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08/06/2001 | FRANCE | N°1999-7164

France | France, Cour d'appel de Versailles, 1ère chambre 2ème section, 08 juin 2001, 1999-7164


COUR D'APPEL DE VERSAILLES
1ère chambre 2ème section
ARRÊT N° DU 08 JUIN 2001
R. G. N° 99/ 07164
AFFAIRE : L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS " OSE " C/ Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines, ès qualités d'administrateur ad'hoc du mineur Z...
Appel d'un jugement rendu le 13 Août 1999 par le T. I. ECOUEN
La cour d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre 2ème section, a rendu l'arrêt CONTRADICTOIRE suivant, prononcé en audience publique,
La cause ayant été débattue à l'audience publique du 04 Mai 2001,
DEVANT : Monsieur Alban CHAIX, prés

ident chargé du rapport, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés, en application ...

COUR D'APPEL DE VERSAILLES
1ère chambre 2ème section
ARRÊT N° DU 08 JUIN 2001
R. G. N° 99/ 07164
AFFAIRE : L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS " OSE " C/ Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines, ès qualités d'administrateur ad'hoc du mineur Z...
Appel d'un jugement rendu le 13 Août 1999 par le T. I. ECOUEN
La cour d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre 2ème section, a rendu l'arrêt CONTRADICTOIRE suivant, prononcé en audience publique,
La cause ayant été débattue à l'audience publique du 04 Mai 2001,
DEVANT : Monsieur Alban CHAIX, président chargé du rapport, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés, en application de l'article 786 du nouveau code de procédure civile, assisté de Madame Caroline DE GUINAUMONT, greffier,
Le magistrat rapporteur en a rendu compte à la cour, dans son délibéré, celle-ci étant composée de :
Monsieur Alban CHAIX, président, Madame Marie-Christine LE BOURSICOT, conseiller, Monsieur Daniel CLOUET, conseiller, et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément à la loi,
DANS L'AFFAIRE,
ENTRE : L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS " OSE ", Association reconnue d'utilité publique dont le siège social est 117, rue du Faubourg du Temple 75010 PARIS, représentée par son Président domicilié en cette qualité audit siège APPELANTE CONCLUANT par la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, avoués près la cour d'appel de VERSAILLES AYANT pour Avocat Maître BOUSSEREZ du Barreau de PONTOISE substitué par Maître POURRE, Avocat au Barreau de PONTOISE
ET Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines, demeurant... 78012 VERSAILLES, ès qualités d'administrateur ad'hoc du mineur Z... né le 30 mars 1987 INTIME CONCLUANT par la SCP DEBRAY CHEMIN, avoués près la cour d'appel de VERSAILLES AYANT pour Avocat Maître FOURNIER du Barreau de VERSAILLES
FAITS ET PROCEDURE
Z... a été confié à l'Aide sociale à l'enfance des Yvelines, par une ordonnance provisoire en date du 19 juillet 1994. Par jugement rendu par le Tribunal pour enfants de Versailles, les 6 février 1995, 6 août 1996 et 17 juillet 1997, ce placement a été renouvelé. Dans la semaine du 16 au 21 septembre 1996, alors qu'il avait été confié par l'ASE des Yvelines, au foyer " La maison des champs " (OSE), depuis le 24 août 1994, Z..., âgé de 9 ans, a été victime de viols en réunion commis par trois de ces camarades : A..., âgé de 13 ans, B..., âgé de 13 ans et C..., âgé de 12 ans. Tous les quatre résidaient à " la Maison des Champs " à LUZARCHES (95). A... semble être à l'origine des faits qui ont commencé dans les vestiaires où B... a imposé à Z... une fellation. Il s'en est ensuite vanté auprès d de A... et de C... avec lequel il est redescendu aux vestiaires. Les trois garçons ont de nouveau abusé de Z... en tentant de le sodomiser. Puis, les mêmes faits se sont reproduits un peu plus tard dans la soirée dans la chambre de A.... D..., âgé de 12 ans, témoin de la scène, a averti la lingère. Monsieur X..., directeur de l'établissement averti, a déposé plainte le 26 septembre 1996.
Une information a été ouverte sous le chef de viols en réunion et sur la personne d'un mineur de 15 ans. Un procès verbal d'interrogatoire de première comparution a été établi le 27 juin 1997 pour C..., le 12 août 1997 pour B... et le 13 août pour A.... Z... a été entendu en tant que témoin le 3 septembre 1997. Les trois mineurs mis en examen ont été laissés en liberté. Une confrontation a été organisée entre A..., B... et C... le 2 octobre 1997.
Par une ordonnance en date du 19 janvier 1997, le Juge d'Instruction du Tribunal de Grande Instance de PONTOISE a désigné le docteur Y... en sa qualité d'expert. Le rapport a été remis le 14 novembre 1997. Par une ordonnance en date du 11 mars 1998, le Juge d'Instruction au Tribunal de Grande Instance de PONTOISE a :
- qualifié les crimes de viols sur mineurs de 15 ans commis en réunion, reprochés aux mis en examen comme constituant en réalité des délits d'agressions sexuelles sur mineur de moins de 15 ans commis en réunion,
- renvoyé l'affaire devant le Tribunal pour enfants pour y être jugée.
Par jugement du 24 septembre 1998, le Tribunal pour enfants de PONTOISE a :
- déclaré les trois auteurs coupables des faits reprochés et les a condamnés à des peines d'emprisonnement avec sursis,
- rejeté la constitution de partie civile du Président du Conseil Général des Yvelines, dirigée contre les parents des auteurs.
C'est dans ces circonstances, que suivant exploit en date du 20 mai 1999, Monsieur le Président du Conseil Général des YVELINES, agissant ès-qualité d'administrateur ad hoc de Z... a saisi le Tribunal d'Instance D'ECOUEN en demandant à l'Association OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS de payer la somme de :
-30. 000 francs à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil, au titre du préjudice moral subi par Z....
-5. 000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.
Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines demande enfin au Tribunal d'assortir la décision de l'exécution provisoire.
L'association OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS a demandé au Tribunal de déclarer Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines, ès-qualités irrecevable et subsidiairement mal fondé en ses demandes. Elle a également sollicité une somme de 10. 000 francs au titre des frais irrépétibles. Le Tribunal a fait droit à la demande du Président du Conseil Général des Yvelines et a condamné l'Association OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS à lui payer ès-qualités les sommes de :
-30. 000 francs à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice moral de Z... avec exécution provisoire
-3. 000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens
Cette décision a été frappée d'appel par l'Association OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS.
La condamnation en principal a été exécutée en vertu de l'exécution provisoire.
Par un jugement contradictoire en date du 13 août 1999, le Tribunal d'Instance d'ECOUEN a rendu la décision suivante :
- rejette l'exception d'irrecevabilité soulevée par l'association L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS,
- condamne l'association L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS à verser à Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines en sa qualité d'administrateur ad hoc les sommes de :
-30. 000 Francs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral de Z...,
-3. 000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- ordonne l'exécution provisoire de la décision à l'exception de la condamnation fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamne l'association L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS aux dépens.
Le 7 septembre 1999, l'Association OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS " OSE " reconnue d'utilité publique a interjeté appel. Elle soutient que l'action introduite par Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines en sa qualité d'administrateur ad hoc du mineur Z... est irrecevable. En effet, en vertu de l'article 87-1 du Code de procédure pénale, l'administrateur désigné par le juge d'instruction ou la juridiction saisie des faits a mandat d'agir " en exerçant les droits reconnus à la partie civile ", et donc exclusivement sur le plan de la procédure pénale. Le tribunal a considéré que les dispositions de l'article 388-2 du Code civil investissait l'administrateur ad hoc du pouvoir de saisir la juridiction civile aussi bien que la juridiction pénale. Or, l'Association OSE fait valoir que le Président du Conseil Général des Yvelines est bien intervenu en se constituant partie civile dans le cadre de la procédure pénale devant le Tribunal pour enfants à l'occasion de poursuites exercées par le Ministère public contre les mineurs. En aucun cas, selon elle, le mandat ne pouvait être utilisé pour agir à l'encontre de l'association dans un cadre juridique différent tant en ce qui concerne la compétence juridictionnelle que le fondement de l'action.
Dès lors, Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines était irrecevable à agir dans l'intérêt du jeune Z... à l'encontre de l'association exposante, en sa qualité d'administrateur ad hoc du mineur. Subsidiairement, sur le fondement de l'action, elle fait valoir que l'action du Président du Conseil Général agissant en sa qualité d'administrateur ad hoc ne revêt pas nécessairement une nature délictuelle. Elle fait observer que le Président du Conseil Général des Yvelines utilise un artifice de procédure en se prévalant à tort de sa qualité d'administrateur ad hoc pour fonder son action, alors même qu'il est tuteur de l'enfant. En tout état de cause, elle précise que le mineur placé dans l'établissement ne peut être considéré comme un tiers à l'égard des autres mineurs placés dans le même foyer. Par ailleurs, elle fait observer qu'en vertu du principe de non cumul des actions en responsabilité délictuelle ou contractuelle, Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines est irrecevable à invoquer les dispositions de l'article 1384 alinéa 1er du Code civil.
Ainsi, la responsabilité éventuelle de l'OSE dans les faits dont a été victime le jeune Z... doit s'analyser selon les règles applicables en matière de responsabilité contractuelle, c'est à dire sur le fondement de l'article 1147 du Code civil. Seule une faute prouvée dans l'exécution de ses obligations à l'égard de Monsieur le Président du Conseil Général pourrait mettre en jeu sa responsabilité.
Or, une telle faute, qui ne ressort d'ailleurs aucunement des pièces versées aux débats, n'est pas invoquée par le demandeur. Elle ajoute de toute façon que le jeune Z... n'avait pas la qualité de tiers à l'égard des autres mineurs auteurs des faits.
Elle prétend par ailleurs que la jurisprudence de la Cour de cassation invoquée par le Président du Conseil Général des Yvelines que ce soit l'arrêt BLIECK du 29 mars 1991 ou l'arrêt Foyer Notre-Dame des Flots du 26 mars 1997 n'est pas transposable au cas d'espèce.
Dans ses dernières écritures, le Président du Conseil Général des Yvelines affirme que l'association OSE a commis une faute manifeste sans toutefois la caractériser, une surveillance permanente des enfants placés étant strictement impossible. Subsidiairement, elle précise que les auteurs des faits commis à l'encontre du jeune Z... avaient été confiés au foyer LA VIE DES CHAMPS, par différents départements qui assumaient la fonction de gardien dont ils avaient été investies par le Juge des enfants sur le fondement des articles 375 et suivants du Code civil. Elle en déduit que la responsabilité de l'administration ne peut, par le biais de la présente instance, être mise en cause s'agissant d'une question préjudicielle relevant de la compétence du juge administratif. Elle demande donc à la Cour de
-infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,
- déclarer Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines en sa qualité d'administrateur ad'hoc du mineur Z..., irrecevable en ses demandes à l'encontre de l'association L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS,
- subsidiairement déclarer l'action mal fondée,
- plus subsidiairement, constater l'existence d'une question préjudicielle relative à la responsabilité éventuelle de l'Administration, gardien des mineurs auteurs des faits,
- condamner Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines à restituer à l'association L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS la somme de 30. 000 Francs versée au titre de l'exécution provisoire avec intérêts au taux légal à compter de leur paiement soit le 7 septembre 1999,
- condamner Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines à verser à l'association L'OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS la somme de 20. 000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- rejeter la demande du Conseil Général des Yvelines tendant à obtenir la condamnation de l'OSE à lui verser une somme de 15. 000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamner Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Pour sa part, Monsieur le Président du Conseil Général des Yvelines, agissant ès-qualité d'administrateur ad hoc de Z... soutient que l'esprit de l'ancien article 87-1 du code de procédure pénale et de l'article 388-2 du Code civil est de permettre au mineur délaissé par son tuteur naturel d'être défendu ou représenté quelque soit la juridiction ou l'opposant. Il précise que la partie civile constituée au cours de l'instruction, comme en l'espèce, conserve le bénéfice de l'option et peut exercer son action en réparation devant la juridiction civile en vertu de l'article 4 du Code de procédure pénale. Il fait observer que les textes sus visés ne mentionnent aucune restriction quant au nombre d'actions à engager, la qualité civile ou pénale de la juridiction saisie ou encore celle du défendeur.
Concernant le fondement de l'action de l'administrateur ad hoc, il fait valoir que le principe de non-cumul s'analyse eu égard au fait dommageable et suppose une action engagée cumulativement sur les deux fondements.
Toutefois, selon lui, lorsque le Président du Conseil Général agit en qualité d'administrateur ad hoc d'un enfant mineur, il intervient en tant que représentant légal de l'enfant, se substituant ainsi, pour une mission précise, à l'autorité parentale qui même en cas de placement reste dévolue aux parents. Ainsi, de ce fait, le concluant n'a plus la qualité de cocontractant à l'égard de l'OSE mais bien de tiers contrairement à ce que soutient l'appelante. Il argue également du fait que contrairement à ce que soutient l'OSE ni Z... ni le conseil général ne sont adhérents, ni ne font partie de l'association pour reprendre le terme non juridique et vide de sens employé selon lui par l'Association OSE en première instance.
Concernant l'application de l'article 1384 alinéa 1 du Code civil, il estime que l'Association OSE avait bien la garde des trois mineurs au sens de cet article. En conséquence, elle est responsable de plein droit sur le fondement de cet article du dommage causé à Z... par les trois mineurs. Il fait observer que l'esprit de l'arrêt BLIECK et les commentaires qu'il a suscité, plaident en faveur d'une présomption de responsabilité à l'encontre des professionnels de l'éducation auxquels sont confiés des mineurs en danger sur le fondement de l'article 375 du Code civil et qui doivent donc être assurés en conséquence. L'arrêt Notre dame des Flots rappelle également que la responsabilité de l'établissement répond à un régime de responsabilité sans faute. C'est donc bien selon lui sur le fondement de la notion de garde que la responsabilité de l'établissement est engagée, seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer la responsabilité d'un établissement d'éducation. Subsidiairement, il fait valoir que la faute de l'établissement est manifeste et entre en voie de condamnation sur le fondement de l'article 1382 du Code civil. Enfin, compte tenu du préjudice infligé à un enfant particulièrement vulnérable, ayant été confronté à une réalité difficile eu égard notamment à l'absence de ses parents, il demande une indemnisation à hauteur de 30. 000 francs pour le préjudice subi par Z.... Il demande donc à la Cour de A titre principal sur le fondement de l'article 1384 alinéa 1 du code civil,
- confirmer purement et simplement la décision entreprise,
- y ajouter la condamnation de l'OSE à payer au Président du Conseil Général des Yvelines la somme de 15. 000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, A titre subsidiaire et sur le fondement de l'article 1382 du code civil,
- constater la faute commise par l'OSE,
- confirmer le quantum des condamnations prononcées par la décision entreprise,
- y ajouter la condamnation de l'OSE à payer au Président du Conseil Général des Yvelines la somme de 15. 000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- condamner l'OSE aux entiers dépens dont distraction au bénéfice de la SCP DEBRAY CHEMIN, dans les conditions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été signée le 3 mai 2001 et l'affaire appelée à l'audience du 4 mai 2001.
SUR CE
LA COUR
I) Considérant quant à la recevabilité de l'action engagée par le Président du Conseil Général des Yvelines, ès qualités, que l'association appelante fait à nouveau valoir que, selon elle, le Président ayant été désigné en qualité d'administrateur ad'hoc du mineur Z... (né le 30 mars 1987) sur le fondement de l'article 87-1 du code de procédure pénale, et qu'en vertu de ce texte cet administrateur-toujours selon elle-ne pouvait agir que sur le plan de la procédure pénale ;
Mais considérant que le premier juge faisant une exacte lecture de l'ordonnance du 22 janvier 1998 rendue par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de PONTOISE a expressément visé l'article 388-2 du code civil et a donné mission au Président du Conseil Général " d'exercer au nom de Z... les droits reconnus à la partie civile " ; que la généralité de ces termes, il est patent que cette décision de justice ne comporte aucune restriction quant aux actions pouvant être engagées dans l'intérêt du mineur c'est-à-dire donc, soit devant une juridiction pénale, soit devant une juridiction civile ; que de plus cet article donnait au Président du Conseil Général le pouvoir d'exercer les droits reconnus à la partie civile et que l'article 4 du code de procédure pénale prévoit que la partie civile peut exercer son action, tant devant le juridiction pénale que devant la juridiction civile ;
Considérant que c'est donc par une exacte application de ces textes, que le premier juge a dit, à bon droit, que cette action en responsabilité et en paiement de dommages-intérêts (article 1384 alinéa 1 du code civil) engagée devant lui était recevable ; que le jugement est par conséquent confirmé de ce premier chef ;
II) Considérant quant au fondement de cette action, que doivent s'appliquer en la présente espèce les principe de Droit constant fondés sur l'article 1384 alinéa 1er du code civil, étant manifeste ici que l'association " OSE " a reçu du tribunal pour enfant de VERSAILLES la mission et la responsabilité, en tant que gardien, d'organiser, de diriger et de contrôler le mode de vie de ce mineur et des 3 autres mineurs de ce même foyer d'hébergement ; que cette association est donc responsable des actes de ces trois derniers, auteurs d'agressions sexuelles avec violence sur la personne du mineur Z..., en vertu de cet article 1384 alinéa 1 du code civil et non pas sur le fondement de l'article 1147 dudit code, à tort invoqué par l'appelante ; que toute l'argumentation que celle-ci développe au sujet de l'application d'une responsabilité contractuelle et à propos d'une faute qu'il conviendrait de prouver contre elle est donc inopérante et ne sera pas davantage analysée ;
Que la présomption de responsabilité pesant sur cette association n'est pas écartée par la preuve d'une cause étrangére exonérative, et notamment par la preuve d'une faute de la victime ;
Considérant quant au préjudice subi par le mineur Z... à la suite de ces agressions sexuelles avec violence commises sur sa personne et qui ont donné lieu à une condamnation des 3 auteurs par le tribunal pour enfants de PONTOISE, le 24 septembre 1998, que l'appelante n'en discute et n'en conteste ni l'existence, ni l'évaluation, même à titre subsidiaire ;
Considérant que le premier juge a exactement évalué ce préjudice moral, certain et direct, du mineur, et que le jugement est confirmé en ce qu'il a, à juste titre, fixé à 30. 000 Francs les dommages-intérêts mis à la charge de l'association " OSE ", de ce chef ; que l'appelante est donc déboutée de sa demande en restitution de cette somme versée par elle ;
Considérant que compte-tenu de l'équité, l'association appelante qui succombe en son appel est déboutée de sa demande en paiement de 20. 000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, et que par contre, elle est condamnée à payer 10. 000 Francs au Président du Conseil Général ès qualités, sur ce même fondement, pour ses frais irrépétibles en appel, le jugement étant de plus confirmé en ce qu'il a, à bon droit, et eu égard à l'équité, déjà accordé 3. 000 Francs à cette partie, en vertu de ce même texte ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Vu l'article 1384 alinéa 1er du code civil :
DEBOUTE l'association " OEUVRE DE SECOURS AUX ENFANTS " (OSE) des fins de son appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ;
CONFIRME en son entier le jugement déféré ;
Et y ajoutant :
CONDAMNE l'appelante à payer au Président du Conseil Général des Yvelines ès qualités, la somme de 10. 000 Francs (soit 1 524, 49 Euros) en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour ses frais irrépétibles en appel ;
CONDAMNE l'association " OSE " à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP d'avoués DEBRAY CHEMIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre 2ème section
Numéro d'arrêt : 1999-7164
Date de la décision : 08/06/2001

Analyses

MINEUR - Procédure - Représentation - Opposition d'intérêts avec ses représentants légaux - Administrateur ad hoc - Désignation par le juge.

L'ordonnance d'un juge d'instruction qui, au visa de l'article 388-2 du Code civil, désigne un président de conseil général en qualité d'administrateur ad hoc d'un mineur, en vue d'exercer en son nom les droits reconnus à la partie civile, confère à la personne désignée la possibilité d'exercer, sans aucune restriction, toutes actions dans l'intérêt du mineur, soit devant le juge civil, soit devant le juge pénal, conformément aux dispositions de l'article 4 du Code de procédure pénale

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Personnes dont on doit répondre - Domaine d'application - Mineur - Mineur en danger - Organisation et contrôle de son mode de vie - /.

L' association qui reçoit judiciairement la charge d'organiser et de contrôler le mode de vie des mineurs qui lui sont confiés, doit répondre sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil des dommages qu'ils causent, y compris des agressions et violences que ceux-ci perpétuent sur un autre pensionnaire dans son enceinte, sans que la présomption de responsabilité pesant sur l'association soit écartée par la preuve d'une cause étrangère exonératoire, notamment la faute de la victime


Références :

Code civil, article 388-2
Code de procédure pénale, article 4 Code civil, article 1384, alinéa 1er

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-06-08;1999.7164 ?
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