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30/03/2001 | FRANCE | N°JURITEXT000006937255

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 mars 2001, JURITEXT000006937255


FAITS ET PROCEDURE, Par acte sous seing privé en date du 11 septembre 1989, la SA Assurances Générales de France-Vie (AGF) a donné à bail aux époux X... un appartement sis à Saint-Cloud, 6 square de l'Hippodrome, pour un loyer mensuel de 6.395 francs en principal. En raison d'impayés, un commandement de payer la somme de 59.505 francs, en date du 23 janvier 1996, a été délivré aux époux X... par huissier. Ce commandement a également été délivré à Monsieur Y..., caution de sa fille, Madame X..., en vertu d'un courrier de celui-ci daté du 21 août 1989. Faute de paiement des

sommes réclamées, la SA AGF a fait assigner en référé les époux X......

FAITS ET PROCEDURE, Par acte sous seing privé en date du 11 septembre 1989, la SA Assurances Générales de France-Vie (AGF) a donné à bail aux époux X... un appartement sis à Saint-Cloud, 6 square de l'Hippodrome, pour un loyer mensuel de 6.395 francs en principal. En raison d'impayés, un commandement de payer la somme de 59.505 francs, en date du 23 janvier 1996, a été délivré aux époux X... par huissier. Ce commandement a également été délivré à Monsieur Y..., caution de sa fille, Madame X..., en vertu d'un courrier de celui-ci daté du 21 août 1989. Faute de paiement des sommes réclamées, la SA AGF a fait assigner en référé les époux X... et Monsieur Y... devant le tribunal d'instance de Boulogne-Billancourt. Par ordonnance de référé en date du 28 juin 1996, le juge a constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail bénéficiant aux époux X...; autorisé leur expulsion; condamné in solidum les époux X... et Monsieur Y... à payer la somme de 101.375 francs à titre de provision sur l'arriéré de loyers et de charges impayés arrêtés au 30 juin 1996, avec intérêts à compter du 23 janvier 1996 sur la somme de 59.505 francs; autorisé les défendeurs de se libérer de leur dette par versements mensuels de 3.000 francs pour les époux X... et de 1.000 francs pour Monsieur Y...; fixé le montant de l'indemnité d'occupation. Le 30 septembre 1998, la SA AGF a fait assigner au fond les époux X... et Monsieur Y... devant le tribunal d'instance de Boulogne-Billancourt, afin de les voir condamner à payer in solidum, avec l'exécution provisoire, la somme de 155.269 francs avec intérêts au taux légal à compter du jugement, cette somme correspondant aux montants en principal et intérêts impayés, ordonnés par le juge des référés, l'indemnité d'occupation jusqu'à avril 1998 et les sommes déjà versées déduites. Monsieur Y... s'est opposé à cette demande. Il a soutenu que l'ordonnance de référé ne préjugeait rien au fond et qu'il ne pouvait

être tenu de la dette des époux X...; qu'en effet, sa lettre ne remplit pas les conditions légales pour valoir à titre de caution; qu'en outre, ni ses versements consécutifs à l'ordonnance de référé, ni ses courriers à la SA AGF ne peuvent valoir reconnaissance de cette qualité. Reconventionnellement, il a demandé le remboursement des 108.000 francs indûment versés. Par jugement contradictoire en date du 18 mars 1999, le tribunal d'instance de Boulogne-Billancourt a rendu la décision suivante: - disons que Monsieur Y... est tenu à titre de caution des sommes impayées avant le 30 juin 1996 au titre des loyers de l'appartement occupé par Monsieur et Madame X..., - constatons qu'au 5 avril 1998, Monsieur et Madame X... étaient redevables auprès de la SA AGF de la somme de 71.375 Francs représentants les loyers et charges échus au 30 juin 1996, outre les intérêts au taux légal à compter du 8 mars 1997 jusqu'au 6 avril 1998 pour la somme de 71.375 Francs, - constatons que Monsieur Y... a versé la somme de 100.000 Francs le 6 avril 1998 pour le paiement de ces sommes, - déclarons qu'en conséquence, le surplus versé par Monsieur Y... devra lui être remboursé par la SA AGF, - condamnons Monsieur et Madame X... au paiement de la somme de 156.201 Francs au titre de l'indemnité d'occupation avec intérêts au taux légal à compter du 14 avril 1999, à la SA AGF, - ordonnons l'exécution provisoire du présent jugement, - condamnons Monsieur et Madame X... au paiement de la somme de 3.000 Francs à la SA AGF au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamnons Monsieur et Madame X... au paiement des deux tiers des dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer et de sa dénonciation, - condamnons la SA AGF au paiement d'un tiers des dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer et sa dénonciation. Par déclaration en date du 30 juillet 1999, seul Monsieur Y... a relevé appel de cette décision. Il fait valoir que

son engagement de caution, fondé sur un courrier en date du 21 août 1989, est nul; qu'en effet, ce courrier ne répond pas aux exigences de forme des articles 1326 et 2015 du Code civil; qu'ayant été écrit avant la signature même du bail en cause, l'indétermination de l'étendue de son obligation rend son engagement manifestement non valable; que la nullité de son engagement est aussi justifiée par le non respect des dispositions de l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989, relatif au cautionnement d'une dette locative; qu'il n'a absolument pas non plus reconnu implicitement cet engagement; qu'il sollicite donc la restitution des sommes indûment versées, à hauteur de 135.733 francs; que la demande reconventionnelle en dommages et intérêts de la SA AGF est injustifiée. Par conséquent, il prie la Cour de : - infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance de BOULOGNE en date du 18 mars 1999, - constater que l'attestation souscrite par Monsieur Bernard Y... le 21 août 1989, est antérieure de près de trois semaines à la signature du contrat de location souscrit par Monsieur et Madame X... auprès des AGF le 11 septembre 1989 et ne saurait en aucun cas, être constitutive d'un engagement de caution de la dette locative de Monsieur et Madame Vincent X... à l'égard de la compagnie AGF VIE, - voir prononcer la nullité pure et simple de l'engagement de caution ou de garantie souscrit par Monsieur Bernard Y... en date du 21 août 1989, au profit de Madame Catherine Y... épouse X..., et de Monsieur Vincent X..., - débouter par voie de conséquence, purement et simplement la compagnie ASSURANCES GENERALES DE FRANCE-VIE de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre de Monsieur Bernard Y... en sa prétendue qualité de caution de Monsieur et Madame Vincent X..., - débouter en outre la compagnie ASSURANCES GENERALES DE FRANCE-VIE de toutes ses demandes de dommages-intérêts ou d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du

nouveau code de procédure civile formulées dans ses dernières écritures à l'encontre de Monsieur Bernard Y..., - condamner la compagnie ASSURANCES GENERALES DE FRANCE-VIE à rembourser à Monsieur Bernard Y... l'intégralité des sommes qu'il a versées en exécution de l'ordonnance de référé du 28 juin 1996 rendue par le tribunal d'instance de BOULOGNE, et représentant un montant total de 135.733 Francs, - donner acte à Monsieur Bernard Y... de ce qu'il reconnaît avoir reçu des AGF en exécution du jugement du tribunal d'instance de BOULOGNE du 18 mars 1999, un premier et unique remboursement d'un montant de 19.103,09 Francs, qui devra s'imputer sur le montant total des remboursements dus par les AGF, - condamner enfin la compagnie ASSURANCES GENERALES DE FRANCE-VIE à payer à Monsieur Bernard Y... la somme de 15.000 Francs à titre d'indemnité et sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamner la compagnie ASSURANCES GENERALES DE FRANCE-VIE en tous les dépens dont distraction au profit de la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, avoué à la cour, qui pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. La SA AGF soutient que Monsieur Y... a, à diverses reprises, reconnu son engagement de caution de manière implicite, actes qui constituent autant d'aveux extrajudiciaires; que les qualités et compétences professionnelles de Monsieur Y... font de lui un sachant, qui ne peut valablement prétendre s'être mépris sur les conséquences de son engagement; que l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 a été introduit par une loi du 21 juillet 1994 et est donc inapplicable en l'espèce; qu'une caution peut être valablement indéterminée, s'il est établi que la personne caution avait, de manière non équivoque, la connaissance de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée, ce qui est le cas en l'espèce; qu'en tout état de cause, le courrier litigieux constitue un commencement de preuve par écrit, conforté par les

agissements de Monsieur Y...; qu'à titre subsidiaire, elle est fondée à demander des dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1134 alinéa 3 du code civil, Monsieur Y... ayant souscrit un engagement qu'il savait ne pas être valable et donc de mauvaise foi; que le compte entre les parties retenu par le premier juge doit être confirmé; qu'enfin, à titre subsidiaire, en tout état de cause, si l'engagement de caution devait être reconnu nul, elle sollicite l'octroi de dommages et intérêts en raison de la mauvaise foi de Monsieur Y.... Par conséquent, elle prie la Cour de : Vu les articles 1134, 1326 et 2015 du code civil, Vu les articles 699 et 700 du nouveau code de procédure civile, - débouter Monsieur Bernard Y... de l'intégralité de son appel, - confirmer en toutes ses dispositions le jugement attaqué, - condamner Monsieur Y... au paiement d'une somme de 20.000 Francs à titre de dommages-intérêts pour sanctionner sa mauvaise foi dans l'exécution de l'engagement par lui souscrit et à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour constaterait la nullité du cautionnement, de porter cette somme à 100.000 Francs, - condamner Monsieur Bernard Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel et autoriser la SCP GAS, avoué à la cour, à recouvrer directement ceux des dépens dont elle déclare avoir fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du nouveau code de procédure civile, - condamner Monsieur Bernard Y... à payer à la Société AGF-VIE la somme de 15.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. L'ordonnance de clôture a été signée le 8 février 2001 et l'affaire plaidée à l'audience du 22 février 2001. SUR CE LA COUR Considérant que les dispositions de l'article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989, introduites par la loi du 21 juillet 1994, ne sont pas applicables à l'engagement de caution de Monsieur Y... allégué par la société AGF VIE, lequel est antérieur à leur entrée en vigueur;

Considérant que l'aveu, judiciaire ou extrajudiciaire, exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de sa volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques; qu'il est de droit constant qu'il ne peut donc porter que sur des points de fait et non sur des points de droit; que la société AGF VIE n'est donc pas fondée à invoquer contre Monsieur Y... l'aveu qu'il aurait fait de la validité de son engagement de caution et ce, sur le fondement des articles 1355 et 1356 du code civil; Considérant qu'il est constant que la lettre manuscrite de Monsieur Y... signée par lui et datée du 21 août 1989, que lui oppose l'intimée comme valant engagement de caution de sa fille et de son gendre pour le paiement du loyer et de ses charges, n'est pas suffisamment déterminée quant à l'étendue de la caution, faute notamment de faire référence à un contrat de bail précis (lequel ne sera signé que le 11 septembre 1989); que néanmoins, dans ce courrier, Monsieur Y..., qui a indiqué sa double qualité de marchand de biens et de juge au tribunal de commerce de La Rochelle, a clairement précisé que cette lettre, qualifiée par lui "attestation" était rédigée dans le cadre du dossier de demande par sa fille et son mari d'un logement dans l'ensemble immobilier "Résidence de l'hippodrome de Saint Cloud"; Considérant que cette lettre manuscrite constitue donc un commencement de preuve par écrit émanant de l'appelant, rendant vraisemblable le fait qu'il s'est engagé, compte tenu de sa qualité professionnelle, en connaissant la nature et l'étendue de l'obligation contractée à titre principal et cautionnée par lui; Considérant que dans une lettre du 23 avril 1996, adressée par Monsieur Y... à la SA AGF VIE, l'appelant a souligné que l'assignation (en référé) lui avait été délivrée en qualité de caution de ses enfants, sans contester ce point, mais regrettant l'impossibilité d'établir "ensemble" un calendrier de rééchelonnement

et précisant même qu'il se rendrait au tribunal d'instance de Boulogne Billancourt pour présenter la défense de ce dossier; que dans un courrier postérieur daté du 14 juin 1996, il a indiqué à l'avocat de la SA AGF VIE "nous solliciterons donc des délais", mention qui ajoutée à l'absence de toute contestation de sa dette, fait présumer sa reconnaissance; qu'enfin, Monsieur Y..., condamné par une ordonnance de référé rendue le 28 juin 1996 par le président du tribunal d'instance de Boulogne Billancourt, in solidum avec les époux X... et en qualité de caution, à payer à la société AGF VIE la somme de 101.375 Francs à titre provisionnel, non seulement n'a pas interjeté appel, mais a réglé spontanément, sans qu'aucune procédure d'exécution n'ait été entreprise à son encontre, la somme de 100.000 Francs par chèque daté du 6 avril 1998; Considérant que ces éléments extérieurs à l'acte constituent le complément de preuve du commencement de preuve par écrit retenu par la cour de l'engagement de caution donné par Monsieur Y...; que par conséquent, la cour, en substituant ses propres motifs susvisés à ceux du tribunal, confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que Monsieur Y... est tenu à titre de caution des sommes impayées avant le 30 juin 1996, au titre des loyers de l'appartement occupé par Monsieur et Madame X...; Considérant que par conséquent, la cour déboute Monsieur Y... de l'ensemble de ses demandes, notamment de remboursement des sommes qu'il a versées à la société AGF VIE; qu'elle confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, l'intimée étant déboutée de sa demande subsidiaire en paiement de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1134 alinéa 3 du code civil, - étant observé au surplus que ce fondement aurait été inaproprié, la lettre de garantie du 21 août 1989 ne mentionnant pas la SA AGF VIE; Considérant qu'eu égard à l'équité, il y a lieu d'allouer à la SA AGF VIE la somme de 6.000 Francs sur le fondement

de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; PAR CES MOTIFS La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort: Dit que la preuve est rapportée de l'engagement de caution de Monsieur Y... pour le paiement des loyers de l'appartement loué par la société AGF VIE à Monsieur et Madame X..., en application des dispositions de l'article 1347 du code civil; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, la cour substituant ses propres motifs à ceux du tribunal; Et y ajoutant: Déboute la SA AGF VIE de sa demande subsidiaire en paiement de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1134 alinéa 3 du code civil; Déboute Monsieur Y... des fins de toutes ses demandes; Condamne Monsieur Y... à payer à la SA AGF VIE la somme de 6.000 Francs (soit 914,69 Euros) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; Le condamne à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP GAS, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le greffier en chef

Le président qui a assisté au prononcé Frédérique RAABE

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006937255
Date de la décision : 30/03/2001

Analyses

CAUTIONNEMENT - Preuve - Acte sous seing privé - Mentions de l'article 1326 du code civil - Défaut - Commencement de preuve par écrit

Une lettre manuscrite signée et datée aux termes de laquelle le signataire fait état de sa double qualité de professionnel de l'immobilier et de magistrat consulaire et indique clairement que sa rédaction intervient dans le cadre d'un dossier de demande de logement présenté par sa fille, constitue un commencement de preuve par écrit rendant vraisemblable son engagement en qualité de caution de celle-ci, en parfaite connaissance de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée à titre principal. Les circonstances que l'intéressé a été assigné en qualité de caution, sans contestation de sa part, qu'il a ensuite lui-même écrit au bailleur pour regretter l'impossibilité d'établir " ensemble " un calendrier de rééchelonnement, et qu'enfin condamné en référé, in solidum avec sa fille et en qualité de caution, à payer une somme de cent mille Francs, il n'a non seulement pas interjeté appel mais a réglé le montant de cette condamnation, constituent des éléments extérieurs à l'acte complétant le commencement de preuve par écrit de l'engagement de caution donné par le signataire de cette lettre


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-03-30;juritext000006937255 ?
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