COUR D'APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 ä JFF/DR ARRÊT A... Y... 15 MAI 2003 R.G. A... 01/00743 AFFAIRE : . S.A. CALBERSON PARIS C/ . S.A. ICOM COPIE CERTIFIEE CONFORME EXPEDITION EXECUTOIRE DELIVREES LE : A : . SCP GAS . SCP DELCAIRE BOITEAU E.D. RÉPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS ---------------------- LE QUINZE MAI DEUX MILLE TROIS, La cour d'appel de VERSAILLES, 12ème chambre section 2, a rendu l'arrêt CONTRADICTOIRE suivant, prononcé en audience publique, La cause ayant été débattue à l'audience publique du DIX MARS DEUX MILLE TROIS, DEVANT : Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller chargé du rapport, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, assisté de Mme Marie-Thérèse GENISSEL, greffier, Le magistrat rapporteur en a rendu compte à la cour, dans son délibéré, celle-ci étant composée de : * Madame Françoise LAPORTE, Président, * Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, * Monsieur Denis COUPIN, conseiller, et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément à la loi, DANS L'AFFAIRE, ENTRE : . S.A. CALBERSON PARIS, dont le siège est ..., représentée par son Président Directeur Général en exercice domicilié en cette qualité audit siège APPELANTE d'un jugement rendu le 23 Novembre 2000 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE, 2ème chambre CONCLUANT par la SCP GAS, Avoués près la Cour d'Appel de VERSAILLES PLAIDANT par Maître Z... substituant Maître B..., Avocat au Barreau de PARIS "D.695" ET : . S.A. ICOM, dont le siège est ..., représentée par son Président Directeur Général en exercice domicilié en cette qualité audit siège INTIMEE CONCLUANT par la SCP DELCAIRE BOITEAU, Avoués près la Cour d'Appel de VERSAILLES PLAIDANT par Maître WILHELM Annie du X... CONNOR, Avocat au Barreau de PARIS ä FAITS ET PROCEDURE : 5La société ICOM, qui exerce l'activité d'imprimerie, a été chargée par la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION
(ci-après C.L.P.) de réaliser des travaux de presse en vue du festival de CANNES de 1998 ; ces dossiers devaient être livrés le 15 mai 1998 au Palais des Festivals. La société ICOM a confié à la société CALBERSON le soin d'effectuer ce transport ; l'enlèvement est intervenu le 13 mai 1998 et la livraison à CANNES a été effectuée le 18 mai 1998. Invoquant le préjudice subi par elle consécutivement au retard dans l'acheminement des dossiers de presse, la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION a, par acte du 16 octobre 1998, assigné la société ICOM, notamment en paiement d'une indemnité égale à 250.000 F (38.112,25 ) à titre de dommages-intérêts. Par actes des 28 décembre 1998 et 18 janvier 1999, la société ICOM a régularisé un appel en intervention forcée et en garantie à l'encontre de la société CALBERSON PARIS. Par jugement du 23 novembre 2000, le Tribunal de Commerce de PONTOISE a : * déclaré recevable l'action en garantie diligentée par la société ICOM à l'encontre de la société CALBERSON PARIS ; * fixé la créance de la société ICOM sur la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION à la somme de 41.667,30 F (6.352,14 ) ; * fixé la créance de la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION sur la société ICOM à la somme de 22.115,43 F (3.371,48 ), et à celle de 100.000 F (15.244,90 ) à titre de dommages-intérêts ; * * ordonné la compensation entre les sommes dues par chacune des parties ; * en conséquence, condamné la société ICOM à payer à la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION la somme de 80.448,13 F (12.264,24 ), majorée des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 1998, date de l'assignation ; * condamné la société ICOM à payer à la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION la somme de 5.000 F (762,25 ) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; * condamné la société CALBERSON PARIS à garantir et indemniser la société ICOM à concurrence des condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière. La société CALBERSON PARIS a interjeté appel de cette
décision. Elle fait valoir que le fondement du préjudice allégué à l'encontre de la société ICOM résulte incontestablement de l'inexécution d'une prestation de transport dans les délais qu'elle avait acceptés. Elle relève que, la société intimée étant débitrice d'une obligation de livraison dans un délai déterminé, les dispositions de l'article L 133-6 du code de commerce s'appliquent de plein droit. Sur le fond, elle objecte que la société ICOM, qui connaissait parfaitement ses propres conditions d'intervention, et qui ne pouvait ignorer que le matériel serait livré trois jours ouvrés suivants, soit le 18 mai 1998 dans la matinée, n'a pas assorti son ordre d'affrètement de la moindre instruction quant à un délai impératif à respecter. Aussi, la société appelante demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, et, à titre principal, de déclarer irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé à son encontre, subsidiairement de débouter la société ICOM de ses prétentions. A titre encore plus subsidiaire, elle sollicite qu'il soit jugé que l'indemnité qui pourrait être mise à sa charge ne saurait excéder le prix du transport, soit 145,70 (955,79 F), et ce conformément aux dispositions de l'article 15 du contrat-type messagerie. En toute hypothèse, elle conclut à la condamnation de la société ICOM à lui verser la somme de 15.451,88 , en remboursement des causes de la décision de première instance assortie de l'exécution provisoire, ce avec intérêts au taux légal à compter du 03 mai 2002, date de son règlement. Elle réclame en outre la somme de 3.000 en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société ICOM sollicite la confirmation du jugement. Elle expose que l'article L.133-6 du code de commerce est inapplicable en l'espèce, dans la mesure où l'action principale de la société C.L.P. à son encontre était fondée, non sur un contrat de transport ou de commission de transport, mais sur le contrat d'entreprise qui la liait à son
donneur d'ordre. Elle fait valoir qu'eu égard au bref délai qui lui était imparti pour l'acheminement des dossiers de presse, elle a confié le transport à une société de renommée internationale et a pris soin de mentionner sur la lettre de voiture que la livraison devait intervenir le 15 mai au matin. Elle soutient que, si la société appelante ne pouvait effectuer ce transport dans les délais impartis, il lui appartenait d'en informer sans tarder la société ICOM au moment de la prise en charge. Elle explique que la société CALBERSON ne saurait à bon droit se prévaloir d'allongements de délais prévus par ses conditions générales, dès lors que ces conditions générales sont inopposables à la société intimée. Elle précise qu'il importe peu que la demande de transport n'ait pas mentionné de délai, puisqu'elle a stipulé un délai de livraison sur le titre de transport, et que CALBERSON n'a émis aucune réserve et a pris les marchandises en charge sans manifester ultérieurement aucun désaccord sur les modalités d'exécution qui lui étaient imposées. Elle conteste également que les contrats de messagerie rapide puissent se voir appliquer les dispositions du contrat-type destinées à régir les transports courants, et elle ajoute qu'en tout état de cause, la faute lourde commise par la société appelante la prive du bénéfice des limitations de responsabilité incluses dans ce contrat-type. Elle réclame en outre la somme de 2.000 au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 09 janvier 2003. ä MOTIFS DE LA DECISION :
ä Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription : Considérant qu'aux termes de l'article L 133-6 alinéas 1er et 4 du code de commerce, " les actions pour avaries, pertes ou retards auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport sont prescrites dans le délai d'un anä ; le délai pour intenter chaque action récursoire est d'un mois ; cette prescription ne court que du
jour de l'exercice de l'action contre le garanti " ; considérant qu'en l'occurrence, il est constant que la société ICOM, qui a été assignée à la requête de la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION par acte du 16 octobre 1998, a exercé son appel en garantie à l'encontre de la société CALBERSON PARIS par actes des 28 décembre 1998 et 18 janvier 1999, donc postérieurement à l'expiration du délai d'un mois édicté par la disposition légale susvisée ; mais considérant que ne sont soumises au délai de prescription d'un mois prévu par ce texte que les actions récursoires qui se rattachent à une action principale née de l'exécution d'un contrat de transport ; considérant que tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors que l'action principale dont la société C.L.P. a pris l'initiative à l'encontre de la société ICOM est elle-même fondée, non sur un contrat de transport ou de commission de transport, mais sur l'exécution d'un contrat d'entreprise ; considérant que le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a écarté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'article L 133-6 alinéa 4 du code de commerce, et en ce qu'il a déclaré recevable l'appel en garantie formé par la société ICOM plus d'un mois après l'assignation principale. ä Sur la responsabilité de la société CALBERSON : Considérant que, pour contester sa responsabilité dans le retard de livraison des imprimés destinés au Palais des Festivals de CANNES, la société CALBERSON PARIS fait valoir que la commande reçue de la société ICOM selon télécopie du 13 mai 1998 ne mentionne aucun délai pour la réalisation de cette prestation ; mais considérant que la lettre de voiture, qui constitue le seul document valant contrat entre les parties, comporte l'indication en caractères très apparents : " Livraison le 15/05/1998 matin " ; considérant que la société CALBERSON, qui a procédé le 13 mai 1998 à l'enlèvement des marchandises accompagnées du document de transport, n'a pas informé la société ICOM, au moment de la prise en
charge, que le transport ne pourrait être effectué dans ce délai, ni même émis la moindre réserve à cet égard ; considérant qu'elle a donc nécessairement accepté les conditions qui figuraient sur ce document, et en particulier celle relative au délai qui lui était imparti pour exécuter l'opération ; considérant que la société appelante allègue vainement que, par courrier du 24 juin 1997, elle avait adressé à la partie adverse un exemplaire de ses conditions générales " CALBERAPID ", auxquelles était annexée une carte de la France faisant apparaître que, pour un transport au départ de PARIS et à destination du département des Alpes Maritimes, le délai maximum garanti est de 72 heures ; considérant qu'en effet, sur le titre de transport, qui constitue le document contractuel de base, il n'est fait aucune référence à ces conditions générales, lesquelles ne font donc pas partie intégrante de la convention liant les parties ; considérant qu'il s'ensuit qu'en livrant les imprimés litigieux seulement le 18 mai 1998, nonobstant la stipulation contractuelle d'un délai impératif au 15 mai 1998 au matin, la société CALBERSON PARIS a engagé sa responsabilité sur le fondement de l'article L 133-1 du code de commerce, et doit, ainsi que l'a à bon droit jugé le Tribunal, répondre des conséquences dommageables envers la société ICOM de cette livraison tardive. ä Sur l'exclusion de limitation de l'indemnité : Considérant qu'à titre subsidiaire, la société CALBERSON PARIS demande qu'il soit fait application de l'article 15 du contrat-type messagerie, lequel, en cas de retard à la livraison, limite l'indemnité due à un montant qui ne peut excéder le prix du transport, droits, taxes et frais divers exclus, s oit 145,70 ; considérant que, toutefois, l'application du plafond réglementaire d'indemnisation peut être mise en échec en cas de faute lourde du transporteur ; considérant qu'en l'occurrence, il apparaît que la société ICOM avait pris soin de mentionner en caractère très
apparents sur le titre de transport la date à laquelle la livraison devait intervenir, et avait ainsi manifesté l'importance particulière qu'elle attachait à la célérité d'un transport exécuté sous le régime de la messagerie rapide ; considérant que, pour autant, non seulement la société appelante a livré les dossiers de presse avec un retard de trois jours par rapport au délai qui lui avait été imparti, mais elle a également négligé d'informer la société ICOM des difficultés rencontrées par elle pour accomplir sa prestation dans ce délai ; considérant que, dès lors qu'un tel comportement caractérise un manquement d'une extrême gravité, dénotant l'inaptitude du débiteur de l'obligation à exécuter la mission qui lui était confiée, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a, retenant la faute lourde du transporteur, condamné la société CALBERSON PARIS à relever et garantir la société ICOM des condamnations prononcées à son encontre et au bénéfice de la société CUEL LAVALETTE PRODUCTION. ä Sur les demandes annexes : Considérant que, dans la mesure où l'appel en garantie diligenté par la société ICOM a été à bon droit accueilli par les premiers juges, la demande de la société CALBERSON PARIS, tendant à la restitution des sommes versées par elle dans le cadre de l'exécution provisoire de la décision entreprise, se trouve être sans objet ; considér