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05/09/2002 | FRANCE | N°2000-01943

France | France, Cour d'appel de Versailles, 05 septembre 2002, 2000-01943


Les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE exploitent chacune, à Paris, des points de vente au détail d'articles de parfumerie sous l'enseigne commune AU RAYON D'OR. Elles bénéficiaient de contrats de distribution sélective conclus avec la société YVES SAINT LAURENT qui, le 18 février 1998, en a signifié la résiliation au motif que les boutiques ne satisfaisaient plus aux critères qualitatifs requis. Elles ont contesté le bien fondé de cette décision et notamment la pertinence des critères retenus. Des vérifications ont abouti au rétablissement des re

lations commerciales avec la seule société FRAMBIE. Les sociétés A...

Les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE exploitent chacune, à Paris, des points de vente au détail d'articles de parfumerie sous l'enseigne commune AU RAYON D'OR. Elles bénéficiaient de contrats de distribution sélective conclus avec la société YVES SAINT LAURENT qui, le 18 février 1998, en a signifié la résiliation au motif que les boutiques ne satisfaisaient plus aux critères qualitatifs requis. Elles ont contesté le bien fondé de cette décision et notamment la pertinence des critères retenus. Des vérifications ont abouti au rétablissement des relations commerciales avec la seule société FRAMBIE. Les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE ont alors saisi le tribunal de commerce de Nanterre pour obtenir que soit ordonnée à la société YVES SAINT LAURENT la reprise des relations commerciales et, sous astreinte de 30.000 francs (4.573,47 euros) par jour de retard, des livraisons, pour réclamer des dommages et intérêts à raison de 2.000.000 francs (304.898,03 euros) pour RAYON D'OR, 600.000 francs (91.469,41 euros) pour SONAT BEAUTE, 1.300.000 francs (198.183,72 euros) pour RIVOLI BEAUTE et 500.000 francs (76.224,51 euros) pour FRAMBIE, outre 122.128 francs (18.618,29 euros) au titre d'une remise de 2% sur le chiffre d'affaires et 50.000 francs (7.622,45 euros) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, subsidiairement la désignation d'un expert, en sollicitant que soient ordonnées la publication du jugement et l'exécution provisoire. Par jugement rendu le 04 février 2000, cette juridiction a débouté les demanderesses de toutes leurs prétentions et a condamné chacune d'elles à payer à la société YVES SAINT LAURENT 50.000 francs (7.622,45 euros) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu que le fabricant était en droit d'établir lui-même les critères de son système de distribution sélective et que les demanderesses

n'apportaient pas la preuve d'une discrimination. Les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE, qui ont interjeté appel de cette décision, rappellent ensemble qu'en matière de distribution sélective le choix des distributeurs ne peut être fait que selon des critères définis, objectifs et appliqués de façon proportionnée et sans discrimination. Elles prétendent qu'en l'espèce ceux retenus unilatéralement par le fabricant sur sa grille de notation n'ont pas un tel caractère, ne sont pas contrôlables et permettent ainsi une application discriminatoire. Elles soutiennent que les notes pénalisantes qui leur ont été attribuées sont abusives, qu'elles ne peuvent justifier la rupture dès lors que le distributeur conteste la pertinence des critères, fournit des éléments contraires et propose un contrôle par un tiers. Elles réfutent le prétexte d'une prétendue exigence accrue de qualité en soulignant la simultanéité des quatre résiliations. Elles font valoir le standing élevé de leurs magasins en comparaison de ceux d'autres distributeurs agréés et critiquent certaines des notes attribuées à cet égard. Elles expliquent que toutes les autres grandes marques considèrent que les boutiques remplissent les critères de qualité. Elles font au surplus observer que la société YVES SAINT LAURENT refuse tout contrôle comme l'arbitrage d'une société d'évaluation indépendante. Elles demandent à la cour d'infirmer le jugement, de mettre un terme aux ruptures injustifiées dont elles sont victimes en condamnant la société YVES SAINT LAURENT à reprendre les relations commerciales et à livrer les commandes sous astreinte de 4.573,47 euros par jour de retard, de réparer le préjudice qui leur est causé en condamnant la société YVES SAINT LAURENT à payer 503.081,76 euros à la société AU RAYON D'OR, 329.289,88 euros à RIVOLI BEAUTE, 152.449,02 euros à SONAT BEAUTE et 76.224,51 euros à FRAMBIE, ainsi qu'à leur payer 18.618,29 euros au titre de la remise de 2% sur chiffre d'affaires, subsidiairement de

désigner un expert pour réunir les éléments de nature à apprécier les notations attribuées, condamner la société YVES SAINT LAURENT à leur payer 7.622,45 euros pour les frais irrépétibles de première instance et pareille somme pour ceux engagés en cause d'appel. La société YVES SAINT LAURENT oppose la licéité reconnue du contrat de distribution qu'elle met en place pour chaque point de vente, au regard des conditions d'exemption prévues par le règlement de la commission des Communautés européennes du 22 décembre 1999. Elle affirme qu'il appartient au seul fabricant de fixer les critères de sélection qu'il souhaite imposer à ses distributeurs et que ces critères et leur évaluation peuvent évoluer. Rappelant les clauses du contrat relatives à la procédure d'évaluation, elle affirme le caractère incontestable de la pertinence du rapport de visualisation en tant que moyen de preuve. Elle soutient que la discrimination prétendue n'est pas établie en l'espèce et elle dénie tout caractère probant, à cet égard, à la déclaration faite, pour les besoins de la cause selon elle, par le dirigeant des sociétés appelantes auprès de la Direction Générale de la Concurrence et de la Répression des Fraudes. Elle explique que la procédure contractuelle a été respectée, que les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE ont été informées des résultats du rapport d'évaluation fait en 1997, qu'elles ont bénéficié du délai de six mois prévu pour procéder à la mise en conformité, qu'elles n'ont contesté le système de notation que le 10 avril 1998, après la résiliation. Elle expose que les contestations soulevées ont été examinées avec attention et vérifiées. Elle affirme que, n'ayant pas commis de faute, aucune condamnation ne saurait être mise à sa charge. Elle qualifie de fantaisistes, en leur principe et leur quantum, les demandes en paiement de dommages et intérêts et critique les chiffres allégués. Elle fait observer que les relations commerciales ont été rétablies

avec la société FRAMBIE qui avait tardé à justifier des qualifications de son personnel et qui cherche ainsi à obtenir un dédommagement pour un préjudice qu'elle avait seule pouvoir d'éviter. Elle conteste enfin devoir une remise de 2% sur les chiffres d'affaires dont les conditions d'attribution n'ont pas été satisfaites pour l'année 1996. Elle conclut ainsi à la confirmation du jugement et à la condamnation de chacune des sociétés appelantes à lui payer 7.622,45 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 11 avril 2002 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 21 mai 2002. MOTIFS DE LA DECISION SUR LES CONTRATS Considérant que la société YVES SAINT LAURENT a successivement renouvelé, avec les sociétés AU RAYON D'OR et SONAT BEAUTE le 1er janvier 1992, avec la société RIVOLI BEAUTE le 1er janvier 1994 et avec la société FRAMBIE le 1er janvier 1998, des contrats, tous identiques dans leurs clauses et conditions, de détaillant agréé des produits à sa marque ; Considérant que la licéité de ces contrats et des conditions générales de vente qui y sont annexées, au regard des dispositions restrictives relatives aux accords entre entreprises susceptibles d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, a été admise par une décision la Commission des Communautés Européennes en date du 16 décembre 1991 et, pour l'essentiel, confirmée par un arrêt du Tribunal de Première Instance des Communautés Européennes rendu le 12 décembre 1996 ; que le caractère licite de ce contrat de distribution sélective n'est, au demeurant, pas discuté par les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE ; Considérant que ces contrats sont conclus pour une durée commençant le jour de la signature et s'achevant le 31 décembre suivant et sont ensuite, sauf dénonciation trois mois avant l'échéance, tacitement renouvelés par périodes successives d'une

année civile ; Que les contrats peuvent toutefois faire l'objet d'une résiliation anticipée pour différentes raisons et, particulièrement, "si le détaillant agréé ne satisfait pas ou ne satisfait plus aux critères qualitatifs définis à l'article I des conditions générales de vente, conformément aux dispositions de l'article IV du contrat" ; Considérant en effet que le détaillant agréé souscrit des obligations précises tenant, notamment, à la nature et à la qualité des autres produits qu'il distribue, au standing et à l'entretien du point de vente, à la qualification professionnelle de son personnel et relatives au service de conseil et de démonstration ; Considérant que, dans le courant du mois de juillet 1997, la société YVES SAINT LAURENT, comme elle y est contractuellement autorisée par les dispositions de l'article III des conditions générales de vente, a procédé à une visualisation des boutiques des appelantes ; que l'évaluateur, madame X..., a déterminé, pour chacune d'elles, un cumul de points par le jeu d'une grille d'évaluation ; qu'au regard d'un minimum requis de 427 points, les sociétés AU RAYON D'OR et FRAMBIE ont obtenu respectivement les notes de 407 et 403 points ; que les sociétés RIVOLI BEAUTE et SONAT BEAUTE obtenaient 394 et 373 points alors que le minimum les concernant était de 420 ; Considérant que, conformément à la procédure fixée aux conditions générales de vente, la société YVES SAINT LAURENT, par lettres du 23 juillet 1997, a fait savoir à chacun de ses quatre distributeurs que les points de vente ne satisfaisaient pas aux critères qualitatifs, énumérant les éléments non satisfaisants et rappelant à chacun de ses cocontractants qu'il disposait d'un délai de six mois pour prendre les mesures nécessaires ; Considérant que le 19 septembre 1997, les quatre sociétés ont réclamé communication des grilles complètes de notation ; que la société YVES SAINT LAURENT a satisfait à cette demande en adressant photocopie des rapports de visualisation par

courrier du 31 octobre 1997 ; Considérant que le 26 janvier 1998, la société YVES SAINT LAURENT a procédé à une nouvelle visite des quatre points de vente ; que les rapports établis par l'évaluateur, madame Y..., déterminent les notes respectives de 412 pour la société AU RAYON D'OR, 418 pour FRAMBIE, 389 pour SONAT BEAUTE et 415 pour RIVOLI BEAUTE ; Considérant que l'attestation produite par la société AU RAYON D'OR indiquant que l'évaluatrice aurait renseigné la grille au crayon, outre qu'elle est délivrée par une personne salariée de l'entreprise, est dépourvue de toute portée, dès lors que la fiche d'évaluation est et reste un document interne à la société YVES SAINT LAURENT ; que l'attestation établie par madame Z... se borne à critiquer l'état d'esprit de l'enquêtrice, sans même préciser la date des faits attestés ni la boutique concernée ; Considérant que les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE soutiennent que l'insuffisance des notes portées par la société YVES SAINT LAURENT sur la grille ne peut constituer une preuve suffisante du caractère justifié de la rupture des contrats qui leur a été signifiée par lettres du 18 février 1998 ; Considérant toutefois que, dans le cadre d'un réseau de distribution sélective mis en place pour préserver une image de marque de grande réputation et le prestige attaché aux articles de haute qualité que constituent les parfums de luxe, il revient au fabricant de fixer les critères de sélection qu'il souhaite imposer à ses distributeurs, sans être contraint de recueillir leur opinion ; Que le contrat et les conditions générales de vente y annexées précisent, de manière détaillée, les critères qualitatifs auxquels doit satisfaire le distributeur et tenant, notamment, à la localisation du point de vente, à son environnement, à la façade de l'immeuble, à l'aménagement intérieur de la boutique, à sa superficie, aux activités commerciales qui y sont déployées, à la qualité du service de conseil et de démonstration des produits de

la marque et à la qualification professionnelle du détaillant et de son personnel ; Considérant que la grille d'évaluation énumère ces différents critères et propose à l'enquêteur, pour les éléments correspondants, l'attribution de 2, 4, 7 ou 10 points ; que certaines notations visent des constatations objectivement vérifiables telles que la commercialité du quartier, de la rue et leur desserte, l'environnement commercial immédiat, l'éventuelle situation dans un centre commercial, la longueur des vitrines, la surface de vente, la nature des matériaux, la présence de meubles personnalisés, l'ancienneté de la décoration intérieure, l'existence de cabines de soins esthétiques, le nombre des vendeuses et les diplômes professionnels ; que d'autres au contraire tiennent à des constatations de situations momentanées comme l'encombrement et la propreté de la boutique ; que d'autres enfin ne peuvent résulter que d'appréciations plus subjectives de l'enquêteur comme l'attrait général du point de vente, son standing, l'état d'entretien, la qualité de son éclairage ou l'impression sur la qualité et la recherche de la décoration ; Considérant qu'il ne saurait être fait grief à la société YVES SAINT LAURENT d'utiliser ces grilles d'évaluation destinées à vérifier que chaque point de vente des distributeurs agréés respecte les critères de qualité définis, même unilatéralement, par le fabricant ; Considérant que les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE soutiennent que ces grilles vont au-delà de ce qui est nécessaire, n'ont pas un caractère objectif et contrôlable et sont dès lors susceptibles de faire l'objet d'une application discriminatoire, permettant à la société YVES SAINT LAURENT de gérer précisément la notation finale qu'elle souhaite obtenir ; Considérant toutefois qu'il appartient à chacune d'elles d'apporter la démonstration d'une application discriminatoire à leur endroit des modalités d'utilisation des

grilles d'évaluation ; Que la société RIVOLI BEAUTE conteste quatre éléments de notation sur les soixante qui lui ont été attribués ; que sa contestation porte précisément sur des critères d'appréciation subjective que sont le caractère attrayant des commerces avoisinants, l'état d'entretien des plafonds de la boutique, la première impression sur la décoration du point de vente et le caractère attrayant des linéaires ; que la critique d'une appréciation subjective ne démontre en rien son caractère discriminatoire ; qu'il convient de souligner à cet égard que les quatre notes délivrées en juillet 1997 et en janvier 1998 par deux enquêtrices différentes sont strictement identiques, montrant ainsi que la subjectivité de l'appréciation se trouve régulée par la pratique professionnelle qu'acquièrent ces personnes, dont la société YVES SAINT LAURENT souligne, pour l'une d'elles, l'ancienneté dans la maison ; Que la société AU RAYON D'OR conteste un critère objectif sur la qualité des matériaux de façade, pareillement noté "moyenne" par les deux enquêtrices, en faisant valoir qu'il s'agit d'un immeuble en pierre de taille sans pourtant justifier de cette affirmation, ainsi que deux notes liées aux critères subjectifs du caractère attrayant des linéaires et de la disponibilité du personnel ; que le petit nombre de ces contestations doit être rapproché du total de soixante et une notes qui ont été données par l'enquêtrice ; que relativement aux linéaires, des notes strictement identiques ont été attribuées en juillet 1997 et janvier 1998 par des évaluateurs distincts ; que la société AU RAYON D'OR ne saurait sérieusement soutenir que serait discriminatoire l'attribution d'une note de 7 à la disponibilité de ses vendeuses alors que celles-ci recueillent la note maxima de 10 pour leur expérience ou diplômes, leur nombre et la note de 7 pour leur présentation ; Que la société SONAT BEAUTE conteste les notations obtenues en se bornant à affirmer que son magasin est

largement au-dessus de la moyenne de standing requise par la société YVES SAINT LAURENT ; qu'elle conteste cinq notes sur les soixante et une qui lui ont été attribuées ; que même à supposer ces notes révisées, le total des points ne se verrait rehaussé que de onze et n'atteindrait pas ainsi, en tout état de cause, le seuil de 420 fixé par le fabricant ; Que la société FRAMBIE ne conteste plus les notes qui lui ont été attribuées ; que la société YVES SAINT LAURENT a rétabli les relations commerciales avec elle après que lui furent communiqués les justificatifs des diplômes des vendeuses ; Considérant qu'à la suite de l'enquête de visualisation réalisée au mois de juillet 1997, chacune des sociétés appelantes a vu son attention attirée par la société YVES SAINT LAURENT sur la nécessité de remédier à un certain nombre d'insuffisances dont quelques-unes pouvaient faire l'objet d'un traitement efficace et rapide ; qu'aucune des sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE n'allègue ni ne justifie de mesures prises, dans les boutiques, pour répondre aux insatisfactions exprimées par le fabricant ; Que la procédure d'avertissement préalable et le délai de six mois laissé au détaillant pour pallier les insuffisances constatées, sont contractuellement fixés ; qu'ils ont, l'un et l'autre, été respectés par la société YVES SAINT LAURENT ; que les dispositions contractuelles n'envisagent pas le recours à un organisme extérieur pour apprécier la qualité du respect des critères imposés par le fabricant ;

Considérant que les sociétés AU RAYON D'OR, FRAMBIE et SONAT BEAUTE n'avaient pas contesté les notes attribuées à l'occasion des enquêtes de visualisation faites en 1991 et 1992, ni de celles pratiquées en juillet 1997 ; que les appelantes n'ont émis de protestations sur l'objectivité des notations qu'après que leur fut notifiée la résiliation des contrats ; qu'on ne peut à la fois admettre la

pertinence des notations lorsqu'elles aboutissent à la satisfaction des critères de qualité et la rejeter dans le cas contraire ; Considérant qu'elles ont, toutefois, été en mesure de formuler sur les notes qui leur avaient été attribuées en janvier 1998, leurs observations que la société YVES SAINT LAURENT a examinées, procédant alors à des vérifications et corrigeant certaines appréciations ; Considérant enfin que les déclarations unilatérales du dirigeant des sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE à la Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des fraudes, outre le fait qu'elles ont été faites en septembre 1999, alors que la procédure était engagée depuis de nombreux mois, ne sont appuyées d'aucun justificatif et sont donc dépourvues de force probante quant au caractère abusif de la rupture ; que les appelantes ne donnent pas de précision sur la suite qu'aurait donnée à l'affaire cette administration ; Considérant au total que les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE n'apportent pas la preuve qui leur incombe que la société YVES SAINT LAURENT aurait fait de la grille d'évaluation du respect des critères contractuels de qualité un usage discriminatoire ; Qu'à cet égard la simple production de photographies de façades de boutiques moins attrayantes qui seraient agréées par la société YVES SAINT LAURENT ne démontre pas la pratique discriminatoire alléguée, d'autant que la société YVES SAINT LAURENT explique, sans être contredite, qu'elle a réduit, en trois ans et demi, de 10% ses distributeurs en articles parfumants et de 12,5% ceux des produits de beauté ; Que les contestations soulevées par les sociétés appelantes sur quelques-unes des nombreuses notes attribuées à chacune des boutiques ne justifient pas d'avoir recours à une expertise d'autant que les points litigieux portent, pour la plupart, sur des appréciations subjectives qui n'ont pas lieu d'être soumises à

l'examen d'un technicien ; Considérant que les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE sont mal fondées à tirer argument de ce qu'elles ont conservé la qualité de dépositaire d'autres fabricants de produits de parfumerie et de beauté, eu égard à la liberté laissée à chaque fabricant de définir le standard de qualité de son propre réseau ; Considérant que la société FRAMBIE, dont le contrat avait été résilié par lettre du 18 février 1998, a été réintégrée au réseau de distribution sélective après que son conseil ait transmis à la société YVES SAINT LAURENT, le 05 juin 1998, la justification des diplômes du responsable et des personnels ; Que ces insuffisances avaient été relevées dès l'enquête de juillet 1997 qui avait attribué deux notes de 7 plutôt que 10 pour la notation de la compétence professionnelle ; qu'une notation identique en janvier 1998 avait été délivrée alors que le total des points n'était que de 9 inférieur au seuil exigible ; Considérant que la perte par la société FRAMBIE de sa qualité de distributeur agréé entre le 18 février et le 30 juin 1998 ne résulte ainsi que de sa propre carence à communiquer à la société YVES SAINT LAURENT les justificatifs de diplômes de son personnel ; Qu'elle n'est dès lors pas fondée à réclamer à la société YVES SAINT LAURENT l'indemnisation d'un préjudice résultant de cette situation momentanée ; qu'au surplus, elle ne communique aucune justification de celui très élevé de 500.000 francs (76.224,51 euros) dont elle demande l'indemnisation ; Considérant que les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE réclament à la société YVES SAINT LAURENT une somme de 18.618,29 euros en paiement d'une remise de 2% sur le chiffre d'affaires de l'année 1996 ; Que, selon la lettre de proposition émise par la société YVES SAINT LAURENT le 16 février 1996, cette remise, qui s'ajoutait à celles de fin d'année, respectivement de 7 et 12% sur les parfums et les produits de beauté, ainsi qu'à celle

trimestrielle de 8%, pouvait être versée au distributeur en cas de bonne mise en avant dans les linéaires du point de vente des produits parfumants et de soins à la marque, en cas de positionnement du présentoir de maquillage YSL et de respect de l'image ; Que la société YVES SAINT LAURENT a estimé que ces conditions n'avaient pas été satisfaites en 1996 et a fait savoir au dirigeant des sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE, par lettre du 27 février 1997, que la ristourne supplémentaire était refusée ; Considérant que les sociétés appelantes n'ont pas protesté à ce refus et n'ont formulé à nouveau leur prétention à ristourne qu'à l'occasion du litige les opposant au fabricant sur la résiliation des contrats ; Considérant qu'aucune des quatre sociétés n'allègue ni ne justifie qu'elle aurait respecté, en 1996, les conditions contractuelles d'attribution de la ristourne de 2% ; que leur prétention de ce chef n'est, dès lors, pas fondée ; Qu'il résulte de ce qui précède que les sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE doivent être déboutées de toutes leurs demandes et que le jugement entrepris doit recevoir confirmation ; Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la société YVES SAINT LAURENT la charge des frais qu'elle a été contrainte d'engager en cause d'appel ; que chacune des sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE sera condamnée à lui payer une indemnité complémentaire de 1.000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Considérant que les appelantes qui succombent en toutes leurs prétentions doivent être condamnées aux dépens ; PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement entrepris, Y ajoutant, CONDAMNE chacune des sociétés AU RAYON D'OR, RIVOLI BEAUTE, SONAT BEAUTE et FRAMBIE à payer à la société YVES SAINT LAURENT la somme complémentaire de 1.000 euros sur le fondement

de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, LES CONDAMNE in solidum aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP BOMMART-MINAULT, société titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR COUPIN, CONSEILLER PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT M.THERESE GENISSEL

F. LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2000-01943
Date de la décision : 05/09/2002

Analyses

VENTE - Vente commerciale - Distribution sélective - Agrément.

En matière de distribution sélective de produits de luxe, il appartient au seul fabricant de fixer les critères de sélection qu'il souhaite imposer à ses distributeur pour préserver son image de marque et le prestige qu'il entend attacher à ses produits. Il s'ensuit qu'il ne peut être fait grief à un fabricant d'utiliser une grille d'évaluation pour vérifier que chaque point de vente des distributeurs agréés respecte les critères qualitatifs qu'il a lui-même posés, lorsque lesdits critères ont été précisés et définis de manière détaillée dans le contrat de distribution et les conditions générales de vente

VENTE - Vente commerciale - Distribution sélective - Agrément.

Le reproche d'une application discriminatoire des critères de dsitribution sélective par le fabriquant suppose que celui qui l'invoque apporte la démonstration de son allégation. Tel n'est pas le cas d'un distributeur qui affirme que son point de vente se situe au-dessus de la moyenne de standing requise par le fabricant sans qu'à cet égard la simple production de photographies de façades de boutiques moins attrayantes, et néanmoins agréées, soit de nature à démontrer davantage l'existence d'une pratique discriminatoire


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2002-09-05;2000.01943 ?
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