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21/12/2001 | FRANCE | N°2000-2972

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21 décembre 2001, 2000-2972


Monsieur et Madame X... et Monsieur et Madame Y... sont propriétaires de divers lots dépendants d'un ensemble immobilier sis au PECQ (78) 36, rue du Président Wilson. Le 17 avril 1996, la société SIGERC, syndic de la copropriété a convoqué une assemblée générale des copropriétaires qui a donné son accord pour missionner un architecte pour réaliser une étude technique sur le ravalement de l'ensemble immobilier. Le 16 octobre 1996, le conseil syndical a confié l'étude au cabinet Z.... Le 23 octobre 1996, la SIGERC lui confiait la mission d'étude préalable et l'appel d'offre po

ur les opérations de ravalement moyennant une rémunération de 60.0...

Monsieur et Madame X... et Monsieur et Madame Y... sont propriétaires de divers lots dépendants d'un ensemble immobilier sis au PECQ (78) 36, rue du Président Wilson. Le 17 avril 1996, la société SIGERC, syndic de la copropriété a convoqué une assemblée générale des copropriétaires qui a donné son accord pour missionner un architecte pour réaliser une étude technique sur le ravalement de l'ensemble immobilier. Le 16 octobre 1996, le conseil syndical a confié l'étude au cabinet Z.... Le 23 octobre 1996, la SIGERC lui confiait la mission d'étude préalable et l'appel d'offre pour les opérations de ravalement moyennant une rémunération de 60.000,00 francs et 7 % du montant des travaux pour la maîtrise de l'oeuvre en cas de vote favorable de l'assemblée générale. Lors de l'assemblée générale du 29 avril 1998, Monsieur Z... et deux autres architectes ont été mis en concurrence. Le 25 juin 1998, les copropriétaires désignaient Monsieur A... pour une nouvelle mission d'étude dont le coût fut fixé à 87.585,00 francs TTC Monsieur Z..., invoquant la clause d'exclusivité insérée dans le contrat du 23 octobre 1996, a fait valoir que sa mission n'était pas terminée, de sorte que Monsieur A... n'a pas entrepris sa mission. Suivant acte en date du 16 février 1999, les époux X... et Y... ont fait assigner la société SIGERC devant le tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye aux fins de : - constater qu'il n'y a pas eu de vote lors de l'assemblée du 17 avril 1996 autorisant la SIGERC à engager les fonds de la copropriété, - dire qu'il n'y a pas de décision de l'assemblée dont l'annulation serait soumise aux dispositions de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 mais inexistence pure et simple de cette décision, - dire que le syndic a engagé sa responsabilité quasi-délictueuse en signant le contrat litigieux, - condamner la SIGERC à rembourser les requérants de leur quote-part des honoraires de Monsieur Z..., - condamner la SIGERC

au paiement de 10.000,00 francs à titre de dommages et intérêts en raison du caractère diffamatoire de la lettre adressée aux copropriétaires par la SIGERC. Les requérants ont fait valoir que, faute de vote, la décision du 17 avril 1996, n'avait aucune portée juridique. Ils ont en outre rappelé que l'assemblée générale du 31 mai 1999 avait refusé d'approuver les comptes de 1997. Par jugement en date du 18 novembre 1999, le tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye a rendu la décision suivante : - Dit que l'action en diffamation exercée par Monsieur et Madame X... et Y... au titre de la lettre du 16 juin 1998, est prescrite en application de l'article 65 de la loi du 27 septembre 1881, - Les déboute en conséquence de leurs demandes de dommages et intérêts et de publicité du jugement, - Dit que l'assemblée générale des copropriétaires du 17 avril 1996 n'a pas pris de décision au sens de la loi du 10 juillet 1965 autorisant la société SIGERC à engager la copropriété dans les dépenses relatives à une mission d'étude préalable et d'appel d'offre relative au ravalement, En conséquence, - Condamner la société SIGERC à payer à Monsieur et Madame X... la somme de 651,24 francs (SIX CENT CINQUANTE ET UN FRANCS VINGT QUATRE CENTIMES) à Monsieur et Madame Y..., celle de 506,52 francs (CINQ CENT SIX FRANCS CINQUANTE DEUX CENTIMES) au titre du préjudice financier, - Déboute les parties du surplus et de leurs autres demandes, - Ordonne l'exécution provisoire, - Condamne la société SIGERC à payer la somme de 5.000,00 francs (CINQ MILLE FRANCS) à Monsieur et Madame X... d'une part et à Monsieur et Madame Y... d'autre part, - Condamne la société SIGERC aux dépens. Par déclaration en date du 6 mars 2000, la société SIGERC a relevé appel de cette décision. La SIGERC expose que lors de l'assemblée générale du 17 avril 1996 et suivant la deuxième résolution, quitus lui a été donné à une très forte majorité, que dès lors, les intimés avaient

deux mois pour contester cette décision. L'appelante soutient en outre que la 7ème résolution de l'assemblée du 29 avril 1998, emporte confirmation implicite de la mission d'expertise générale confiée à Monsieur Z.... Par conséquent, la société SIGERC demande à la Cour de : Vu la loi du 10 juillet 1965 Vu le décret du 17 mars 1967 Vu l'article 32-1 du nouveau code de procédure civile Vu la loi du 29 juillet 1881, Réformant le jugement de première instance : - Constater que Monsieur Z... a reconnu que la deuxième phase de rénovation avait été faite sous condition suspensive de l'accord de l'assemblée, - Constater que cette condition suspensive n'a jamais été levée, - Dire et juger que la mission confiée, suivant accord des copropriétaires aux termes de l'assemblée de 1996, au profit de Monsieur Z... est uen décision au sens de la loi du 1965, - Dire et juger prescrite la contestation des consorts Y... et X... au sens de l'article 42 de la loi de 1965 au titre de cette mission, - Dire et juger en toute hypothèse que suivant procès-verbal de l'assemblée générale du 29 avril 1998, a été confirmé la mission confiée à Monsieur Z... par l'assemblée des copropriétaires, - Dire et juger en toutes hypothèses que Monsieur Z... a pu être valablement missionné par le conseil syndical en application des dispositions de l'article 27 du décret du 27 mars 1967, En conséquence, - Dire et juger totalement infondé la demande des consorts Y... et X... et les en débouter, - Dire et juger que les consorts Y... et X... n'avaient aucun droit de communication d'informations erronées du syndicat des copropriétaires, - Dire et juger que la lettre du 16 juin 1998, quand bien même elle constituerait une diffamation, serait prescrite au sens de l'article 65 de la loi de 1881 faute de poursuite exercée dans un délai de 3 mois à compter du 16 juin 1998, - Dire et juger que les consorts Y... et X... ont anormalement usé de leur droit d'agir en

justice, - Condamner solidairement les consorts Y... et X... à payer à la société SIGERC la somme de 1 franc à titre de dommages et intérêts pour procédure au sens de l'article 32-1 du nouveau code de procédure civile, - Condamner les consorts Y... et X... solidairement à payer à la société SIGERC la somme de 20.000,00 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - Les condamner aux entiers dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés directement par la SCP KEIME etamp; GUTTIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Les époux X... et Y... maintiennent leur argumentation développée en première instance et sans y ajouter prient la Cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SIGERC ; - Le réformer pour le surplus et la condamner à payer aux consorts Y... et X... la somme de 10.000,00 francs en réparation de leur préjudice moral ; - La condamner en tous les dépens. La clôture a été prononcée le 6 septembre 2001 et l'affaire plaidée à l'audience du 20 novembre 2001. SUR CE, LA COUR, I) Considérant en droit que les copropriétaires peuvent, en application de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 "contester les décisions des assemblées générales" ; Considérant que cette faculté de contestation ne s'applique qu'aux délibérations de l'assemblée générale, dès lors qu'elles revêtent le caractère d'une véritable décision et non d'un simple voeu ou d'une mesure préparatoire, ou encore, d'une consultation ou, comme ici, d'une "information" (sic) des copropriétaires ; Considérant, dans le présent cas, que la lecture même du procès-verbal de l'assemblée générale du 17 avril 1996, objet de l'actuel litige, révèle qu'à l'évidence le texte critiqué n'est pas une décision ayant donné lieu au vote d'une résolution et que son libellé est intitulé :

"Information sur les travaux dont la réalisation est prévisible dans les années 1997 à 2000" ; que ce texte d'"information" qui n'indique

que des "coûts estimatifs" ne fait pas expressément l'objet d'une résolution, qui, dans ce procès-verbal aurait dû constituer une quatrième résolution, et qu'il y est simplement dit, en termes très généraux, que : "l'assemblée donne son accord pour missionner un architecte ou un bureau d'études pour la réalisation d'une étude technique sur le ravalement", étant souligné que cette mission, aux contours vagues, ne concerne pas les deux autres séries de travaux évoqués et qui sont : . la réfection des joints d'étanché'té de parking, . la réfection de l'étanché'té du bâtiment ALSACE ; qu'en outre, cette "information" ne dit rien sur les conditions essentielles du contrat à payer avec cet architecte ou ce bureau d'études en vue de la réalisation de ces travaux projetés, et ce en violation des exigences de l'article 11-4ä du décret du 17 mars 1967 ; qu'il est pourtant patent que les honoraires font partie de ces conditions essentielles d'un contrat d'architecte ; Considérant que de plus, et surtout, ce paragraphe d'information" ne comporte aucune indication sur la majorité qui aurait "donné son accord", alors que toutes les autres résolutions de ce même procès-verbal d'assemblée générale explicitent les millièmes représentés par la majorité, par chacune d'elles, et les millièmes représentés, à chaque fois, par les abstentions et par les opposants (article 17 du décret du 17 mars 1967) ; qu'en outre, ce procès-verbal du 17 avril 1996 indique en première page qu'il y a eu une convocation du syndic du 19 mars 1996 mais que ce document n'a pas été produit par la SARL SIGERC et que rien ne démontre donc dans les mentions mêmes du procès-verbal d'assemblée générale, quel était exactement l'ordre du jour de cette assemblée générale (article 9, 10 et 11 du décret du 17 mars 1967); Considérant que certes les résolutions ou les mentions et informations de cette assemblée générale n'ont pas fait l'objet d'une contestation dans le délai de deux mois de l'article 42 de la loi du

10 juillet 1965, mais qu'il est patent, ici, que "l'information" ci-dessus analysée n'est pas une décision, stricto sensu et qu'il n'y a pas eu de résolution explicite votée, notamment en vue de missionner un architecte ou un bureau d'études, et que l'inobservation de ce délai légal de deux mois ne peut donc pas être opposée aux copropriétaires intimés ; Considérant que c'est donc à bon droit que le premier juge a retenu que cette mention d'une "information" (sic) sur des travaux à réaliser dans l'année 1997-2000, ne constituait pas une décision de cette assemblée générale et qu'elle était dépourvue de tout effet juridique ; que le jugement est par conséquent confirmé sur ce point ; que par ailleurs, le premier juge a exactement retenu que cette mention d'information litigieuse ne pouvait pas davantage s'analyser en une délégation de la part du conseil syndical, et ce en raison de son imprécision et faute d'un scrutin ; qu'en application de l'article 27 du décret du 17 mars 1967 invoqué par l'appelante, il appartenait en effet au conseil syndical, dans sa réunion du 16 octobre 1996, de fixer, même approximativement, les honoraires qui seraient dûs à l'architecte missionné, Monsieur Z..., ce qu'il n'a pas fait ; que, notamment, il n'a pas été indiqué que les honoraires de ce technicien constitueraient des dépenses d'administration et qu'ils seraient payés par le syndic dans les conditions prévues par l'alinéa 3 de cet article 27 ; que de plus, la mission de ce technicien ne faisait l'objet d'aucune définition ni d'un énoncé des conditions essentielles de contrat qui serait passé avec lui ; que l'appelante n'est donc pas fondée à se prévaloir des dispositions de cet article ; Considérant que la SARL SIGERC fait certes état d'autres décisions intervenues lors des deux assemblées générales du 29 avril 1998 et du 25 juin 1998, au sujet notamment de la désignation d'un deuxième architecte, mais qu'il demeure que ces 7ème et 8ème résolutions ne

disent toujours rien sur la rémunération originairement prévue pour l'architecte, Monsieur Z..., ou ensuite modifiée, ni sur celle qu'il convenait enfin de lui reconnaître ; que ces deux résolutions aux objets bien précis et limités ne contiennent aucune formulation suffisamment explicite qui permettrait d'admettre que l'assemblée générale avait confirmé cette prétendue mission qui aurait été donnée à l'architecte, Monsieur Z..., dès le 17 avril 1996; qu'au demeurant, dans sa lettre de réclamation du 11 septembre 1998, cet architecte rappelait, à bon droit, que ni l'assemblée générale du 24 juin 1997 ni celles du 29 avril 1998 et du 25 juin 1998 n'avaient émis de vote au sujet de ses honoraires, et qu'il est patent d'ailleurs qu'un litige oppose actuellement ces parties à propos de cette rémunération dont le montant n'est toujours pas déterminé ; que la seule rémunération votée par la 7ème résolution du 25 juin 1998, d'un montant de 88.000,00 francs T.T.C. ne concerne que le deuxième architecte (Monsieur A... désigné dans la 8ème résolution), et ce pour la nouvelle mission "partielle" qui lui était confiée à cette date ; Considérant que les copropriétaires intimés sont donc en droit de faire valoir que des honoraires de l'architecte Monsieur Z... leur avaient été indûment facturés ; que le jugement est donc confirmé en ce qu'il leur a exactement accordé les remboursements des sommes qu'ils avaient versées de ce chef ; II) Considérant que les intimés n'ont pas formé d'appel incident au sujet des justes dispositions du jugement déféré qui a déclaré prescrite l'action des intéressés fondée sur une prétendue diffamation ; que le jugement est donc confirmé de ce chef ; III) Considérant qu'il résulte de la motivation ci-dessus développée que, tant devant le premier juge que devant la Cour, les époux Y... et les époux X... ont fait valoir des moyens sérieux ; que l'appelante n'est donc pas fondée à leur reprocher une procédure abusive et qu'elle est déboutée de sa demande

de dommages-intérêts de ce chef ; Considérant que, de leur côté, les intimés ne démontrent pas le préjudice dit moral qui leur aurait été causé par une lettre adressée par la société SIGERC aux autres copropriétaires, et qu'ils sont donc déboutés de leur demande en paiement de 10.000,00 francs de dommages-intérêts, de ce chef ; IV) Considérant que compte tenu de l'équité, le jugement est confirmé en ses justes dispositions accordant des sommes aux époux Y... et aux époux X..., en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; qu'eu égard à l'équité, la Cour, y ajoutant, condamne l'appelante à payer à chacun des deux couples intimés la somme de 3.000,00 francs sur ce même fondement, pour les frais irrépétibles en appel ; que la SARL SIGERC qui succombe en son appel est, compte tenu de l'équité, déboutée de sa propre demande en vertu de ce même texte. PAR CES MOTIFS, La cour statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort: - Déboute la SARL SIGERC des fins de son appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ; - Confirme en son entier le jugement déféré ; Et y ajoutant : - Condamne l'appelante à payer 3.000,00 francs (457,35 euros) à chacun des deux couples d'intimés, en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, pour leurs frais irrépétibles en appel ; - Déboute les intimés de leur demande en paiement de 10.000,00 francs (1524,49 euros) de dommages-intérêts pour un préjudice dit moral ; - Condamne l'appelante à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par Maître TREYNET, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Et ont signé le présent arrêt : Monsieur Alban CHAIX, Président, Madame B... de GUINAUMONT, qui a assisté à son prononcé, Le GREFFIER,

Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 2000-2972
Date de la décision : 21/12/2001

Analyses

COPROPRIETE - Syndicat des copropriétaires - Assemblée générale - Décision - Annulation

S'il résulte des dispositions de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 que les copropriétaires peuvent contester les décisions des assemblées générales dans les deux mois de la notification qui leur en est faite par le syndic, il découle de l'emploi du terme de " décision " que ce texte n'a vocation à s'appliquer qu'aux délibérations des assemblées emportant une véritable décision et non un simple voeu ou une " information " des copropriétaires. Il s'ensuit que, nonobstant l'exercice d'un recours dans le délai prescrit, aucune déchéance n'est opposable à des copropriétaires qui contestent la mission confiée à un architecte, dès lors que par l'adoption d'une résolution intitulée " information sur les travaux dont la réalisation est prévisible dans les années 1997 à 2000, l'assemblée donne son accord pour missionner un architecte ou un bureau d'études pour la réalisation d'une étude technique sur le ravalement. ", mais sans autres précisions, notamment sur les conditions du contrat à conclure avec l'architecte, contrairement aux exigences de l'article 11-4° du décret du 17 mars 1967 ; ce vote ne constitue pas une décision de l'assemblée générale, mais une simple " information " dépourvue d'effets juridiques.


Références :

Loi du 10 juillet 1965 article 42 Décret du 17 mars 1967 article 27

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-12-21;2000.2972 ?
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