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06/04/2004 | FRANCE | N°2003-03148

France | France, Cour d'appel de Versailles, 06 avril 2004, 2003-03148


X... D'APPEL DE VERSAILLES

PRUD'HOMMES

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6ème Chambre Sociale ARRET PRONONCE EN AUDIENCE PUBLIQUE PAR Monsieur François BALLOUHEY, Y..., ASSISTE DE Monsieur Z..., Greffier, LE SIX AVRIL DEUX MILLE QUATRE R É P U B L I Q U E F R A N OE A I S E AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS ------------------- ARRET Nä DU 06 Avril 2004 R.G. :

03/03148 DÉFENSE 2000 en la personne de son représentant légal C/ Monsieur Philippe A... Syndicat B... des Coursiers du 17ème en la personne de son représentant légal Appel d'un jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en dat

e du 04 Avril 2003 (section : Commerce) "départage" ARRET CONTRADICTOIRE INFIRMAT...

X... D'APPEL DE VERSAILLES

PRUD'HOMMES

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6ème Chambre Sociale ARRET PRONONCE EN AUDIENCE PUBLIQUE PAR Monsieur François BALLOUHEY, Y..., ASSISTE DE Monsieur Z..., Greffier, LE SIX AVRIL DEUX MILLE QUATRE R É P U B L I Q U E F R A N OE A I S E AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS ------------------- ARRET Nä DU 06 Avril 2004 R.G. :

03/03148 DÉFENSE 2000 en la personne de son représentant légal C/ Monsieur Philippe A... Syndicat B... des Coursiers du 17ème en la personne de son représentant légal Appel d'un jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 04 Avril 2003 (section : Commerce) "départage" ARRET CONTRADICTOIRE INFIRMATION PARTIELLE Notifié le :

Copie Copie exécutoire Délivrées le à M La X... d'appel de VERSAILLES, 6ème chambre, a rendu l'arrêt suivant, après que la cause a été débattue en audience publique du VINGT TROIS FÉVRIER DEUX MILLE QUATRE devant

Monsieur BALLOUHEY, Y..., Monsieur BOILEVIN, Conseiller, Monsieur POIROTTE, Conseiller, assistés de Monsieur Z..., Greffier, et que ces mêmes magistrats en ont délibéré conformément à la loi, dans l'affaire, entre : DÉFENSE 2000 en la personne de son représentant légal 8, square Léon Blum 92800 PUTEAUX Non comparante - Représentée par Me Marie-France GAUJOL-JOSEPH (avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T 03) APPELANTE ET : Monsieur Philippe A... 20, avenue Rapp 75007 PARIS Non comparant - Représenté par M. Laurent C... (Délégué syndical ouvrier) INTIMÉE Syndicat B... des Coursiers du 17ème en la personne de son représentant légal 3, rue Trabé 75017 PARIS Non comparant - Représenté par M. Laurent C... (Délégué syndical ouvrier) PARTIE INTERVENANTE *** Lors des débats la X... a entendu Monsieur BALLOUHEY, Y..., en son rapport, les

conseils des parties en leurs explications. L'affaire a ensuite été mise en délibéré et les parties ont été avisées que l'arrêt serait rendu le SIX AVRIL DEUX MILLE QUATRE. *** FAITS, PROCÉDURE, DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES 5 Par jugement du 4 avril 2003, le conseil de prud'hommes de Nanterre, section commerce, statuant en formation de départage sur les demandes présentées par Monsieur Philippe A... à l'encontre de la société DEFENSE 2000 tendant au paiement d'un rappel de salaires, des congés payés afférents, d'un rappel sur indemnité de repas unique, de dommages et intérêts pour non respect des dispositions conventionnelles et d'une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; sur les demandes présentées à l'encontre de la société DEFENSE 2000 par l'Union Locale de Paris 17ä du Syndicat CGT des Coursiers et Personnel des Sociétés de Transport Léger, intervenante volontaire à l'instance, tendant au paiement de dommages et intérêts pour atteinte à l'intérêt collectif de la profession et d'une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; et sur la demande reconventionnelle présentée par la société DEFENSE 2000 tendant à la condamnation de Monsieur A... au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, a :

Condamné la société DEFENSE 2000 à payer à Monsieur A... les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter du 5 juillet 2001 : - A titre de rappel de salaires : 6 375,49 - A titre de congés payés sur rappel de salaires : 637,54 - A titre de rappel sur indemnité de repas unique conventionnelle : 2 268,71 Condamné la société DEFENSE 2000 à payer à Monsieur A... à titre de dommages et intérêts pour non respect des dispositions conventionnelles : 500 , avec intérêts au taux légal à compter du jugement ; Condamné la société DEFENSE 2000 à payer à l'Union Locale CGT, à titre de dommages et intérêts pour non respect des dispositions conventionnelles : 500 ; Ordonné

l'exécution provisoire ; Condamné la société DEFENSE 2000 à payer à Monsieur A..., au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : 400 ; Condamné la société DEFENSE 2000 à payer à l'Union Locale CGT, au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile : 100 ; Rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties. La société DEFENSE 2000 a régulièrement interjeté appel de ce jugement. Monsieur A... a été engagé par la société DEFENSE 2000, en qualité de coursier, par contrat de travail verbal à durée indéterminée du 4 août 1997 soumis à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport. Par lettre du 21 mars 2000, il a démissionné de son emploi et a quitté l'entreprise le 31 mars 2000. Estimant ne pas avoir été rempli de ses droits lors de l'exécution de son contrat de travail, il a saisi le conseil de prud'hommes. L'Union Locale de Paris 17ä du Syndicat CGT des Coursiers et Personnel des Sociétés de Transport Léger est intervenue volontairement à l'instance. Devant la X..., par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier à l'audience, la société DEFENSE 2000 conclut : A l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions ; A ce qu'il soit jugé que la rémunération variable versée à Monsieur A... à titre d'usage n'est pas contraire aux dispositions de l'article 14 de la convention collective ; Pour le cas où la X... jugerait cette rémunération variable illicite, à sa nullité et à la restitution, par Monsieur A..., d'une somme de 22 043 , montant des primes qu'il a perçues ; A ce qu'il soit jugé que Monsieur A... a été rempli de ses droits au titre de l'indemnité de repas unique ; Au débouté de toutes les autres demandes présentées par Monsieur A... ; A titre subsidiaire à la réformation du jugement sur le point de départ des intérêts assortissant le rappel de salaires ; A la condamnation de Monsieur A... au paiement d'une somme de 1 000 au titre de

l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier à l'audience, Monsieur A... conclut : A la confirmation du jugement en toutes ses dispositions ; A la condamnation de la société DEFENSE 2000 au paiement d'une somme de 1 000 au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Par conclusions écrites, déposées et visées par le greffier à l'audience, l'Union Locale de Paris 17ä du Syndicat CGT des Coursiers et Personnel des Sociétés de Transport Léger conclut : A la confirmation du jugement en toutes ses dispositions ; A la condamnation de la société DEFENSE 2000 au paiement d'une somme de 1 000 au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la X..., conformément aux dispositions de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'aux prétentions orales telles qu'elles sont rappelées ci-dessus. MOTIFS DE LA DÉCISION : - Sur la demande de rappel de salaires : L'article 14 de l'annexe 1 de la convention collective des transports routiers portant dispositions particulières aux ouvriers dispose : "Dans un but de sécurité, les contrats de travail ne pourront contenir de clause de rémunération principale ou accessoire de nature à compromettre la sécurité, notamment par incitation directe ou indirecte au dépassement de la durée du travail ou des temps de conduite autorisés, telle que l'octroi de primes ou de majorations de salaire en fonction des distances parcourues et/ou du volume des marchandises transportées". Il résulte des pièces produites et des explications des parties que la rémunération de Monsieur A... était constituée d'un salaire fixe et d'une rémunération variable prenant la forme de primes d'efficacité et d'activité calculées en fonction du nombre de bons ou unités de course obtenus par le salarié au cours de chaque mois.

Chaque course effectuée donnait en effet lieu à l'attribution d'unités de course dont le nombre dépendait notamment de la localisation du point de livraison et de la priorité accordée au client qui pouvait demander que la livraison soit effectuée dans un délai d'une heure. Dans la mesure où l'attribution d'une course à tel coursier de l'entreprise plutôt qu'à tel autre dépendait notamment de sa disponibilité ainsi qu'il résulte des propres explications de l'employeur, le principe d'une rémunération variant en fonction du nombre d'unités de course obtenues incitait Monsieur A... à réaliser les livraisons qui lui étaient confiées en un minimum de temps aux fins d'effectuer le plus grand nombre de livraisons possible pour augmenter le montant de ses primes ce qui était de nature à compromettre sa sécurité et celle des tiers. La société DEFENSE 2000 soutient que les dispositions de l'article 14 de l'annexe 1 de la convention collective ne concerne que les clauses de rémunération prévues par les contrats de travail et fait valoir que le système de rémunération à l'unité de course résulte d'un usage collectif de la profession. Les nombreux jugements et arrêts rendus dans des espèces similaires produits par les parties qui ont donné lieu, dans l'immense majorité des cas, à la condamnation des employeurs qui pratiquaient ce mode de rémunération, établissent l'existence sinon d'un usage, à tout le moins d'une pratique répandue laquelle, quelle que soit sa nature juridique, est contraire aux dispositions d'ordre public de la convention collective qui a pour objet de prohiber tout système de rémunération de nature à compromettre la sécurité ainsi que l'avait d'ailleurs relevé le Syndicat National des Entreprises de Transports Légers et de Services Rapides dans une lettre circulaire adressée à ses adhérents au cours de l'année 1997. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que le versement des primes d'efficacité et d'activité mises en place par la

société DEFENSE 2000 sont contraires à la convention collective. Bien qu'étant illicites, les primes perçues par Monsieur A... ont été la contrepartie de la prestation de travail qu'il a réellement effectuée. L'employeur n'est donc pas fondé à demander l'annulation des primes et leur remboursement. Il convient au contraire, comme l'ont décidé les premiers juges, d'intégrer cette rémunération variable aux salaires fixes. Le montant du salaire ne pouvant être diminué sans accord préalable du salarié, Monsieur A... est en droit d'obtenir un rappel de salaire et un rappel de congés payés que le conseil de prud'hommes a, avec exactitude, fixés respectivement à 6 375,49 et 637,54 . Il convient, en conséquence de confirmer le jugement sur ces condamnations. Toutefois, ainsi que le relève à juste titre la société DEFENSE 2000, c'est à tort que les premiers juges ont fixé le point de départ des intérêts au taux légal les assortissant au 5 juillet 2001, date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, alors que ces demandes ont été présentées pour la première fois devant le bureau de jugement lors de l'audience du 26 septembre 2002. Il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement sur le point de départ des intérêts et de fixer celui-ci au 26 septembre 2002. - Sur la demande en rappel d'une indemnité unique de repas : L'article 3 du protocole d'accord du 30 avril 1974 conclu en application de l'article 10 de l'annexe 1 de la convention collective des transports routiers portant dispositions particulières aux ouvriers prévoit, pour chaque repas, le versement d'une indemnité au personnel qui, en raison d'un déplacement professionnel, est obligé de prendre un ou plusieurs repas hors de son lieu de travail lorsque son amplitude de service couvre entièrement les périodes comprises soit entre 11 heures 45 et 14 heures 45, soit entre 18 heures 45 et 21 heures 15. L'article 4 du même protocole prévoit le versement

d'une indemnité unique de repas au personnel appelé à faire des déplacements, au sens de l'article 3, dans la zone de camionnage autour de Paris. L'amplitude de travail de Monsieur A..., qui effectuait une activité "de course à course" dans la zone de camionnage autour de Paris, couvrait entièrement la période comprise entre 11 heures 45 et 14 heures 45. Il bénéficiait d'une pause quotidienne de 30 minutes qui ne lui permettait pas de se rendre soit à son domicile soit au siège de l'entreprise pour y prendre son repas. En subordonnant le versement de l'indemnité unique de repas à la mise à disposition d'un client pour une journée entière de travail, la société DEFENSE 2000 a donc méconnu les dispositions du protocole d'accord du 30 avril 1974, étant par ailleurs observé que l'accord d'entreprise du 28 décembre 2000 dont elle fait également état pour s'opposer au paiement de cette indemnité unique de repas est postérieur au départ de Monsieur A... de l'entreprise. Les premiers juges ont fixé avec exactitude, déduction faite des sommes qu'il avait déjà perçues à ce titre, le montant du rappel d'indemnité unique de repas due au salarié. Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement. - Sur les dommages et intérêts : La méconnaissance par l'employeur de l'article 14 de l'annexe 1 de la convention collective et du protocole d'accord du 30 avril 1974 ont nécessairement occasionné un préjudice au salarié et aux intérêts collectifs de la profession. C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a alloué à Monsieur A... et à l'Union Locale de Paris 17ä du syndicat CGT des coursiers et personnel des sociétés de transport léger des dommages et intérêts en réparation de ce préjudice qu'ils ont, à juste titre, évalué à 500 pour chacun d'eux. Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement. L'équité commande qu'une somme de 700 soit mise à la charge de la société DEFENSE 2000 au profit de Monsieur A... et de l'Union

Locale de Paris 17ä du syndicat CGT des coursiers et personnel des sociétés de transport léger, au titre des frais non compris dans les dépens en plus de l'indemnité allouée par les premiers juges. Monsieur A..., qui succombe, sera condamnée aux dépens et la demande qu'elle forme à ce même titre doit être rejetée. PAR CES MOTIFS : La X..., STATUANT publiquement par arrêt contradictoire, INFIRME le jugement sur le point de départ des intérêts au taux légal assortissant les condamnations au rappel de salaires et aux congés payés y afférents, Et, statuant à nouveau, FIXE le point de départ de ces intérêts au 26 septembre 2002. CONFIRME le jugement en ses autres dispositions. DÉBOUTE la société DEFENSE 2000 de ses demandes en remboursement des primes perçues par Monsieur Philippe A... et en paiement des frais non compris dans les dépens. CONDAMNE la société DEFENSE 2000 à payer à Monsieur Philippe A... la somme de 700 (SEPT CENTS EUROS) au titre des frais non compris dans les dépens. CONDAMNE la société DEFENSE 2000 à payer à l'Union Locale de Paris 17ä du Syndicat CGT des Coursiers et Personnels des Sociétés de Transport Léger la somme de 700 (SEPT CENTS EUROS) au titre des frais non compris dans les dépens. CONDAMNE la société DEFENSE 2000 aux dépens. Et ont signé le présent arrêt, Monsieur BALLOUHEY Y... et Monsieur Z..., Greffier. LE GREFFIER

LE Y...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2003-03148
Date de la décision : 06/04/2004

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions collectives - Conventions diverses - Convention nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport

ll résulte des dispositions d'ordre public de l'article 14 de l'annexe I de la convention collective des transports routiers que tout système de rémunération de nature à compromettre la sécurité est proscrit.La rémunération d'un coursier constituée pour une partie d'un salaire fixe et pour l'autre d'une part variable sous forme d'attribution d'unités de course en proportion de la distance de la course et de son degré d'urgence, dès lors qu'elle incite le bénéficiaire à effectuer le plus grand nombre possible de courses pour augmenter le montant de ses primes est nécessairement de nature à compromettre la sécurité de l'intéressé et des tiers.La mise en ouvre de telles primes d'efficacité et d'activité est contraire à la convention collective, sans qu'importe l'existence d'un usage collectif ou d'une pratique répandue dans la profession.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-04-06;2003.03148 ?
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