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16/03/2001 | FRANCE | N°1999-4439

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16 mars 2001, 1999-4439


FAITS ET PROCEDURE, Par acte sous seing privé du 1er décembre 1995, Madame Isabelle X... a consenti à Madame Isabelle DE Y... un bail sur un logement sis au 177/177 bis, rue Galliéni à BOULOGNE-BILLANCOURT. Par acte d'huissier du 2 juin 1998, Madame Isabelle X... a fait signifier à Madame Isabelle DE Y... un congé fondé sur l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, valant offre de vente au prix de 450.000 francs hors frais. Madame Isabelle DE Y... n'a pas fait connaître dans le délai de deux mois imparti son intention d'acquérir le logement. Par acte d'huissier du 27 juillet 1998, M

adame Isabelle X... a fait assigner Madame Isabelle DE Y.....

FAITS ET PROCEDURE, Par acte sous seing privé du 1er décembre 1995, Madame Isabelle X... a consenti à Madame Isabelle DE Y... un bail sur un logement sis au 177/177 bis, rue Galliéni à BOULOGNE-BILLANCOURT. Par acte d'huissier du 2 juin 1998, Madame Isabelle X... a fait signifier à Madame Isabelle DE Y... un congé fondé sur l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, valant offre de vente au prix de 450.000 francs hors frais. Madame Isabelle DE Y... n'a pas fait connaître dans le délai de deux mois imparti son intention d'acquérir le logement. Par acte d'huissier du 27 juillet 1998, Madame Isabelle X... a fait assigner Madame Isabelle DE Y... devant ce tribunal pour que celui-ci, par une décision assortie de l'exécution provisoire : - constate que Madame Isabelle DE Y... est occupante sans droit ni titre, - ordonne l'expulsion de Madame Isabelle DE Y... et de tous occupants de son chef avec, si besoin est, l'assistance de la force publique, ainsi que la séquestration de tous meubles laissés dans les lieux dans tel endroit qu'il lui plaira, - fixe à la somme de 5.000 francs l'indemnité d'occupation due par Madame Isabelle DE Y... jusqu'à la libération effective des lieux, - condamne Madame Isabelle DE Y... au paiement de la somme de 5.000 francs à titre de dommages-intérêts et de 3.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par acte d'huissier du 21 décembre 1998, Madame DE Y... a fait assigner Monsieur Z... A... et Madame Souad B... dont elle expose qu'ils seraient les occupants des lieux, pour que la décision à intervenir leur soit opposable et que leur expulsion soit ordonnée. Ces deux affaires ont été jointes sous le n° 1263/98. A l'audience du 6 janvier 1999, devant le tribunal d'instance, Madame Isabelle X... était représentée par Maître LEMAISTRE-BONNEMAY qui a exposé que les loyers n'étaient pas réglés depuis des mois et qu'elle allait

assigner les défendeurs en paiement d'une somme de 62.382,65 francs. Madame Isabelle DE Y... était représentée par Maître BIJU-DUVAL qui a exposé qu'elle acquiesçait au congé et demandait l'expulsion des occupants des lieux. Monsieur A..., seul comparant, a reconnu qu'il devrait quitter les lieux, ainsi que Madame B... sa compagne ; il a cependant exposé qu'il travaillait dans un restaurant et Madame B... comme femme de ménage, qu'ils avaient deux enfants et qu'ils ne pouvaient quitter les lieux immédiatement. Il a ajouté que l'appartement nécessitait de très nombreux travaux dont il n'avait pu obtenir l'exécution. La bailleresse s'est opposée à tout délai. Par jugement en date du 17 février 1999, le tribunal d'instance de BOULOGNE BILLANCOURT a rendu la décision suivante : - constate que Madame Isabelle DE Y... a acquiescé au congé qui lui a été délivré par Madame Isabelle X... le 3 juin 1998 concernant le logement dont elle était locataire au 177/177bis rue Galliéni à BOULOGNE-BILLANCOURT, et qu'elle est donc occupante sans droit ni titre depuis le 1er décembre 1998, - ordonne à défaut de départ volontaire, l'expulsion de Madame Isabelle DE Y... et de tous occupants de son chef, en l'espèce, Monsieur Z... A... et Madame Souad B... avec, si besoin est, l'assistance de la force publique, - rappelle s'agissant des meubles et objets mobiliers laissés dans les lieux, qu'il devra être procédé conformément aux articles 65 et 66 de la loi du 9 juillet 1991, - condamne Madame Isabelle DE Y... au paiement d'une indemnité d'occupation de 5.000 francs par mois et ce, jusqu'à la libération définitive des lieux, - condamne Madame Isabelle DE Y... à payer à Madame Isabelle X... la somme de 3.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - déboute Madame X... du surplus de sa demande, - ordonne l'exécution provisoire de la décision, - condamne Madame Isabelle DE Y... aux dépens.

Le 2 juin 1999, Madame DE Y... interjete appel, appel limité, puisque l'intéressée a acquiescé au jugement en ses dispositions relatives au congé. L'appelante n'a jamais indiqué quelle était sa profession (articles 901 et 960 alinéa 2-a). Elle reproche au jugement entrepris d'avoir, d'une part, estimé qu'elle n'avait de locataire que le nom et l'obligation de payer un loyer alors qu'elle a reçu la citation en justice provenant de la bailleresse à sa seule adresse, à Neuilly, et non pas à l'adresse des locaux prétendument non libérés, que c'est donc à tort que l'expulsion de Monsieur A... et de Madame B... a été ordonnée, comme si ces derniers étaient occupants du chef de Madame DE Y... alors qu'il est manifeste qu'elle ne les a pas introduits dans les lieux, ces derniers y étant déjà lors de la conclusion du bail indépendamment de sa volonté; et, d'autre part, que la locataire ayant acquiescé au congé alors que l'occupation a perdurait au delà de la date à laquelle l'appelante a expressément indiqué qu'elle entendait restituer les lieux ne peut, aux termes d'une jurisprudence de la 3è chambre civile de la Cour de cassation, être tenue de payer une indemnité d'occupation lorsque pour l'occupation qui perdure au-delà de la rupture de la relation contractuelle du bail, il est établi que la relation contractuelle n'est pas de son fait et qu'elle a été connue du bailleur qui en est en partie responsable. Elle demande à la Cour de : - d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a, à bon droit, constaté que Madame DE Y... avait acquiescé au congé qui lui avait été délivré par la bailleresse, Madame X..., selon exploit du 27 mai 1998, - réformant la décision entreprise, - de constater que Madame DE Y... n'a jamais occupé les lieux loués, ce qui était parfaitement connu de Madame X..., que l'occupation des lieux par Madame B... et Monsieur A... a perduré

au-delà de la prise d'effet du congé et postérieurement à la date du 30 juin 1998, date pour laquelle Madame DE Y... souhaitait que les locaux soient restitués, du seul fait de Madame B... et de Monsieur A... et que ces derniers pour être occupants des lieux dès avant la régularisation du contrat de location, ne sont pas occupants du chef de Madame DE Y..., En conséquence, d'ordonner la mise hors de cause pure et simple de Madame DE Y... et débouter Madame X... de toutes demandes à son encontre, A titre infiniment subsidiaire, et pour le cas où la Cour croyait devoir considérer Madame B... et Monsieur A... comme occupants du chef de Madame DE Y..., - de dire et juger que l'indemnité d'occupation ne saurait être fixée du jour de la prise d'effet du congé jusqu'au jour de la libération effective des lieux qu'à une somme mensuelle de 2.250 francs, - de condamner Madame X... à payer à Madame DE Y... la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens, - dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. En réponse, Madame Isabelle X... soutient que, d'une part, la locataire qui ne conteste pas avoir signé le contrat de bail, allègue des arguments incohérents et qu'en réalité c'est elle même qui a décidé de mettre dans les lieux Monsieur C... et Madame B..., employés à son service, que dès lors il importe peu à la bailleresse de savoir que le logement était occupé par une autre personne et que la décision d'expulsion de Madame DE Y... devra donc être confirmée, que, d'autre part, elle est bien fondée a solliciter la confirmation de la demande d'expulsion afin de valider la procédure diligentée et la charge des frais d'expulsion, d'autant que Madame DE Y... n'a pas fait

toutes les procédures pour obtenir le départ des occupants de son chef et doit donc répondre de cette occupation auprès de Madame X... et supporter le coût de la procédure. Elle demande à la Cour de : - débouter Madame DE Y... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, - confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Y ajoutant, ordonner la capitalisation des intérêts, - condamner Madame DE Y... au paiement de la somme de 15.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - condamner Madame DE Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué pour ceux la concernant par la SCP JULLIEN LECHARNY ROL, société titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Monsieur Z... A... et Madame Souad B... ont fait l'objet d'un procès-verbal de recherches infructueuses par actes d'huissier en date du 19 décembre 2000 établis conformément à l'article 659 du Nouveau Code de Procédure Civile. L'arrêt sera donc réputé contradictoire. L'ordonnance de clôture a été signée le 11 janvier 2001 et l'affaire plaidée à l'audience du 8 février 2001. SUR CE, LA COUR, Considérant qu'il est constant que, le 1er décembre 1995, Madame DE Y... a signé le contrat de bail litigieux, en prenant expressément la qualité de locataire et sans aucune mention relative à l'introduction prévue dans les lieux loués d'une tierce personne, et notamment d'une dame D... (ou SOUAD) B... ; que les loyers ont été régulièrement payés par l'appelante en cette qualité de locataire et qu'à aucun moment jusqu'à son départ personnel des lieux, elle n'a remis en cause la validité de ce contrat et que jamais elle n'a invoqué un quelconque vice de son consentement (erreur, dol ou violence) ; que certes, dans sa lettre de réclamation du 5 décembre 1997, Madame DE Y... révélait enfin explicitement qu'elle louait "cet

appartement pour (son) amie Souad B...", mais que cette circonstance ne change rien à la nature et aux effets mêmes de ce bail qui ne lie que la locataire signataire du contrat, et que l'appelante n'est donc pas fondée à prétendre maintenant, pour échapper à ses obligations légales et contractuelles de locataire, qu'elle "n'avait de locataire que le nom et l'obligation de payer le loyer", et même alors qu'il s'agirait d'un bail "fictif", alors qu'en réalité, elle avait, en plus, l'obligation de quitter complètement les lieux loués et de les remettre à la disposition de la bailleresse, le 1er décembre 1998, comme convenu, libres de toute occupation ; qu'en fait, elle n'a pas respecté de bonne foi ses obligations puisqu'elle s'est contentée d'indiquer qu'elle libérerait les lieux, le 30 juin 1998 et qu'elle restituerait les clés à cette date, alors qu'elle savait parfaitement, dès le début, que l'occupante sans droit ni titre Madame B... (et tous les autres occupants sans titre, du chef de celle-ci) resteraient dans les lieux ; que rien dans ce dossier ne démontre que cette Madame B..., "amie" de Madame DE Y..., serait rentrée dans les lieux, avant la signature du bail, le 1er décembre 1995, et qu'en tout état de cause, dès la signature de ce contrat, c'est l'appelante qui était seule locataire et qui devait donc assumer seule toutes les obligations inhérentes à cette qualité, en application des articles 1709 et suivants du code civil ; que Madame DE Y... a agi avec une légèreté fautive grave en créant cette situation de fait qui a eu, pour effet, de faire obstacle à une libre et complète reprise de possession des lieux par la propriétaire, alors surtout que, de plus, l'appelante est maintenant incapable de dire où habitent cette "amie" Madame Souad B... qui n'avait même pas daigné comparaître devant le tribunal d'instance, ainsi que cet autre occupant, Monsieur A... Z... (ou C...) qu'elle a laissés dans la place, en décembre 1998 ; que c'est

donc, à bon droit, que le premier juge a ordonné l'expulsion de ces occupants sans titre qui occupaient les lieux du chef de Madame DE Y... et que le jugement est confirmé sur ce point ; que la simple circonstance évoquée par l'appelante selon laquelle quelques quittances auraient également visé Madame B... est sans utilité pour la solution du présent litige puisque cette simple mention ne permet nullement de conférer à ce tiers une quelconque qualité de locataire et que ce nom était nécessairement mentionné comme étant celui d'une occupante dont la présence dans les lieux avait, en cours de bail, été portée à la connaissance de la bailleresse ; qu'aucun écrit explicite émanant de Madame X... ne permet de retenir que celle-ci aurait accepté de considérer cette Madame B... et les personnes occupant les lieux du chef de celle-ci, comme étant ses locataires ; qu'au demeurant, ces occupants sans droit ni titre se sont empressés de disparaître sans plus donner de leurs nouvelles et sans indiquer leurs nouveaux domiciles, qu'ils ont fait l'objet de procès-verbal de recherches infructueuses (article 659 du Nouveau Code de Procédure Civile), et qu'ils n'ont jamais prétendu, d'une quelconque manière, qu'ils auraient été les locataires de Madame X... ; Considérant, par conséquent, que le jugement est confirmé en ce qu'il a exactement ordonné l'expulsion de Madame DE Y... et celle de tous occupants de son chef, en l'espèce, Madame Souad B... et Monsieur Z... A... (ou C...) et la séquestration de leur mobilier ; Considérant que l'indemnité d'occupation mensuelle due par Madame DE Y... a été exactement fixée par le premier juge, en sa durée et en son montant, et que le jugement est également confirmé de ce chef ; que l'appelante est donc déboutée de sa demande subsidiaire en réduction de ce montant ; que la Cour ajoute que les intérêts au taux légal échus, dus sur les sommes mises à la charge de l'appelante pour une année entière au moins, seront capitalisés conformément aux

dispositions de l'article 1154 du code civil à compter de la demande de ce chef formulée le 21 septembre 2000 ; Considérant que, compte tenu de l'équité, le jugement est confirmé en ce qu'il a, à bon droit, condamné Madame DE Y... à payer 3.000 francs à Madame X... en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que la Cour, y ajoutant, condamne l'appelante à payer 12.000 francs à l'intimée pour ses frais irrépétibles en appel en vertu de ce même article ; que par contre, l'appelante qui succombe en tous ses moyens est, eu égard à l'équité, déboutée de sa propre demande fondée sur ce même article ; PAR CES MOTIFS, LA COUR statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort : DEBOUTE Madame Isabelle DE Y... des fins de son appel et de toutes les demandes que celui-ci comporte ; CONFIRME en son entier le jugement déféré ; ET Y AJOUTANT : CONDAMNE l'appelante à payer à Madame Isabelle X... la somme de 12.000 francs (DOUZE MILLE FRANCS) (soit 1 829,39 euros) en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile pour ses frais irrépétibles en appel ; ORDONNE que les intérêts au taux légal échus, dus sur les sommes à payer par Madame DE Y... pour une année entière au moins, seront capitalisés à compter du 21 septembre 2000, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil ; CONDAMNE l'appelante à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP d'avoués JULLIEN LECHARNY ROL, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le faisant fonction de greffier,

Pour le Président empêché qui a assisté au prononcé

(Article 456 du NCPC) Le Conseiller, S. LANGLOIS

MC LE BOURSICOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1999-4439
Date de la décision : 16/03/2001

Analyses

BAIL (règles générales) - Preneur - Qualité - Preneur apparent

Le locataire qui a signé le bail en prenant expressément la qualité de locataire sans aucune mention relative à l'introduction dans les lieux loués d'une tierce personne, qui a payé régulièrement les loyers en cette qualité et qui n'a jamais, jusqu'à son départ personnel des lieux, remis en cause la validité de ce contrat, n'est pas fondé à invoquer ensuite le caractère "fictif" de celui-ci et est tenu d'assumer seul toutes les obligations inhérentes à sa qualité, en application des articles 1709 et suivants du code civil


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-03-16;1999.4439 ?
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