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17/05/2001 | FRANCE | N°1998-3717

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17 mai 2001, 1998-3717


Stéphanie Rachel X... née le xxxxxxxxxxxxxxxxa été reconnue dès sa naissance par M X..., la mère de l'enfant ayant accouché sous X. Stéphanie a été élevée depuis sa naissance au foyer de M X... et de son épouse, HH, laquelle a saisi le 15 janvier 1996 le tribunal de grande instance d'une requête en adoption plénière de l'enfant. Le tribunal de grande instance de NANTERRE, saisi d'une action en contestation de reconnaissance engagée par le procureur de la république près ledit tribunal sur le fondement de l'article 339 du code civil modifié par l'article 26 de la loi du 5 ju

illet 1996 ,a par jugement en date du 24 avril 1998 déclaré irrecev...

Stéphanie Rachel X... née le xxxxxxxxxxxxxxxxa été reconnue dès sa naissance par M X..., la mère de l'enfant ayant accouché sous X. Stéphanie a été élevée depuis sa naissance au foyer de M X... et de son épouse, HH, laquelle a saisi le 15 janvier 1996 le tribunal de grande instance d'une requête en adoption plénière de l'enfant. Le tribunal de grande instance de NANTERRE, saisi d'une action en contestation de reconnaissance engagée par le procureur de la république près ledit tribunal sur le fondement de l'article 339 du code civil modifié par l'article 26 de la loi du 5 juillet 1996 ,a par jugement en date du 24 avril 1998 déclaré irrecevable l'action engagée au motif que 2- 1] ]15- le MINISTÈRE PUBLIC ne rapportait pas la preuve de la fraude régissant les règles de l'adoption. Appelant, le MINISTÈRE PUBLIC conclut aux termes de ses écritures en date du 22 juillet 1998 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé à l'infirmation du jugement et, demande à la cour, statuant à nouveau, de déclarer son action recevable, et avant-dire droit d'ordonner une mesure d'expertise sanguine permettant d'affirmer ou de rejeter la paternité de MH sur l'enfant Stéphanie. MH, intimé, conclut aux termes des ses écritures en date du 18 janvier 2001 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, à la confirmation du jugement et subsidiairement, offre de faire intervenir son épouse dans la cause pour qu'elle confirme être prête à retirer sa requête en l'état et à s'engager à n'en présenter de nouvelle avant l'expiration du délai de dix ans de possession d'état par l'enfant, permettant à cette dernière , aux parties et au tiers concernés de bénéficier des dispositions du Sème alinéa de l'article 339 du code civil. SUR CE Considérant qu'aux termes de l'article 339 du code civil, la reconnaissance peut être contestée par toutes personnes qui y ont intérêt, même par son auteur, que l'action est également ouverte au ministère public si des indices tirés des actes eux-mêmes rendent invraisemblable la

filiation déclarée, et également lorsque la reconnaissance est effectuée en fraude des règles régissant l'adoption ; -3- i Considérant que la reconnaissance d'un enfant naturel est présumée être l'expression de la vérité et qu' il incombe, d'une manière générale, à celui qui la conteste, fusse le MINISTÈRE PUBLIC d'apporter le preuve de son caractère mensonger ; Considérant que le MINISTÈRE PUBLIC fait grief aux premiers juges d'avoir mal interprété l'alinéa 3 de l'article 339 du code civil en y ajoutant l'obligation sous peine d'irrecevabilité de son action, de rapporter la preuve de la fraude, qu'il estime que la démarche du législateur lors de l'adoption de la loi du 5 juillet 1996 dont l'article 26 a ajouté à l'article 339, a été de ne pas limiter l'action du MINISTÈRE PUBLIC mais d'en admettre l'exercice dans le cas où est rapporté un faisceau de présomptions laissant légitimement soupçonner une fraude à l'adoption, qu'il affirme satisfaire à cette obligation et rapporter la preuve de la recevabilité de son action ; Considérant que l'intimé oppose que si la reconnaissance peut être contestée par le MINISTÈRE PUBLIC en cas d'indices graves tirés des actes mêmes, rendant invraisemblable la filiation déclarée, l'action engagée est irrecevable lorsque la filiation est, comme ici, vraisemblable, et que les éléments de fait invoqués par l'appelant n'établissent pas la preuve de la fraude à l'adoption, qu'il fait valoir s'être volontairement prêté avec sa fille au test comparé d'analyses sanguines qui conclut à la totale compatibilité du groupe sanguin de l'enfant avec celui de son père; Considérant que l'action n'est ouverte au MINISTÈRE PUBLIC que dans deux cas, le premier s'il existe des indices tirés des actes eux -mêmes rendant invraisemblable la filiation déclarée, l'autre quand la -4- reconnaissance est effectuée en fraude des règles régissant la filiation, que la recevabilité de son action s'apprécie au regard des deux situations expressément

visées par le législateur ; Considérant qu'en l'espèce et du propre aveu du MINISTÈRE PUBLIC, rien dans les actes ne permet de conclure à l'invraisemblance de la filiation ; Considérant qu'il suffit à la recevabilité de l'action que des présomptions graves et concordantes d'une fraude existent, qu'alors et alors seulement, l'expertise biologique, peut être demandée par le ministère public dès lors qu'en matière de filiation elle est de droit sauf motif légitime et que rien ne justifierait qu'il soit fait au ministère public sur le terrain de la preuve du caractère mensonger de la reconnaissance, un sort différent de celui réservé autres parties ; Considérant, contrairement à ce qu'invoque l'appelant, que l'application de l'article 339 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 1996 ne peut être appréciée dans le contexte d'une démarche en vue d'une modification de l'accouchement sous X, laquelle est encore au stade du débat, mais au regard de la stricte lecture du texte et de la permission légale donnée à la mère biologique de rester anonyme ; Considérant que le MINISTÈRE PUBLIC affirme trouver l'existence d'un faisceau de présomptions laissant légitimement soupçonner une fraude à l'adoption, dans le fait que le père âgé de 44 ans au moment de la naissance de Stéphanie n'a pas eu d'enfant de ses précédentes unions, qu'il est incapable d'expliquer les circonstances de -5- sa rencontre avec la mère biologique, que la maternité n'a gardé aucune trace de l'accouchement, sauf une mention partiellement cancellée , qu'aucune preuve n'est donnée par le père du règlement de l'accouchement, que ce n'est que plus de Sans et demi après le recueil de l'enfant que madame X... a déposé la requête en adoption alors que la prescription pénale était acquise sur le fondement des articles 227-12 et 13 du code pénal, que monsieur Y... refuse de se soumettre à une analyse comparée des sangs, qu'enfin son épouse aurait selon les attestations fournies au dossier d'adoption fait preuve d'un comportement

identique à celui d'une mère comblée dans sa demande d'enfant et non d'une femme trompée ; Mais considérant que tous ces faits, pris séparément ou ensemble, ne constituent pas des éléments suffisants à étayer l'allégation d'une fraude aux règles régissant les lois de l'adoption ; Considérant que le fait que monsieur X... n'ait pas eu d'enfant né de ses deux mariages ne renferme pas la preuve de son incapacité à procréer ; Considérant que l'accouchement sous X étant licite, il ne saurait en être tiré l'existence d'une présomption de fraude, dès lors que la clandestinité de cette maternité peut trouver sa justification dans la situation d'homme marié du père, que les pièces administratives produites aux débats attestent de la présence de monsieur X... lors de la naissance qu'il a personnellement déclarée à la mairie du 16ème arrondissement, qu'il a reconnu l'enfant le même jour, que le fait pour madame X... d'avoir accueilli l'enfant dès sa naissance n'est pas -6- nécessairement suspect si l'on considère que la mère biologique avait manifesté sa décision d'abandon en accouchant sous X et que l'enfant ne se trouvait avoir de filiation qu'avec son époux, que le père s'est soumis au test de compatibilité sanguine, qui conclut à la totale compatibilité , le médecin précisant que les examens sont tout à fait en faveur de sa paternité ; Considérant que le refus du père de se soumettre à une expertise des sangs ne peut dans ce contexte apparaître dilatoire et de nature à laisser supposer qu'il en craindrait le résultat, qu'enfin le délai pris par l'épouse pour décider de l'adoption n'a, en soi, rien de suspect alors que l'enfant atteignait l'âge de trois ans et que ce délai peut se justifier par celui de la réflexion dans le contexte de la naissance de l'enfant ; Considérant qu'il convient en conséquence de débouter le MINISTÈRE PUBLIC de son action faute de justifier d'éléments de fait constituant des présomptions sérieuses d'une fraude du père aux règles régissant l'adoption, et de confirmer le

jugement entrepris qui a déclaré son action irrecevable ; PAR CES MOTIFS LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après débats en Chambre du Conseil et en dernier ressort, REOEOIT le MINISTÈRE PUBLIC en son appel mais le dit mal fondé, CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, MET les dépens à la charge du Trésor avec faculté de recouvrement direct conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET Le Greffer,

Le président, Sylvie RENOULT

Francine BARDY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-3717
Date de la décision : 17/05/2001

Analyses

FILIATION - Filiation naturelle - Reconnaissance - Contestation - Conditions

La reconnaissance d'un enfant naturel est présumée être l'expression de la vérité et il incombe à celui qui la conteste, fusse le Ministère public, d'apporter la preuve de son caractère mensonger. L'article 339 du Code civil, modifié par l'article 26 de la loi du 5 juillet 1996, ouvre l'action en contestation de recon- naissance au ministère public dans deux cas, mais il en subordonne la receva- bilité à l'appréciation des deux situations qu'il vise expressément. Il en résulte que lorsque les actes ne permet en rien de conclure à l'invraisemblance de la filiation, le ministère public s'il peut demander une expertise biologique, laquelle est de droit en matière de filiation sauf motif légiti- me, c'est sous réserve de la recevabilité de son action et, par conséquent, à condition qu'existent des présomptions graves et concordantes d'une fraude aux règles régissant les lois de l'adoption. Dès lors que les faits invoqués par la ministère public pour étayer une telle fraude sont insuffisants, il en résulte que son action est irrecevable


Références :

Code civil, article339

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-05-17;1998.3717 ?
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