La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/02/2002 | FRANCE | N°2001-5036

France | France, Cour d'appel de Versailles, 14 février 2002, 2001-5036


Cinq sociétés du Groupe LCI ont été placées en redressement judiciaire, la SA L.C.I. SUD OUEST le 23 novembre 1999, la SA L.C.I. le 14 décembre 1999, et les sociétés SA L.C.I. DEVELOPPEMENT, SA L.C.I. LINGUISTIQUE et SA L.C.I.COMMUNICATION le 13 janvier 2000. Maître MICHEL a été désigné en qualité d'administrateur judiciaire, et Maître CHAVANE DE DALMASSY en qualité de représentant des créanciers. Par jugement en date du 17 juillet 2001 le Tribunal de commerce de Versailles a arrêté le plan de redressement par voie de continuation des cinq sociétés du Groupe LCI et a ordo

nné la cession forcée de leurs actions par les dirigeants de droit et...

Cinq sociétés du Groupe LCI ont été placées en redressement judiciaire, la SA L.C.I. SUD OUEST le 23 novembre 1999, la SA L.C.I. le 14 décembre 1999, et les sociétés SA L.C.I. DEVELOPPEMENT, SA L.C.I. LINGUISTIQUE et SA L.C.I.COMMUNICATION le 13 janvier 2000. Maître MICHEL a été désigné en qualité d'administrateur judiciaire, et Maître CHAVANE DE DALMASSY en qualité de représentant des créanciers. Par jugement en date du 17 juillet 2001 le Tribunal de commerce de Versailles a arrêté le plan de redressement par voie de continuation des cinq sociétés du Groupe LCI et a ordonné la cession forcée de leurs actions par les dirigeants de droit et de fait à une société à créer entre la Société ADHERSIS et Monsieur X.... Madame Hélène Y..., Monsieur Jean Charles Z..., Monsieur Mickaùl A..., Monsieur Patrick B..., ont interjeté appel de ce jugement et demandent à la Cour : -de les déclarer recevables en leur appel réformation, et subsidiairement en leur appel nullité, -de prononcer la nullité du jugement pour violation du principe du contradictoire, et à défaut de l'infirmer, -en toute hypothèse de débouter les intimés de l'intégralité de leurs demandes, -de condamner Maître MICHEL, es qualités, à leur payer la somme de 4.573,47 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Les appelants demandent que le jugement soit annulé pour non respect du contradictoire. Ils estiment que les modalités de leur convocation ne leur ont pas permis de connaître l'objet précis du litige. Ils reprochent au Tribunal de commerce de ne pas les avoir autorisés à assister aux débats, si bien qu'ils ont été laissés dans l'ignorance des moyens soulevés par les parties et n'ont pu les contester. Ils considèrent que s'ils avaient eu la possibilité d'informer complètement le Tribunal ce dernier n'aurait pas statué comme il l'a fait. Les appelants rappellent qu'ils ont donné leur accord pour céder leurs actions pour le prix de 1 F, mais en

précisant qu'ils s'opposaient à la reprise par Monsieur X... et la Société ADHERSIS. Ils font grief aux premiers juges de leur avoir donné acte de leur accord de céder leurs actions pour 1 F, en occultant que cet accord était soumis à la condition que la reprise ne soit pas faite par Monsieur X... et la Société ADHERSIS. Ils soutiennent que dès lors que leur accord était soumis à cette condition, et que cette condition n'était pas remplie, le Tribunal de commerce ne pouvait ordonner la cession forcée de leurs actions qu'après avoir vérifié que les conditions d'application de l'article L.621-59 du Code de commerce (ancien article 23) étaient remplies, et notamment qu'ils étaient bien dirigeants de droit ou de fait des sociétés. Ils font valoir que l'existence de cette condition n'est nullement démontrée. Les appelants exposent par ailleurs les raisons qui les conduisent à refuser de céder leurs actions à Monsieur X.... Ils font notamment valoir que ce dernier s'est livré à des opérations douteuses et se sert des biens des sociétés comme des siens propres. Ils soutiennent que Monsieur X... a continué ses agissements même après sa démission donnée au mois de mai 1998 pour, selon ses propres explications, se rendre insolvable pendant son divorce, et qu'il est resté dirigeant de fait, notamment par l'intermédiaire de Monsieur C..., comptable et associé. Ils en déduisent que la déconfiture des sociétés lui est imputable, et qu'il convient de mettre fin à ses activités ou à tout le moins de ne pas lui confier le redressement des sociétés. Les appelants s'appuient sur les faits qu'ils ont énoncés dans la plainte pénale qu'ils ont déposée au mois de décembre 1999, en soulignant que cette plainte a donné lieu à l'ouverture d'une instruction actuellement en cours, et à l'envoi de commissions rogatoires en cours d'exécution. Les appelants contestent également la désignation de Monsieur VAN D... comme expert pour évaluer les actions, alors que ce dernier a déjà

déposé un rapport estimant leur prix à 1 franc. Les sociétés SA L.C.I. DEVELOPPEMENT, SA L.C.I. LINGUISTIQUE, SA L.C.I. SUD OUEST, SA L.C.I.COMMUNICATION et SA L.C.I., Maître MICHEL, es qualités, d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de ces sociétés et Maître CHAVANE DE DALMASSY, es qualités de représentant des créanciers de ces sociétés, ont pris des conclusions communes, et demandent à la Cour de déclarer l'appel tant irrecevable que mal fondé, et de condamner les appelants à leur payer la somme de 7.622,45 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Monsieur X..., intimé comme tenu personnellement de l'exécution du plan et comme directeur de la SA LCI DEVELOPPEMENT, a été assigné, mais n'a pas constitué Avoué. Les appelants se sont désistés de leur recours contre Monsieur E..., qu'ils avaient intimé. Les représentants des salariés, de trois des sociétés, Madame F..., Monsieur G... et Monsieur De H... se sont présentés à l'audience et ont fait valoir personnellement leurs observations. Celles-ci ont consisté pour chacun à appuyer avec force le plan de redressement tel qu'il a été arrêté par le Tribunal de commerce, notamment en ce qu'il permet à Monsieur X... de reprendre la direction du Groupe. Le Ministère Public a visé la procédure.

DISCUSSION Sur la recevabilité de l'appel I... qu'il résulte des dispositions de l'article L.623-1-2ä du Code de commerce que les décisions arrêtant le plan de continuation de l'entreprise ne sont susceptibles d'appel que de la part du débiteur, de l'administrateur, du représentant des créanciers, du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ainsi que du ministère public même s'il n'a pas agi comme partie principale ; I... que les actionnaires sont donc irrecevables à faire appel ; I... toutefois que cette irrecevabilité ne s'étend pas aux dispositions du jugement qui

sont détachables du plan de continuation, et qui les concerne directement ; qu'il en va ainsi de la disposition qui ordonne la cession forcée des actions des dirigeants de droit ou de fait, sur le fondement de l'article L.621-59 du Code de commerce ; I... que l'appel sera déclaré recevable dans cette limite ; Sur la recevabilité de l'appel nullité I... que les appelants forment subsidiairement un recours en appel nullité ; Mais considérant que ce recours est irrecevable en ce qui concerne les dispositions arrêtant le plan de redressement car les appelants ne sont pas parties au litige concernant ces dispositions ; I... en outre que ce recours subsidiaire n'a pas à être examiné en ce qui concerne les dispositions du jugement concernant la cession forcée des actions, dès lors que l'appel de droit commun, formé à titre principal, est recevable ; Sur l'annulation du jugement pour non respect du principe du contradictoire I... que les appelants ont été avisés de l'audience, et y ont comparu ; qu'avant l'audience ils ont été informés de ce que le Tribunal de commerce serait amené à examiner des offres de reprise, et un projet de plan de continuation prévoyant la cession forcée des actions des dirigeants ; qu'ils ont reçu en copie l'évaluation faite par Monsieur VAN D... du prix de ces actions ; I... que les appelants avaient la faculté de consulter les projets de plan déposés au Greffe le 15 juin 2001, et faisant apparaître qu'il était prévu un plan de continuation par voie de reprise interne par la Société ADHERSIS I.T. et par Monsieur X... ; I... que les appelants ont donc été avertis en temps utile des projets de plan soumis à l'examen du Tribunal de commerce ; que d'ailleurs ils ont fait connaître leur opposition à la reprise par la Société ADHERSIS et par Monsieur X... ; I... que les appelants n'étaient pas du nombre des personnes pouvant être présentes à l'audience en Chambre du Conseil ; que c'est

à bon droit que les premiers juges ne les ont appelés que pour l'examen de la cession forcée de leurs actions ; I... que le principe du contradictoire a été respecté ; que les appelants seront déboutés de leur demande d'annulation du jugement ; Sur les conditions d'application de l'article L.621-59 du Code de commerce I... que la cession forcée des actions ou des parts sociales ne peut être ordonnée que pour celles qui appartiennent aux dirigeant de droit ou de fait, et à la condition que la survie de l'entreprise le requiert ; I... que les appelants ne contestent pas que la survie de l'entreprise requiert cette cession forcée ; que le présent litige démontre d'ailleurs à lui seul qu'il n'est pas envisageable de laisser le capital partagé entre les appelants et Monsieur X... ; qu'en effet les appelants critiquent fortement ce dernier tandis que le plan est soumis à la condition expresse de la cession forcée des actions des dirigeants ; I... que par ailleurs il est démontré que les appelants sont dirigeants de droit ou de fait des cinq sociétés concernées ; I... que la qualité de dirigeant doit être appréciée en l'espèce, non pas au jour du jugement d'ouverture des procédures collectives, mais à la date antérieure à la nomination de Monsieur J..., étant observé que le jugement d'ouverture est, selon les sociétés, antérieur ou postérieur de quelques jours à la désignation de ce dernier comme Président des Conseils d'Administration des sociétés ; que les dirigeants de droit doivent être considérés comme les dirigeants de fait pour ce court laps de temps séparant leur éviction du jugement d'ouverture ; I... qu'il ressort de la liste des mandats (pièce 3 de la SCP LISSARRAGUE, DUPUIS etamp; BOCCON-GIBOD) et des explications des intimés que les appelants étaient dirigeants de droit ou de fait des cinq sociétés ; que Madame Y... est dirigeant de droit des cinq sociétés concernées, en qualité d'administrateur ; que Monsieur Z... est

dirigeant de droit des cinq sociétés concernées en qualité d'administrateur ou de représentant de la SA LCI DEVELOPPEMENT, elle-même administrateur ; que Monsieur A... est Président du Conseil d'Administration de la SA LCI LINGUISTIQUE, et administrateur de la SA LCI, société charnière pour le développement des sociétés du Groupe LCI, qu'en outre il s'est comporté en dirigeant de fait, notamment en effectuant un virement de 450.000 francs du compte de la SA LCI COMMUNICATION sur un compte à Miami, pour le rachat d'une société au Brésil (pièces 53 à 58 de la SCP LISSARRAGUE, DUPUIS etamp; BOCCON-GIBOD) ; que Monsieur B... est le Président du Conseil d'Administration de la SA LCI, ce qui lui donne un pouvoir de décision sur l'ensemble des sociétés opérationnelles du Groupe LCI ; I... que les conditions d'application de l'article L.621-59 du Code de commerce sont donc remplies ; Sur le refus des appelants de céder leurs actions à la Monsieur X... I... que les appelants refusent que la cession forcée de leurs actions se fasse au profit de Monsieur X... et de la Société ADHERSIS ; Mais considérant qu'il appartient à la juridiction de dire à quelles personnes cette cession doit être faite, de manière à permettre le redressement de la société ; que l'identité du cessionnaire ne présente aucun intérêt pour les cédants, dès lors que le prix, évalué au jour du jugement d'ouverture, ne dépend pas de cette identité et qu'il doit leur être payé comptant ; que les cessionnaires n'ont pas qualité pour critiquer le choix de la personne au profit de laquelle a lieu la cession forcée des titres ; qu'il n'y a pas lieu d'examiner les moyens soulevés par les appelants au soutien de leur refus de céder leurs actions à Monsieur X... ; Sur les modalités d'évaluation des actions I... qu'au terme de l'article L.621-59, le prix de cession des actions doit être fixé à dire d'expert ; I... que les appelants critiquent la disposition du

jugement qui a désigné Monsieur VAN D..., en faisant valoir que ce dernier a déjà été chargé par le Juge-Commissaire de procéder à l'évaluation des actions, et en a estimé le prix à la somme de 1 franc ; I... que Monsieur VAN D... a été désigné par le Juge-Commissaire pour évaluer, à titre indicatif, le prix des actions ; que la juridiction qui ordonne la cession forcée, ne peut le désigner à nouveau ; qu'il convient de désigner un autre expert ; Sur les autres demandes I... qu'il convient de faire droit, à hauteur de 2.200 euros à la demande formée par Maître MICHEL, es qualités, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; I... que les appelants qui succombent pour l'essentiel, seront condamnés aux dépens, et déboutés des demandes qu'ils forment sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire, Déclare irrecevable l'appel nullité formé par Madame Y..., Monsieur Z..., Monsieur A..., et Monsieur B..., à l'encontre du jugement rendu le 17 juillet 2001, Déclare recevable l'appel, mais seulement en ce qui concerne les dispositions concernant la cession forcée des actions sur le fondement de l'article L.621-59 du Code de commerce, Statuant dans cette limite, confirme le jugement, sauf en ce qu'il a désigné Monsieur VAN D... pour évaluer les actions à dire d'expert, Statuant à nouveau sur ce point, désigne Monsieur Alain K..., 97, rue Péreire, 78105 - Saint Germain en Laye Cedex, pour évaluer à dire d'expert, le prix des actions des sociétés SA L.C.I. DEVELOPPEMENT, SA L.C.I. LINGUISTIQUE, SA L.C.I. SUD OUEST, SA L.C.I.COMMUNICATION et SA L.C.I., lors des jugements d'ouverture de leurs redressements judiciaires, Dit que la société en formation, bénéficiaire du plan de continuation devra verser une provision de 1.700 euros à valoir sur la rémunération de

l'expert, et que la Société ADHERSIS et Monsieur X... sont tenus solidairement du versement de cette provision, Dit que l'expert devra déposer son rapport dans les 5 mois de sa saisine, Dit que les opérations d'expertise seront contrôlées par le Conseiller de la mise en état, Condamne in solidum Madame Y..., Monsieur Z..., Monsieur A..., et Monsieur B... à payer à Maître MICHEL, es qualités, la somme de 2.200 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Condamne Monsieur Z..., Madame Y..., Monsieur A..., et Monsieur B... aux dépens d'appel et accorde à la SCP LISSARRAGUE, DUPUIS etamp; BOCCON-GIBOD, titulaire d'un office d'Avoué, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile, Et ont signé le présent arrêt : Monsieur Jean L..., qui l'a prononcé, Madame Michèle M..., qui a assisté à son prononcé, Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2001-5036
Date de la décision : 14/02/2002

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Voies de recours - Appel - Jugement - Jugement arrêtant un plan de continuation - Appelants - Liste limitative - Exception.

S'il résulte des dispositions de l'article L 623-1-2° du Code de commerce qu'un actionnaire est irrecevable à faire appel d'une décision arrêtant le plan de continuation de l'entreprise, cette irrecevabilité ne s'étend pas aux dispositions du jugement qui sont détachables du plan de continuation et qui le concernent directement.Tel est le cas de la disposition qui ordonne la cession forcée des actions des dirigeants de droit ou de fait, sur le fondement de l'article L 621-59 du code précité

ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement judiciaire - Plan - Plan de continuation.

La cession forcée des actions ou part sociales d'une société en redressement, prévue par l'article L 621-59 du Code de commerce suppose, notamment, que ces titres appartiennent aux dirigeants de droit ou de fait.La qualité de dirigeant doit s'apprécier, non pas au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective, mais à celui - antérieur ou postérieur - de la désignation du président du conseil d'administration, les dirigeants de droit devenant dirigeants de fait durant ce court intervalle de temps


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2002-02-14;2001.5036 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award