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06/12/2001 | FRANCE | N°1998-8608

France | France, Cour d'appel de Versailles, 06 décembre 2001, 1998-8608


La SA GALLE absorbée le 24 septembre 1991 par la SA JOYAU a effectué des prestations de transport routier de marchandises pour le compte des SA PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS FRANCE. A la suite de litiges, la société GALLE a assigné, le 14 novembre 1991, les sociétés PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS et Maître CHAVINIER ès-qualités de mandataire liquidateur de la société IDF en paiement devant le tribunal de commerce de NANTERRE où la société JOYAU, se disant aux droits de la société GALLE, est intervenue volontairement. Par jugement rendu le 25 octobre 1994, cette juridictio

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La SA GALLE absorbée le 24 septembre 1991 par la SA JOYAU a effectué des prestations de transport routier de marchandises pour le compte des SA PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS FRANCE. A la suite de litiges, la société GALLE a assigné, le 14 novembre 1991, les sociétés PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS et Maître CHAVINIER ès-qualités de mandataire liquidateur de la société IDF en paiement devant le tribunal de commerce de NANTERRE où la société JOYAU, se disant aux droits de la société GALLE, est intervenue volontairement. Par jugement rendu le 25 octobre 1994, cette juridiction a condamné les sociétés PIONEER SETON et FUJI MAGNETICS à régler à la société GALLE respectivement les sommes de 480.965,61 francs et de 174.626,59 francs et autorisé la société GALLE à déclarer sa créance à hauteur de 32.920,61 francs au passif de la société ID F. Sur le recours formé par les sociétés PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS et Maître CHAVINIER ès-qualités, la Cour de ce siège, par arrêt infirmatif du 09 mai 1996 a déclaré irrecevables, en application de l'article 32 du nouveau code de procédure civile, les prétentions émises à l'encontre des sociétés appelantes par la société GALLE qui n'avait plus d'existence à la date de l'introduction de l'instance et estimé que l'intervention volontaire de la société JOYAU n'avait pu avoir pour effet de couvrir cette irrégularité. Cette décision est désormais définitive. La société JOYAU a alors saisi le tribunal de commerce de NANTERRE le 16 janvier 1997, d'une action en règlement des mêmes sommes à l'encontre des sociétés PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS FRANCE. Par un premier jugement du 18 mars 1996, cette juridiction a rejeté la fin de non recevoir tirée de l'autorité de chose jugée soulevée par les intimées et les a enjointes de conclure au fond. Puis selon une seconde décision du 23 septembre 1998, le tribunal a condamné les sociétés PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS FRANCE à verser à la société JOYAU respectivement les sommes de 480.964,61

francs et de 174.626,59 francs avec intérêts légaux à compter du 14 novembre 1991, le montant des frais d'expertise et chacune 20.000 francs de dommages et intérêts, outre une indemnité, de même montant au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens et ordonné l'exécution provisoire. Les sociétés PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS FRANCE ont relevé appel de ces deux jugements les 13 et 24 novembre 1998 selon deux procédures enrôlées respectivement sous les numéros 8608/98 et 8625/98. Elles soutiennent que la nouvelle instance engagée par la société JOYAU se heurte au principe de l'autorité de chose jugée de l'article 1351 du code civil dès lors qu'il existe en l'espèce identité de parties, d'objet et de cause. Elles font valoir, en toute hypothèse, que la prescription annale de l'article 108 du code du commerce est acquise à leur profit et que le courrier du 18 janvier 1991 qui ne constitue pas, selon elles, une reconnaissance de dette tant au plan intrinsèque qu'extrinsèque n'est pas susceptible de l'intervertir. Elles invoquent, en tout état de cause l'erreur de droit affectant les décisions déférées relativement à l'acte du 14 novembre 1991 jugé définitivement inexistant par la Cour dans son précédent arrêt du 09 mai 1996. Elles allèguent l'attitude essentiellement malicieuse et empreinte d'une extrême mauvaise foi de la société JOYAU dans le cadre des procédures engagées. Elles demandent, en conséquence, à la Cour de déclarer l'action de la société JOYAU irrecevable sur le fondement de l'article 1351 du code civil et subsidiairement sur celui de l'article 108 du code de commerce. Elles réclament chacune 500.000 francs de dommages et intérêts en raison de l'attitude téméraire, malicieuse et injustifiée de la société JOYAU et une indemnité de 100.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et la restitution des sommes consignées entre les mains du président de la chambre des avoués près

cette Cour en vertu de l'ordonnance du premier président du 02 avril 1999. La société JOYAU conclut à la confirmation des deux jugements attaqués sauf à y ajouter une indemnité de 20.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle se prévaut de motifs énoncés par la Cour dans sa décision du 09 mai 1996 pour opposer que son intervention volontaire venant aux droits de la société GALLE dans le cadre de la procédure antérieure n'a pu aucunement avoir pour effet d'épuiser ses droits, puisqu'elle n'agissait pas en son nom propre, en déniant l'identité de qualités des parties. Elle considère que la lettre du 18 janvier 1991 comporte sans équivoque une reconnaissance de dette à concurrence de 705.918,55 francs interrompant la prescription de l'article 108 du code du commerce. ä MOTIFS DE L'ARRET Considérant que les litiges ayant le même objet, il est de l'intérêt d'une bonne justice de les juger ensemble ; que les instances seront donc jointes conformément à l'article 367 du nouveau code de procédure civile sous le numéro 8608/98 ; considérant qu'aux termes de l'article 1351 du code civil, l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement et qu'à condition que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité ; considérant qu'il est constant que l'instance initiée par la société GALLE a fait l'objet d'un arrêt de cette chambre rendu le 09 mai 1996 en matière contentieuse dont le caractère définitif n'est pas discuté ; considérant que la demande de la société JOYAU est identique à celle formulée lors de l'instance antérieure par la société GALLE, puis par elle reprise, puisqu'elle concerne les mêmes factures à concurrence des montants semblables de 174.626,59 francs et 480.965,61 francs à l'égard respectivement de la société FUJI MAGNETICS FRANCE et de la société PIONEER SETTON que celles sur

lesquelles le tribunal de commerce de NANTERRE avait statué le 25 octobre 1994 ; considérant par ailleurs, que la société JOYAU fonde ses prétentions sur les mêmes transports effectués par la société GALLE pour le compte des sociétés présentement appelantes et auparavant défenderesses ; considérant, en outre, que si la société JOYAU n'a pas initié l'instance précédente, elle y est intervenue volontairement ainsi que cela a été expressément constaté tant dans le jugement du tribunal de commerce de NANTERRE du 25 octobre 1994 que dans l'arrêt de la Cour du 09 mai 1996 en sorte qu'elle a acquis la qualité de partie ; considérant que la société JOYAU ne saurait sérieusement soutenir avoir agi successivement sous les deux qualités différentes de " venant aux droits " de la société GALLE et en son nom propre en arguant de l'absence d'identité de qualités lorsqu'une partie agit comme mandataire d'une personne morale, puis à titre personnel, en procédant par voie de confusion et de dénaturation des motifs de l'arrêt du 09 mai 1996 ; considérant, en effet, que l'hypothèse à laquelle se réfère la société JOYAU est inopérante en l'espèce, dès lors qu'elle a elle-même indiqué dans l'instance précédente venir purement et simplement aux droits et obligations de la société GALLE par suite de son absorption sans jamais avoir fait état de ce qu'elle serait intervenue en tant que mandataire de cette société étant, de surcroît, observé que ce prétendu mandat n'aurait pu survivre à la disparition de la personnalité morale de la société GALLE ; considérant qu'il s'infère en réalité de l'intervention volontaire de la société JOYAU faisant siennes les demandes formées dans l'assignation du 14 novembre 1991 dès le premier degré de juridiction et reprises devant la Cour, que celle-ci a bien eu, dans les deux cas, la qualité de partie principale aux instances comme tirant justement et exclusivement ses droits de la société GALLE dont ceux en cause afférents aux relations contractuelles entretenues par

elle seule avec les sociétés PIONEER SETTON et FUJI MAGNETICS FRANCE, qui lui ont été transmis avec tous les autres éléments d'actif et de passif composant le patrimoine de la société GALLE par l'acte de fusion absorption du 24 septembre 1991 ; considérant que contrairement aux dires inexacts de la société JOYAU, la Cour n'a jamais observé dans son arrêt du 09 mai 1996, que " la société JOYAU intervenait volontairement en qualité de venant aux droits de la société GALLE et nullement en son nom propre " ; que la Cour dans ses motifs page 13 de cette décision, après avoir relevé que lors de l'introduction de l'action, le 14 novembre 1991, la société GALLE n'ayant plus d'existence légale, il s'agissait non pas d'un défaut de capacité à agir, mais d'une instance engagée par une personne morale dépourvue du droit d'agir pour en déduire que l'assignation délivrée en son nom personnel était elle-même inexistante et les prétentions y figurant irrecevables en application de l'article 32 du nouveau code de procédure civile, a seulement énoncé que " l'intervention volontaire de la société JOYAU en cours de procédure alors que celle-ci, subrogée de plein droit dans les droits et actions de la société absorbée, aurait dû introduire l'action en son nom propre, ne pouvait avoir pour effet de couvrir l'irrégularité " en question ; que la Cour a donc expressément et explicitement estimé qu'eu égard à l'inexistence de la société GALLE survenue le 10 octobre 1991, antérieurement à l'introduction de l'instance par acte du 14 novembre 1991, il eut appartenu à la seule société JOYAU venant à ses droits, de l'engager à cette époque là ; considérant qu'eu égard à l'identité de cause, d'objet et de parties, au sens de l'article 1351 du code civil, l'action de la société JOYAU doit être déclarée irrecevable comme violant le principe de l'autorité de chose jugée en application de l'article 122 du nouveau code de procédure civile, en infirmant entièrement les deux jugements déférés ; considérant que les sociétés

FUJI MAGNETICS et PIONEER ne démontrant pas une mauvaise foi caractérisée et patente de la part de la société JOYAU qui a pu, le cas échéant, se méprendre sur la portée de ses droits, leur demande en dommages et intérêts sera rejetée ; considérant que l'équité commande en revanche eu égard aux procédures auxquelles ont dû faire face ces deux sociétés poursuivies et réitérées selon des modalités critiquables de leur accorder à chacune une indemnité de 40.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; considérant qu'il importe en outre, d'ordonner la déconsignation en faveur des appelantes des fonds détenus par le président de la chambre des avoués près la Cour en vertu de l'ordonnance du premier président du 02 avril 1999 ; considérant que la société JOYAU qui succombe intégralement en ses prétentions supportera les dépens des deux instances. PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, ä ORDONNE la jonction des instances 98/8608 et 98/8625 sous le numéro R.G. 8608/98 ; ä INFIRME les deux jugements déférés en toutes leurs dispositions ; Et statuant à nouveau, ä DECLARE irrecevable l'action de la SA JOYAU sur le fondement de l'article 1351 du code civil ; ä REJETTE la demande en dommages et intérêts des sociétés appelantes ; ä CONDAMNE la SA JOYAU à verser à la SA FUJI MAGNETICS FRANCE et à la SA PIONEER FRANCE chacune, une indemnité de 40000 F. ( 6097,96 ) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; ä ORDONNE sur la simple production d'une copie exécutoire du présent arrêt, la déconsignation en faveur des SA FUJI MAGNETICS FRANCE et PIONEER FRANCE de tous les fonds détenus par le président de la chambre des avoués près la Cour en vertu de l'ordonnance du premier président en date du 02 avril 1999 ; ä CONDAMNE la SA JOYAU aux dépens des deux instances et AUTORISE la SCP GAS, Avoués, à recouvrer ceux d'appel conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ARRET PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT M. THERESE X...

F. LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-8608
Date de la décision : 06/12/2001

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Fin de non-recevoir - Action en justice - Irrecevabilité

L'intervenant volontaire qui indique venir purement et simplement aux droits d'une partie, en tant que société absorbante de celle-ci, prend de ce fait la qualité de partie principale à l'instance comme subrogée de plein droit dans les droits et actions de la société absorbée. En conséquence, la décision rendue dans cette instance ayant acquis un caractère définitif, l'autorité de chose jugée qui s'y attache, telle que définie par l'article 1351 du Code civil, s'oppose à ce que la société absorbante introduise par la suite dans la même qualité une instance nouvelle pour former, contre les mêmes parties, des demandes identiques sur des fondements semblables


Références :

Code civil, article 1351

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-12-06;1998.8608 ?
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