Se prévalant d'une créance sur la société R.I.F.P. correspondant à diverses factures d'installations et de maintenance d'équipements téléphoniques, la société MATRA NORTEL COMMUNICATIONS DISTRIBUTION a requis du président du Tribunal de commerce de CHAMBERY une ordonnance d'injonction de payer que ce magistrat a délivrée le 04 août 1999, pour un montant de 83.341,79 francs (12.705,37 euros) en principal, 53 francs (8,08 euros) de frais et 1.000 francs (152,45 euros) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La société R.I.F.P. a formé opposition, par lettre du 27 septembre 1999, auprès du greffe du tribunal de commerce de CHAMBERY qui, par application des dispositions de l'article 1408 du nouveau code de procédure civile, a renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Nanterre. Par jugement rendu le 27 juin 2000, cette juridiction, constatant que la société R.I.F.P. n'avait pas conclu et ne s'était pas présentée à l'audience du juge rapporteur, relevant que la société MATRA NORTEL produisait aux débats des procès-verbaux de réception, des factures et le contrat de maintenance, a déclaré la société R.I.F.P. mal fondée en son opposition et l'a condamnée à payer à la société MATRA NORTEL 83.341,79 francs (12.705,37 euros) avec intérêts légaux calculés à compter du 28 mars 1995 sur la somme de 73.354,10 francs (11.182,76 euros), du 29 décembre 1997 sur celle de 8.901,85 francs (1.357,08 euros) et du 07 septembre 1999 pour le solde, 8.300 francs (1.265,33 euros) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et les dépens. La société R.I.F.P., qui a interjeté appel de cette décision, expose qu'ayant demandé et obtenu le renvoi de l'affaire elle n'a jamais été convoquée à la nouvelle audience de plaidoirie de telle sorte qu'elle n'a pas été en mesure d'être entendue, ni de déposer son dossier et ses pièces. Elle en tire la conclusion que le jugement, qui a contrevenu aux règles du procès équitable, doit être annulé. Invoquant les dispositions des
articles 42 et 46 du nouveau code de procédure civile, elle discute la compétence du tribunal de commerce de Nanterre en faisant valoir que son siège social est à CHAMBERY et que les matériels ont été livrés en son établissement de Paris où se trouvait aussi, à l'époque, le siège de la société MATRA NORTEL. Elle soutient que son exception d'incompétence est parfaitement recevable en cause d'appel dès lors qu'elle n'a pu développer, devant les premiers juges, aucune défense au fond. Elle précise que le jugement, qui a statué au fond, ne pouvait pas faire l'objet d'un contredit. Elle invoque les dispositions de l'article 74 du nouveau code de procédure civile pour affirmer qu'elle pouvait simultanément soulever le moyen de nullité du jugement et d'incompétence. Aussi demande-t-elle à la cour de prononcer la nullité du jugement, en tout état de cause de le réformer, de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de CHAMBERY et, subsidiairement, de la mettre en demeure d'avoir à conclure sur le fond. La société MATRA NORTEL COMMUNICATIONS DISTRIBUTION rappelle le déroulement de la procédure devant les premiers juges et expose que la société R.I.F.P. a bénéficié de plus de six mois et de sept audiences pour faire valoir les moyens de sa défense. Elle explique avoir déposé sa requête devant le tribunal de commerce de CHAMBERY, conformément aux dispositions de l'article 1406 nouveau code de procédure civile, sous le bénéfice de celle de l'article 1408 dudit code. Elle souligne que la société R.I.F.P. n'a, à aucun moment, soulevé l'incompétence devant les premiers juges et en infère qu'elle est irrecevable à le faire en cause d'appel, d'autant que ce moyen relève du contredit et qu'il devait être soulevé avant tout moyen de nullité. Elle conclut ainsi au mal fondé de l'appel. Sur le fond, elle précise les quatre commandes justifiant ses facturations et explique que sont demeurées impayées quatre redevances du contrat de maintenance résilié. Elle rappelle les mises
en demeure et fait observer que la société R.I.F.P. n'a développé aucun moyen de défense. Elle conclut à la confirmation du jugement, sauf à calculer les intérêts sur la totalité de sa créance à compter du 28 mars 1995 et à condamner la société R.I.F.P. à lui payer 1.500 euros complémentaires au titre des frais irrépétibles. La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 27 juin 2002 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 24 septembre 2002. MOTIFS DE LA DECISION ä SUR LA DEMANDE DE NULLITE DU JUGEMENT Considérant qu'il ressort des pièces transmises par le greffe du tribunal de commerce de Nanterre que, par lettre du 22 novembre 1999, le conseil de la société R.I.F.P. a demandé, en cette qualité, à cette juridiction de renvoyer l'affaire, lors de l'audience du 24 novembre 1999 à 9 h15, précisant attendre les pièces de son contradicteur, que l'affaire a été renvoyée à l'audience de mise en état du 11 janvier 2000, puis devant un juge rapporteur en ses audiences successives des 22 février, 21 mars et 18 avril 2000, que les mentions portées au plumitif indiquent que le défendeur n'était pas présent à ces audiences ; Considérant que le 18 avril 2000, le juge a décidé de procéder à une nouvelle convocation des parties pour plaidoiries au 10 mai ; que le conseil de la société R.I.F.P. a adressé au greffe du tribunal, une lettre datée du 10 mai 2000, sollicitant le renvoi de l'audience de plaidoirie à une prochaine date, expliquant devoir plaider à Bergerac un incident ; que le juge rapporteur a renvoyé les plaidoiries à son audience du 23 mai à laquelle le conseil de la société R.I.F.P. ne s'est pas présenté et n'a pas fait parvenir de dossier ; Qu'il est ainsi établi que la société R.I.F.P. a disposé de cinq audiences de mise en état auxquels son conseil n'a pas jugé utile de se présenter ; que ce dernier ayant demandé, à au moins deux reprises le renvoi, il lui appartenait de se renseigner sur la date à laquelle l'affaire devait
revenir et sur celles suivantes ; qu'ayant répondu à la convocation pour l'audience des plaidoiries du 10 mai, il ne saurait prétendre n'en avoir pas été informé ; Considérant que la société MATRA NORTEL a indiqué au tribunal avoir adressé ses pièces le 22 décembre 1999, qu'elle exposait, par lettre du 20 mars suivant, n'avoir reçu de son contradicteur ni pièces, ni conclusions ; que la société R.I.F.P. n'allègue ni ne démontre avoir procédé en première instance à une telle communication ; Qu'il suit de là que la société R.I.F.P. a disposé de cinq audiences de mise en état et deux de plaidoiries et d'un délai de plus de six mois pour faire valoir ses moyens ; qu'elle ne saurait se prévaloir du défaut de diligences de son conseil pour prétendre que le jugement a contrevenu aux règles du procès équitable ; Que la demande en annulation du jugement sera en conséquence rejetée ; ä SUR L'EXCEPTION D 'INCOMPETENCE Considérant que le jugement de première instance n'a pas statué sur la compétence dès lors qu'aucune exception de cette nature n'a été soulevée devant les premiers juges ; qu'il a tranché le fond du litige ; qu'il s'ensuit que seule la voie de l'appel était ouverte à la société R.I.F.P. pour exercer un recours contre cette décision ; Considérant que la société MATRA NORTEL est mal fondée à opposer l'irrecevabilité de l'exception d'incompétence au motif qu'elle a été soulevée après celle de nullité dès lors que ces deux moyens ont été soulevés simultanément et avant toute défense au fond en cause d'appel ; Considérant, en revanche, que le jugement entrepris a été rendu contradictoirement, le conseil de la société R.I.F.P. ayant fait connaître son intervention à la juridiction de premier degré ; qu'il n'a soulevé devant les premiers juge aucune exception d'incompétence ; Considérant que, par lettre du 27 septembre 1999, le conseil de la société R.I.F.P. avait formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer ; que cette opposition est motivée ; que la société R.I.F.P. a ainsi contesté
être redevable de la somme réclamée "dans la mesure où un accord avait été conclu entre les parties, concernant la mise à disposition de ce matériel, que la société MATRA COMMUNICATIONS n'a pas respecté" et précisant que "selon les termes de cet accord, la société MATRA prêtait à la société RIFP une installation téléphonique pour les bureaux de la Société PARIS, pour lui permettre d'en apprécier la fiabilité, en contrepartie de quoi, la société RIFP consentait à la société MATRA une priorité, à prix égal pour un marché de travaux concernant l'équipement téléphonique d'un hôtel à ROISSY" ; Considérant que l'affaire avait été renvoyée par le tribunal de commerce de CHAMBERY devant celui de Nanterre en application des dispositions de l'article 1408 du nouveau code de procédure civile, la société MATRA NORTEL ayant expressément invoqué, dans sa requête, la compétence de cette juridiction ; qu'est produite aux débats la copie de la lettre adressée le 05 octobre 1999 par le greffier du tribunal de commerce de Chambéry au conseil de la société R.I.F.P. accusant réception de son opposition et l'informant de la transmission de l'affaire à Nanterre, conformément à l'article 1408 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que, ni à l'audience du 24 novembre 1995, ni aux six suivantes, la société R.I.F.P. n'a soulevé l'incompétence de cette juridiction, ni contesté la saisine intervenue sur la base d'une lettre d'opposition qui faisait valoir des moyens de défense au fond ; Considérant que dans leur décision, les premiers juges ont fait état des termes de cette lettre d'opposition par laquelle la société R.I.F.P. avait ouvert un débat contradictoire ; Qu'il suit de là que la société R.I.F.P. est irrecevable à soulever pour la première fois, en cause d'appel, l'incompétence du tribunal de commerce de Nanterre ; Considérant que la société R.I.F.P. s'est contentée, dans ses conclusions devant la cour, d'alléguer la nullité du jugement et de soulever une exception
d'incompétence ; qu'en raison de l'irrecevabilité de cette exception, elle ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article 76 du nouveau code de procédure civile et demander à être mise en demeure de conclure au fond ; ä SUR LE FOND Considérant que la société MATRA NORTEL produit aux débats : - les bons de commande chiffrés du 17 septembre 1993, les procès-verbaux de réception de installation dans les locaux de la société R.I.F.P. avenue Hoche à Paris, d'un autocommutateur et d'un "fax", et les factures du 08 et du 18 octobre 1993 respectivement de 33.208 francs (5.062,53 euros), et 21.348 francs (3.254,48 euros) - le bon de commande chiffré, la feuille d'intervention du transfert de cette installation depuis l'avenue Hoche jusqu'au 15 rue Maison Dieu à Paris, et la facture correspondante du 07 février 1994 d'un montant de 11.338,16 francs (1.728,49 euros) ; - le bon de commande chiffré d'une intervention faite le 17 septembre 1993 sur un appareil ALCATEL, avenue Hoche à Paris, et la facture du 11 mars 1994 d'un montant de 2.372 francs (361,61 euros) ; - le bon chiffré de mise en service d'un "Tambour", 15 rue Maison Dieu à Paris, facturé le 10 janvier 1996 pour 1.423,20 francs (216,97 euros) , - le contrat de maintenance conclu le 06 octobre 1993 portant sur un matériel de téléphonie installé 16 avenue Hoche à Paris, quatre factures de redevance pour les périodes du 06 octobre 1994, date de fin de garantie, au 30 septembre 1998, pour des montants respectifs de 3.002,67 - 3.155,78 - 3.185,91 et 3.222,23 francs (457,75 - 481,10 - 485,69 et 491,23 euros) ainsi que la facturation des indemnités de résiliation anticipée pour 1.085,84 francs (165,54 euros) ; Que la créance de la société R.I.F.P. est ainsi parfaitement fondée sur des commandes et un contrat et justifiée par des factures pour un montant total de 83.341,79 francs (12.705,37 euros) ; Considérant que la société MATRA NORTEL a adressé à sa cliente le 28 mars 1995 une mise en demeure d'avoir à lui payer
73.354,10 francs (11.182,76 euros) et le 29 décembre 1997 une autre pour la somme de 97.263,93 francs (14.827,79 euros) ; Considérant que la société R.I.F.P. s'est bornée, dans son opposition, dont elle produit aux débats la copie, à invoquer un accord aux termes desquels les installations fournies par la société MATRA NORTEL n'auraient été que prêtées mais dont elle ne justifie aucunement ; que la seule mention, sur quatre des bons de commande, que le montant sera à régler lors du versement d'acompte pour l'hôtel de Roissy en France, n'est pas de nature à démontrer la réalité d'un prêt, alors que la société R.I.F.P. n'allègue pas avoir émis de protestation à la réception des factures et des mises en demeure ; qu'au contraire, la convention d'un règlement décalé a pour effet de confirmer la réalité d'une vente et celle de l'obligation corrélative de paiement que la société R.I.F.P. a souscrite, même si la date pouvait en être reportée jusqu'à la survenance d'un événement sur laquelle elle ne fournit aucune précision ; Qu'il suit de là que le jugement entrepris doit être confirmé sauf à faire partir le calcul des intérêts légaux sur le solde de la créance soit 83.341,79 - 73.354,10 = 9.987,69 francs (1.522,61 euros) du 29 décembre 1997 date de la deuxième mise en demeure ; Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la société MATRA NORTEL la charge des frais qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel ; que la société R.I.F.P. sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 1.500 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que l'appelante qui succombe dans l'exercice de son recours doit être condamnée aux dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, DEBOUTE la société R.I.F.P de sa demande d'annulation du jugement, DECLARE la société R.I.F.P. irrecevable en son exception d'incompétence, CONFIRME le jugement entrepris, sauf à dire que les intérêts légaux seront calculés sur la
somme de 11.335,21 euros à compter du 28 mars 1995 et sur celle de 1.522,61 euros à compter du 29 décembre 1997, Y ajoutant, CONDAMNE la société R.I.F.P. à payer à la société MATRA NORTEL COMMUNICATIONS DISTRIBUTION la somme complémentaire de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, LA CONDAMNE aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP KEIME-GUTTIN, société titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR COUPIN, CONSEILLER PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET
LE GREFFIER
LE PRESIDENT M. THERESE X...
FRANOEOISE LAPORTE