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15/01/2004 | FRANCE | N°2002-01895

France | France, Cour d'appel de Versailles, 15 janvier 2004, 2002-01895


COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 F.L./P.G. ARRET Nä DU 15 Janvier 2004 R.G. Nä 02/01895 AFFAIRE : - S.A NISSAN FRANCE C/ - S.A. GARAGE X... Copie certifiée conforme Expédition exécutoire délivrées le : à : ä SCP JULLIEN LECHARNY ROL ä SCP BOMMART MINAULT E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS -------- LE QUINZE JANVIER DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, 12ème chambre section 2, a rendu l'arrêt CONTRADICTOIRE suivant, prononcé en audience publique, La cause ayant été débattue à l'audience publique du VINGT NOVEMBRE DEUX MILLE TROIS

DEVANT : MADAME FRANOEOISE LAPORTE, PRESIDENT chargée du rapport...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 F.L./P.G. ARRET Nä DU 15 Janvier 2004 R.G. Nä 02/01895 AFFAIRE : - S.A NISSAN FRANCE C/ - S.A. GARAGE X... Copie certifiée conforme Expédition exécutoire délivrées le : à : ä SCP JULLIEN LECHARNY ROL ä SCP BOMMART MINAULT E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS -------- LE QUINZE JANVIER DEUX MILLE QUATRE, La cour d'appel de VERSAILLES, 12ème chambre section 2, a rendu l'arrêt CONTRADICTOIRE suivant, prononcé en audience publique, La cause ayant été débattue à l'audience publique du VINGT NOVEMBRE DEUX MILLE TROIS DEVANT : MADAME FRANOEOISE LAPORTE, PRESIDENT chargée du rapport, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, assistée de Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier, Le magistrat rapporteur en a rendu compte à la cour, dans son délibéré, celle-ci étant composée de :

MADAME FRANOEOISE LAPORTE, PRESIDENT MONSIEUR JEAN-FRANOEOIS FEDOU, CONSEILLER MONSIEUR DENIS COUPIN, CONSEILLER et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément à la loi, DANS L'AFFAIRE ENTRE : - S.A NISSAN FRANCE ayant son siège ZA du Parc de Pissaloup, 13 avenue Jean d'Alembert BP 123, 78194 TRAPPES CEDEX, agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège. APPELANTE d'un jugement rendu le 14 Décembre 2001 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES, 4ème chambre. CONCLUANT par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL, Avoués près la Cour d'Appel de VERSAILLES. PLAIDANT par la SCP REYNAUD-LAFONT GAUDRIOT-MAREST, avocats du barreau de VERSAILLES. ET - S.A. GARAGE X... ayant son siège 47/49 avenue Abbé Alvitre 19100 BRIVE LA GAILLARDE, agissant poursuites et diligences de son Président du Conseil d'Administration domicilié en cette qualité audit siège. INTIMEE - APPELANTE INCIDEMMENT CONCLUANT par la SCP BOMMART MINAULT, Avoués près la Cour d'Appel de VERSAILLES. PLAIDANT par Maître

Christian BOURGEON, avocat du barreau de PARIS. - Monsieur Charles X... ... par la SCP BOMMART MINAULT, Avoués près la Cour d'Appel de VERSAILLES. PLAIDANT par Maître Christian BOURGEON, avocat du barreau de PARIS. FAITS ET PROCEDURE : 5 La SA GARAGE X... était concessionnaire à BRIVE de la marque DATSUN depuis 1971. Par contrat de concession du 21 avril 1996, la SA NISSAN FRANCE lui a consenti l'exclusivité de la distribution de la marque NISSAN pour le département de la CORREZE et certains cantons de la DORDOGNE et du LOT. La société NISSAN a résilié, le 04 novembre 1997, le contrat de concession à effet au 04 novembre 1999. Arguant de la remise en cause de mauvaise foi par la société NISSAN d'un accord de principe sur la poursuite des relations contractuelles au-delà du mois de novembre 1999 consécutif à des pourparlers rendant abusive la résiliation du contrat de concession, la société GARAGE X... et Monsieur Charles X... ont assigné la société NISSAN FRANCE devant le Tribunal de Commerce de VERSAILLES en réparation de leur préjudice. Par jugement rendu le 14 décembre 2001, cette juridiction a dit que la société NISSAN avait mis fin à tort aux pourparlers engagés avec son concessionnaire et qu'elle était responsable de la cessation de leurs relations contractuelles, condamné la société NISSAN à verser à la société GARAGE X... 800.000 francs (121.959,21 euros) de dommages et intérêts, rejeté la demande indemnitaire de Monsieur X..., dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, alloué une indemnité de 20.000 francs (3.048,98 euros) en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à la société GARAGE X... et condamné la société NISSAN aux dépens. Appelante de cette décision, la société NISSAN dénie toute faute de sa part dans la rupture des pourparlers avec la société GARAGE X... en faisant valoir qu'elle n'est pas à l'origine de la prolongation

des pourparlers et qu'elle a toujours posé une condition préalable et déterminante d'une réorganisation profonde de la concession qui n'a jamais été réalisée par l'intimée en sorte que celle-ci est intervenue pour de justes motifs en juin 1999. Elle fait grief au tribunal d'avoir méconnu l'économie générale du projet qui ne se bornait pas à une simple augmentation de la surface commerciale et ne dispensait pas la société GARAGE X... de présenter un budget d'exploitation et un tableau de financement prévisionnels. Elle prétend que le rapprochement des sociétés NISSAN et RENAULT, en mars 1999, est sans intérêt au titre de la rupture des pourparlers dès lors que la résiliation du contrat de concession est intervenue plusieurs années auparavant et qu'elle était libre de rompre des discussions à une époque où elle n'avait aucune assurance de voir le projet de la société X... se réaliser. Elle estime qu'en toute hypothèse, la société GARAGE X... a commis une faute lourde en ne recherchant pas, parallèlement aux discussions engagées avec la société NISSAN, d'autres partenaires. Elle allègue encore plus subsidiairement que le préjudice de la société GARAGE X... ne peut être constitué par la disparition du fonds de commerce dont la preuve n'est pas rapportée et qu'il ne pourrait correspondre qu'à la perte d'une chance de contracter avec elle. Elle considère irrecevable l'appel incident provoqué de Monsieur X... et en tout cas mal fondé dans la mesure où il ne justifie d'aucun préjudice. Elle sollicite donc l'entier débouté de la société GARAGE X..., elle soulève l'irrecevabilité et le mal fondé de l'appel incidemment provoqué de Monsieur X... et réclame une indemnité de 5.000 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. La société GARAGE X... oppose que postérieurement au courrier de résiliation du 04 novembre 1997, les parties sont parvenues à un accord de principe, le 16 novembre 1998, sur la poursuite des relations contractuelles

au-delà du 04 novembre 1999 en affirmant que la décision de résiliation avait pour seul but de la pousser à investir dans des installations et plus représentatives que celles dont il disposait. Elle ajoute que la société NISSAN a rompu cet accord sans motif légitime et de mauvaise foi en juin 1999 en soulignant que ceux évoqués successivement par l'appelante tenant à la prétendue tardivité de la présentation de son projet et à sa non réalisation d'une réorganisation de la concession ne sont pas pertinents. Elle objecte que l'attitude de la société NISSAN ne s'explique que par des considération d'opportunité découlant de facteurs extérieurs à ses relations avec elle qui lui confèrent un caractère déloyal. Elle précise que la société NISSAN l'a privé du préavis utile de résiliation de 24 mois et de la faculté de céder à un tiers son fonds de commerce. Elle indique que l'indemnité allouée par le tribunal ne constitue pas une contrepartie suffisante à l'atteinte portée à la valeur de son fonds de commerce en raison de la perte brutale de la clientèle attachée à la marque NISSAN introduite en Corrèze en 1971 et développée localement pendant 28 ans. Monsieur X... invoque la recevabilité de son appel lié aux demandes formées par la société X... et son bien fondé à réclamer réparation du préjudice moral qu'il prétend avoir subi en tant que signataire à titre personnel du contrat résilié. Formant appel incident, la société GARAGE X... et Monsieur X... réclament respectivement 457.347 euros et 15.245 euros outre des indemnités en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile de 6.000 euros et de 2.000 euros. MOTIFS DE LA DECISION : Considérant qu'il n'est pas discuté que la société NISSAN ait régulièrement informé la société GARAGE X... de la résiliation de son contrat de concession par lettre du 04 novembre 1997 avec effet au 04 novembre 1999 en respectant le délais de préavis de deux ans conformément au contrat et au droit communautaire

applicable ; considérant que sa responsabilité ne peut dès lors être recherchée que sur le fondement quasi-délictuel quant à la rupture des pourparlers avec son ancien cocontractant que la société GARAGE X... estime fautive ; considérant qu'il s'infère des pièces produites que la société GARAGE X..., alors que le contrat de concession du 21 avril 1996 était déjà résilié depuis le 04 novembre 1997, a repris contact avec la société NISSAN afin de nouer de nouvelles relations contractuelles, le 11 avril 1998, en lui présentant plusieurs projets d'investissements de 2.000.000 francs (304.898,03 euros) pour continuer à représenter la marque NISSAN ; que par lettre du 03 novembre 1998, la société GARAGE X... a proposé à la société NISSAN l'agrandissement de ses locaux commerciaux en se portant acquéreur d'un garage mitoyen de 900 m en précisant qu'une réponse définitive devait lui parvenir d'ici la fin de l'année ; considérant que par courrier en date du 16 novembre 1998, la société NISSAN lui a accusé réception de ce projet en indiquant que l'ensemble immobilier constitué par son local et le garage mitoyen devrait lui permettre de disposer après réalisation des travaux nécessaires d'une concession bien située et valorisante pour les clients de la marque ; qu'en outre, la société NISSAN a rappelé au GARAGE X... comme cela lui avait déjà été spécifié lors de leur dernier entretien du 04 juin 1998, les termes suivants : "UN TEL PROJET N'EST ENVISAGEABLE QUE SI VOUS PROCEDEZ PREALABLEMENT A SA REALISATION A UNE PROFONDE REORGANISATION DE VOTRE CONCESSION TANT AU NIVEAU DE L'ACTIVITE VN-VO QU'APRES VENTE" et lui a précisé : "NOUS NE SERONS EN MESURE DE VOUS FAIRE PART DE NOTRE POSITION QU'APRES AVOIR REOEU DE VOTRE PART UN BUDGET PREVISIONNEL D'EXPLOITATION, UN TABLEAU DE FINANCEMENT PREVISION AINSI QUE LES PLANS DE L'ENSEMBLE IMMOBILIER" ; Considérant que plusieurs mois plus tard, la société GARAGE X... a rencontré les dirigeants de la société NISSAN, le 09

juin 1999, lesquels lui ont rappelé l'expiration du contrat de concession au 04 novembre 1999 et la fin de toute discussion ; considérant que par lettre recommandée avec avis de réception du 21 juillet 1999, la société GARAGE X... a informé la société NISSAN de la signature d'un protocole d'accord concernant l'acquisition du garage juxtaposé à son établissement et demandé son concours aux fins de finaliser ce projet et le 03 août 1999, la société a confirmé la rupture de toutes relations depuis le 09 juin 1999 ; considérant qu'il ressort de la chronologie de ces évènements que la société GARAGE X... n'a fait part à la société NISSAN de son souhait de négocier de nouvelles relations contractuelles que le 11 avril 1998 plus de quatre mois après la notification du préavis de résiliation sans que cette initiative ne soit assortie de précision, ni suivie d'effet concret avant plusieurs mois ; qu'en effet, ce n'est que le 03 novembre 1998 qu'elle a confirmé "son intention d'investir pour moderniser et mettre aux normes NISSAN ses locaux de BRIVE afin d'améliorer et de défendre au mieux les intérêts de NISSAN en Corrèze" ; que non seulement, la société GARAGE X... n'a pas fourni sa réponse définitive avant la fin 1998, période dont elle avait elle-même expressément fait état, mais n'a, en réalité, avisé la société NISSAN de l'acquisition de l'immeuble voisin que le 21 juillet 1999 après que celle-ci lui ait notifié sa décision de rompre toute discussion dès le 09 septembre 1999, sans qu'elle ne justifie l'avoir informée de l'évolution de son dossier, étant observé que son affirmation selon laquelle Monsieur Y..., chef de région, aurait été tenu constamment au courant n'est corroborée par aucune preuve et s'avère démentie par la circonstance que les discussions ont toujours été poursuivies avec le dirigeant de la société NISSAN FRANCE comme en font foi les correspondances produites ; considérant, en outre, que la société NISSAN était en droit légitime de rompre les

négociations dès lors que les conditions préalables et indispensables à leur poursuite par ses soins et dont elle avait clairement et loyalement données connaissance à la société GARAGE X... depuis le 04 juin 1998, puis réitérées le 16 novembre 1998, tenant à la réorganisation profonde de la concession dans tous ses domaines d'activité et à la fourniture des documents prévisionnels et des plans de l'ensemble immobiliers requis n'ont jamais été satisfaites jusqu'à la rupture du 09 juin 1999, ni même d'ailleurs ultérieurement puisque le 21 juillet 1999, la société GARAGE X... n'était toujours pas en mesure d'apporter des renseignements sérieux sur la question de sa réorganisation, administrative, commerciale et financière, ni de fournir les pièces réclamées dont rien n'interdisait l'établissement avant même l'achat de l'immeuble en cause, lequel ne constituait nullement, au vu de la teneur de la lettre du 16 novembre 1998, le seul élément auquel la société NISSAN subordonnait sa décision ; considérant que la société GARAGE X... qui était ainsi parfaitement informée des modalités et conditions des pourparlers, mais n'a pu les remplir ne saurait, par voie de supputations, prétendre que le rapprochement des sociétés NISSAN et RENAULT réalisé plusieurs années après la résiliation du contrat de concession du 04 novembre 1997 constituerait le motif de la rupture des discussions qui lui est seule imputable ; considérant que le jugement déféré doit dès lors être intégralement infirmé et la société GARAGE X... déboutée de toutes ses prétentions ; considérant que les demandes formées par Monsieur Charles X... à titre personnel étant directement liées à celles présentées par la société GARAGE X... envers la société NISSAN puisqu'elles sont fondées sur les mêmes fautes alléguées à son encontre, son appel incident provoqué est recevable ; que toutefois, il sera rejeté dans la mesure où la responsabilité de la société NISSAN n'est pas, en l'espèce, engagée ;

considérant que l'équité commande d'accorder à la société NISSAN une indemnité de 3.500 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; considérant que la société GARAGE X... et Monsieur Charles X... qui succombent en toutes leurs demandes, supporteront les dépens des deux instances. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, Et statuant à nouveau, DECLARE Monsieur Charles X... recevable en son appel incident provoqué, LE DEBOUTE ainsi que la SA GARAGE X... de toutes ses prétentions dirigées à l'encontre de la SA NISSAN FRANCE, LES CONDAMNE à verser à l'appelante une indemnité de 3.500 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, LES CONDAMNE aux dépens des deux instances et AUTORISE la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL, avoués, à recouvrer ceux d'appel conformément à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET REDIGE ET PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT M. THERESE GENISSEL

FRANOEOISE LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2002-01895
Date de la décision : 15/01/2004

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Faute - Convention - Formation - Pourparlers engagées en vue de sa conclusion

La rupture des pourparlers entrepris par un concessionnaire avec son concédant, postérieurement à la dénonciation régulière du contrat de concession, ne revêt aucun caractère fautif de la part du concédant lorsqu'ayant soumis à conditions la poursuite des négociations, il n'a été satisfait à aucune de celles-ci par le concessionnaire, la rupture lui étant seule imputable .


Références :

article 1383 du code civil

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2004-01-15;2002.01895 ?
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