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25/03/2004 | FRANCE | N°2002-04871

France | France, Cour d'appel de Versailles, 25 mars 2004, 2002-04871


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 D.C./P.G. ARRET Nä Nac : 55Z réputé contradictoire DU 25 MARS 2004 R.G. Nä 02/04871 AFFAIRE : S.A. TRANSPORTS DUGRAND C/ Société ACE INSURANCES NV Me Alicia Marie SAEZ X..., liquidateur de la sté INTERTRANS TORRENT FRANCE Sté TRANSCAP INTERNATIONAL cédée dans ses droits à SAS SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE, ET AUTRES Décision déférée à la cour : d'un jugement rendu rendu le 21 Juin 2002 par le Tribunal de Commerce NANTERRE Nä de chambre : 5ème chambre. RG nä :

2000F03935 et 2001F00110 Expéditions exécutoires Expédi

tions délivrées le : à : représentée par la SCP BOMMART MINAULT représentée ...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 D.C./P.G. ARRET Nä Nac : 55Z réputé contradictoire DU 25 MARS 2004 R.G. Nä 02/04871 AFFAIRE : S.A. TRANSPORTS DUGRAND C/ Société ACE INSURANCES NV Me Alicia Marie SAEZ X..., liquidateur de la sté INTERTRANS TORRENT FRANCE Sté TRANSCAP INTERNATIONAL cédée dans ses droits à SAS SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE, ET AUTRES Décision déférée à la cour : d'un jugement rendu rendu le 21 Juin 2002 par le Tribunal de Commerce NANTERRE Nä de chambre : 5ème chambre. RG nä :

2000F03935 et 2001F00110 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à : représentée par la SCP BOMMART MINAULT représentée par la SCP LEFEVRE TARDY etamp; HONGRE BOYELDIEU, représentée par Me Jean-Pierre BINOCHE, représentée par la SCP KEIME etamp; GUTTIN, REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT CINQ MARS DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : APPELANTE S.A. TRANSPORTS DUGRAND ayant son siège 273 bd Jules Durand 76600 LE HAVRE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentée par la SCP BOMMART MINAULT, avoués. assistée de Maître BURAUD du Cabinet RACINE, Avocat du Barreau de BORDEAUX. INTIMEES Société ACE INSURANCES NV ayant son siège 9/11 Belliard Straat 1040 BRUXELLES (BELGIQUE), agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège. représentée par la SCP LEFEVRE TARDY etamp; HONGRE BOYELDIEU, avoués. assistée de Me Bruno FLESCHI du Cabinet Me Philippe PLICHON, avocat au barreau de PARIS. S.A.S. SOCIETE S.D.V LOGISTIQUE INTERNATIONALE "S.D.F - LI" anciennement dénommée S.A SCAC ayant absorbé par voie de fusion la société TRANSCAP INTERNATIONAL (intimée) ayant son siège 31/32 quai de Dion Bouton 92800 PUTEAUX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. INTERVENANTE VOLONTAIRE représentée par Me Jean-Pierre BINOCHE,

avoué. assistée de la SCP SCHEUBER ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS. Société INTERTRANS TORRENT FRANCE, ayant son siège Avenue Alfred Sauvy ZAE, Mas de la Garrigue Nord, 66600 RIVESALTES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. ASSIGNEE LE 2 JUIN 2003 SELON DES MODALITES DE L'ARTICLE 659 DU NCPC SOCIETE CARGOLINK SOCIETE DE DROIT ESPAGNOL, AYANT SON SIEGE RAMBLA MENEZ NUNEZ 38 1ä 03200 ALICANTE (ESPAGNE), PRISE EN LA PERSONNE DE SES REPRESENTANTS LEGAUX DOMICILIES EN CETTE QUALITE AUDIT SIEGE. REPRESENTEE PAR LA SCP KEIME etamp; GUTTIN, AVOUES. ASSISTEE DE ME EDOUARD MOUSNY DE LA SELARL H.MC LEAN ET ASSOCIES, AVOCATS AU BARREAU DE PARIS. SOCIETE OSKAR SCHUNK ESPANA CORREDURIA DE SEGUROS AYANT SON SIEGE CLARAT DE LAVAL, 29 ENTIO, 46700 GANDIA VALENCIA (ESPAGNE), PRISE EN LA PERSONNE DE SES REPRESENTANTS LEGAUX DOMICILIES EN CETTE QUALITE AUDIT SIEGE. ASSIGNEE EN INTERVENTION FORCEE PRIS EN SA QUALITE D'ASSUREUR RESPONSABILITE DE LA SOCIETE INTERTRANS TORRENT, LE 28 MAI 2003 PAR ACTE REGLEMENT CE 1348/2000, REMIS A PERSONNE HABILITEE LE 11/09/03. N'A PAS CONSTITUE AVOUE. Madame Alicia Marie SAEZ X... prise en sa qualité de liquidateur de la Sté INTERTRANS TORRENT FRANCE, demeurant C Numez de Balboa, 21 -TO TORRENT ESPAGNE. ASSIGNEE EN REPRISE D'INSTANCE LE 26 /5/2003 REGLEMENT CE 1348/2000,REMIS A PERSONNE A PERSONNE LE 1/09/03. N'A PAS CONSTITUE AVOUE. Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Février 2004 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Françoise LAPORTE, Président chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composé de : Madame Françoise LAPORTE, Président, Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse Y..., FAITS,

PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES 5 La compagnie Française de Pêches Nouvelles et la société de Gestion de Copropriété, qui ont leur siège à Cayenne, ont vendu en avril et juillet 1999 à la société FRIGORIFICOS DELFIN, située à Fuenlabrade en Espagne, des cartons de crevettes congelées qui ont été acheminés par voie maritime, par le transporteur CARGOLINK, jusqu'au port du Havre sous conteneurs réfrigérés. Les marchandises ont été débarquées puis transférées, par les soins de la société TRANSCAP INTERNATIONAL aux droits de laquelle se déclare aujourd'hui la société SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE, depuis le navire jusqu'aux entrepôts frigorifiques de la société TRANSPORTS DUGRAND où les conteneurs ont été dépotés. Les cartons ont été chargés dans un camion et transportés par la route jusqu'à Madrid (Getafe) en Espagne par la société INTERTRANS TORRENT FRANCE selon lettre CMR émise le 03 septembre 1999. A leur arrivée, le 06 du même mois, la société FRIGORIFICOS DELFIN, destinataire, a porté sur la lettre CMR des réserves, acceptées par le transporteur, tenant au non-respect de la température négative constante et à la décongélation qui en est résultée des produits. Un expert d'avarie est intervenu le 06 novembre 1999, en présence de l'assureur de la société CARGOLINK. Il a conclu à une insuffisance de circulation d'air froid provoquée par le rangement compact réalisé dans le camion, lors du dépotage rempotage effectué dans les locaux de la société DUGRAND. La société FRIGORIFICOS DELFIN a été indemnisée de son préjudice évalué à 9.770.768 pesetas (58.723,50 euros) par son assureur la compagnie ACE INSURANCES NV, ci-après dénommée ACE, qui a saisi le tribunal de commerce de Nanterre pour rechercher la responsabilité des sociétés TRANSCAP INTERNATIONAL, DUGRAND, INTERTRANS TORRENT FRANCE et CARGOLINK. La société TRANSCAP a assigné en garantie les sociétés DUGRAND, INTERTRANS et CARGOLINK. Par jugement rendu le 21 juin 2002, cette juridiction a relevé que le

rôle de la société TRANSCAP a consisté en la réception des conteneurs frigorifiques au port du Havre après déchargement du navire, à l'établissement des documents douaniers et au transport par camion des conteneurs jusqu'aux entrepôts de la société DUGRAND. Elle a considéré que TRANSCAP n'était pas intervenue en qualité de commissionnaire de transport pour l'acheminement entre Le Havre et Getafe au cours duquel les marchandises ont été endommagées et l'a mise hors de cause. Relevant que le transport routier avait été réalisé sous couvert d'une lettre de voiture CMR où la société DUGRAND apparaissait comme expéditeur et estimant que l'avarie survenue lors du transport terrestre trouvait son origine dans un défaut de chargement, elle en a déduit que la responsabilité de la société DUGRAND était engagée, mais constatant que le transporteur n'avait pas formulé de réserves sur la défectuosité apparente du chargement au départ, elle a partagé la responsabilité à raison de deux tiers pour la société DUGRAND et un tiers pour CARGOLINK quant à l'indemnisation d'un préjudice qu'elle a chiffré à 58.723,40 euros majoré d'intérêts calculés au taux de 5% l'an à compter du 20 janvier 2000. Elle a dit non prescrite et bien fondée l'action de CARGOLINK en garantie à l'encontre de la société INTERTRANS, voiturier responsable de la marchandise. Elle a ainsi condamné la société CARGOLINK et la société DUGRAND à payer à la compagnie ACE respectivement les sommes de 19.574,47 euros et de 39.148,93 euros, majorées des intérêts au taux de 5% à compter du 20 janvier 2000 et capitalisés, condamné la société INTERTRANS à relever et garantir la société CARGOLINK des condamnations prononcées à son encontre, ordonné l'exécution provisoire et condamné, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, DUGRAND et CARGOLINK à payer chacune 2.000 euros à la compagnie ACE et 1.000 euros à la société TRANSCAP mise hors de cause ainsi que la société

INTERTRANS à payer 1.500 euros à la société CARGOLINKS sur ce même fondement, partageant les dépens après masse, par moitié, entre les sociétés CARGOLINK et DUGRAND. La société TRANSPORTS DUGRAND a interjeté appel de cette décision à l'encontre de toutes les autres parties. La société INTERTRANS TORRENT FRANCE a été assignée à la requête de la société CARGOLINK par acte extrajudiciaire du 2 juin 2003 qui a donné lieu à un procès-verbal de recherches infructueuses, dressé le même jour. Le 26 mai 2003, maître CHARDON, huissier de justice a attesté avoir accompli, à l'encontre de madame Alicia Marie SAEZ X... prise en sa qualité de liquidateur de la société INTERTRANS TORRENT FRANCE, les formalités prévues par les articles 4 et 9 du règlement CE nä1348/2000 du conseil du 29 mai 2000 relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes extrajudiciaires.A l'initiative de la société CARGOLINK, la société OSKAR SCHUNK ESPANA CORREDURIA DE SEGUROS a été assignée en intervention forcée en qualité d'assureur responsabilité de la société INTERTRANS TORRENT, par acte du même règlement CE en date du 28 mai 2003. La société TRANSPORTS DUGRAND expose qu'elle a assuré le dépotage et le stockage de la marchandise. Elle conteste la qualité de transitaire de transport que lui ont attribuée les premiers juges comme celle de chargeur, le transport terrestre ayant, selon elle, été organisé exclusivement par la société FRIGORIFICOS DELFIN qui a donné l'ordre à la société CARGOLINK de charger. Elle observe qu'aucune réserve n'a été prise par le chauffeur et considère que la rupture de la chaîne du froid ne peut résulter que d'un événement postérieur à la prise en charge de la marchandise en parfait état par le transporteur comme cela résulte des mentions portées sur la lettre de voiture. Elle affirme que la responsabilité de l'avarie incombe à ce dernier qui, de plus, en régime international de transport, a une obligation de vérifier l'état apparent de la marchandise,

l'agencement du chargement et particulièrement de la circulation normale de l'air et d'une bonne répartition de la température. Elle invoque une jurisprudence de la cour d'appel d'Aix en Provence pour soutenir que le transporteur est responsable des dommages résultant d'une trop grande compacité du chargement. Elle se prévaut également des éléments du rapport d'expertise dont elle soutient qu'il ne lui est pas opposable mais l'est à ceux qui y ont été parties. Elle demande en conséquence à la cour de dire qu'elle n'est pas responsable des dommages, de la mettre hors de cause, de juger que l'avarie trouve son origine dans les fautes commises par le voiturier et de débouter la compagnie ACE INSURANCES de toutes ses fins et conclusions en la condamnant à lui payer 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société ACE répond que les conclusions de l'expert établissent que le contrat de transport a été conclu avec la société CARGOLINK qui l'a sous-traité à la société INTERTRANS TORRENT et qui doit donc répondre de la faute commise par son substitué. Elle relève que la CMR mentionnait des instructions claires sur la température de transport, que la prise en charge a été faite sans réserves, mais qu'il en a été formulées à la livraison de la marchandise. Elle en déduit que la responsabilité de la société INTERTRANS TORRENT est présumée. Elle ajoute qu'il incombait au transporteur de vérifier l'état apparent des marchandises et le chargement correct des colis et considère que la société CARGOLINK aurait dû s'apercevoir que le chargement avait été effectué de manière trop compacte sans que des palettes aient été placées sur le sol de la remorque et contre les parois pour permettre à l'air froid de circuler. Elle fait observer que les marchandises ont été chargées à partir des entrepôts de la société TRANSPORTS DUGRAND qui, sur la CMR, apparaît comme expéditeur et à qui incombait donc le chargement de la marchandise. Elle en déduit que, si la cour

estimait que l'avarie résulte du mauvais chargement, elle retiendrait la responsabilité de la société TRANSPORTS DUGRAND. Elle soutient qu'elle justifie précisément du préjudice de son assurée et se prévaut de la quittance que cette dernière lui a remise.Aussi conclut-elle à la confirmation du jugement et demande-t-elle la condamnation conjointe et in solidum des sociétés INTERTRANS TORRENT, CARGOLINK et TRANSPORTS DUGRAND à lui payer 58.723,40 euros avec intérêts calculés au taux de 5% à compter du 20 janvier 2000 et capitalisés, outre 4.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société CARGOLINK rappelle les dispositions de l'article 17 OE 4-c de la convention CMR qui prévoient que le transporteur n'est pas responsable des dommages résultant de la manutention et du chargement, de l'arrimage ou du déchargement de la marchandise par l'expéditeur ou le destinataire. Elle expose que l'expert a déterminé que l'origine du dommage se trouvait, en l'espèce, dans la défaillance de la circulation d'air froid provoquée par l'entreposage compact. Elle considère que le dommage est dû à un mauvais chargement lequel incombait à la société TRANSPORTS DUGRAND. Elle fait valoir que la remorque avait été plombée par la société TRANSPORTS DUGRAND, que le chauffeur ne pouvait procéder au contrôle visuel du chargement et que, pour des denrées périssables, la compacité intérieure ne constitue pas un vice apparent du chargement.Elle en déduit qu'elle ne peut être tenue responsable des dommages survenus et conclut au débouté de la société ACE en toutes ses demandes. Subsidiairement, elle considère que sa responsabilité ne saurait excéder 20% du préjudice indemnisable compte tenu des circonstances de l'espèce et notamment de la qualité de professionnel du transport et de l'entreposage frigorifique de l'expéditeur. Elle critique les modalités retenues par l'expert pour déterminer le préjudice et considère que le seul poste susceptible d'être indemnisé

en application de la convention CMR est le montant des frais de transformation soit 3.614.467 pesetas (21.723,38 euros) ou, subsidiairement, de 4.184.614,40 pesetas (25.150,04 euros) dans l'hypothèse où serait retenue une perte de poids de 4.012 kg qui devrait être chiffrée sur la base de la valeur départ des marchandises indiquée sur les factures. Elle explique que, si la cour considérait que le dommage n'était pas dû à une faute de chargement, il conviendrait de confirmer le jugement qui a condamné la société INTERTRANS TORRENT à la relever et la garantir des condamnations. Elle ajoute, en invoquant l'évolution du litige et la liquidation de la société INTERTRANS TORRENT, qu'elle est fondée à appeler en cause d'appel la société OSCAR SCHUNK, assureur en responsabilité de la société INTERTRANS TORRENT, pour la voir condamner à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge. Elle réclame enfin la condamnation des sociétés ACE, INTERTRANS TORRENT, de son liquidateur maître SAEZ X... et de la société OSKAR SCHUNK ESPANA CORREDURIA DE SEGUROS à lui payer 3.050 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE intervient volontairement à l'instance par conclusions signifiées le 18 février 2003 aux termes desquelles elle expose venir aux droits de la société TRANSCAP INTERNATIONAL par suite de l'absorption qu'elle en a faite par voie de fusion. Elle observe qu'aucune demande n'est formée à son encontre par aucune des parties qui ne contestent pas les dispositions du jugement qui a mis TRANSCAP INTERNATIONAL hors de cause. Elle demande en conséquence la confirmation pure et simple de la décision de ce chef et la condamnation des sociétés ACE, TRANSPORTS DUGRAND et CARGOLINK à lui payer 5.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société INTERTRANS TORRENT FRANCE et madame Alicia Marie SAEZ X..., es qualités de liquidateur,

assignée à sa personne par acte du 1er septembre 2003, comme la société OSKAR SCHUNK ESPANA CORREDURIA DE SEGUROS assignée par acte délivré le 11 septembre 2003 à personne habilitée, n'ont pas constitué avoué. La présente décision sera réputée contradictoire en application de l'article 474 du nouveau code de procédure civile. La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 15 janvier 2004 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 12 février 2004. MOTIFS DE LA DECISION SUR LA DEMANDE DE MISE HORS DE CAUSE DE LA SOCIETE TRANSCAP INTERNATIONAL Considérant qu'il convient de constater l'intervention volontaire de la société SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE qui a absorbé par voie de fusion, selon décision des actionnaires en date du 30 décembre 2002, la société TRANSCAP INTERNATIONAL ; Considérant qu'il n'est pas discuté que, comme l'ont relevé les premiers juges, la société TRANSCAP INTERNATIONAL se soit bornée, dans l'opération de transport, à réceptionner les conteneurs au HAVRE après leur débarquement du navire, à payer le fret maritime, à établir les documents douaniers et à effectuer leur transport par camion jusqu'aux entrepôts frigorifiques de la société DUGRAND ; Considérant que cette dernière n'a émis aucune réserve à la réception des marchandises en ses entrepôts ; Considérant qu'il convient de relever que la société TRANSCAP INTERNATIONAL n'a été aucunement mise en cause dans l'avarie survenue aux marchandises après leur chargement dans un camion frigorifique et leur départ, par la route, de ces entrepôts ; Considérant d'ailleurs qu'aucune des parties ne discute la motivation des premiers juges qui ont dit que la société TRANSCAP n'était pas intervenue en qualité de commissionnaire de transport ; Considérant qu'aucune demande n'est articulée à l'encontre de la société SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE venant aux droits de la société TRANSCAP INTERNATIONAL ; Qu'il convient, dans ces conditions, de faire droit à

sa demande et de confirmer le jugement qui l'a mise hors de cause ; SUR LE TRANSPORT ROUTIER Considérant que les marchandises prises en charge aux entrepôts frigorifiques de la société TRANSPORTS DUGRAND ont voyagé par transport routier pour être livrées à Madrid en Espagne ; qu'il suit de là que cette opération, intervenue entre des lieux situés tous deux dans des Etats signataires, est régie par la Convention signée le 19 mai 1956 à Genève, dite CMR, comme cela est d'ailleurs indiqué sur la lettre de voiture et comme au demeurant parties en conviennent ; Considérant qu'il n'est pas davantage discuté que la réalisation des opérations de transport a été confiée, par le propriétaire de la marchandise, la société FRIGORIFICOS DELFIN, à la société CARGOLINK selon télécopie du 02 septembre 1999 donnant à celle-ci instructions d'enlèvement des crevettes congelées chez DUGRAND ; Considérant que la société CARGOLINK, qui a facturé cette prestation le 03 septembre 1999, ne discute pas cette qualité de transporteur principal ; qu'elle confirme dans ses écritures avoir été chargée d'acheminer les marchandises et s'être substituée, pour la réalisation de l'opération de transport, la société INTERTRANS TORRENT FRANCE ; Considérant que la lettre de voiture CMR produite aux débats indique que l'expéditeur est la société DELFIN SA LEON au Havre et le destinataire cette même société à Fuenlabrade (Espagne), que le lieu de chargement est FRIGO DUGRAND au Havre et celui de livraison DELFIN SA à Madrid ; Considérant que les représentants de chacune des sociétés TRANSPORTS DUGRAND et INTERTRANS TORRENT FRANCE y ont apposé leur tampon humide, dans les cases respectives "signature et timbre" de l'expéditeur et du transporteur et ont signé la lettre de voiture ; Considérant qu'il suit de là que la société TRANSPORTS DUGRAND ne saurait sérieusement contester sa qualité d'expéditeur de la marchandise au regard des règles de la convention CMR ; Considérant que la lettre de voiture porte, dans la case

"instructions de l'expéditeur" les mentions "Marchandises à - 18ä Certificats sanitaires Plomb 0014329" ; Considérant que la société TRANSPORTS DUGRAND produit aux débats deux "bon de sortie" des marchandises de ses entrepôts frigorifiques, dûment émargés par le chauffeur, attestant de la prise en charge des marchandises en bon état et d'une température de -18ä; Considérant qu'il résulte de ces mentions et documents ainsi que de l'absence de réserve à la prise en charge des marchandises que le transporteur est présumé les avoir prises telles qu'elles sont décrites dans la lettre de voiture :

nature poids nombre de colis et température; Considérant en revanche que des réserves ont été formulées à la livraison, le 06 septembre 1999, et ont été acceptées par le chauffeur sur la lettre de voiture ; qu'il est établi par le rapport d'expertise d'assurance que des dommages ont été constatés trouvant leur origine dans une rupture de la chaîne du froid ; Considérant qu'aux termes de l'article 17 de la convention CMR le transporteur est responsable de la perte totale ou partielle ou de l'avarie de la marchandise entre le moment de la prise en charge et celui de la livraison sans qu'il soit besoin d'établir une faute de sa part ; Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la convention CMR il répond, de ses propres actes et omissions comme de ceux de ses préposés et de toutes personnes aux services desquelles il recourt pour l'exécution du transport ; Qu'il suit de là que la société CARGOLINK est, en l'espèce, présumée responsable des dommages subis par la marchandise transportée ; Considérant que, pour s'exonérer de cette présomption de responsabilité, celle-ci se prévaut des dispositions de l'article 17 OE 4 de la convention en faisant valoir que le dommage est dû à un mauvais chargement ; Considérant en effet que l'expert a déterminé que les dégâts avaient pour origine une circulation d'air froid défaillante au cours du transport, provoquée par l'entreposage

compact des cartons dans le camion ; qu'il a relevé que l'expédition était transportée directement arrimée sur le caillebotis du sol du camion alors que, pour ce véhicule, il aurait été nécessaire de poser des palettes sur le sol afin d'assurer le refroidissement correct des caisses placées en bas de piles ; Considérant que, la CMR ne réglant pas les modalités d'exécution du chargement et à défaut de convention des parties à cet égard, il y a lieu d'appliquer, pour ce qui concerne le chargement et l'arrimage, la loi du lieu de conclusion du contrat de transport ; qu'en l'espèce, la lettre de voiture ayant été signée au HAVRE, lieu de chargement, il convient de se référer au contrat type dit "général", aux termes duquel le chargement et l'arrimage des envois de trois tonnes et plus incombent à l'expéditeur ; Considérant en l'espèce que le poids mentionné à la lettre de voiture est de 21.657 kg ; qu'il suit de là que le chargement du camion frigorifique incombait à la société TRANSPORTS DUGRAND, expéditeur de la marchandise et signataire, en cette qualité, de la lettre de voiture ; Considérant que celle-ci se borne à relever que le rapport d'expertise ne lui est pas opposable mais s'en empare pour en opposer les constatations au voiturier ; que ce rapport, contradictoirement communiqué auxConsidérant que celle-ci se borne à relever que le rapport d'expertise ne lui est pas opposable mais s'en empare pour en opposer les constatations au voiturier ; que ce rapport, contradictoirement communiqué aux débats, constitue un élément de preuve à l'encontre de la société TRANSPORTS DUGRAND qui ne discute aucunement la constatation de l'expert selon laquelle la marchandise était placée directement sur le sol du camion ; Considérant que la faute commise par la société TRANSPORTS DUGRAND dans le chargement du véhicule, cause du dommage, est de nature à exonérer le transporteur de sa responsabilité ; Considérant toutefois qu'en application de l'article 8 de la convention CMR, lors de la

prise en charge des marchandises, le transporteur est tenu de vérifier l'état apparent de la marchandise et de son emballage. Considérant qu'il a le devoir de contrôler le chargement réalisé par l'expéditeur ; obligation de contrôle dont il se déduit une responsabilité partielle du transporteur pour les dommages résultant d'une défectuosité de chargement n'ayant pas suscité de réserves de sa part et alors qu'il a procédé au transport malgré les vices apparents de cet arrimage ; Considérant en l'espèce que la position des cartons directement au sol, sans qu'ait été prise la précaution de les placer sur des palettes permettant la circulation de l'air froid sous la marchandise constituait un vice de chargement dont le caractère apparent ne saurait être discuté dès lors qu'il suffisait au chauffeur d'ouvrir la porte arrière du véhicule pour le constater ; Considérant à cet égard que c'est sans en justifier que la société CARGOLINK affirme que le chauffeur ne pouvait procéder au contrôle visuel du chargement au motif que l'expédition avait été plombée ; que la seule mention du numéro du plomb sur la lettre de voiture n'a pourtant aucunement pour effet de démontrer que cette opération aurait été faite unilatéralement par la société TRANSPORTS DUGRAND hors la présence du chauffeur de la société INTERTRANS TORRENT, alors que ce dernier a signé les bons de sortie des marchandises des entrepôts, attestant de leur température négative convenable ; Considérant que la lettre de voiture ne comporte aucune réserve du transporteur quant à un quelconque empêchement du chauffeur d'effectuer un contrôle visuel de l'arrimage de la marchandise avant le départ ; Considérant que c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont procédé à un partage de la responsabilité du dommage à raison de deux tiers à la charge de l'expéditeur pour le chargement défectueux et d'un tiers pour le transporteur qui a manqué à son obligation de contrôle ; SUR LE PREJUDICE Considérant que

l'expert a chiffré le dommage subi par la société FRIGORIFICOS DELFIN à la somme de 9.770.768 pesetas constitué de 3.614.467 pesetas pour le coût de la transformation des 9.742,50 kg de marchandises perdues et de 6.155.301 pesetas pour la perte de poids provoqué par la transformation ; Considérant que la société CARGOLINK discute cette évaluation en relevant que le rapport ne démontre pas le processus de transformation des marchandises entraînant une perte de poids et rejette l'indemnisation de 6.155.301 pesetas ; Mais considérant que l'expert a relevé que c'est en accord avec la société propriétaire qu'il a été décidé de chiffrer le dommage selon une estimation prévoyant la récupération des crevettes endommagées et leur transformation en produits secondaires ; Considérant qu'il a pesé 9.742,50 kg de marchandises avariées, triées en accord avec les parties; que pour chaque catégorie de crevettes, il a retenu un taux de perte de poids lié à la transformation de ces produits ; qu'il est en effet cohérent qu'une opération industrielle de transformation d'une matière première telle que des crevettes qui comportent une partie significative de carapace se traduise par une perte de poids ; que la société CARGOLINK se borne à contester cette réalité sans apporter le moindre élément technique de nature à contredire l'avis de l'expert qui a procédé à une analyse détaillée et approfondie ; Considérant en revanche qu'aux termes de l'article 23 OE 1 de la convention CMR, l'indemnité est calculée d'après la valeur de la marchandise "au lieu et à l'époque de la prise en charge" ; que l'expert a indiqué que la valorisation de la perte de poids a été calculée "en appliquant le prix commercial augmenté des taxes de transport et des droits de douane plus 20% de bénéfice commercial" ; Considérant qu'il n'y a pas lieu de retenir cette majoration au titre de l'indemnisation du bénéfice ; qu'il suit de là que l'indemnisation du préjudice de perte de poids doit être fixée à 6.155.301 pesetas /

1,20 = 5.129.417 pesetas ; et donc l'indemnité totale de 5.129.417 + 3.614.467 = 8.743.884 pesetas ;Considérant que la peseta se convertit en euros à raison de 166,386 pesetas pour un euro ; que le préjudice doit donc être chiffré à 52.551,80 euros : Qu'il suit de là que, compte tenu du partage de responsabilité, le jugement entrepris doit être confirmé dans son principe mais les condamnations de la société CARGOLINK et de la société TRANSPORTS DUGRAND respectivement ramenées à 17.517,26 euros et 35.034,53 euros ; SUR LA GARANTIE DE LA SOCIETE INTERTRANS TORRENT ET DE LA SOCIETE OSKAR SCHUNK ESPANA CORREDURIA DE SEGUROS Considérant que la demande d'appel en garantie dirigée par la société CARGOLINK contre la société INTERTRANS TORRENT FRANCE, son prétendu liquidateur et la compagnie d'assurance OSKAR SCHUNK ne peuvent prospérer dès lors que la société CARGOLINK expose, sans en justifier, que la société INTERTRANS TORRENT est en liquidation ; qu'il s'agit d'une société de droit français immatriculée au registre de commerce de PERPIGNAN comme mentionné sur la lettre de voiture CMR ; que la nature de la liquidation, amiable ou judiciaire, n'est pas précisée ; qu'il n'est pas justifié de la qualité de cette dame SAEZ X... ... ; que la société CARGOLINK affirme que la société OSKAR SCHUNK ESPANA CORREDURIA DE SEGUROS serait l'assureur de INTERTRANS sans pourtant produire aucun élément de nature à démontrer la réalité d'une obligation conventionnelle d'assurance de cette compagnie ; Que doit être infirmé le jugement qui a condamné la société INTERTRANS TORRENT à relever et garantir la société CARGOLINK des condamnations prononcées contre elle ; SUR LES AUTRES DEMANDES Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la société ACE et à la société SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE la charge des frais qu'elles ont été contrainte, l'une et l'autre, d'engager en cause d'appel ; que les sociétés TRANSPORTS DUGRAND et CARGOLINK seront condamnées in solidum à payer à chacune d'elles une indemnité complémentaire de

2.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que l'équité ne commande pas d'allouer des sommes sur le fondement de ce même texte aux appelantes, principale et incidente, qui, succombant dans l'exercice de leur recours, doivent être condamnées aux dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, CONSTATE l'intervention volontaire de la société SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE, CONFIRME le jugement entrepris, hormis en sa disposition condamnant la société INTERTRANS à relever et garantir la société CARGOLINK et sauf à ramener respectivement à 17.517,26 et 35.034,53 euros les condamnations en principal prononcées à l'encontre de la société TRANSPORTS DUGRAND et de la société CARGOLINK, Y ajoutant, CONDAMNE in solidum la société TRANSPORTS DUGRAND et la société CARGOLINK à payer à chacune des sociétés ACE INSURANCES NV et SDV LOGISTIQUE INTERNATIONALE la somme complémentaire de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, DIT n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit des sociétés TRANSPORTS DUGRAND et CARGOLINK, DEBOUTE la société CARGOLINK de son appel en garantie, CONDAMNE in solidum les sociétés TRANSPORTS DUGRAND et CARGOLINK aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP LEFEVRE-TARDY etamp; HONGRE-BOYELDIEU et par Maître BINOCHE, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, Président et par Mme Marie SAUVADET, greffier en chef présent lors du prononcé LE GREFFIER EN CHEF,

LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2002-04871
Date de la décision : 25/03/2004

Analyses

TRANSPORTS TERRESTRES - Marchandises - Transport international - Convention de Genève du 19 Mai 1956 (CMR) - Responsabilité - Exonération

En l'absence de dispositions de la Convention de Genève du 19 mai 1956 relative au transport routier international, dite CMR, réglant les modalités d'exécution et d'arrimage des chargements, et à défaut de convention des parties, il convient d'appliquer la loi du lieu de conclusion du contrat de transport. L'application de cette norme interne - ici la loi française en vertu de laquelle la faute commise par l'expéditeur est de nature à écarter la présomption de responsabilité que la CMR fait peser sur le transporteur - ne fait pas obstacle cependant à l'obligation incombant au transporteur d'avoir à vérifier l'état apparent de la marchandise et de son emballage telle qu'elle résulte de l'article 8 de la CMR. Il s'ensuit qu'en cas de faute apparente de chargement commise par l'expéditeur, si l'application de la loi française a pour effet d'exonérer le transporteur de sa responsabilité, l'absence de réserves émises par le chauffeur à l'égard d'un défaut de chargement apparent, sans qu'une preuve de l'impossibilité de procéder au contrôle visuel du chargement soit rapportée, suffit aussi pour engager, partiellement, la responsabilité du transporteur en raison des dommages résultant de sa carence


Références :

Convention de Genève du 19 mai 1956, article 8

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-03-25;2002.04871 ?
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