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08/04/2004 | FRANCE | N°2002-06107

France | France, Cour d'appel de Versailles, 08 avril 2004, 2002-06107


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 D.C./P.G. ARRET Nä Code nac : 59B contradictoire DU 08 AVRIL 2004 R.G. Nä 02/06107 AFFAIRE : S.A. COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE "INGENICO" C/ CIT GROUP (N.F.L) LIMITED anciennement dénommée Société NEWCOURT FINANCIAL LIMITED Décision déférée à la cour : d'un jugement rendu rendu le 21 Juin 2002 par le Tribunal de Commerce NANTERRE Nä de chambre : 5ème chambre RG nä : 2001F02456-01F2915 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à : représentée par la SCP BOMMART MINAULT représentée par la SC

P GAS E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE HUIT AVRIL ...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 D.C./P.G. ARRET Nä Code nac : 59B contradictoire DU 08 AVRIL 2004 R.G. Nä 02/06107 AFFAIRE : S.A. COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE "INGENICO" C/ CIT GROUP (N.F.L) LIMITED anciennement dénommée Société NEWCOURT FINANCIAL LIMITED Décision déférée à la cour : d'un jugement rendu rendu le 21 Juin 2002 par le Tribunal de Commerce NANTERRE Nä de chambre : 5ème chambre RG nä : 2001F02456-01F2915 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à : représentée par la SCP BOMMART MINAULT représentée par la SCP GAS E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE HUIT AVRIL DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

APPELANTE S.A. COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE "INGENICO" ayant son siège ..., prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par la SCP BOMMART MINAULT, avoués. assistée de Me Stéphane X..., avocat au barreau de PARIS (R.110). ** ** ** ** ** ** ** ** INTIMEE CIT GROUP (N.F.L) LIMITED anciennement dénommée Société NEWCOURT FINANCIAL LIMITED ayant son siège 66 buckingham Gate Y... SWIE, 6 AU, ANGLETERRE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par la SCP GAS, avoués. assistée de la SCP PIGOT, SEGOND ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS. ** ** ** ** ** ** ** ** Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Février 2004 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Denis COUPIN, conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de : Madame Françoise LAPORTE, Président, Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse GENISSEL,

FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES 5Le 29 juin 1998, la COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE, dite INGENICO, a émis au profit de la société de droit anglais ATetamp;T CAPITAL LIMITED, ultérieurement dénommée NEWCOURT FINANCIAL LIMITED et aujourd'hui CIT GROUP (NFL) LIMITED, une garantie à première demande à concurrence des montants de 252.383,83 US $ au 1er juillet 2000 et 252.383,83 US $ au 1er juillet 2001, d'une durée de validité venant à échéance le 1er novembre 2001. NEWCOURT FINANCIAL LIMITED a adressé le 17 mai 2001 à INGENICO une déclaration de mise en jeu de la garantie pour une somme de 252.383,83 US $ qui n'a pas été réglée. C'est dans ces conditions qu'elle a assigné la société INGENICO devant le tribunal de commerce de Nanterre pour obtenir le règlement de cette somme avec intérêts à compter du 30 mai 2001 ainsi que 50.000 francs (7.622,45 euros) pour ses frais irrépétibles. En cours de procédure elle a augmenté sa demande principale de la deuxième fraction de la garantie, soit 252.383,83 US $ avec intérêts à compter du 04 octobre 2001. Ecartant les arguments soulevés par la société INGENICO pour se soustraire à son engagement, cette juridiction a fait droit à la demande principale et alloué à NEWCOURT FINANCIAL LIMITED 2.200 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société INGENICO, qui a interjeté appel de cette décision, expose qu'elle fabrique et commercialise des terminaux de paiement, que pour financer l'acquisition de 1.000 de ces équipements un établissement bancaire russe JSC SBS AGRO BANK est entré en contact avec la société CIT GROUP qui lui a consenti un prêt le 29 juin 1998, jour de la signature de la garantie à première demande. Elle précise que le 15 juillet 1998, elle a vendu à la société IBS SYSTEM INTEGRATION, substituant SBS AGRO, les 1.000 terminaux pour 400.000 dollars qui ont été expédiés à Moscou courant juillet 1998 et dont elle n'a jamais reçu le règlement. Elle indique

que la société russe SBS AGRO est aujourd'hui en faillite et fait valoir que, faute d'avoir été déclarée, la créance de la société CIT GROUP est éteinte et que cette extinction constitue une exception inhérente à sa dette qu'elle peut valablement opposer à son créancier. Elle demande ainsi à la cour d'infirmer le jugement et de dire et juger la société CIT GROUP irrecevable en son action. Invoquant les dispositions de l'article 1131 du code civil elle soutient que son engagement est nul pour absence de cause en expliquant que sa garantie était accordée en vue de la vente des appareils à la société SBS, que cette acquisition est entrée dans le champ contractuel et a été érigée en condition de son engagement. Elle affirme que cette cause fait défaut puisque la vente n'a pas, en définitive, été conclue avec SBS. Elle fait à cet égard grief au jugement de n'avoir pas cherché à identifier de manière précise la cause de l'engagement du garant et réfute les objections de la société CIT GROUP. Elle rappelle que nul ne peut être son propre garant ce qui est le cas en l'espèce puisqu'elle est garante de la dette contractée par SBS à l'égard de la société CIT GROUP destinée à financer l'acquisition des terminaux et donc du paiement de la somme qui lui est due par SBS en vertu du contrat de vente. Elle en déduit que, si sa créance est éteinte, la garantie se trouve aussi nécessairement éteinte. Subsidiairement, elle affirme que la garantie consentie n'est pas autonome dès lors que l'engagement a pour objet la dette de SBS ou est nécessairement lié à celle-ci qui finançait l'achat des terminaux. Soulignant les termes de la garantie qui a pour seul objet la propre dette du débiteur principal SBS elle prétend que le défaut d'autonomie de l'objet fait obstacle à la qualification de garantie autonome. Elle observe que la société CIT GROUP ne rapporte pas la preuve que les "emprunteurs solidaires" mentionnés à l'engagement, lui devraient quelque somme que ce soit en

vertu du "Promissory note" du 29 juin 1998, que le contrat de prêt existe et que les fonds ont été virés à SBS. Elle relève la similarité des modalités de remboursement des prêts et de la mise en oeuvre de l'appel en garantie. Elle en déduit que la garantie doit être requalifiée en cautionnement. Elle expose que la garantie qu'elle a octroyée était subordonnée à l'affectation des fonds à l'acquisition des terminaux de paiement par SBS et tire de la constatation que cette condition ne s'est pas réalisée, la conséquence que son engagement s'est trouvé rétroactivement anéanti. Elle ajoute qu'en ne contrôlant pas la destination des fonds prêtés à SBS la société CIT GROUP a agi avec une légèreté certaine et a engagé sa responsabilité vis à vis d'elle et que le comportement de celle-ci s'apparente à une manouvre frauduleuse et à un abus manifeste dès lors que toute demande illégitime d'exécution par le bénéficiaire de la garantie constitue une fraude si celui-ci l'appelle en sachant que rien ne lui est dû ou lorsque les motifs invoqués reposent manifestement sur une contrevérité. A titre infiniment subsidiaire, elle fait valoir un comportement fautif de la société CIT GROUP qui n'a pas contrôlé la destination des fonds prêtés et réclame à cette dernière, à titre de dommages et intérêts la somme de 504.767,66 US $ sur le fondement de l'article 1382 du code civil. Elle demande à la société CIT GROUP 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société CIT GROUP réplique que la demande de la société INGENICO à une condamnation pour procédure frauduleuse et abus manifeste est nouvelle en cause d'appel et, partant, irrecevable en application de l'article 564 du nouveau code de procédure civile. Relativement à la fin de non recevoir tirée du défaut de déclaration de créance, elle fait observer que la faillite de SBS AGRO BANK relève d'un régime juridique étranger et en déduit que la société INGENICO ne peut se prévaloir des dispositions du

droit français. Elle ajoute que la garantie étant autonome et non un cautionnement, la déclaration de la créance est sans incidence, d'autant que la société INGENICO a renoncé à se prévaloir de toutes les exceptions. Elle fait subsidiairement remarquer qu'elle a fait enregistrer sa créance dans la faillite de SBS AGRO. Elle réfute la prétendue nullité de la garantie pour défaut de cause en faisant valoir que le contrat de vente entre SBS et la société INGENICO ne constitue pas la cause de la garantie qui ne fait aucune référence à cette soi-disant condition déterminante pas plus qu'au contrat de vente lui-même qui n'est jamais entré dans le champ contractuel de la garantie. Elle soutient que seul le contrat de prêt ayant donné lieu à l'émission de deux "promissory notes" peut constituer la cause de la garantie. Elle ajoute que la cause objective ne peut avoir d'incidence sur la validité ou l'efficacité de la garantie en raison du principe de l'inopposabilité des exceptions. Elle relève que la règle dont se prévaut la société INGENICO selon laquelle "nul ne peut être son propre garant" concerne le cautionnement. Elle en déduit que la société INGENICO ne peut en tirer argument préalablement à sa demande de requalification. Elle précise l'articulation de l'opération qui comportait trois engagements contractuels indépendants de sorte que la société INGENICO a la qualité de garant vis à vis d'elle et de créancier à l'égard de SBS. Elle discute point par point les arguments de la société INGENICO qui soutient à titre subsidiaire la demande de requalification de la garantie en cautionnement, en faisant valoir l'incontestable autonomie de la garantie qui fait référence à un paiement à première demande, qui a un caractère indépendant et qui emporte renonciation du garant à se prévaloir de toutes exceptions. Subsidiairement, si la garantie était requalifiée, elle souligne l'absence de toute obligation du prêteur au titre de l'affectation du prêt, comme de toute référence à une

telle clause dans la garantie en ajoutant, plus subsidiairement encore, que la société INGENICO n'apporte pas la preuve de la non-utilisation des fonds prêtés pour régler les équipements, objet du contrat de vente. Si la cour déclarait recevable la demande nouvelle fondée sur un prétendu appel abusif et frauduleux de la garantie, elle conclut néanmoins à son rejet en observant qu'aucun argument sérieux n'est développé à l'appui de cette prétention et en rappelant qu'il appartient au garant qui s'en prévaut d'apporter la preuve de la fraude comme de son caractère manifeste. Relativement à la demande subsidiaire de la société INGENICO en paiement de dommages et intérêts, elle rappelle le caractère totalement indépendant de la garantie par rapport au contrat de base en ajoutant qu'elle n'avait aucune obligation de suivre l'affectation du prêt. Elle en tire la conséquence qu'aucune faute délictuelle ne saurait lui être reprochée. Elle conclut ainsi à la confirmation du jugement entrepris en réclamant de surcroît la capitalisation des intérêts, la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et celle de 12.200 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 15 janvier 2004 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 24 février 2004. MOTIFS DE LA DECISION Considérant que, le 29 juin 1998, la société INGENICO a signé un acte intitulé "GARANTIE A PREMIERE DEMANDE" aux termes duquel elle déclarait "par les présentes, lesquelles constituent de notre part un engagement autonome au regard du Promissory note (ci-après le "Contrat") en date du 29/06/1998 conclu entre ATetamp;T Capital Limited (..), (ci-après le bénéficiaire), d'une part, Marshbrook Limited (...) et JSC SBS Agro Bank (..) (ci-après les "Emprunteurs Solidaires") d'autre part, nous engager inconditionnellement et irrévocablement au profit du Bénéficiaire à

lui payer, à première demande de sa part, formulée en une ou plusieurs fois toute(s) somme(s) due(s) par les Emprunteurs Solidaires et ce jusqu'à concurrence d'un montant total de $ US 504.767,66, soit $ US 252.383,83 au 1er juillet 2000 et $ US 252.383,83 au 1er juillet 2001, augmenté(s) des taxes en vigueur, et ce dans les conditions ci-après décrites." ; Considérant que, dans son engagement, la société INGENICO a ajouté : "Il est expressément entendu que nous nous interdisons par les présentes, comme une condition substantielle de notre engagement, de faire valoir pour nous soustraire à l'exécution inconditionnelle et immédiate de la présente Garantie (ou la retarder) et par conséquent au(x) paiement(s) qu'elle met à notre charge, aucune exception, ni objection, ni fin de non recevoir quelconques tirées de toutes relations juridiques et/ou d'affaires entre INGENICO et les Emprunteurs Solidaires ou tout autre tiers, en particulier en raison du Contrat, étant bien entendu que le manquement effectif ou non par les Emprunteurs Solidaires aux obligations leur étant assignées par ledit Contrat sera indifférent, en ce qui nous concerne, à nos obligations telles que résultant de la présente garantie." ; SUR L'IRRECEVABILITE DE LA PROCEDURE Considérant que cet engagement est explicitement stipulé autonome au regard du "promissory note", que les montants garantis et la durée de validité n'y apparaissent nullement en corrélation avec les conditions d'exécution du contrat de base ; Considérant que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont retenu que la garantie souscrite est autonome et que la société INGENICO ne peut se prévaloir de l'extinction supposée de la créance de la société CIT GROUP ; Considérant de surcroît que la "faillite" de la société de droit russe SBS AGRO BANK est soumise à la législation de ce pays ; que la société INGENICO ne produit aucun élément de nature à démontrer les obligations des créanciers dans ce

type de procédure, sous cette législation, ni la portée et la conséquence d'un manquement ; Considérant que la société CIT GROUP produit aux débats un certificat de l'agence moscovite pour la restructuration des organismes de crédit qui confirme que les deux lettres de change de 252.383,83 $ US correspondent aux références de celles inscrites dans les livres des créanciers de la SBS AGRO ; Que le moyen d'irrecevabilité de la procédure tirée du prétendu défaut de déclaration de créance sera en conséquence rejeté ; SUR LA NULLITE POUR DEFAUT DE CAUSE Considérant que pour soutenir que l'acquisition par SBS une certaine quantité de biens auprès d'elle est entrée dans le champ contractuel de la garantie et a été érigée par elle en condition de son engagement, la société INGENICO se prévaut d'une télécopie adressée par ATetamp;T Capital le 10 avril 1998 ; Mais considérant qu'outre la circonstance que ce document est rédigé en langues anglaise et russe et non accompagné de sa traduction, il semble, pour autant que la cour en ait compris le sens, constituer une proposition de prêt ayant pour objet de financer l'acquisition d'équipements INGENICO, sans autre précision ; qu'il vise une vente pour 495.000 dollars, montant différent de celui de 400.000 dollars porté au contrat de vente commerciale des 1000 terminaux ; que la validité de l'offre était de 30 jours, qu'il n'est ni allégué ni démontré qu'elle aurait été acceptée par SBS, de telle sorte qu'elle était caduque au 10 mai 1998 ; que l'opération commerciale décrite apparaît donc sans relation avec la garantie souscrite le 29 juin 1998 ; Considérant, en toute hypothèse, que la circonstance que le financement accordé par ATetamp;T aux "emprunteurs solidaires" aurait été destiné à l'acquisition de matériel IINGENICO n'a aucunement pour conséquence d'établir que la cause de la garantie serait constituée du contrat de vente de matériels par la société INGENICO à la société SBS ; Considérant que la cause de la garantie est exclusivement

constituée du financement accordé par ATetamp;T et, en aucune façon, de la vente commerciale que cette intervention financière pouvait faciliter ; Considérant que la société INGENICO n'est pas davantage fondée à soutenir que ce contrat de prêt n'existerait pas au motif que les "promissory notes" seraient datés du 24 juillet 1998 alors que son engagement a été souscrit le 29 juin précédent ; Considérant en effet que ces deux billets à ordre sont produits aux débats accompagnés de leur traduction ; qu'ils sont émis par la société MARSHBROOK LIMITED qui reconnaît la réception d'une somme suffisante en contrepartie et qui promet, sous l'aval de JSC SBS AGRO de payer à ATetamp;T Capital Limited les sommes de 252.383,83 dollars US à chacune des échéances des 24 juillet 2000 et 24 juillet 2001 ; Considérant que l'émission de ces billets à ordre confirme la réalité du financement accordé par ATetamp;T ; que la circonstance qu'ils ont été établis par les emprunteurs postérieurement à la garantie donnée au prêteur par la société INGENICO n'a aucunement pour effet de priver cette garantie de sa cause qui reste précisément l'opération de financement ; Qu'il suit de là que la société INGENICO ne peut qu'être déboutée de sa demande de nullité de sa garantie sur le fondement une absence de cause de son engagement ; SUR L'IMPOSSIBILITE POUR INGENICO D'ETRE SON PROPRE GARANT Considérant qu'aux termes de la garantie à première demande du 29 juin 1998, la société INGENICO a souscrit un engagement inconditionnel et irrévocable de payer les sommes convenues à ATetamp;T ; Considérant que cette dernière justifie par la production des deux billets à ordre que les sociétés MARSHBROOK LIMITED et JSC SBS AGRO se sont reconnues ses débitrices ; Considérant que la société INGENICO est bien garante de ces deux "emprunteurs solidaires" et aucunement d'elle-même au titre de l'opération commerciale de vente de matériel qu'elle a conclu, au demeurant, non pas avec la société SBS mais avec

une société chypriote IBS SYSTEM INTEGRATION ; Qu'il n'existe dès lors, en l'espèce, aucune confusion entre le garant et le garanti et que la société INGENICO n'est pas fondée à refuser sur ce fondement d'exécuter son engagement ; SUR LA DEMANDE DE REQUALIFICATION DE LA GARANTIE Considérant que c'est vainement que la société INGENICO tente de se soustraire à son engagement de garantie à première demande en prétendant le requalifier en cautionnement et opposer une extinction de son obligation en raison du non-respect par la société CIT GROUP de l'affectation du prêt ; Considérant en effet que, comme le relève à bon droit la société CIT GROUP, la formulation même de l'engagement démontre le caractère totalement indépendant que le signataire a entendu donner à sa garantie ; Considérant que, contrairement à ce que soutient la société INGENICO, le caractère autonome de son engagement n'est pas remis en cause par l'existence de l'objet de la garantie qui est le financement accordé par la société CIT GROUP à MARSHBROOK LIMITED et JSC SBS AGRO ; qu'elle ne peut sans se contredire à la fois soutenir que son engagement est nul pour défaut de cause et que la garantie n'est pas autonome de la cause de son engagement ; Considérant que l'obligation de garantie n'est pas dépendante de l'obligation principale de prêt mais causée par celle-ci ; Considérant qu'il convient de relever à titre surabondant que l'opération de prêt intervenue est matérialisée par l'émission de deux billets à ordre et que engagement de garantie ne fait aucune mention de l'affectation du prêt consenti ; SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES ET INTERETS POUR PROCEDURE FRAUDULEUSE ET ABUS MANIFESTE Considérant que le jugement relève que, dans ses écritures de première instance, la société INGENICO réclamait la condamnation de la société CIT GROUP à lui payer la somme de 504.767,66 US $ sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; Considérant dès lors que la même demande formulée en cause d'appel n'est pas nouvelle au

sens des dispositions de l'article 564 du nouveau code de procédure civile, que seuls les moyens développés à son appui le sont ; Qu'il suit de là que la société INGENICO doit être déclarée recevable en cette demande subsidiaire ; Considérant que la circonstance que l'engagement de garantie à première demande vise un "promissory note" en date du 29 juin 1998, alors que les deux billets à ordre effectivement émis par MARSHBROOK LIMITED sous l'aval de JSC SBS AGRO sont datés du 24 juillet suivant n'a aucunement pour effet de démontrer le caractère frauduleux ou seulement abusif du comportement de la société CIT GROUP ; Considérant que c'est de manière inexacte que la société INGENICO prétend que rien n'est dû à la société CIT GROUP alors que le directeur du département du règlement des dettes et créances de l'agence pour la restructuration des organismes de crédit atteste du contraire par lettre du 18 mars 2002 ; Considérant que la garantie à première demande ne mettait à la charge de la société CIT GROUP aucune obligation d'assurer le contrôle de l'affectation du prêt ; Considérant que la société INGENICO ne peut ainsi soutenir que le contrat de prêt n'existe pas dès lors que la société MARSHBROOK a reconnu la réception des sommes justifiant l'émission des billets à ordre ; qu'elle ne peut davantage prétendre que l'appel à sa garantie serait abusif comme formé en référence à un prêt consenti dans des termes différents de celui visé dans la lettre d'engagement ; Considérant en effet que la société INGENICO commet à cet égard une confusion entre la conclusion du contrat de prêt proprement dit, la mise en place du financement, et l'émission des instruments cambiaires qui en découlent ; qu'en l'espèce le prêt consenti est, comme le souligne la société INGENICO elle-même dans ses écritures, identique à ses propres engagements de garantie et conforme à ce à quoi elle s'est engagée ; Qu'il résulte de ce qui précède que le jugement entrepris doit recevoir confirmation en

toutes ses dispositions ; SUR LES AUTRES DEMANDES Considérant que rien ne s'oppose à la capitalisation des intérêts échus depuis au moins une année entière, dans les conditions de l'article 1154 du code civil, à compter du 28 avril 2003, jour de la demande ; Considérant que la société CIT GROUP ne démontre pas le caractère abusif du comportement de la société INGENICO, ni ne justifie du préjudice qu'elle allègue ; que sa demande de dommages et intérêts doit être rejetée ; Considérant en revanche qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge des frais qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel ; que la société INGENICO sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que l'équité ne commande pas d'allouer des sommes sur le fondement de ce même texte à la société INGENICO qui, succombant dans l'exercice de son recours, doit être condamnée aux dépens d'appel ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, REJETTE le moyen d'irrecevabilité de la procédure, soulevé par la COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE, tiré du prétendu défaut de déclaration de créance, DECLARE la COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE recevable mais mal fondée en sa demande de dommages et intérêts pour procédure frauduleuse et pour abus manifeste, l'en déboute, CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Y ajoutant, ORDONNE la capitalisation des intérêts, échus depuis au moins une année entière, dans les conditions de l'article 1154 du code civil, à compter du 28 avril 2003, CONDAMNE la COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE à payer à la société CIT GROUP (NFL) LIMITED la somme complémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au bénéfice de

la COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE, CONDAMNE la COMPAGNIE INDUSTRIELLE ET FINANCIERE D'INGENIERIE aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP Daniel et Benoît GAS, société titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, Président et par Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier présent lors du prononcé Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2002-06107
Date de la décision : 08/04/2004

Analyses

BANQUE - Garantie à première demande - Caractère - Caractère autonome - Portée

Une garantie à première demande stipulée inconditionnelle et irrévocable dont l'exécution a été expressément spécifiée indépendante de toutes relations juridiques ou d'affaires, revêt un caractère autonome par rapport aux contrats de vente et de prêt dans le contexte desquels elle est intervenue.Il s'ensuit que le garant ne peut prétendre se soustraire à son engagement en invoquant l'extinction de la créance du bénéficiaire de la garantie dès lors que celle-ci est inconditionnelle, qu'il ne peut davantage invoquer la nullité de son engagement pour défaut de cause, faute d'établir que le contrat commercial qu'il invoque aurait eu une relation directe avec la garantie offerte, laquelle a sa cause dans l'opération de financement bancaire, ou encore faire requalifier son engagement en cautionnement pour invoquer une exception d'inexécution tirée d'un manquement de la banque dans l'affectation du prêt


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-04-08;2002.06107 ?
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