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20/02/2003 | FRANCE | N°2001-2044

France | France, Cour d'appel de Versailles, 20 février 2003, 2001-2044


Eric X... a été engagé par la société SARL PRIMO IMMOBILIER à compter du 29 juin 1998, en qualité de négociateur immobilier, coefficient 270, la relation de travail étant régie par la convention collective nationale de l'immobilier. Sa rémunération mensuelle brute était de 7.000 F outre une prime d'objectif. Par lettre en date du 7 mai 1999 il se voyait convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement pour faute fixé au 14 mai 1999 à 17 heures. Il était licencié pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 31 mai 1999. Les motif

s de la rupture étaient énumérés dans les termes suivants :

- "manque...

Eric X... a été engagé par la société SARL PRIMO IMMOBILIER à compter du 29 juin 1998, en qualité de négociateur immobilier, coefficient 270, la relation de travail étant régie par la convention collective nationale de l'immobilier. Sa rémunération mensuelle brute était de 7.000 F outre une prime d'objectif. Par lettre en date du 7 mai 1999 il se voyait convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement pour faute fixé au 14 mai 1999 à 17 heures. Il était licencié pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 31 mai 1999. Les motifs de la rupture étaient énumérés dans les termes suivants :

- "manque d'esprit d'entreprise, mauvaise entente avec vos collègues, détournement à votre profit, de clients prospects appartenant à d'autres commerciaux. - Etablissements par vous, d'un faux bordereau de commission servant à la préparation par l'expert comptable des feuilles de paies, aux fins d'obtenir une prime de 1.000 F au mois d'avril. Après vérification des bordereaux antérieurs, il est constaté la même infraction en janvier. - Rétention d'un chèque d'indemnité d'immobilisation de la promesse RADREAULT/BROSSE à l'ordre du notaire du vendeur. Après la signature de la promesse le 9 avril, vous l'avez adressé, en date du 11 avril à Maître LISCH, notaire, sans adresser le chèque de 100.000 F d'indemnité d'immobilisation. Vous ne m'en avez pas tenu informé. A l'occasion de cette mission, vous n'avez pas apporté toutes les diligences et attentions que notre mandant était en droit d'attendre de nous. Vous avez failli, à notre obligation de diligence et de soin. Nous considérons que vous avez trahi la confiance que nous vous avions mis en vous, ne pouvant, en permanence, vérifier la totalité de vos interventions. Nous ne pouvons prendre le risque de voir mettre en jeu notre responsabilité professionnelle par des négligences". Le salarié à contesté ces griefs dès le 5 juin. C'est dans ces circonstances qu'il a attrait la société PRIMO IMMOBILIER

devant le Conseil de Prud'hommes de BOULOGNE BILLANCOURT aux fins de contester la légitimité de son licenciement et de se voir allouer les sommes suivantes : - indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse :

55.500 F - indemnité pour non respect de la procédure :

9.250 F - indemnité de préavis :

9.250 F - rappel de paiement de commissions :

115.000 F - rappel de salaire pour les mois de mai et juin 1999 :

8.750 F - reprise de prime :

2.000 F - remboursement de frais :

1.440 F Le premier juge par la décision dont est appel en date du 20 décembre 2000 a estimé que la faute grave n'était pas établie et bien plus que le licenciement litigieux n'était pas causé. C'est ainsi qu'il a condamné la SARL PRIMO IMMOBILIER à payer à Eric X... la somme de 27.750 F à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse outre celle de 9.250 F à titre d'indemnité de préavis. La société PRIMO IMMOBILIER a régulièrement relevé appel de cette décision. L'appelante a fait conclure à l'infirmation du jugement déféré en soutenant que la preuve de la faute grave commise par le salarié était rapportée et en demandant à ce dernier le remboursement de la somme perçue dans le cadre de l'exécution provisoire. Elle a sollicité en outre l'allocation de la somme de 1.219,59 sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Eric X... a conclu pour sa part à la confirmation du jugement entrepris, mais ayant relevé appel incident a réitéré ses demandes de première instance dans les termes suivants : - indemnité pour non respect de la procédure :

1.410 - dommages intérêts pour brutalité :

762 - - rappel de salaires, primes et frais :

1.859 - commission spoliée :

1.525 Il a demandé en outre la contrepartie financière de la clause non concurrence soit l'allocation d'une somme de 28.400 correspondant au montant de la clause pénale stipulée à son contrat a concurrence d'un an de salaire ; SUR QUOI, LA COUR CONSIDERANT que l'article L 122-14 du Code du travail dispose : "L'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement mentionnée à l'article L 122-14-1 ; Que ces derniers doivent être objectifs, précis et vérifiables ; qu'à défaut le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; CONSIDERANT qu'une faute ne peut être qualifiée de grave que si elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la période de préavis ; que le salarié perd dans ce cas le bénéfice des indemnités de licenciement et de préavis ; que la preuve en incombe à celui qui l'invoque ; CONSIDERANT que les motifs du licenciement énumérés dans la lettre de rupture dont les termes ont été ci-avant rapportés, fixent les termes et limites du litige ; Qu'il incombe dès lors à la Cour d'en vérifier la réalité et la pertinence ; CONSIDERANT dans le cas présent, que trois griefs sont invoqués à l'encontre du salarié :

- manque d'esprit d'entreprise et détournement de prospects, - établissement d'un faux bordereau de commission, - rétention d'un chèque d'indemnité d'immobilisation établi à l'ordre d'un notaire. CONSIDERANT que la première série de grief ne résulte que de l'attestation de Pierre Y... responsable de l'agence, que cette

seule attestation de caractère subjectif, est insuffisante pour établir les prétendus manquements et le défaut d'intégration du salarié qui en tout état de cause est vague en l'absence de justificatifs de faits précis et objectifs ; CONSIDERANT que l'établissement d'un faux bordereau de commission n'est établi par aucun élément probant, qu'il résulte de la seule affirmation de l'employeur ; CONSIDERANT que la preuve de la rétention d'un chèque d'immobilisation n'est pas mieux démontrée aucun élément justificatif n'étant en effet produit aux débats ; CONSIDERANT qu'aucun élément objectif ne permet d'établir une cause réelle et sérieuse au licenciement litigieux, qu'il y a lieu en conséquence d'entrer en voie de confirmation, le premier juge, s'étant fondé à bon droit sur l'article L 122-14-5 du Code du travail et ayant fait une exacte évaluation du préjudice subi par le salarié qui recouvre tant les vices de fond que de forme ; CONSIDERANT qu'Eric X... a sollicité l'allocation de dommages intérêts pour brutalité, que cependant il ne rapporte pas la preuve de brutalité engendrant un préjudice indépendant de celui résultant du licenciement abusif ; qu'il doit donc être débouté de sa demande de ce chef ; CONSIDERANT que le salarié ne rapporte pas mieux la preuve des salaires et de commissions qu'il prétend ne pas avoir perçu, qu'il doit être également débouté de ce chef de demande ; CONSIDERANT en revanche que sa demande consistant dans le versement de la contrepartie financière à la clause de non concurrence stipulée dans son contrat de travail paraît fondée ; CONSIDERANT qu'il est en effet constant que le contrat de travail d'Eric X... en date du 29 juin 1998, stipule une cause de non concurrence en cas de rupture du contrat de travail, qu'il lui était interdit pendant un délai de deux ans à compter de son départ d'exercer la profession de négociateur immobilier sur les communes de SCEAUX, BOURG LA REINE, CHATENAY, PLESSIS ROBINSON,

FONTENAY AUX ROSES, L'HAY LES ROSES, CLAMART, CHATILLON et VERRIERES LE BUISSON ; CONSIDERANT qu'une clause de non concurrence n'est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, limitée dans le temps et dans l'espace et que si elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié et comporte en outre l'obligation pour l'employeur de verser une contrepartie financière, lesdites conditions étant cumulatives ; CONSIDERANT en l'occurrence que le dirigeant de la société PRIMO IMMOBILIER ne paraît pas avoir relevé son salarié de cette clause, que ce dernier et par conséquent présumé l'avoir exécutée, comme il l'affirme d'ailleurs en indiquant qu'il a été au chômage de mai 1999 à janvier 2001, soit durant vingt mois ; qu'il a dès lors incontestablement droit au paiement d'une indemnité valant contrepartie financière de l'obligation qu'il a eu de ne pas exercer la profession de négociateur immobilier dans un espace géographique donné et durant une période définie ; CONSIDERANT que le montant de cette contrepartie financière doit résulter de l'importance de l'atteinte à la liberté professionnelle du salarié comparée aux revenus dont il disposait dans l'exercice de ses fonctions, principe de proportionnalité appliqué à la période concernée en l'occurrence de 20 mois ; CONSIDERANT qu'Eric X... percevait une rémunération brute mensuelle de 7.500 F, que l'atteinte à sa liberté professionnelle était limitée à un secteur précis et relativement restreint de la banlieue parisienne ; que ce dernier avait donc la faculté de chercher un emploi de négociateur immobilier dans les autres secteurs de la région parisienne ou à PARIS même ; que par conséquent l'atteinte à sa liberté professionnelle si elle a effectivement été réelle, a été néanmoins réduite et peu préjudiciable au salarié ; CONSIDERANT qu'il y a lieu dès lors d'évaluer la contrepartie financière due à Eric X... à 230 par

mois, soit sur vingt mois, à la somme de 4.600 ; PAR CES MOTIFS :

La COUR, STATUANT publiquement et contradictoirement ; CONFIRME le jugement déféré ; Y AJOUTANT : CONDAMNE la société SARL PRIMO IMMOBILIER à verser à Eric X... la somme de 4.600 uros à titre de contrepartie financière à l'exécution de la clause de non concurrence stipulée dans son contrat de travail ; DEBOUTE Eric X... du surplus de ses demandes ; LAISSE les entiers dépens à la charge de la société SARL PRIMO IMMOBILIER. Et ont signé le présent arrêt Monsieur LIMOUJOUX, Président, et Madame Z..., Greffier. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2001-2044
Date de la décision : 20/02/2003

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence

Si l'employeur qui s'abstient de relever son ancien salarié des obligations d'une clause de non concurrence est tenu au paiement d'une contrepartie financière, la clause étant présumée avoir été exécutée par le salarié, son montant doit être déterminé proportionnellement à la durée et à l'intensité de l'atteinte portée à la liberté professionnelle du salarié au regard de ses revenus professionnels antérieurs.Il suit de là que l'interdiction d'exercer la profession de négociateur immobilier dans un secteur limité de la banlieue parisienne, ici une dizaine de communes de la banlieue ouest, caractérise un préjudice de faible amplitude, le salarié ayant la possibilité de chercher un emploi de même type dans la capitale et dans l'ensemble des autres secteurs géographiques de la banlieue


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2003-02-20;2001.2044 ?
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