreurs formelles puisqu'elles concernent notamment la portée de la décision quant à sa transcription à l'état civil, sont telles qu'il ne saurait être considéré que les délais d'instruction par l'administration constituent un trouble manifestement illicite, ni que les conditions de l'engagement de la responsabilité de l'Etat à l'égard de Tarik X... à raison du fonctionnement défectueux du service de la justice et lui ouvrant droit à réparation sont incontestablement réunies. Seul le juge du fond peut connaître de l'ensemble des demandes formées par Tarik X... L'urgence requise par l'article 811 du Nouveau code de procédure civile pour le renvoi par le juge des référés devant la juridiction du fond n'est justifiée par aucune pièce, étant observé qu'il n'est pas même établi que Tarik X... demeure à ce jour en France, ni, si tel est le cas, en quel endroit. Les demandes de Tarik X..., y compris celle fondée sur l'article 700 du Nouveau code de procédure civile, seront, en référé, rejetées, et celui-ci renvoyé à se pourvoir au fond comme il appartiendra.

Enfin, il convient de condamner Tarik X... aux dépens, dont distraction au conseil de l'Agent judiciaire du Trésor. PAR CES MOTIFS: Statuant en référé, publiquement, par ordonnance contradictoire, en premier ressort: Déboutons Tarik X... de l'ensemble de ses demandes, et le renvoyons à se pourvoir au fond comme il appartiendra; Condamnons Tarik X... aux dépens de l'instance, et disons que la SCP BILLON - BUSSY-RENAULD et Associés pourra recouvrer directement contre lui ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision. AINSI PRONONCE EN AUDIENCE PUBLIQUE DES REFERES LE VINGT SEPT AVRIL DEUX MILLE QUATRE ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2004-00394
Date de la décision : 27/04/2004

Analyses

REFERE - Compétence

Le juge des référés, qui n'est pas compétent pour juger le droit ou trancher le fond, ne peut ordonner à l'administration l'établissement d'un certificat de nationalité française et un acte de naissance français, dès lors que la constatation de la nationalité française d'une personne du fait de sa naissance ne peut s'analyser comme l'une des mesures que le juge des référés peut ordonner ou prescrire en application des articles 808 ou 809 du Nouveau code de procédure civile


Références :

Nouveau code de procédure civile, articles 808 et 809

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-04-27;2004.00394 ?
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