La SA AIR LIQUIDE a confié à la SA AGENCE MARITIME MARTIN -AMM- le démontage des équipements d'une usine située à ESCH sur ALZETTE au LUXEMBOURG et leur acheminement à destination de la société ALKAT à KATOWICE en POLOGNE ainsi que leur installation sur ce site. Une partie des matériels expédiée par voie fluviale, après un stockage imprévu, a été transportée par route par les sociétés de droit polonais ZAKLAD TRANSPORTU ENEGETYKI-ZTE - RADOM et EKO SYSTEME. Se prévalant d'avaries et de manquants à la livraison ayant fait l'objet de réserves de la part de la société ALKAT et donné lieu à une évaluation par expertise à la somme globale de 750.830 francs (114.463,30 ), la société AIR LIQUIDE a engagé une action en réparation de son préjudice à l'encontre de la société AMM en sa qualité prétendue de commissionnaire de transport et de ses assureurs en responsabilité professionnelle, les sociétés CHEGARAY DE CHALUS, GROUPAMA NAVIGATION ET TRANSPORTS, TROUGH TRANSPORT MUTUAL SERVICE et LES MUTUELLES DU MANS devant le Tribunal de Commerce de NANTERRE et la société AMM a appelé en garantie les voituriers les sociétés ZTE et EKO SYSTEME. Par jugement rendu le 05 décembre 2000, cette juridiction faisant droit à l'exception soulevée par la société AMM s'est déclarée incompétente et a renvoyé les parties à se mieux pourvoir devant la Cour d'Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale de PARIS, selon convention en date du 19 décembre 1997, et condamné la société AIR LIQUIDE aux dépens. Le 20 décembre 2000, la société AIR LIQUIDE a formé contredit de ce jugement. Elle soulève l'irrecevabilité de l'exception d'incompétence présentée par la société AMM après avoir exercé une défense au fond par la voie de son appel en garantie, sur le fondement de l'article 74 du nouveau code de procédure civile. Elle soutient que la clause compromissoire figurant à la convention par elle conclue, le 19 décembre 1997, avec la société AMM est contraire aux dispositions impératives de
l'article 33 de la convention CMR et inopposable aux transporteurs. Elle ajoute que la société AMM ayant attrait ses substitués devant la juridiction étatique a implicitement mais nécessairement renoncée au Tribunal Arbitral en créant un lien indivisible entre la demande principale et l'appel en garantie dont il est de l'intérêt de l'administration d'une bonne justice, qu'ils soient jugés devant une seule et même juridiction. Elle souligne que la compétence devait s'apprécier au moment de l'introduction de l'action directe sans que la déclaration des assureurs de la société AMM en cours d'instance, d'accepter de se soumettre à la procédure d'arbitrage ne puisse avoir d'incidence et que la recevabilité de cette action n'est pas subordonnée à l'appel en la cause de l'assuré par la victime. Elle demande donc à la Cour de déclarer le Tribunal de Commerce de NANTERRE compétent pour connaître de ses actions dirigées envers la société AMM et ses assureurs et de lui accorder une indemnité de 10.000 francs (1.524,49 ) en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. La société AMM oppose que la convention CMR ne peut régir ses rapports avec la société AIR LIQUIDE et se prévaut des réserves quant à la compétence de la juridiction étatique effectuées lors de ses appels en garantie contre les transporteurs. Elle fait état de la situation de son siège social à Montoir de Bretagne pour estimer que le Tribunal de Commerce de NANTERRE est, en toute hypothèse, territorialement incompétent. Elle sollicite donc la confirmation du jugement déféré, subsidiairement l'incompétence du Tribunal de Commerce de NANTERRE au profit du Tribunal de Commerce de SAINT-NAZAIRE et dans tous les cas une indemnité de 50.000 francs (7.622,45 ) en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Les sociétés CHEGARAY de CHALUS, GROUPAMA, TT CLUB et MUTUELLES DU MANS se réfèrent aux motifs du tribunal pour relever que les premiers juges n'ont pas, à juste titre, retenu leur
compétence pour statuer sur l'action dirigée par la société AIR LIQUIDE à l'encontre de la société AMM et ont admis, à bon escient, leur exception d'incompétence, en observant que dès l'instance où le demandeur à choisi de mettre en cause l'assuré, l'assignation de l'assureur lui devient indivisible et ne saurait être soumise à une juridiction différente et que l'arrêt du 07 novembre 2000 de la Cour de Cassation, invoqué par la société AIR LIQUIDE ne correspond pas au cas présentement en litige. Elles demandent acte de ce qu'elles acceptent la compétence de la Cour d'Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale et concluent à la confirmation de la décision attaquée, sauf à y ajouter une indemnité de 50.000 francs (7.622,45 ) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Les sociétés EKO SYSTEM et ZTE RADOM qui ont eu connaissance de l'actuelle procédure comme en font foi les avis de réception signés de leurs soins retournés à la Cour, n'ont pas conclu. MOTIFS DE L'ARRET : Considérant qu'il est constant que le contrat conclu, le 19 décembre 1997, entre les sociétés AIR LIQUIDE, ALKAT, OXYLUS, MOTOSTAT BEDZIN et AMM confiant l'exécution à cette dernière de diverses prestations concernant le transport du LUXEMBOURG vers la POLOGNE d'une usine de séparation des gaz de l'air stipule en son article 15-2 et 15-3 qu'il est régi par la loi française et soumis à une clause compromissoire en faveur de la Chambre de Commerce Internationale de PARIS ; considérant que la société AMM ne peut utilement en contester la validité en invoquant les dispositions de l'article 33 de la CMR aux termes duquel le contrat de transport peut contenir une clause attribuant compétence à une Tribunal Arbitral, à condition que cette clause prévoit que le Tribunal Arbitral appliquera la présente convention, dès lors que relative au contrat de transport international de marchandises par route, la CMR ne s'applique pas au contrat de commission de transport étant, en outre,
observé que la société AIR LIQUIDE ne prétend pas que la société AMM ait agi en qualité de transporteur terrestre, mais lui attribue explicitement celle de commissionnaire de transport ; considérant que les appels en garantie des deux transporteurs polonais formés, le 14 octobre 1999, par la société AMM qui comportent en exergue du dispositif la mention suivante : "sans approbation de la demande de la société AIR LIQUIDE mais au contraire sous les plus expresses réserves de contester tant la compétence du tribunal que la recevabilité et le bien fondé de l'action formée à son encontre", ne constituent nullement une renonciation au bénéfice de la clause compromissoire de la part de cette société, mais la réserve certaine et non ambiguù de son droit d'en revendiquer l'application ; qu'ils ne sont donc pas de nature, alors même que tendant uniquement à transférer les prétentions de la demanderesse initiale à la charge de deux tiers, nouvelles parties à l'instance, ils ne peuvent s'analyser en une défense au fond au sens de l'article 74 du nouveau code de procédure civile, à rendre irrecevable l'exception d'incompétence soulevée régulièrement, le 27 juin 2000, par la société AMM ; considérant que le tribunal s'est donc, à bon droit, déclaré incompétent à l'égard de l'action en responsabilité initiée par la société AIR LIQUIDE contre la société AMM ; considérant que la société CHEGARAY de CHALUS et les trois assureurs en soulevant à leur tour l'incompétence du Tribunal de Commerce de NANTERRE, ont expressément accepté la compétence de leur assurée soit celle de la Cour d'Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale, tant en première instance que devant la Cour ; considérant que ces compagnies sont mises en cause en qualité d'assureurs de la responsabilité de la société AMM et ne peuvent donc se voir engagées que dans les limites et selon les modalités où leur assurée le sera elle-même en sorte que leur sort est lié ; considérant que dès lors que la société AIR
LIQUIDE a choisi d'attraire en justice à la fois l'assurée et l'assureur, elle ne peut y procéder, eu égard à l'indivisibilité du litige l'opposant à ces parties résultant de la demande de condamnation solidaire à leur encontre et de surcroît dans les soucis d'une bonne administration de la justice et d'éviter la contrariété de décision, que devant la même juridiction ; qu'elle ne peut valablement se référer aux dispositions de l'arrêt du 07 novembre 2000 de la Cour de Cassation concernant l'hypothèse où la victime assigne l'assureur seul, ce qui n'a pas pour effet de rendre irrecevable l'action pour cet unique motif, lequel ne correspond pas au cas de l'espèce, ni prétendre pouvoir priver une partie défenderesse du droit d'invoquer, comme en la cause in limine litis, une clause compromissoire ou d'y adhérer volontairement en arguant sans fondement de ce que la compétence devrait être exclusivement appréciée au moment de l'introduction de l'instance ; considérant que les premiers juges ont donc dénié aussi, à juste titre, leur compétence pour statuer sur l'action directe envers les assureurs ; considérant que le jugement déféré sera, en conséquence, confirmé sauf à renvoyer seulement les parties à mieux se pourvoir conformément à l'article 96 du nouveau code de procédure civile ; considérant que l'équité commande d'allouer aux défenderesses une indemnité de 1.600 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que la société AIR LIQUIDE qui succombe en son contredit, supportera les dépens. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, CONFIRME le jugement déféré sauf à renvoyer les parties à mieux se pourvoir au titre des actions principales en responsabilité directe contre la SA AMM et ses assureurs, CONDAMNE la SA AIR LIQUIDE à verser à la SA AMM et aux assureurs une indemnité de 1.600 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, LA
CONDAMNE aux entiers dépens du contredit. ARRET PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER
LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT M.THERESE GENISSEL
F. X...