Par requête du 24 septembre 1999, M. HINOT, en sa qualité de mandataire syndical de M. X..., a saisi le conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye pour contester le licenciement économique dont l'intéressé avait fait l'objet, et solliciter paiement de diverses indemnités. Selon procès-verbal du 15 novembre 2000, le conseil s'est déclaré en départage. Par jugement du 11 juin 2001, le juge départiteur statuant seul, après avis de deux conseillers présents, en application de l'article R 516-40 alinéa 7 du code du travail, a constaté que M. X... était représenté par M. HINOT, conseiller prud'homme du conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye, qu'en conséquence le dit conseil n'était pas une juridiction impartiale au sens de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et a renvoyé l'affaire devant le conseil de prud'hommes d'Argenteuil statuant en formation de départage. M. X... a régulièrement relevé appel de ce jugement. Devant la cour, il demande la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a renvoyé l'affaire devant le conseil de prud'hommes d'Argenteuil, sauf à dire que l'affaire doit être fixée devant le bureau de jugement et non devant la formation de départage. Il fait valoir que le renvoi devant la formation de départage du conseil de prud'hommes d'Argenteuil se heurte à une difficulté tenant à la composition de la formation, laquelle en application de l'article L 515.3 du code du travail doit être le même bureau de jugement, complété et présidé par le juge départiteur. Il sollicite une indemnité de procédure de 5 000 F. Le Ministère public a conclu à la confirmation du jugement entrepris sauf en ce qu'il a ordonné le renvoi devant la formation de départage. Il se réfère aux décisions de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dont l'article 6.1 exige que la cause soit
entendue par une juridiction impartiale, y compris en apparence, et à la décision de la Cour de Cassation selon laquelle l'exigence d'apparence d'impartialité fait obstacle à ce qu'un mandataire syndical assistant ou représentant un salarié puisse intervenir devant le conseil dont il est membre, même devant une autre section que celle à laquelle il appartient. La société ABC demande à la cour de confirmer la décision entreprise, et de condamner M. X... à lui payer les sommes de 5 000 F à titre de dommages-intérêts pour appel abusif, et de 5 000 F à titre d'indemnité de procédure. Elle fait valoir que le renvoi devant la formation de départage est possible en vertu de l'article R 516.40 du code du travail.
MOTIFS DE LA DÉCISION Considérant que M. X... était assisté devant la section commerce du conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye de M. HINOT, mandataire syndical, conseiller dans la section encadrement du dit conseil depuis le 2 mai 2000, après l'avoir déjà été de 1993 à 1998 ; Considérant que selon l'article L 516.3 du code du travail, les personnes habilitées à assister ou représenter les parties en matière prud'homale, si elles sont conseillers prud'hommes, ne peuvent pas exercer leur mission devant la section ou la chambre à laquelle elles appartiennent ; Considérant qu'aux termes de l'article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial ; que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales constitue une norme ayant une autorité supérieure à celle de la loi française ; Considérant que l'exigence d'impartialité implique qu'un conseiller prud'homme n'exerce pas de mission de représentation ou d'assistance devant le conseil dont il est membre ; qu'autoriser un des membres du conseil à assister ou représenter un justiciable devant une autre section du conseil que
celle à laquelle il appartient, aurait pour conséquence que la juridiction ne présenterait pas une apparence d'impartialité ; qu'en effet les justiciables peuvent penser que les liens qui se créent nécessairement entre les membres d'une même juridiction, y compris avec le juge départiteur sont de nature à affecter l'impartialité de la juridiction lorsque l'un d'eux assiste ou représente une partie ; Considérant qu'il y a donc lieu de renvoyer l'affaire devant une autre juridiction ; Considérant que selon l'article L 515-3 du code du travail, en cas de départage l'affaire est renvoyée devant le même bureau de jugement présidé par le juge départiteur ; que du fait du renvoi devant une autre juridiction, le même bureau de jugement ne peut être appelé à siéger ; que les dispositions relatives à l'impossibilité du bureau de jugement de se réunir au complet, laquelle autorise le juge départiteur à statuer seul après avoir pris l'avis des conseillers présents, n'est applicable qu'à l'intérieur d'une même juridiction ; que l'affaire doit être en conséquence renvoyée devant le bureau de jugement et non devant la formation présidée par le juge départiteur ; que le jugement sera réformé en ce sens ; Considérant que le choix du conseil de prud'hommes d'Argenteuil , conseil limitrophe, apparaît conforme à l'intérêt d'une bonne administration de la justice ; Considérant qu'au vu des dispositions du présent arrêt, il y a lieu de débouter l'intimée de ses demandes de dommages-intérêts et d' indemnité de procédure ; qu'il n'y a pas lieu à indemnité de procédure au bénéfice de M. X... ;
PAR CES MOTIFS : La COUR, STATUANT publiquement par arrêt contradictoire, Réformant le jugement du conseil de prud'hommes de Saint Germain en Laye du 11 juin 2001, Renvoie la cause et les parties devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes d'Argenteuil ; Déboute la société ABC de ses demandes, et M.
X... de sa demande d'indemnité de procédure ; Dit que les dépens suivront ceux de la procédure au fond. Et ont signé le présent arrêt Mme LINDEN, Président, et Mme Y..., Greffier. LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT