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06/09/2001 | FRANCE | N°1998-915

France | France, Cour d'appel de Versailles, 06 septembre 2001, 1998-915


FAITS ET PROCEDURE : La Société FLASH VILLE, ayant son siège à NOUMEA (Nouvelle-Calédonie) a acquis en mars 1994 auprès de la Société THOMSON ELECTROMENAGER INTERNATIONAL soixante-huit lave-linges Brandt moyennant le prix de 116.450 francs ; elle a chargé la Société HESNAULT de les transporter de CORBAS (Rhône) à NOUMEA. Les lave-linges ont été placés par l'expéditeur dans le container IKSU 9065571, lequel a été transporté de CORBAS à MARSEILLE par la Société PIACENZA Père et Fils ; selon connaissement n° OSCNCFMRSF54272 établi à MARSEILLE le 06 avril 1994, le transp

ort maritime en container s'est effectué sur le navire " New Zealand " exp...

FAITS ET PROCEDURE : La Société FLASH VILLE, ayant son siège à NOUMEA (Nouvelle-Calédonie) a acquis en mars 1994 auprès de la Société THOMSON ELECTROMENAGER INTERNATIONAL soixante-huit lave-linges Brandt moyennant le prix de 116.450 francs ; elle a chargé la Société HESNAULT de les transporter de CORBAS (Rhône) à NOUMEA. Les lave-linges ont été placés par l'expéditeur dans le container IKSU 9065571, lequel a été transporté de CORBAS à MARSEILLE par la Société PIACENZA Père et Fils ; selon connaissement n° OSCNCFMRSF54272 établi à MARSEILLE le 06 avril 1994, le transport maritime en container s'est effectué sur le navire " New Zealand " exploité par la Société CONTSHIP CONTAINER LINES. Le navire est arrivé au port de NOUMEA le 11 mai 1994, et le container a été pris en charge d'abord par la Société TRANSMAR, représentant de la Compagnie Maritime à NOUMEA, puis par la Société UNITRANS, laquelle l'a remis à la Société FLASH VILLE ; à l'ouverture du container, le chauffeur de la Société UNITRANS et le représentant de la Société FLASH VILLE ont constaté qu'il était à moitié vide ; des réserves ont été portées par le destinataire sur le bon de livraison UNITRANS n° 09881. Une expertise a été confiée à Monsieur Gérald X..., expert maritime et commissaire d'avaries à NOUMEA, en vue de déterminer l'ampleur et la cause des manquants ; l'expert maritime a conclu que le vol des machines à laver, ayant pu difficilement être commis à bord du navire, s'était probablement produit lors du transport antérieur au transport maritime. C'est dans ces circonstances que, par actes d'huissier en date des 11 et 19 mai 1995, les Compagnies d'assurances LE CONTINENT, MUTUELLE ELECTRIQUE D'ASSURANCE, EUROPEENNE D'ASSURANCE, COMMERCIAL UNION, CRAVAC SACH VERSICHERUNG, CEAI, GUARDIAN RISQUES France, CIAT, NATIONAL SUISSE (France), NAVIGATION ET TRANSPORT, NORWICH UNION, ALLIANZ VIA IART ASSURANCE, POOL MUTUELLE DU MANS, COMMERCIAL UNION et NATIONALE SUISSE (France) ont fait assigner devant le Tribunal de

Commerce de VERSAILLES la Société HESNAULT et la Société UNITRANS pour les voir condamner solidairement à leur payer la somme principale de 61.481,52 francs, outre intérêts au taux légal avec capitalisation annuelle à compter de la subrogation intervenue le 20 décembre 1994. Par actes des 06 et 07 juin 1995, la Société HESNAULT a appelé en garantie la Société TRANSPORTS PIACENZA Père et Fils, la Société CONTSHIP CONTAINER LINES France et la Société UNITRANS, pour voir dire que, dans l'hypothèse où elle ferait l'objet d'une condamnation au profit des compagnies requérantes, lesdites sociétés devront la garantir de toutes les condamnations prononcées contre elle. Suivant jugement en date du 05 novembre 1997, le Tribunal a :

Ïjoint les deux instances ; Ï réduit la demande des compagnies d'assurances à la somme de 57.714,30 francs ; Ïdit que le rapport d'expertise de Monsieur X... n'est pas opposable aux parties en cause ; Ï déclaré la Société UNITRANS seule responsable du vol des trente lave-linges, et condamné cette société à payer aux compagnies d'assurances requérantes la somme de 57.714,30 francs, outre les intérêts au taux légal à compter du 19 mai 1995, date de l'assignation, avec capitalisation de ceux-ci à compter du 19 mai 1996 ; Ï dit non fondée la demande en paiement formée par les compagnies d'assurances à l'encontre de la Société HESNAULT et débouté lesdites compagnies de leur demande en tant qu'elles est dirigée contre celle-ci ; Ï dit irrecevable l'appel en garantie formé par la Société HESNAULT contre la Société PIACENZA Père et Fils ; Ïdit la Société HESNAULT mal fondée dans son appel en garantie contre la Société CONTSHIP CONTAINER LINES, et débouté la Société HESNAULT de sa demande à l'encontre de celle-ci ; Ï condamné la Société UNITRANS à payer, au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile : Î aux compagnies d'assurances demanderesses la somme de 6.000 francs ; Î à la Société HESNAULT la somme de 15.000

francs ; Ï condamné la Société HESNAULT à payer, au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile : Ï à la Société PIACENZA Père et Fils la somme de 5.000 francs ; Ï à la Société CONTSHIP CONTAINER LINES la somme de 5.000 francs ; Ïcondamné la Société UNITRANS aux dépens. La Société UNITRANS SA a interjeté appel de ce jugement le 10 décembre 1997. Elle fait grief à la décision entreprise d'être entrée en voie de condamnation à son encontre au seul motif que le bon de livraison, qui comporte en réalité une erreur de date, mentionne une livraison intervenue le 27 mai 1994 de 13 heures à 17 heures. Elle expose que le container a été enlevé par elle le 25 mai 1994 à 13h 10, qu'elle a livré directement à la Société FLASH VILLE à Ducos, Zone Industrielle de Nouméa, le même jour à 13h 30 sur un véhicule plateau, le plomb étant conforme, et que la Société FLASH VILLE a signé le bon de livraison sans réserve au niveau du plomb qui était toujours conforme. Elle indique que le container a alors été ouvert en présence du chauffeur d'UNITRANS et que c'est à ce moment-là qu'il a été constaté que ce container était à moitié vide et qu'une réserve a donc été ajoutée. Elle précise qu'à la suite de la réception du container par le client, le véhicule est resté sur place sans le chauffeur, et que le client a procédé lui-même au dépotage. Elle relève que la mention des horaires de 13h à 17h correspond en fait à l'heure de départ, au temps de mise à disposition du plateau avec le container et à l'heure de retour. Elle soutient qu'en réalité elle n'est intervenue que de 13h à 13h 30 pour transporter ce container du port de NOUMEA jusqu'aux locaux de la Société FLASH VILLE, ce qui exclut toute possibilité de vol durant ce bref intervalle de temps. Invoquant les conclusions du rapport établi par le commissaire aux avaries, duquel il ressort que le vol n'a pu se produire que durant le transport antérieur au transport maritime ou lors du stationnement sur le container au port d'embarquement, la

Société UNITRANS demande à la Cour de réformer le jugement entrepris, de dire et juger qu'elle n'est nullement responsable du vol intervenu, et de condamner les intimés aux entiers dépens. Les Compagnies d'assurances LE CONTINENT, ALLIANZ VIA IART ASSURANCES, CEAI, NATIONALE SUISSE (France), COMMERCIAL UNION, EUROPENNE D'ASSURANCES, GUARDIAN RISQUES France, KRAVAG SACH VERSICHERUNG, MUTUELLE ELECTRIQUE D'ASSURANCES, NATIONAL SUISSE (France), NAVIGATION ET TRANSPORT, NORWICH UNION, POOL MUTUELLE DU MANS, et SIAT, ont interjeté appel de ce jugement le 30 janvier 1998. D'abord en ce qui concerne la valeur probante du rapport d'expertise, elles font observer que le caractère non contradictoire de l'expertise diligentée le 27 mai 1994 à la requête de la Société THOMSON ELECTROMENAGER INTERNATIONAL ne fait pas obstacle, par principe, à ce que le rapport établi par Monsieur Gérald X... soit utilisé comme élément de preuve, dès lors qu'il a été régulièrement versé aux débats et que les parties ont pu en discuter. Ensuite en ce qui concerne la responsabilité de la Société HESNAULT, elles expliquent que celle-ci, en sa qualité de commissionnaire, a été chargée d'organiser l'ensemble des opérations de transport de soixante-huit machines à laver jusqu'à NOUMEA (Nouvelle-Calédonie), et qu'en application des articles 97, 98 et 99 du Code de Commerce, elle est responsable de toute la chaîne du transport jusqu'à destination et garante des différents intervenants, voituriers et autres intermédiaires, qui coopèrent à l'exécution de ce transport.Elles entendent se prévaloir des conclusions ci-dessus rappelées du rapport de l'expert maritime pour conclure que le vol s'est produit au cours d'une période durant laquelle la Société HESNAULT avait la responsabilité de la marchandise. Elles soutiennent que la Société HESNAULT ne saurait être exonérée de sa responsabilité au motif que le transporteur maritime CONTSHIP CONTAINER LINES n'a émis aucune

réserve sur le poids du conteneur, alors que l'absence de réserves ne démontre nullement que la marchandise était conforme aux mentions portées sur le connaissement. Elles relèvent que la Société HESNAULT n'est pas davantage fondée à invoquer la circonstance que le conteneur vidé de la moitié de son chargement aurait présenté au moment de son levage une inclinaison importante révélant le vol, alors qu'il n'est pas établi que le conteneur à moitié vide aurait présenté, lors de son levage par les moyens portuaires, une inclinaison de nature à faire naître des inquiétudes quant à une éventuelle spoliation. Elles précisent qu'aucune conséquence ne saurait non plus être tirée du fait que, lors de la remise du conteneur au transporteur UNITRANS, le plomb était intact, alors que l'expert maritime a démontré que le conteneur avait fort bien pu être ouvert sans que le plomb soit brisé. A cet égard, elles soulignent que le conteneur litigieux a quitté l'usine de la Société THOMSON ELECTROMENAGER INTERNATIONAL le 25 mars 1994, et qu'il n'a été embarqué sur le " CS New Zealand " au Havre que le 06 avril 1994, soit douze jours plus tard, et elles estiment qu'un tel laps de temps était largement suffisant pour permettre à des malfaiteurs d'agir. En conséquence, les assureurs subrogés dans les droits de la Société FLASH VILLE demandent à la Cour, en réformant de ce chef le jugement entrepris, de dire que le commissionnaire de transport HESNAULT a engagé sa responsabilité et doit répondre des conséquences dommageables du sinistre sur le fondement des dispositions des articles 97, 98 et 99 (articles L 132-4 à L 132-6) du Code de Commerce. De plus relativement à la responsabilité de la Société UNITRANS, les compagnies d'assurances mentionnent que celle-ci ne rapporte pas la preuve des erreurs sur la date et sur les temps de livraison que comporterait le bon de livraison qu'elle a établi et signé. Elles font valoir qu'en tout état de cause, à supposer que la

Société UNITRANS ait livré le conteneur litigieux le 25 mai 1994, il n'en demeure pas moins que, selon le bon de livraison établi par elle, les opérations de livraison ont duré quatre heures, de 13 heures à 17 heures. Elles estiment que, dès lors que la Zone Industrielle de Ducos se trouve à la sortie de Nouméa, à moins de quinze minutes de la zone portuaire, il restait une période de plusieurs heures totalement injustifiée et inexpliquée, largement suffisante pour qu'un vol ait pu être commis. Alléguant que la formulation employée par le commissaire d'avaries n'exclut nullement que le vol ait pu se produire après le débarquement du conteneur à Nouméa, les compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE concluent à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré la Société UNITRANS responsable du vol de trente machines à laver et en ce qu'il l'a condamnée à leur payer la somme de 57.714,30 francs en principal, outre les intérêts de cette somme calculée au taux légal à compter du 19 mai 1995, avec capitalisation de ceux-ci à compter du 19 mai 1996. Elles demandent à la Cour de réformer ledit jugement en ce qu'il a dit non opposable aux parties en cause le rapport d'expertise de Monsieur Gérald X... et en ce qu'il a dit non fondée la demande en paiement formée par elles contre la Société HESNAULT. Par voie de conséquence, elles sollicitent la condamnation de la Société HESNAULT, solidairement avec la Société UNITRANS, à leur payer, avec exécution provisoire, la somme principale de 57.714,30 francs, les intérêts de cette somme calculés au taux légal à compter du 19 mai 1995, avec capitalisation de ceux-ci à compter du 19 mai 1996. Elles concluent en outre à la condamnation de la Société HESNAULT, solidairement avec la Société UNITRANS, à leur payer la somme de 24.140 francs TTC au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et à prendre en charge les entiers dépens de première instance et d'appel. La Société

HESNAULT réplique que, si elle a agi en qualité de commissionnaire de transport depuis le départ Usine de la Société TEMI à CORBAS (Rhône) jusqu'à quai au port de NOUMEA, sa mission a pris fin lors de la remise du container au port de NOUMEA, entre les mains de la Société UNITRANS, de telle sorte qu'elle n'a pas à répondre des incidents ultérieurs à cette remise. Elle fait observer que, pour rechercher la cause du sinistre et le lieu où il a pu se produire, l'expert maritime s'est en réalité livré à de simples hypothèses d'autant moins probantes qu'il n'a pas correctement analysé les opérations antérieures au transport maritime, les opérations à destination à NOUMEA et les conséquences de l'absence de réserves des intervenants. Elle souligne que l'expert ne pouvait, par des suppositions non vérifiées, prétendre situer le moment du vol, alors qu'il lui appartenait de tirer toutes les conséquences des absences de réserves des divers intervenants dans la chaîne de transport, en retenant la seule responsabilité de la Société UNITRANS. Se prévalant de la présomption de livraison conforme, et relevant que la Société UNITRANS n'apporte aucun élément probant de nature à détruire cette présomption, la société intimée conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il est entré en voie de condamnation à l'encontre de ladite société et en ce qu'il a débouté les assureurs subrogés dans les droits de la Société FLASH VILLE de leur demande à l'encontre du commissionnaire de transport. A titre subsidiaire, au cas où la responsabilité exclusive de la Société UNITRANS ne serait pas retenue, la Société HESNAULT demande à la Cour de la déclarer bien fondée dans son recours en garantie notamment à l'encontre de la Compagnie Maritime CONTSHIP CONTAINER LINES. De plus, elle sollicite la condamnation solidaire de la Société UNITRANS et des assureurs à lui payer la somme de 20.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et à prendre en charge les

entiers dépens. La Société CONTSHIP CONTAINER LINES FRANCE répond en premier lieu que le vol n'a pu être commis durant la traversée maritime, et qu'il n'a pu davantage être perpétré avant la prise en charge du conteneur par le transporteur maritime. En effet, elle explique que c'est le chargeur, la Société HESNAULT, qui a empoté la marchandise et plombé le conteneur, que le numéro de plomb à destination était toujours le même, et qu'ainsi, elle a remis à destination une marchandise telle qu'elle l'avait reçue des mains de ladite société. Elle précise que le conteneur a été chargé et a voyagé en milieu de cale, et que sa position sur le navire exclut toute possibilité de vol au cours de la traversée. Elle soutient également qu'à supposer que la spoliation du conteneur ait eu lieu avant sa prise en charge par l'armement CONTSHIP au HAVRE, d'une part les opérations de chargement et de déchargement auraient mis en exergue un problème de répartition du poids à l'intérieur du conteneur, d'autre part et surtout, la marchandise reçue par FLASH VILLE à NOUMEA serait nécessairement arrivée endommagée, alors qu'il n'en a rien été puisque le reliquat de cargaison reçu par le destinataire a été réceptionné en parfait état. Aussi elle conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a retenu que la responsabilité de la Société CONTSHIP n'est nullement engagée dans la réalisation du sinistre. En second lieu, la compagnie maritime intimée soutient que tous les éléments de fait concourent à incriminer la responsabilité de la Société UNITRANS, dans la mesure où les pièces versées aux débats par celle-ci ne correspondent nullement à la position qu'elle tente d'adopter dans ses écritures. A cet égard, elle relève que les mentions du bon de livraison communiqué par la Société HESNAULT et par les compagnies d'assurances font état d'une livraison en date du 27 mai 1994 chez le destinataire et ayant duré entre 13 heures et 17 heures, soit l'espace de quatre

heures. Elle soutient que c'est vainement que la Société UNITRANS tente de nier l'exactitude desdites mentions et prétend que la livraison aurait eu lieu le 25 mai 1994 et aurait débuté à 13h 10 pour se terminer à 13h 30, alors que les mentions du bon de livraison font foi jusqu'à preuve du contraire et que cette preuve contraire n'est nullement rapportée. Alléguant que le bon de livraison produit aux débats par la partie appelante comporte une rectification évidente de la date du 25 mai 1994 et que sa force probante est donc éminemment sujette à caution, la Société CONTSHIP CONTAINER LINES FRANCE sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a retenu l'entière responsabilité de la Société UNITRANS. De plus, la société intimée conclut à la condamnation de la Société UNITRANS au paiement d'une indemnité de 15.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel. La Société TRANSPORTS PIACENZA sollicite à titre principal la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a énoncé que la présente action, en tant qu'elle est dirigée à son encontre, se trouve prescrite par application de l'article 108 (article L 133-6) du Code de Commerce. A titre subsidiaire, elle fait observer que la prise de livraison sans réserves entraîne une présomption de réception conforme à l'égard du destinataire, de telle sorte qu'il incombe à ceux qui invoqueraient sa responsabilité de démontrer que le vol a eu lieu pendant le parcours entre CORBAS (Rhône) et le port de MARSEILLE, ce que le rapport non contradictoire de Monsieur X... ne met nullement en évidence. Aussi elle demande à la Cour de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle l'a mise hors de cause et en ce qu'elle a condamné la Société UNITRANS (en réalité la Société HESNAULT) à lui payer la somme de 5.000 francs par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Elle conclut en outre à la condamnation de ladite société à lui payer

la somme complémentaire de 15.000 francs en remboursement des frais irrépétibles exposés par elle en cause d'appel, et à prendre en charge les entiers dépens de première instance et d'appel. L'ordonnance de clôture a été prononcée le 14 septembre 2000. MOTIFS DE LA DECISION : Sur la présomption de livraison conforme :

Considérant qu'à titre préalable, il doit être pris acte de ce que la qualité de commissionnaire de transport de la Société HESNAULT dans l'opération d'acheminement des marchandises litigieuses de CORBAS (Rhône) à NOUMEA (Nouvelle-Calédonie) n'est pas contestée par cette société ; Considérant qu'il résulte des mentions du connaissement délivré à MARSEILLE le 06 avril 1994 que le container plombé renfermant les soixante-huit colis à destination de NOUMEA devait être embarqué au port du HAVRE, puis déchargé au port de NOUMEA ; Considérant qu'aux termes de ses écritures devant la Cour, la Société UNITRANS reconnaît qu'elle est intervenue au moment où le container a été déposé au port de NOUMEA et que son rôle a consisté, à partir de l'ordre de la Société FLASH VILLE, à enlever la cargaison sur le quai, à l'acheminer chez ce client, puis à reprendre le container vide et à le rapporter en zone portuaire ; Considérant qu'il s'ensuit que la mission de la Société HESNAULT a pris fin lors de la remise du container au port de NOUMEA entre les mains de la Société UNITRANS ; Or considérant qu'il apparaît que le connaissement en date du 06 avril 1994 ne contient aucune réserve de la part de la Compagnie Maritime CONTSHIP CONTAINER LINES lors de la prise en charge du container à MARSEILLE ; Considérant qu'il doit être également observé que la Société UNITRANS n'a pas davantage pris de réserves à NOUMEA lors de la prise en charge par elle de la cargaison qui lui a été remise le 25 mai 1994 par la Société TRANSMAR, représentant la Compagnie Maritime en Nouvelle-Calédonie ; Considérant que, par voie de conséquence, la Société HESNAULT, en sa qualité de commissionnaire

de transport, et la Société CONTSHIP CONTAINER LINES, chargée de l'acheminement des marchandises par la voie maritime depuis MARSEILLE jusqu'à NOUMEA via LE HAVRE, bénéficient de la présomption de livraison conforme telle qu'elle est édictée par l'article 57 du décret du 31décembre 1966. Sur les conséquences de la présomption de livraison conforme : Considérant qu'il incombe à la Société UNITRANS, qui a pris livraison du container sans réserve, de démontrer que les manquants constatés lors de la remise de la cargaison à son destinataire trouvent leur origine dans les opérations effectuées antérieurement à l'intervention de cette société ; Or considérant qu'en premier lieu, aucune preuve n'est rapportée que le vol des trente lave-linges ait pu se produire avant la prise en charge du conteneur par le transporteur maritime ; Considérant qu'en effet, ainsi que cela a déjà été relevé, la Société CONTSHIP n'a assorti d'aucune réserve le connaissement délivré par elle le 06 avril 1994, portant mention de la réception d'un container de vingt pieds, non chargé par elle, et comportant soixante-huit colis de matériel électroménager ; Considérant qu'il s'ensuit que cette cargaison constituée par les soixante-huit machines à laver a été nécessairement arrimée à l'intérieur du container afin de ne subir aucun dommage lors du transport par mer ; Considérant que, dès lors, si le vol s'était produit avant les opérations d'acheminement par la voie maritime, les trente-huit machines restantes seraient arrivées endommagées au port de NOUMEA par suite d'un mauvais arrimage ; considérant qu'au demeurant, si, aux termes de son rapport en date du 06 juin 1994, Monsieur Gérald X..., Commissaire d'Avaries, a estimé, sans la moindre certitude, qu' : " Il apparaît donc que la spoliation a pu être commise probablement lors du transport antérieur au transport maritime ou lors du stationnement du conteneur dans le Terminal du port d'embarquement ", cet avis n'est

toutefois corroboré par aucun élément probant et se trouve même contredit par le fait, non contesté, que les machines restantes sont arrivées en bon état à destination ; considérant qu'au surplus, aucune conséquence ne peut être tirée de l'analyse du plomb du container quant à l'appréciation de l'époque du vol, dans la mesure où, d'après les constatations faites par l'expert maritime, le conteneur a fort bien pu être ouvert par les voleurs sans que le plomb ait été brisé ; Considérant que le fait que, selon les compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE, le conteneur litigieux ait quitté l'usine de la Société THOMSON ELECTROMENAGER INTERNATIONAL le 25 mars 1994 et n'ait embarqué sur le " New Zealand " au Havre que le 06 avril 1994, soit douze jours plus tard, ne permet donc pas, en l'absence de tout élément de preuve, de conclure que le vol aurait pu avoir été perpétré durant cette période ; considérant qu'en second lieu, rien ne vient davantage corroborer l'hypothèse suivant laquelle la disparition des trente machines aurait pu survenir au cours de la traversée maritime ; considérant que, tout au contraire, après examen du plan du chargement à l'intérieur du navire, l'expert maritime a relevé que le conteneur pouvait difficilement avoir été spolié, étant donné qu'il était arrimé au centre de la cale ;

considérant qu'en l'absence de preuve que ce vol se serait produit en un temps où les marchandises litigieuses se trouvaient sous la responsabilité de la Société HESNAULT, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE de leur demande en tant qu'elle est dirigée contre le commissionnaire de transport ; Considérant que, par voie de conséquence, les appels en garantie de la Société HESNAULT à l'encontre de ses substitués, à savoir la Société TRANSPORTS PIACENZA pour le transport terrestre entre CORBAS

(Rhône) et MARSEILLE, et la Société CONTSHIP CONTAINER LINES pour le transport maritime, et à l'encontre de la Société UNITRANS, ne peuvent qu'être déclarés sans objet ; Considérant qu'en revanche, il est constant que la Société UNITRANS a eu la responsabilité du container à partir du 25 mai 1994, date à laquelle celui-ci lui a été remis, à l'arrivée au port de NOUMEA, par la Société TRANSMAR, représentant sur place de la Compagnie Maritime, suivant bon de livraison n° 8500 net de réserves ; Considérant qu'il est également acquis aux débats qu'à réception des marchandises, la Société FLASH VILLE a émis des réserves après avoir constaté qu'il manquait trente machines à laver ; Considérant que force est de constater que la date du 25 mai 1994, figurant sur la lettre de réserves adressée par le destinataire à la Société TRANSMAR, se trouve en contradiction avec les énonciations du bon de livraison n° 9881, faisant état d'une remise des marchandises par la Société UNITRANS à la Société FLASH VILLE le 27 mai 1994 entre 13 heures et 17 heures ; Considérant que, si la société appelante a produit aux débats une attestation en date du 7 juin 1996, aux termes de laquelle la Société CALDIS certifie qu'UNITRANS a procédé à la livraison chez FLASH VILLE le 25 mai 1994 à 13h 30, ce document, qui ne contient pas la moindre indication sur le conteneur et les marchandises concernés, ne peut suffire à combattre les mentions figurant sur le bon de livraison susvisé ; Considérant qu'il s'ensuit que le container litigieux s'est trouvé sous la garde de la Société UNITRANS entre le 25 mai 1994 et le 27 mai 1994 à 17 heures, ou à tout le moins le 25 mai 1994 entre 13 heures et 17 heures, soit sur une période de temps largement suffisante pour qu'un vol ait pu être commis ; Considérant que, dès lors, la Société UNITRANS, qui a accepté sans réserves la cargaison lors de sa remise par la Société TRANSMAR, sans avoir pu établir que les manquants avaient une origine antérieure à sa propre

compagnies, doivent êtreêtre tenue de réparer le préjudice subi par la Société FLASH VILLE du fait de ces disparitions ; Considérant que, par voie de conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la Société UNITRANS à payer aux compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE la somme de 57.714,30 francs en principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 1995, date de l'assignation, lesdits intérêts étant eux-mêmes capitalisés à compter du 19 mai 1996. Sur les demandes annexes : Considérant que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a condamné la Société UNITRANS à payer, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité de 15.000 francs à la Société HESNAULT et une indemnité de 6.000 francs aux compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE ; Considérant que la décision entreprise doit cependant être infirmée en ce qu'elle a condamné la Société HESNAULT à verser aux Sociétés TRANSPORTS PIACENZA et CONTSHIP CONTAINER LINES une indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; Considérant que l'équité commande de mettre à la charge de la Société UNITRANS, sur le même fondement, une indemnité de 10.000 francs en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés tant en première instance qu'en appel par la Société CONTSHIP, et une indemnité de 5.000 francs en remboursement des frais non compris dans les dépens qui ont été engagés dans le cadre de la présente procédure par la Société TRANSPORTS PIACENZA ; Considérant qu'il n'est cependant pas inéquitable que la Société UNITRANS conserve la charge de l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés pour assurer la défense de ses intérêts ; Considérant que les prétentions formulées à ce titre par les compagnies d'assurances subrogées à l'encontre de la Société HESNAULT, et réciproquement par celle-ci à l'encontre desdites compagnies, doivent êtrear les compagnies

d'assurances subrogées à l'encontre de la Société HESNAULT, et réciproquement par celle-ci à l'encontre desdites compagnies, doivent être écartées ; Considérant que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a condamné la Société UNITRANS aux dépens de première instance ; Considérant qu'il convient de faire masse des dépens d'appel, lesquels seront supportés par moitié par la Société UNITRANS et par moitié par les compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, DECLARE recevable l'appel interjeté par la SA UNITRANS, le dit mal fondé ; DECLARE recevable l'appel interjeté par les compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE, le dit mal fondé ; CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a : À déclaré la Société UNITRANS seule responsable des conséquences dommageables pour la Société FLASH VILLE de la non livraison de trente machines à laver ; À condamné la Société UNITRANS à payer aux compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE la somme principale de 57.714,30 francs, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 19 mai 1995, avec capitalisation desdits intérêts à compter du 19 mai 1996 ; Ï débouté les compagnies d'assurances subrogées de leur demande à l'encontre de la Société HESNAULT ; L'INFIRME partiellement pour le surplus, et statuant à nouveau sur les appels en garantie ainsi que sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile : DECLARE sans objet les appels en garantie diligentés par la SA HESNAULT à l'encontre des Sociétés UNITRANS, CONTSHIP CONTAINER LINES et TRANSPORTS PIACENZA ; CONDAMNE la SA UNITRANS à payer, en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile : Ï la somme de 6.000 francs aux compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE ; Ï la somme de 15.000 francs à la SA HESNAULT ; Ï la somme de 10.000

francs à la Société CONTSHIP CONTAINER LINES ; Ï la somme de 5.000 francs à la Société TRANSPORTS PIACENZA ; DEBOUTE les parties de leurs autres et plus amples demandes ; CONDAMNE la SA UNITRANS aux dépens de première instance ; FAIT MASSE des dépens d'appel, lesquels seront pris en charge par moitié par la SA UNITRANS et par moitié par les compagnies d'assurances subrogées dans les droits de la Société FLASH VILLE, et AUTORISE la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS etamp; Associés, la SCP JULLIEN-LECHARNY-ROL, et Maître BINOCHE, Avoués, à recouvrer directement la part les concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR FEDOU, CONSEILLER PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT M.THERESE GENISSEL

F. LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-915
Date de la décision : 06/09/2001

Analyses

TRANSPORTS MARITIMES - Marchandises - Responsabilité - Perte ou avarie

Lorsqu'il résulte des mentions d'un connaissement, émis à Marseille, qu'un conteneur à destination de Nouméa, devait être embarqué au port du Havre pour être déchargé au port de destination, et qu'il n'est pas contesté que le destinataire a missionné un transporteur de son choix pour acheminer ce conteneur jusqu'à ses entrepôts dès son débarquement, il s'ensuit nécessairement que la mission du commissionnaire de transport, intervenu dans les opérations terrestres et maritimes antérieures, a pris fin au port de débarquement lors de la remise du conteneur au transporteur désigné par le destinataire. En l'absence de réserves émises, tant au moment de l'embarquement du conteneur, par le transporteur maritime, qu'au moment de son débarquement, lors de la prise en charge par le transporteur final, le commissionnaire de transport et le transporteur maritime sont fondés à se prévaloir du bénéfice de la présomption de livraison conforme édictée par l'article 57 du décret du 31 décembre 1966. Par suite, il appartient au transporteur final qui conteste sa responsabilité dans le vol partiel de marchandises constaté chez le destinataire, de démontrer, autrement que par la formulation d'hypothèses, que les manquants sont antérieures à son intervention


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-09-06;1998.915 ?
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