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14/02/2002 | FRANCE | N°JURITEXT000006939649

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14 février 2002, JURITEXT000006939649


La Société COLAS a confié à la Société TRANSPORT PARIS INTERNATIONAL - TPI - le soin d'acheminer et de lui livrer vingt-cinq colis de matériels de travaux publics de 196,386 tonnes, de VIEUX-FORT (Sainte-Lucie) à NOSY-BE (Madagascar). La Société TPI s'est adressée pour le transport maritime à la société de droit danois Z... SHIPPING, armateur du navire "INGER Z..." qu'elle a affrété suivant charte partie au voyage du 02 juillet 1992. Les équipements ont été transportés sous couvert d'un connaissement de charte partie émis à SAINT-CLOUD le 19 juillet 1992, sur le navire "I

NGER Z..." qui est arrivé au port de NOSY-BE le 24 août 1992 à 10h 25...

La Société COLAS a confié à la Société TRANSPORT PARIS INTERNATIONAL - TPI - le soin d'acheminer et de lui livrer vingt-cinq colis de matériels de travaux publics de 196,386 tonnes, de VIEUX-FORT (Sainte-Lucie) à NOSY-BE (Madagascar). La Société TPI s'est adressée pour le transport maritime à la société de droit danois Z... SHIPPING, armateur du navire "INGER Z..." qu'elle a affrété suivant charte partie au voyage du 02 juillet 1992. Les équipements ont été transportés sous couvert d'un connaissement de charte partie émis à SAINT-CLOUD le 19 juillet 1992, sur le navire "INGER Z..." qui est arrivé au port de NOSY-BE le 24 août 1992 à 10h 25, le déchargement a débuté le même jour. La Société Malgache de Batelage de NOSY-BE, SOBANO, a procédé à cette fin à la manutention des marchandises à l'aide des grues de 20 tonnes du navire "INGER Z..." en fournissant le matériel d'élingage. Le 25 août 1992 à 13heures 45, lors du déchargement du dernier colis (un tambour sécheur TMS 15 d'une masse de 24 T 400), une élingue a cassé, ce qui a entraîné la chute d'environ trois mètres de ce matériel qui a subi consécutivement d'importants dommages. A la requête de la Société Auxiliaire Maritime de MADAGASCAR - AUXIMAD, consignataire de la cargaison agissant pour le compte de la Société COLAS, le Président du Tribunal de NOSY-BE a, par ordonnance du 02 septembre 1992, désigné la Compagnie des Experts Maritimes de MADAGASCAR - CEMM -, en qualité d'expert, laquelle a évalué les dommages à la somme de 384.435.032 FMG, soit 1.067.756 FF (162.778,48 euros). Les SA Compagnies COMMERCIAL UNION ASSURANCES et PRESERVATRICE FONCIERE THIARD et le GIE GROUPE CONCORDE ont indemnisé la Société COLAS, propriétaire et destinataire de la marchandise, à hauteur de 938.727.88 francs (143.108,14 euros). Puis ces assureurs, subrogés à due concurrence dans les droits de cette dernière, et la Société COLAS au titre du solde de 129.029 francs (19.670,34 euros) resté à sa charge, ont saisi le 23 août 1993 le Tribunal de Commerce

de NANTERRE aux fins d'obtenir la condamnation du Commandant du navire "INGER Z..." et des Sociétés Z... SHIPPING, SOBANO, TPI, SCAC et de la SARL MARITIME INTERNATIONAL TRANSPORTATION - MIT - courtier, en paiement de ces sommes. La Société TPI a appelé en garantie la société de droit danois PARTREDERI INGER Z..., armateur du navire "INGER Z...", l'Association de droit danois SKULD, Club de Protection et d'indemnité du navire, et les Sociétés Z... SHIPPING, MIT et SOBANO. Par jugement rendu le 14 février 1997, cette juridiction a condamné solidairement les Sociétés TPI, PARTREDERI INGER Z..., Z... SHIPPING, MIT, SOBANO et le P and I Club SKULD à payer aux Compagnies COMMERCIAL UNION, PRESERVATRICE FONCIERE ASSURANCES et GROUPE CONCORDE la somme de 938.727 francs (143.108,01 euros) et à la Société COLAS celle de 129.029 francs (19.670,34 euros), majorées des intérêts légaux à compter du 23 août 1992, en limitant ces condamnations à la contre-valeur en francs français de 1.990,05 DTS par kilo de marchandise endommagée pour les sociétés PARTREDERI INGER Z..., Z... SHIPPING, MIT et Petamp; I CLUB SKULD, et à celle de 46.000 DTS pour TPI, ordonné l'exécution provisoire, alloué une indemnité de 5.000 francs (762,25 euros) à chacune des demanderesses, et condamné toutes les autres parties sous la même solidarité aux dépens. Les Sociétés PARTREDERI INGER Z..., Z... SHIPPING et SKULD ont interjeté appel de cette décision à l'encontre des Sociétés TRANSPORT PARIS INTERNATIONAL, COLAS, PRESERVATRICE FONCIERE, Compagnie GROUPE CONCORDE et Compagnie COMMERCIAL UNION. Par arrêt en date du 11 mai 2000, la Cour a relevé qu'il convenait de déduire des termes du connaissement du 19 juillet 1992, faisant corps avec la charte partie signée le 02 juillet 1992, que, lorsque la Société TPI, commissionnaire de transport avait, le 02 juillet 1992, affrété le navire "INGER Z..." exclusivement pour le voyage de la marchandise de SAINTE LUCIE à MADAGASCAR, elle avait nécessairement agi pour le

compte de la Société COLAS en sorte que cette dernière était bien affréteur au voyage. Avant-dire-droit, elle a rouvert les débats et invité les parties à s'expliquer sur les conséquences juridiques susceptibles de découler de cet élément, dans la mesure où la Société COLAS pourrait, en qualité d'affréteur, se voir opposer des dispositions de la charte partie. Les Sociétés PARTREDERI INGER Z..., Z... SHIPPING et SKULD font valoir que c'est à tort que les premiers juges ont apprécié le litige sous l'angle du contrat de transport maritime, alors que tout démontre que l'armateur et la Société COLAS, propriétaire de la cargaison endommagée, étaient liés par des relations contractuelles tirées de la charte partie au voyage. Elles soutiennent qu'en vertu du régime juridique de droit commun de l'affrètement au voyage, et conformément à la clause 5 (b) de la charte partie, la manutention au déchargement incombait non au navire mais au réceptionnaire ou à l'affréteur. Elles relèvent que si, en application de la clause 33 de la charte partie, le navire aurait pu se voir imposer de fournir les élingues, en l'occurrence le manutentionnaire SOBANO, dûment mandaté par et agissant pour le compte, non du navire, mais de la Société COLAS, réceptionnaire de la cargaison et affréteur du navire, a catégoriquement refusé les élingues et l'assistance du navire. Elles observent que la Société COLAS, de qui les assureurs intimés tirent leurs droits, a expressément reconnu que le déchargement avait été effectué sous la responsabilité de SOBANO. A titre subsidiaire, elles relèvent que la responsabilité de l'armateur ne saurait davantage être retenue, même sous le régime du transport maritime, que ce soit par référence aux stipulations du contrat ou au titre de la Convention de BRUXELLES applicable s'agissant d'un transport international. A cet égard, elles expliquent que le sinistre a résulté entièrement d'une cause extérieure à l'armateur et aux préposés de ce dernier, puisqu'elle a

pour origine la mauvaise exécution des opérations de déchargement réalisées sous la responsabilité de SOBANO, qui était le préposé, non de l'armateur, mais de la Société COLAS, destinataire de la marchandise. Aussi, les sociétés appelantes demandent à la Cour d'infirmer le jugement déféré, et de dire que, tant sous l'angle du contrat d'affrètement que sous celui du contrat de transport maritime, et notamment par application de l'article 4(2) (q) de la Convention de Bruxelles, elles ne sauraient se voir imputer une quelconque responsabilité dans la réalisation du sinistre. En conséquence, elles sollicitent la condamnation des Compagnies et Sociétés COMMERCIAL UNION, GENERALI TRANSPORTS, PRESERVATRICE FONCIERE THIARD et COLAS à restituer à la Société SKULD la somme de 474.487,42 francs français (72.335,14 euros) versée en application de l'exécution provisoire dont était assorti le jugement déféré, majorée des intérêts légaux à compter de la date de paiement, soit le 27 août 1997. Elles réclament en outre à ces mêmes sociétés la somme de 50.000 francs (7622,45 euros) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. La Société TRANSPORT PARIS INTERNATIONAL expose que, dès lors que le navire avait été affrété aux conditions "FREE OUT" qui laissent au réceptionnaire, en l'occurrence la Société COLAS, le soin et la responsabilité du déchargement, elle n'avait aucune obligation de suivre personnellement cette opération à NOSY-BE. Elle estime n'avoir commis aucune faute dans le choix du navire, lequel était équipé pour procéder au déchargement des colis lourds. Se prévalant de l'absence de tout manquement dans l'exécution de son mandat, elle demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de débouter la Société COLAS et les compagnies d'assurances CGU COURTAGE, AGF MAT et GIE GENERALI TRANSPORT de leurs réclamations à son encontre, et de les condamner à lui restituer et, en tant que besoin, à lui payer la somme de 477.007,53 francs, soit

72.719,33 euros, versée par elle en vertu de l'exécution provisoire dont est assortie la décision. Subsidiairement, au cas où une condamnation serait prononcée à son encontre, la Société TPI sollicite la fixation de l'indemnité à un montant qui ne saurait excéder l'équivalent en euros de 48.800 DTS, et elle conclut au débouté de la Société COLAS et des assureurs du surplus de leur prétention. Elle demande que, dans cette hypothèse, les Sociétés PARTREDERI INGER Z..., Z... SHIPPING, SOBANO et SKULD soient condamnées in solidum à la relever et garantir à concurrence des sommes mises à sa charge, et à lui payer une indemnité de 8.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. La Société CGU COURTAGE, nouvelle dénomination de COMMERCIAL UNION ASSURANCES, la Société GENERALI FRANCE ASSURANCES, venant aux droits du GIE GENERALI TRANSPORTS, la Société AGF MAT, venant aux droits de la PRESERVATRICE FONCIERE THIARD, et la Société COLAS, répliquent que la circonstance que le connaissement émis le 19 juillet 1992 porte la mention en qualité de chargeur de : "TPI pour le compte de COLAS", et en qualité de destinataire de : "COLAS", ne donne nullement à cette dernière la qualité d'affréteur au voyage. Elles relèvent que l'affréteur stipulé sur la charte partie (laquelle n'a pas été signée par la Société COLAS et qui lui est inopposable) est uniquement la Société TPI, et aucunement la Société COLAS, celle-ci n'apparaissant qu'en tant que chargeur. Elles observent que le connaissement précité fait référence à une charte partie en date, non pas du 02 juillet 1992, mais du 13 juillet 1992, qui n'a jamais été versée aux débats. Elles concluent que l'affréteur au voyage et transporteur demeure la Société TPI, qui ne l'a d'ailleurs jamais contesté pendant huit années de procédure. Elles soutiennent qu'en application des clauses 6 b et 28 de la charte partie du 2 juillet 1992, la responsabilité du déchargement incombait nécessairement à l'affréteur TPI qui, seul, a

signé cette charte partie. Elles indiquent qu'en sa qualité de commissionnaire de transport, la Société TPI doit répondre, conformément aux dispositions des articles 3, 5 et 7 de la Convention de Bruxelles, des fautes imputables au transporteur maritime. Elles précisent que la Société TPI a également commis une faute personnelle en n'étant pas présente au déchargement, et en ne donnant pas les instructions nécessaires pour le suivi de l'opération et le choix d'un matériel adapté au déchargement des marchandises transportées. Elles font valoir que la responsabilité des Sociétés PARTREDERI INGER Z... et Z... SHIPPING est engagée sur le fondement des articles 19, 32 et 33 de la charte partie, dans la mesure où il incombait à l'armateur de fournir des élingues adaptées pour réaliser le déchargement des colis litigieux. Par voie de conséquence, les sociétés intimées concluent à la confirmation du jugement entrepris, sauf à ajouter que les intérêts devront être capitalisés, et hormis en ce qu'il a accueilli les limitations de responsabilité invoquées par les autres parties. Subsidiairement, au cas où la Société COLAS serait qualifiée de transporteur et affréteur au voyage, elles considèrent que tant la Société TPI, commissionnaire de transport, que l'armement doivent répondre des fautes personnelles particulièrement graves qui sont à l'origine du présent sinistre. Dans cette hypothèse, elles sollicitent la condamnation des Sociétés PARTREDERI INGER Z..., Z... SHIPPING et SKULD, solidairement ou in solidum avec les Sociétés TPI et SOBANO, à hauteur des mêmes montants que ceux retenus par le Tribunal. De plus, elles concluent à leur condamnation à payer, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, la somme de 80.000 francs (12.195,92 euros) aux compagnies d'assurances subrogées, et celle de 40.000 francs (6.097,96 euros) à la société COLAS. Par ailleurs, elles demandent qu'en cas d'infirmation de tout chef du jugement assorti de

l'exécution provisoire, il soit précisé que les intérêts légaux sur les sommes à restituer ne pourront courir antérieurement à la signification de l'arrêt à intervenir. Assignée à parquet étranger par acte du 15 février 2001 sur appel provoqué de la Société TRANSPORT PARIS INTERNATIONAL, la Société de Batelage de Nosy-Be, SOBANO, n'a pas comparu. Les diligences accomplies à son égard en vue de lui notifier la présente procédure ont respecté les dispositions des articles 683 et suivants du nouveau code de procédure civile. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 22 novembre 2001. MOTIFS DE LA DECISION : SUR LE REGIME JURIDIQUE DE L'AFFRETEMENT AU VOYAGE APPLICABLE AU PRESENT LITIGE : Considérant qu'aux termes de son arrêt avant-dire-droit du 11 mai 2000, la Cour a déjà relevé que la Société TPI ne discute pas avoir agi pour l'opération en cause en qualité de commissionnaire de transport, et avoir été chargée par la Société COLAS d'organiser le transport, d'acheminer et de lui livrer les équipements de travaux publics ; Considérant qu'à cet égard, il convient de souligner que, selon télécopie du 02 juillet 1992, la Société TPI a fait part à la Société COLAS de ce qu'elle avait "fixé" le navire "INGER Z..." dont elle lui a fourni les caractéristiques, et lui a énoncé l'ensemble des conditions relatives notamment au prix, au délai, au débarquement du matériel et aux modalités d'octroi des "surestaries" tant au port de chargement qu'au port de destination ; Considérant qu'au surplus, il doit être observé que TPI a conclu les contrats nécessaires à l'acheminement des matériels, et, à cette fin, a, selon charte partie au voyage en date du 02 juillet 1992, affrété le navire "INGER Z..." en vue d'assurer l'expédition vers MADAGASCAR ; Considérant qu'il est donc démontré qu'elle disposait d'une entière maîtrise et liberté dans le choix des voies et moyens pour traiter le transport maritime de la marchandise concernée de SAINTE-LUCIE à MADAGASCAR ; Considérant qu'il est

également constant que, le 19 juillet 1992, le commissionnaire de transport TPI, agissant pour le compte de la Société COLAS, ainsi qu'il résulte de la mention "TPI P/C COLAS" figurant dans la case expéditeur, a souscrit un connaissement spécifiant que cette société est réceptionnaire de la marchandise, et faisant expressément référence à une charte partie du 13 juillet 1992 ; Considérant qu'à cet égard, il apparaît que la date du 13 juillet 1992 est manifestement erronée, dans la mesure où elle correspond en réalité à la date de la transmission par télécopie de l'agent MIT à TPI de la seule charte partie du 02 juillet 1992, l'instruction de la procédure n'ayant pas révélé l'existence d'une autre charte partie signée le 13 juillet 1992 ; Considérant que, dès lors, ce connaissement, valant reçu de la marchandise, fait corps avec la charte partie précédemment signée, eu égard à la stipulation "Bill of Lading to be used with charter-parties", pour constituer avec elle une seule et unique convention ; Considérant qu'il suit de là que, ainsi que la Cour l'a énoncé aux termes de son arrêt avant-dire-droit, lorsque la Société TPI, commissionnaire de transport, avait quelques jours plus tôt affrété le navire "INGER Z..." exclusivement pour l'expédition de SAINTE-LUCIE à MADAGASCAR de la marchandise litigieuse, elle avait nécessairement agi pour le compte de la Société COLAS ; Considérant que, pour conclure à l'inopposabilité à son égard des stipulations de la charte partie du 02 juillet 1992, la Société COLAS fait valoir qu'elle est demeurée étrangère à l'établissement de ce document, dont elle n'a pas eu connaissance avant et pendant le transport, et qui ne contient pas la mention expresse que la Société TPI aurait affrété pour son compte le navire "INGER Z..." devant transporter la marchandise en cause ; Mais considérant qu'il convient d'observer que le commissionnaire de transport a conclu cette charte partie avec la Société MIT, agent de l'armateur Z... SHIPPING, aux conditions

qu'elle avait proposées à sa mandante dans son fax du 02 juillet 1992 et que celle-ci avait acceptées ; Considérant qu'il doit être rappelé qu'aux termes de cette télécopie, la Société TIP a confirmé à la Société COLAS qu'elle avait "fixé" le navire "INGER Z...", que les conditions du transport étaient "FREE OUT" (bord navire) au port de destination, et que cette société disposait de 48 heures pour débarquer la totalité du matériel, le non respect de ce délai devant entraîner le paiement de "surestaries" ; Considérant que, dès lors, au regard de ces stipulations spécifiques à l'affrètement au voyage, la Société COLAS n'a pu se méprendre sur le régime juridique applicable au transport litigieux ; Considérant qu'il en résulte d'une part que la Société COLAS était affréteur au voyage, et d'autre part que les clauses de la charte partie, reproduisant les conditions du contrat de commission de transport conclu par elle avec la Société TPI, lui sont opposables. SUR L'ABSENCE DE RESPONSABILITE DE L'ARMATEUR SOUS CE REGIME JURIDIQUE : Considérant que, selon le rapport d'expertise établi le 18 novembre 1992 par le C.E.M. MADAGASCAR : "le résultat du calcul des diamètres des câbles sur feuille en annexe montre que les câbles utilisés au débarquement du T.S.M. étaient sous dimensionnés; les diamètres doivent être supérieurs à 16 mm. Donc l'utilisation de l'élingue dont les câbles sont de 14 mm, qui ont cédé en premier lieu, est la cause du sinistre..." ; Considérant que les conclusions de ce rapport d'expertise, qui ne sont pas discutées, mettent donc clairement en évidence la responsabilité de la Société SOBANO, qui a fourni et utilisé ces élingues pour effectuer les opérations de manutention, à l'origine de l'avarie litigieuse ; Or considérant qu'il résulte de la clause 5 (b) de la charte partie applicable en l'occurrence que: "le déchargement sera effectué par les affréteurs ou leurs agents, sans aucun risque, responsabilité ou frais de quelque nature que ce soit

pour les armateurs" ; Considérant qu'au demeurant, cette clause ne déroge nullement aux règles en vigueur sous le régime de l'affrètement au voyage, dès lors que les opérations de chargement et déchargement de la marchandise, entrant dans le cadre de l'exploitation commerciale du navire, incombent normalement à l'affréteur ; Considérant qu'au surplus, si la clause 33 de la charte partie fait obligation au navire de fournir les élingues, la Société Z... SHIPPING précise toutefois, dans une télécopie adressée le 27 août 1992 à l'agent MIT, s'être heurtée au refus du manutentionnaire, lequel a préféré utiliser son propre matériel plutôt que celui à bord du navire ; Considérant que, dans la mesure où cette explication n'est contredite par aucun élément probant, il s'ensuit que l'armateur ne saurait voir sa responsabilité engagée, ni dans l'inadaptation du matériel utilisé lors du déchargement de la marchandise, ni dans la non fourniture d'élingues appropriées ; Considérant que la Société COLAS était pleinement consciente de ce que les opérations de déchargement incombaient à la seule société SOBANO, puisqu'elle a, par l'intermédiaire de son agent AUXIMAD, adressé le 25 août 1992 à ce manutentionnaire une lettre de réserves motivées par " la mauvaise exécution et la mauvaise qualité des matériels utilisés durant la manipulation de ce colis par vos services...", tout en admettant, dans motivées par " la mauvaise exécution et la mauvaise qualité des matériels utilisés durant la manipulation de ce colis par vos services...", tout en admettant, dans sa déclaration d'accident du 08 septembre 1992, que : "le personnel ainsi que le matériel d'élingage étaient fournis par la Société SOBANO" ; Considérant que les sociétés intimées ne sont pas davantage fondées à rechercher la responsabilité de l'armateur/transporteur maritime sur le fondement des dispositions de la Convention de Bruxelles de 1924 ; Considérant qu'en effet,

celle-ci ne s'applique au connaissement émis en application d'une charte-partie que lorsque ce titre régit les rapports du transporteur et du porteur du connaissement ; Considérant que tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors qu'il a déjà été relevé que, loin d'être un tiers porteur du connaissement étranger au contrat d'affrètement, la Société COLAS avait la qualité d'affréteur, et que ses relations avec le fréteur, la Société Z... SHIPPING, se sont trouvées exclusivement régies par la charte-partie ; Considérant qu'il y a donc lieu, en infirmant le jugement déféré, de débouter la Société COLAS et ses assureurs subrogés dans ses droits, de leurs prétentions à l'encontre des Sociétés PARTREDERI INGER Z... et Z... SHIPPING et de l'Association de droit danois SKULD, et de les condamner à la restitution de la somme de 72.335,14 euros versée au titre de l'exécution provisoire dont était assortie la décision entreprise, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt. SUR L'ABSENCE DE RESPONSABILITE DU COMMISSIONNAIRE DE TRANSPORT : Considérant qu'il vient d'être mentionné qu'en vertu du contrat de commission de transport liant la Société COLAS à la Société TPI, le voyage de la marchandise devait s'effectuer aux conditions FREE OUT (bord navire) au port de destination, le réceptionnaire disposant de 48 heures pour débarquer la totalité du matériel ; Considérant que, dès lors, il résulte tout à la fois de la clause 5 b) de la charte partie opposable à la Société COLAS et des stipulations conventionnelles précitées que non seulement la charge financière mais également le risque des opérations de déchargement devaient incomber à cette société ; Considérant qu'il suit de là que, si elle disposait d'une entière maîtrise et liberté dans le choix des voies et moyens en vue de traiter le transport maritime de la marchandise, en revanche la Société TPI, dont la mission s'arrêtait dès l'ouverture des panneaux de cale du navire, ne pouvait être tenue

de surveiller personnellement les opérations de déchargement à NOSY-BE ; Considérant que, si le commissionnaire de transport conserve cette qualité lorsqu'il a recours à l'affrètement au voyage, il ne saurait être plus responsable que ne l'est légalement son substitué, en l'occurrence le fréteur au voyage, à l'encontre duquel aucun manquement aux stipulations de la charte partie n'a pu être mis en évidence ; Considérant que sa responsabilité personnelle ne saurait davantage être retenue, dès lors qu'il est constant que l'avarie s'est produite lors des opérations de déchargement, à un moment où le contrat de commission ne trouvait plus à s'appliquer ; Considérant qu'il y a donc lieu, en infirmant le jugement déféré, de débouter la Société COLAS et ses assureurs subrogés dans ses droits de leurs prétentions à l'encontre de la Société TRANSPORT PARIS INTERNATIONAL, et de les condamner à restituer à cette dernière la somme de 72.719,33 euros versée par elle au titre de l'exécution provisoire dont était assortie la décision de première instance.

SUR LES DEMANDES ANNEXES : Considérant que l'équité commande d'allouer aux sociétés appelantes ainsi qu'à la Société TPI une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Considérant qu'il n'est pas inéquitable que les compagnies et sociétés intimées conservent la charge des frais non compris dans les dépens exposés par elles tant en première instance qu'en appel ; Considérant que les Sociétés CGU COURTAGE, GENERALI FRANCE ASSURANCES, AGF MAT et COLAS doivent être condamnées aux entiers dépens. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort, CONSTATE que la Compagnie COMMERCIAL UNION ASSURANCES a désormais pour dénomination CGU COURTAGE ; DONNE ACTE à la Société GENERALI FRANCE ASSURANCES de ce qu'elle vient aux droits du GIE GENERALI TRANSPORTS ; DECLARE recevable l'appel interjeté par les Sociétés PARTREDERI INGER Z...,

Z... SHIPPING et SKULD, le dit bien fondé ; INFIRME le jugement déféré, et statuant à nouveau : DEBOUTE la Société COLAS et les Compagnies d'assurances CGU COURTAGE, GENERALI FRANCE ASSURANCES et AGF MAT de leurs demandes à l'encontre des Sociétés PARTREDERI INGER Z..., Z... SHIPPING et SKULD ainsi qu'à l'encontre de la Société TRANSPORT PARIS INTERNATIONAL ; CONDAMNE la Société COLAS et les compagnies d'assurances subrogées dans ses droits à restituer au SKULD la somme de 72.335,14 euros, et à restituer à la Société TPI la somme de 72.719,33 euros, augmentées des intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt ; CONDAMNE in solidum la Société COLAS et les compagnies d'assurances subrogées dans ses droits à payer, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, les sommes de 2.000 euros aux sociétés appelantes, et de 2.000 euros à la Société TPI ; DEBOUTE les parties de leurs autres et plus amples demandes ; CONDAMNE in solidum la Société COLAS et les Compagnies d'assurances CGU COURTAGE, AGF MAT et GENERALI FRANCE ASSURANCES aux dépens de première instance et d'appel, et AUTORISE d'une part la SCP JUPIN etamp; ALGRIN, d'autre part Maître X..., Avoués, à recouvrer directement la part les concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR FEDOU, CONSEILLER PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT M.THERESE GENISSEL

F. Y...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006939649
Date de la décision : 14/02/2002

Analyses

TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Commissionnaire de transport.

Le commissionnaire de transport qui a affrété un navire, selon charte partie au voyage reproduisant les conditions du contrat de commission, exclusivement pour assurer le transport des marchandises confiées par l'expéditeur et qui a souscrit un connaissement stipulé " Bill of lading to be used with charter-parties " en mentionnant le nom de cet expéditeur et en se référant à la charte partie, a nécessairement agi pour le compte de l'expéditeur, le connaissement et la charte partie constituant une seule et même convention. Dès lors qu'il est établi que la charte partie conclue par le commissionnaire de transport avec l'agent de l'armateur, l'a été aux conditions proposées à l'expéditeur et acceptées par lui, celui-ci a nécessairement la qualité d'affréteur au voyage auquel les clauses de la charte partie sont opposables

TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Commissionnaire de transport - Responsabilité.

Lorsque la charte partie opposable à l'affréteur (et expéditeur) met le risque des opérations de déchargement à la charge de celui-ci, la mission du commissionnaire de transport, aussi libre soit-il du choix des voies et moyens d'effectuer le transport maritime de la marchandise, ne s'en est pas moins achevée dès le moment de l'ouverture des panneaux de cales du navire. Il en résulte que la responsabilité du commissionnaire de transport ne saurait être utilement recherchée en raison d'une avarie survenue au cours des opérations de déchargement, c'est à dire à un moment où le contrat de commission ne trouvait plus à s'appliquer, et pas davantage, en cas de recours à l'affrètement au voyage, pour garantir son substitué, le fréteur, en l'absence de tout manquement démontré de celui-ci à la charte partie


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2002-02-14;juritext000006939649 ?
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