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16/05/2002 | FRANCE | N°01/02356

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16 mai 2002, 01/02356




ED/RMdu 16 MAI 2002 9ème CHAMBRE RG : 01/02356 MX COUR D'APPEL DE VERSAILLES Arrêt prononcé publiquement le SEIZE MAI DEUX MILLE DEUX, par Madame RACT MADOUX, Président de la 9ème chambre des appels correctionnels, en présence du ministère public, Nature de l'arrêt :

CONTRADICTOIRE Suite à ARRET DE RENVOI de la COUR DE CASSATION du 9 MAI 2001 (sur arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 6 MARS 2000) COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, du délibéré et au prononcé de l'arrêt, Président



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Mademoiselle X...

, Monsieur Y..., MINISTÈRE PUBLIC :

Monsieur RENAUT, avocat général. GREFFIER



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Madame Z..., agen...

ED/RMdu 16 MAI 2002 9ème CHAMBRE RG : 01/02356 MX COUR D'APPEL DE VERSAILLES Arrêt prononcé publiquement le SEIZE MAI DEUX MILLE DEUX, par Madame RACT MADOUX, Président de la 9ème chambre des appels correctionnels, en présence du ministère public, Nature de l'arrêt :

CONTRADICTOIRE Suite à ARRET DE RENVOI de la COUR DE CASSATION du 9 MAI 2001 (sur arrêt de la Cour d'appel de PARIS du 6 MARS 2000) COMPOSITION DE LA COUR lors des débats, du délibéré et au prononcé de l'arrêt, Président

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Mademoiselle X..., Monsieur Y..., MINISTÈRE PUBLIC :

Monsieur RENAUT, avocat général. GREFFIER

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Madame Z..., agent administratif assermenté faisant fonction de greffier, PARTIES EN CAUSE Bordereau Nä du MX né filiation ignorée Dirigeant de société, nationalité française, marié demeurant Jamais condamné, libre, non comparant, représenté par Maître DEZEUZE Eric et Maître BELIER Gilles, avocats au barreau de PARIS . PARTIE CIVILE COMITE CENTRAL D'ENTREPRISE DE LA SOCIETE NOUVELLE Domicile élu chez Maître LEVY - 91, Rue Saint-Lazare - 75009 PARIS Représenté par Maître GOSSELIN Xavier (SCP LEVY-GOSSELIN), avocat au barreau dePARIS RAPPEL DE LA PROCÉDURE : LE JUGEMENT : Par jugement contradictoire en date du 17 mai 1999, le tribunal correctionnel de Paris a déclaré MXcoupable de : ENTRAVE AU FONCTIONNEMENT DU COMITE D'ENTREPRISE - INFORMATION OU CONSULTATION OBLIGATOIRE, 20 janvier 1998 , à Paris, infraction prévue par les articles L.483-1 AL.1, L.432-1, L.432-1-1, L.432-2, L.432-2-1, L.432-3, L.432-3-1, L.432-3-2, L.432-4, L.432-4-1, L.431-1-1 AL.1 du Code du travail et réprimée par l'article L.483-1 AL.1 du Code du travail SUR L'ACTION PUBLIQUE l'a condamné à une amende délictuelle de 25.000 frs ; SUR L'ACTION CIVILE a déclaré recevable la constitution de partie civile du COMITE CENTRAL d'ENTREPRISE de la SOCIETE NOUVELLE ; a condamné M. MX à payer au COMITE CENTRAL d'ENTREPRISE de la SOCIETE NOUVELLE, partie civile, la somme de UN FRANC à titre de dommages-intérêts, et en outre, la somme de 2.500 frs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; a débouté la partie civile poursuivante du surplus de ses demandes ; LES APPELS : Appel principal a été interjeté par : Monsieur MX, le 21 mai 1999 Monsieur le Procureur de la République, le 21 mai 1999 ARRET DE LA COUR D'APPEL DE PARIS Par arrêt en date du 6 mars 2000, la Cour d'appel de PARIS : a reçu l'appel du prévenu et du ministère public, a infirmé le jugement entrepris, a relaxé le prévenu des fins de la poursuite, a débouté la partie civile de ses demandes ; POURVOI Pourvoi a été formé par le COMITE CENTRAL d'ENTREPRISE de la SOCIETE NOUVELLE ; ARRET DE LA COUR DE CASSATION Par arrêt en date du 9 mai 2001, la Cour de Cassation :

a cassé et annulé, mais en ses seules dispositions civiles, l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de PARIS en date du 6 mars 2000 et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi , a renvoyé la cause et les parties devant la Cour d'appel de VERSAILLES, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; a ordonné l'impression dudit arrêt, sa transcription sur les registres du

greffe de la Cour d'appel de PARIS, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; DÉROULEMENT DES DÉBATS : A l'audience publique du 28 Février 2002, Madame le Président a fait appeler le prévenu qui ne comparait pas mais est représenté par ses conseils ; Ont été entendus : Madame RACT MADOUX, président, en son rapport, Maître GOSSELIN en ses plaidoirie et conclusions, pour la partie civile, Monsieur RENAUT, avocat général, s'en rapporte, Maîtres DEZEUZE et BELIER, en leurs plaidoiries et conclusions, pour le prévenu, Les conseils du prévenu ont eu successivement la parole en dernier. Madame le président a ensuite averti les parties que l'arrêt serait prononcé à l'audience du 16 MAI 2002 conformément à l'article 462 du code de procédure pénale. DÉCISION 5La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, jugeant publiquement, a rendu l'arrêt suivant : RAPPEL DES FAITS - PROCEDURE - ARGUMENTS DES PARTIES La cour se réfère expressément, pour l'exposé des faits, aux énonciations du jugement ; il suffit de mentionner que, courant 1997, la SOCIETE CE a engagé, d'une part, une réorganisation de l'un de ses "pôles", concernant 45 sociétés et 13.500 salariés, avec concentration des effectifs du personnel, et d'autre part, des négociations syndicales en vue de signer un accord d'entreprise sur l'organisation et la gestion du temps de travail ; un "accord-cadre" a été signé le 20 janvier 1998 entre D C, président du pôle considéré et deux organisations syndicales CFDT et CFTC, portant sur "la réduction, l'aménagement et l'organisation du temps de travail et sur l'emploi", avec notamment application de la réduction du temps de travail à 35 heures par semaine, voire à 32 heures, engagement de réaliser une augmentation nette des emplois, diminution des salaires, en contrepartie de la réduction du temps de travail ; Le COMITE CENTRAL D'ENTREPRISE (CCE) soutient qu'il n'a pas été informé, ni consulté préalablement à la signature de cet accord puisqu'il n'a été

convoqué que le 19 janvier pour une réunion fixée au 28 janvier ; M. MX et M. DC ont été cités directement devant le tribunal correctionnel de PARIS le 19 octobre 1998, par le COMITE CENTRAL d'ENTREPRISE de la SOCIETE NOUVELLE (anciennement CE) pour avoir, en leur qualité de président de droit du CCE et de président par délégation du CCE, commis le délit d'entrave au fonctionnement de cet organisme, délit prévu et réprimé par l'article L483-1 du code du travail, pour défaut d'information et de consultation du CCE, préalable à la signature de l'accord d'entreprise en date du 20 janvier 1998 ; La partie civile sollicitait la somme de un franc à titre de dommages-intérêts, celle de 10.000 frs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, ainsi que la publication du jugement à intervenir dans les deux journaux de la SOCIETE CE ; Par jugement contradictoire (article 411 du Code de procédure pénale ) du tribunal correctionnel de PARIS en date du 17 mai 1999, M. MX a été reconnu coupable de ces faits et condamné à une amende de 25.000 frs ; sur intérêts civils, il a été condamné à payer au CCE de la SOCIETE NOUVELLE, la somme de un franc à titre de dommages-intérêts et celle de 2.500 frs au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale , la partie civile étant déboutée du surplus de sa demande ; M. DC a été relaxé des fins de la poursuite ; MX a interjeté appel de ce jugement le 21 mai 1999 ; Le ministère public a interjeté appel incident le même jour, seulement à l'encontre de MX ; Par arrêt du 6 mars 2000, la cour d'appel de PARIS a infirmé le jugement entrepris et relaxé MX des fins de la poursuite, au motif que le défaut de consultation du CCE au sujet d'un accord signé par la direction était imputable au prévenu, en tant que chef d'entreprise et non pas en tant que président du CCE "qualité où il a été poursuivi" ; Sur le pourvoi formé par le CCE de la SOCIETE NOUVELLE, la chambre criminelle de la Cour de Cassation, par arrêt du

9 mai 2001, a cassé et annulé, en ses seules dispositions civiles, l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, pour manque de base légale, au motif que "la juridiction correctionnelle était saisie du délit d'entrave reproché à M. MX, président de la SOCIETE NOUVELLE, indépendamment de la qualité mentionnée à la citation" ; l'affaire a été renvoyée devant la cour d'appel de VERSAILLES ; Devant cette cour, le conseil de MX fait valoir que le projet de réorganisation du pôle de CE a été remis aux représentants du personnel, en vue de la réunion du CCE du 1er juillet 1997 ; qu'il a été décidé d'instaurer des commissions ad'hoc, "une commission sociale" , regroupant la direction et des représentants des organisations syndicales, chargée d'une réflexion sur l'aménagement et la réduction du temps de travail, ainsi qu'une commission économique ; Que le CCE a été régulièrement tenu informé des travaux de cette commission sociale, notamment lors de sa réunion du 16 septembre 1997, un accord d'étape ayant été arrêté le 28 août 1997et signé le 17 septembre 1997 ; qu'une nouvelle consultation du CCE a eu lieu le 6 octobre 1997, lequel a donné son avis sur la première phase de réorganisation du pôle eau et a été informé des phases ultérieures prévues pour la consultation ; qu'à la suite des travaux de la commission sociale, un accord-cadre qui ne constituait que la suite logique de l'accord préalable des 28 août et 17 septembre 1997 a été signé le 20 janvier 1998 ; Cet accord renvoyait pour l'application pratique de certaines de ses dispositions à une mise au point, après concertation avec le personnel et consultation des instances représentatives du personnel et éventuellement expérimentation ; conformément au calendrier convenu, MX a donc réuni le 28 janvier 1998 le comité d'entreprise pour examiner avec lui, les conséquences de cet accord ; Le prévenu considère donc que la consultation sur les principes posés par cet accord, qui avait déjà eu lieu, dès le mois d'octobre 1997, n'avait

pas à être renouvelé en janvier 1998 ; La défense soulève en outre l'irrecevabilité de la constitution de partie civile du CCE de la SOCIETE NOUVELLE, au regard de la jurisprudence de l'assemblée plénière de la Cour de Cassation du 25 février 2000, selon laquelle le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant, n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers ; le conseil de MX rappelle que cette jurisprudence a été étendue à la responsabilité civile personnelle du dirigeant social, par la chambre commerciale, par arrêts des 3 avril 2001 et 9 et 22 mai 2001 ; Selon ces décisions, la responsabilité personnelle du dirigeant social à l'égard de tiers ne peut être retenue que s'il a commis une faute détachable de ses fonctions, et qui lui soit imputable personnellement ; en outre, en matière pénale, un arrêt du 14 décembre 2001 a limité la responsabilité civile personnelle du préposé à l'égard de tiers aux infractions intentionnelles ayant donné lieu à condamnation pénale ; En l'espèce, la responsabilité civile de MX étant recherchée pour des actes commis dans l'exercice de ses fonctions, et MX ne pouvant faire l'objet d'une condamnation pénale, sa relaxe devant la cour d'appel de PARIS étant devenue définitive, en l'absence de pourvoi du ministère public, la demande du CCE de la SOCIETE NOUVELLE serait irrecevable ; A titre subsidiaire, le prévenu soutient que, selon la citation qui, seule saisit le tribunal, il est reproché à MX, es-qualité de président de droit du CCE, d'avoir commis le délit d'entrave ; c'est donc le rôle de ce dernier au sein du CCE qui est remis en cause, et non pas son rôle dans la signature de l'accord ; or, MX n'a pas présidé la séance du CCE du 8 décembre 1997 qui est la dernière ayant précédé la signature de l'accord du 20 janvier 1998, la présidence en ayant été assurée par M. A... ; la responsabilité du délit d'entrave ne peut donc lui être imputée ; En retenant la culpabilité de MX, en qualité de

chef d'entreprise pour ne pas s'être assuré que le CCE avait été informé et consulté préalablement à la signature de l'accord d'entreprise, le tribunal aurait statué au-delà de sa saisine, d'autant que MX n'avait pas été invité à s'expliquer sur ces faits en méconnaissance de l'article 6 OE 1 de la convention européenne ; Il fait, en outre, valoir que les pouvoirs de négocier et signer l'accord litigieux avaient été délégués par un acte du 1er juin 1997 par MX à M. DC, en sa qualité de président du pôle considéré de la SOCIETE CE qui a pleinement assumé sa responsabilité lors de l'audience devant le tribunal correctionnel, en expliquant que la procédure avait été accélérée "pour des questions matérielles de feuille de paie et non pour court-circuiter le CCE" ; Enfin, sur les éléments constitutifs du délit d'entrave, le prévenu, après avoir rappelé l'effectivité d'une consultation préalable à la signature de l'accord du 20 janvier 1998, souligne que la jurisprudence sociale (notamment un arrêt du 5 mai 1998 de la Cour de Cassation) ne fixe pas un moment unique et précis pour la consultation préalable à la conclusion d'un accord collectif entrant dans la compétence du comité d'entreprise, celle-ci pouvant avoir lieu à un moment quelconque situé entre l'engagement des négociations et la conclusion de l'accord, sans qu'il soit nécessaire de réitérer la consultation à chaque étape de la négociation ; il déduit de cette incertitude du droit que l'élément intentionnel n'est nullement caractérisé à son encontre, et à tout le moins, qu'il peut bénéficier des dispositions de l'article 122-3 du code pénal sur l'erreur de droit ; Il sollicite donc que la partie civile soit déboutée de l'ensemble de ses demandes ; Le conseil de la partie civile répond que, selon la dernière jurisprudence de l'assemblée plénière de la Cour de Cassation, la responsabilité civile du dirigeant d'une société à l'égard des tiers est engagée lorsque celui-ci a été condamné pénalement pour une

infraction commise intentionnellement ; tel serait le cas en l'espèce pour MX à l'encontre de qui les éléments constitutifs du délit d'entrave sont réunis ; En effet, le contenu de l'accord portait sur les domaines de compétence du CCE et dès lors qu'il n'y a pas de hiérarchie entre les textes régissant la négociation collective et ceux relatifs à la consultation du comité d'entreprise, cette dernière était obligatoire et ne pouvait être remplacée par la négociation collective au sein d'une "commission sociale ad'hoc" ; Il rappelle que la question de l'aménagement et de la réduction du temps de travail n'avait été évoquée que de manière résiduelle au cours des réunions de 1997 du CCE ; Quant à l'accord étape du 17 septembre 1997, il ne constituerait qu'une pétition de principe, très différente des mesures concrètes figurant dans l'accord d'entreprise signé le 20 janvier 1998 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail, distinguant notamment les modes de rémunération ou de récupération des heures supplémentaires "en astreinte" ou "hors astreinte" ; La seule version, suffisamment précise, et dont le contenu était détaillé, et sur laquelle le CCE aurait pu émettre un avis motivé était celle qui a été élaborée le 13 janvier 1998 par "la commission sociale", mais qui n'a jamais été soumise au CCE avant la signature en date du 20 janvier 1998 ; Il considère que, sauf à remettre en cause ce qui a été jugé par la chambre criminelle de la Cour de Cassation, ces faits compris dans la saisine in rem du tribunal, sont bien imputables à MX, en sa qualité de président de la SOCIETE CE. ; Dès lors que celui-ci n'avait pas consenti de délégation de pouvoir effective et permanente, ni de ses fonctions de président du comité d'entreprise, ni de celles de chef d'entreprise, président de la SOCIETE NOUVELLE chargé notamment de la négociation de l'accord avec les organisations syndicales, la partie civile sollicite la confirmation du jugement du tribunal correctionnel de

PARIS en ce qu'il a condamné MX à verser au CCE de la SOCIETE NOUVELLE la somme de 0,5 ä à titre de dommages-intérêts et réclame une somme de 6.100 ä en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Motifs de la cour - sur la recevabilité de la constitution de partie civile du CCE de la SOCIETE NOUVELLE Le ministère public n'ayant pas formé de pourvoi à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, en date du 6 mars 2000, qui a relaxé M. MX du chef d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise, la cour de renvoi, statuant après cassation des dispositions civiles de l'arrêt, ne pourra prononcer aucune peine contre le prévenu, mais devra rechercher si les éléments constitutifs du délit d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise sont réunis à l'encontre de MX et se prononcer sur l'action civile ; Alors même que MX ne pourra donc être condamné pénalement et que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas séparables de ses fonctions de président du conseil d'administration de la SOCIETE CE (SOCIETE NOUVELLE), le CCE de la SOCIETE NOUVELLE apparaît recevable à agir pour voir reconnu par le juge pénal les éléments constitutifs de ce délit, et voir retenue la responsabilité personnelle de M B..., dès lors que cette infraction suppose l'existence d'une faute pénale intentionnelle, et que selon l'article 2 du Code de procédure pénale toujours en vigueur, l'action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ; en l'espèce, à supposer constitué le délit d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise, ce dernier aurait directement souffert du défaut d'information et de consultation préalablement à la signature d'un accord d'entreprise ; L'exception d'irrecevabilité de l'action de la partie civile sera dès lors rejetée ; - sur l'élément matériel du délit Comme l'ont relevé justement les premiers juges, l'article

L432-1 du code du travail dispose que dans l'ordre économique, le comité d'entreprise est obligatoirement informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, et notamment, sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle du personnel ; En outre, selon l'article L431-5, la décision du chef d'entreprise doit être précédée par la consultation du comité d'entreprise ; pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d'entreprise doit disposer d'informations précises et écrites transmises par le chef d'entreprise, d'un délai d'examen suffisant et de la réponse motivée du chef d'entreprise à ses propres observations ; il résulte de la combinaison de ces deux textes que la signature d'un accord collectif d'entreprise qui constitue une décision du chef d'entreprise et qui porte sur la réorganisation de l'ensemble des sociétés du pôle eau, sur l'aménagement et la réduction du temps de travail, devait être précédée de la consultation du comité d'entreprise ; En l'espèce, il est établi, au vu de l'analyse des différents procès-verbaux des réunions du CCE de l'année 1997, qu'une telle consultation n'a pas eu lieu au plus tard avant la signature de l'accord-cadre intervenue le 20 janvier 1998, signé par M. DC, président du "pôle " déjà évoqué de la SOCIETE CE et par deux organisations syndicales, la CFDT et la CFTC, alors qu'y étaient évoquées des questions très précises, telles que la réduction du temps de travail à 35 heures par semaine avec expérimentation à 32 heures, la mise en place du travail à temps choisi, l'engagement de réaliser une augmentation d'emplois, la réduction des salaires et le gel provisoire de certains éléments de rémunération, autant de questions relevant toutes de l'article L432-1 ci-dessus mentionné ; La défense ne saurait valablement soutenir que cette information

avait été donnée dans le cadre de l'accord d'étape du 28 août 1997, dès lors que celui-ci ne constituait qu'une annonce vague et imprécise des objectifs et des principes généraux à respecter et prévoyait que les modalités d'application du futur accord-cadre devaient encore être étudiées entre les partenaires sociaux ; Dès lors, seule la version du projet d'accord élaborée lors de la réunion de la commission sociale, laquelle n'a jamais été remise au CCE, qui s'est tenue le 13 janvier 1998 contenait des éléments suffisamment déterminés pour permettre un avis motivé du CCE ; enfin, comme l'ont également relevé les premiers juges, la "commission sociale", créée contractuellement entre la direction et les syndicats au sein de laquelle a été élaboré l'accord signé le 20 janvier 1998, n'avait pas à se substituer au comité central d'entreprise qui conservait ses prérogatives légales ; L'élément matériel de l'infraction visée par la prévention apparaît dès lors caractérisé ; - sur l'imputabilité des faits à M. MX et sur l'élément intentionnel de l'infraction Il résulte de l'analyse des articles susvisés que même lorsqu'il confie à un représentant le soin de présider le comité d'entreprise , le chef d'entreprise doit, lorsqu'il prend une mesure entrant dans les prévisions de l'article L432-1 du code du travail, s'assurer de la consultation du comité, sans pouvoir opposer l'argument pris d'une délégation de pouvoirs ; En l'espèce, c'est donc à MX, président de la SOCIETE NOUVELLE (SOCIETE CE à l'époque des faits) qu'il appartenait de s'assurer de la consultation du CCE, dès lors qu'il n'a jamais délégué, de façon permanente, ni son rôle de chef d'entreprise, ni sa fonction de président du CCE, comme le démontrent ses prises de position personnelles sur la réorganisation et l'aménagement du temps de travail et ses déclarations lors de la séance du CCE du 16 septembre 1997 relatives au calendrier qui sera suivi sur les phases de la consultation envisagée ; il considérait en

effet que, dans une premier temps, il y aurait une information-consultation du CCE sur les "principes généraux" de la réorganisation et sa mise en oeuvre ; "dans une deuxième phase éventuelle, si un accord sur la réduction du temps de travail était trouvé, le CCE serait consulté sur les conséquences de cet accord sur l'organisation du travail" ; Il est ainsi démontré que, quelles que soient les délégations de pouvoir que MX a pu consentir à des membres de la direction, pour présider ponctuellement le CCE ou signer l'accord du 20 janvier 1998, celui-ci a volontairement pris la décision de ne pas consulter le CCE, préalablement à la signature de l'accord collectif, en estimant que cet organisme ne devait être consulté que sur "les conséquences de l'accord", alors que la direction avait été avisée par M. C..., secrétaire du CCE de la nécessité de consulter celui-ci avant la signature de l'accord ; l'élément intentionnel de l'infraction imputable à MX est également caractérisé ; Il convient donc de confirmer le jugement du tribunal en ce qu'il a déclaré réunis, à l'encontre de MX, les éléments constitutifs du délit d'entrave au fonctionnement du CCE ; Sur la responsabilité personnelle de MX à l'égard de la partie civile, il y a lieu, ainsi que cela a été mentionné plus haut, de considérer qu'alors même que la faute qu'il a commise n'est pas séparable de ses fonctions de dirigeant de la SOCIETE NOUVELLE, MX a engagé sa responsabilité personnelle, dès lors qu'a été reconnue par la cour la réunion, à son encontre, des éléments constitutifs d'une infraction intentionnelle ; il sera donc condamné à payer à la partie civile la somme de 0,15 ä à titre de dommages-intérêts et celle de 4.000 ä pour l'ensemble des frais de procédure ; PAR CES MOTIFS et ceux non contraires des premiers juges, LA COUR, après en avoir délibéré , Statuant publiquement, et contradictoirement, VU l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 9 mai 2001, ayant cassé et annulé l'arrêt de

la cour d'appel de PARIS du 6 mars 2000 en ses seules dispositions civiles, Statuant sur l'action civile, DECLARE RECEVABLES en la forme les appels de M. MX et du ministère public, DECLARE RECEVABLE la constitution de partie civile du COMITE CENTRAL D'ENTREPRISE (CCE) de la SOCIETE NOUVELLE, CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a retenu, à l'encontre de M. MX, les éléments constitutifs du délit d'entrave au fonctionnement régulier du CCE, en l'absence de convocation et de consultation de cet organisme, préalablement à la signature de l'accord du 20 janvier 1998, faits prévus et réprimés par les articles L435-1, L432-2, L483-1 du code du travail, DECLARE M. MX personnellement responsable des conséquences dommageables de cette infraction, LE CONDAMNE à verser à la partie civile, la somme de 0,15 à titre de dommages-intérêts, et celle de 4.000 sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; LE CONDAMNE aux dépens ; Et ont signé le présent arrêt, le président et le greffier.

LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 01/02356
Date de la décision : 16/05/2002
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2002-05-16;01.02356 ?
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