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01/03/2001 | FRANCE | N°1998-1841

France | France, Cour d'appel de Versailles, 01 mars 2001, 1998-1841


FAITS ET PROCEDURE : Aux termes d'un marché de travaux en date du 03 mai 1990, la Société "PAPETERIES DE GOLBEY" a confié à la Société DUMEZ Travaux Publics, devenue DUMEZ GTM, en sa qualité d'entrepreneur général, la réalisation sur le site de GOLBEY de son unité de production destinée à la fabrication du papier journal. Les travaux dont la Société DUMEZ GTM avait été chargée comprenaient la construction d'un bâtiment abritant une machine à papier et la construction d'une station de traitement des effluents. Par convention de sous-traitance en date du 04 octobre 1990, la

Société DUMEZ GTM a confié à la Société STEREC les travaux relatifs ...

FAITS ET PROCEDURE : Aux termes d'un marché de travaux en date du 03 mai 1990, la Société "PAPETERIES DE GOLBEY" a confié à la Société DUMEZ Travaux Publics, devenue DUMEZ GTM, en sa qualité d'entrepreneur général, la réalisation sur le site de GOLBEY de son unité de production destinée à la fabrication du papier journal. Les travaux dont la Société DUMEZ GTM avait été chargée comprenaient la construction d'un bâtiment abritant une machine à papier et la construction d'une station de traitement des effluents. Par convention de sous-traitance en date du 04 octobre 1990, la Société DUMEZ GTM a confié à la Société STEREC les travaux relatifs à l'exécution de la couverture, du bardage et de l'étanchéité du bâtiment "machine à papier" et de la station de traitement des effluents; ces travaux étaient rémunérés sur la base du bordereau de prix et d'un devis estimatif d'un montant de 8.038.448,46 francs. Suivant bordereau de cession de créances "DAILLY" en date du 12 décembre 1990, la Société STEREC a cédé à la Banque B.T.P. les créances détenues à l'encontre de la Société DUMEZ GTM au titre de la convention de sous-traitance du 04 octobre 1990 ; cette cession de créance "DAILLY" portait sur la totalité du marché, soit un montant de 8.038.448 francs TTC correspondant au devis estimatif, ainsi que sur : "tous dommages, intérêts et accessoires ainsi que tous suppléments ou majorations de prix par suite de révisions ou variations ou toutes autres causes que ce soit". Cette cession de créance devait être notifiée, par courrier du même jour, par B.T.P. BANQUE à la Société DUMEZ GTM. Au motif que la Société STEREC n'avait pas respecté ses obligations contractuelles et qu'elle avait abandonné le chantier, la Société DUMEZ GTM lui a fait savoir, par écrit en date du 02 septembre 1991, qu'elle résiliait le contrat de sous-traitance ; cette résiliation était, par courrier du même jour, portée à la connaissance de la Banque B.T.P. Par jugement du 08

juillet 1991, le Tribunal de Commerce de CHAMBERY a ouvert à l'encontre de la Société STEREC une procédure de redressement judiciaire, laquelle s'est poursuivie par un plan de redressement arrêté le 20 septembre 1991 ; la Société DUMEZ GTM a déclaré une créance d'un montant de 704.452,97 francs au principal à titre chirographaire; la créance déclarée a été rejetée au motif qu'elle était consécutive à la résiliation du contrat survenue postérieurement à l'ouverture de la procédure collective, et qu'elle devait donc échapper à la procédure de vérification. C'est dans ces circonstances que, par acte d'huissier en date du 03 janvier 1992, la Société STEREC a fait assigner la Société DUMEZ GTM devant le Tribunal de Commerce de NANTERRE pour voir condamner la défenderesse au paiement de la somme de 2.691.117,91 francs TTC au titre du marché, ainsi qu'en paiement de la somme de 200.000 francs à titre de dommages-intérêts destinés à réparer son préjudice commercial. Suivant décision prononcée le 16 décembre 1992, le Tribunal a jugé qu'ayant cédé sa créance et ayant donc perdu tout droit sur le terrain contractuel contre la Société DUMEZ, la Société STEREC était irrecevable en ses demandes à l'encontre de la DUMEZ GTM; de plus, il a ordonné avant-dire-droit une mesure d'instruction confiée à Monsieur X..., afin que soit déterminé si le montant de 704.452,97 francs était ou non justifié. Par arrêt en date du 09 février 1995, la Cour d'Appel de VERSAILLES a confirmé par substitution de motifs le jugement précité en tant qu'il avait déclaré irrecevables les demandes de la Société STEREC, et il a rejeté la demande reconventionnelle présentée par la Société DUMEZ GTM en paiement de la somme de 704.452,97 francs. Au motif qu'elle avait obtenu de la Banque B.T.P. qu'elle signifie à la Société DUMEZ GTM la mainlevée des droits de créance auxquels elle pouvait prétendre du fait de la cession DAILLY dont elle avait bénéficié, la

Société STEREC a, par acte d'huissier en date du 18 octobre 1996, fait assigner à nouveau la Société DUMEZ GTM dans les mêmes termes de condamnation que ceux ayant présidé à son assignation en date du 03 janvier 1992. Suivant jugement prononcé le 23 janvier 1998, relevant que : "la signification par huissier du 22 août 1996 intitulée "procès-verbal de mainlevée" ne répond pas aux conditions que la Cour d'appel avait édictées dans sa décision précitée pour que le droit d'agir soit reconnu à STEREC au titre de créances qu'elle soutient détenir au titre du marché litigieux", le Tribunal de Commerce de NANTERRE a : " déclaré irrecevables en l'état les demandes formées par la SA STEREC à l'encontre de la SA DUMEZ GTM, venant aux droits de la SA DUMEZ ; " dit n'y avoir pas lieu, en l'état, de se prononcer sur les demandes reconventionnelles de la SA DUMEZ GTM ; " dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; " condamné la SA STEREC aux entiers dépens. La Société STEREC SA a interjeté appel de ce jugement. Par jugement du Tribunal de Commerce d'ANGERS en date du 04 novembre 1998, la SA STEREC a été déclarée en redressement judiciaire, Maître André-F. BACH a été désigné en tant qu'administrateur judiciaire et Maître MARTIN-TOUCHAIS a été désigné comme représentant des créanciers. Par jugement du 06 janvier 1999, le Tribunal de Commerce d'ANGERS a homologué le plan de cession de la SA STEREC, a désigné Maître André-F. BACH en qualité de commissaire à l'exécution du plan et l'a maintenu dans sa mission initiale d'administrateur judiciaire. Maître André-F. BACH et Maître MARTIN-TOUCHAIS demandent à la Cour de se voir donner acte de leur intervention volontaire dans la présente procédure, en qualité respectivement de commissaire à l'exécution du plan et d'administrateur judiciaire de la SA STEREC pour le premier, et de représentant des créanciers de ladite société pour le second. Devant la Cour, la Société STEREC et ses mandataires judiciaires

expliquent que l'acte de mainlevée de la cession de créance intervenue le 12 décembre 1990 entre la société appelante et la B.T.P. BANQUE a été régulièrement notifié à la Société DUMEZ SA, tant à titre principal par l'acte du 22 août 1996 remis à la personne du débiteur cédé par B.T.P. BANQUE, qu'à titre incident aux termes de l'assignation du 16 octobre 1996 délivrée au débiteur cédé par la société appelante. Ils font valoir qu'à la différence de la précédente mainlevée par laquelle B.T.P. BANQUE avait restitué sa créance à la SA STEREC aux termes d'une simple attestation en date du 5 mars 1993 non susceptible, - ainsi que l'a précédemment jugé la Cour d'Appel de ce siège dans son arrêt du 09 février 1995 de constituer un transport régulier de créance, la mainlevée signifiée à la SA DUMEZ par acte de la SCP LEROY-FABRE, Huissiers de Justice, est intervenue en conformité avec les dispositions de l'article 1690 du Code Civil. Ils ajoutent que c'est à tort que la société intimée prétend que cette signification par huissier comporterait une irrégularité substantielle au motif qu'elle ne fait pas état du montant des sommes restant dues à la date du 22 août 1996, alors qu'il apparaît que la SA DUMEZ était parfaitement informée du montant des sommes qu'elle restait devoir pour en avoir elle-même fait état dans le cadre de sa déclaration de créance du 12 novembre 1991, et surabondamment par le contenu de l'assignation du 16 octobre 1996. Par voie de conséquence, ils demandent à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de dire et juger régulières au regard de l'article 1690 du Code Civil les notifications de transport de créance résultant des actes extrajudiciaires en date des 22 août 1996 et 18 octobre 1996, et en conséquence de : " dire que la SA STEREC a valablement récupéré l'intégralité de sa créance sur la SA DUMEZ GTM ; " condamner la SA DUMEZ GTM à payer au redressement judiciaire de la SA STEREC la somme de 2.691.117,91 francs TTC en principal, outre

intérêts de droit à compter de la précédente demande, formulée aux termes de l'assignation du 03 janvier 1992 ; " ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code Civil ; " dire et juger irrecevable toute demande reconventionnelle de la SA DUMEZ GTM ; " condamner la SA DUMEZ GTM au paiement d'une somme de 200.000 francs à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ayant engendré un préjudice commercial ; " condamner la SA DUMEZ GTM au paiement d'une somme de 40.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; " condamner la SA DUMEZ GTM aux entiers dépens. La SA DUMEZ - GTM réplique que la restitution de la créance à la Société STEREC constitue un transport de créance au sens de l'article 1689 du Code Civil, et nécessite donc, pour être opposable aux tiers tout autant qu'au débiteur cédé, le respect des formalités impératives. Elle fait valoir que la procédure dont la Société STEREC a pris l'initiative en vue de faire croire à la régularité d'un prétendu retour de la créance précédemment cédée à la B.T.P. BANQUE constitue une tentative maladroite de justification "a postériori" de la recevabilité de son action contre DUMEZ GTM. Elle soutient que, ainsi que l'a jugé le Tribunal, l'acte du 22 août 1996 ne peut constituer une signification au sens des dispositions de l'article 1690 du Code Civil, en ce que cette signification n'informe pas le débiteur cédé de la nature et de l'ampleur de la créance cédée, et donc de ses droits à se libérer entre les mains de la Société STEREC. Elle relève également qu'à défaut d'avoir été renseignée sur le prix réel de la cession intervenue entre B.T.P. BANQUE et STEREC (prix au-delà duquel elle ne saurait être tenue), DUMEZ GTM n'est pas en mesure de connaître ses droits à l'encontre de STEREC, ainsi que les exceptions qu'elle pourrait lui opposer notamment du fait des dispositions des articles 1699 et 1700 du Code Civil. Elle fait en outre observer que la

notification de l'acte du 22 août 1996 n'est pas produite, de telle sorte que, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, ce procès-verbal ne remplit pas les conditions édictées par l'article 1690 du Code Civil. La société intimée ajoute que l'assignation du 18 octobre 1996 ne vaut pas davantage notification de la cession, dans la mesure où les deux actes (assignation d'une part, procès-verbal du 22 août 1996 d'autre part) ne mentionnent pas les mêmes montants. Alléguant qu'en l'absence de toute signification valable, le retour de la créance dans le patrimoine de la Société STEREC n'est pas opposable au débiteur cédé, la Société DUMEZ GTM sollicite la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré STEREC irrecevable à agir à son encontre. A titre subsidiaire, au cas où la présente action serait déclarée recevable, la Société DUMEZ GTM fait valoir que le droit de créance revendiqué par la partie adverse est contestable, dès lors que celle-ci a abandonné le chantier en cours d'exécution, n'a pas respecté les délais contractuels d'achèvement des travaux, et n'a d'ailleurs jamais contesté les défaillances qui lui sont reprochées, lesquelles reflètent parfaitement la réalité des relations contractuelles entre DUMEZ GTM et STEREC. A cet égard, elle souligne qu'elle a, à de multiples reprises, mis la Société STEREC en demeure de remédier à ses carences, et que, faute par celle-ci d'avoir pris des mesures correctives, elle a été contrainte de mettre en oeuvre la clause résolutoire stipulée aux articles 16-2 et 16-3 du contrat de sous-traitance. Relevant que les comptes établis en fin de chantier, du fait des coûts engendrés pour pallier les défaillances de la société appelante, laissent apparaître un solde en faveur de l'intimée, la Société DUMEZ GTM conclut au débouté de l'appelante et des intervenants volontaires de l'intégralité de leurs prétentions. A titre infiniment subsidiaire, la Société DUMEZ GTM fait observer que les sommes réclamées par STEREC doivent être réduites de la retenue

de garantie, d'un montant de 434.611,17 francs TTC. Aussi, dans cette hypothèse, elle demande à la Cour de dire que la somme due à la partie appelante ne saurait être supérieure à 1.180.966,71 francs (1.615.577,88 francs TTC, selon le rapport d'expertise amiable établi à la demande de STEREC le 22 octobre 1992, moins les 434.611,17 francs TTC ci-dessus). En tout état de cause, elle conclut à la condamnation de la Société STEREC à lui payer la somme de 50.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, et à prendre en charge les entiers dépens. MOTIFS DE LA DECISION : è Sur la recevabilité de l'action de la Société STEREC :

Considérant qu'à titre préliminaire, il doit être rappelé que, suivant bordereau de cession de créances "DAILLY" en date du 12 décembre 1990, la Société STEREC avait cédé à la B.T.P. BANQUE les créances détenues par elle à l'encontre de la Société DUMEZ au titre de la convention de sous-traitance du 04 octobre 1990 ; considérant qu'il est constant que, par courrier du même jour, B.T.P. BANQUE avait notifié à la Société DUMEZ GTM la cession de créance effectuée par la Société STEREC, tout en lui précisant que cette cession portait sur la totalité du marché, d'un montant de 8.038.448,86 francs TTC ; considérant qu'au surplus, aux termes de cette notification, il était porté à la connaissance de la Société DUMEZ GTM qu'en application de l'article 5 de la loi du 02 janvier 1981, celle-ci ne pourrait désormais valablement se libérer qu'auprès de l'établissement de crédit ; considérant que, dès lors qu'à compter du mois de décembre 1990, la Société STEREC avait perdu tout droit sur la créance susvisée résultant de son marché de sous-traitance, l'action introduite par elle à l'encontre de la Société DUMEZ suivant assignation du 03 janvier 1992 avait été déclarée irrecevable par le Tribunal de Commerce de NANTERRE, suivant jugement rendu le 16 décembre 1992, confirmé sur ce point par arrêt de la Cour d'Appel de

VERSAILLES en date du 09 février 1995 ; considérant qu'il est également constant que, dans le cadre de la procédure d'appel ayant donné lieu à l'arrêt précité, la Société STEREC avait invoqué l'existence d'un courrier daté du 16 février 1993, adressé par B.T.P. BANQUE à la Société DUMEZ, et notifiant à celle-ci le transport de créance en retour à STEREC ; considérant qu'aux termes de sa précédente décision, la Cour de ce siège avait débouté la Société STEREC de sa demande, en relevant que la lettre du 16 février 1993 :

"ne satisfait pas aux exigences légales, ne contenant pas d'éléments précis et non équivoques permettant à la Société DUMEZ, débiteur cédé, d'être exactement informée de l'importance de la créance cédée" ; considérant qu'elle en avait déduit que : "en l'absence de signification de la cession de créance intervenue entre B.T.P. BANQUE et la Société STEREC à une date qui n'est pas précisée, et devant l'insuffisance des éléments portés à la connaissance de la Société DUMEZ, la cession dont se prévaut STEREC est inopposable à la Société DUMEZ" ; considérant qu'en droit, ainsi que le rappelle l'arrêt prononcé le 09 février 1995, la restitution de la créance intervenue entre la Banque BTP et la Société STEREC constitue, au sens des dispositions de l'article 1689 du Code Civil, un transport de créance, lequel suppose, pour être opposable au débiteur cédé, le respect des formalités exigées par l'article 1690 du Code Civil ; considérant qu'il est constant que, pour pouvoir être valablement opposé au débiteur cédé, le transport de créance doit avoir fait l'objet d'une signification comportant des éléments précis et non équivoques qui soient de nature à lui permettre d'être complètement informé des modalités de ce transfert, et notamment de la consistance de la créance cédée ; or considérant que la Société STEREC produit désormais aux débats un acte extrajudiciaire signifié le 22 août 1996 à la Société DUMEZ par la SCP LEROI, FABRE et BERDAGUER, Huissiers de

Justice, aux termes duquel la B.T.P. BANQUE a informé le débiteur cédé qu'il donnait : "mainlevée pure et simple, entière et définitive de la cession de créance, droits et action, concernant le marché que la Société STEREC a passé avec la Société DUMEZ pour le chantier de "papeterie de Golbey" pour le montant de travaux de F 8.038.448,86 TTC en application des dispositions de l'article 1690 du Code Civil" ; considérant qu'à cet égard, il convient de relever qu'aucun délai n'est imposé pour accomplir les formalités prescrites par l'article 1690 du Code Civil, de telle sorte que le fait que la Société STEREC ait attendu le mois d'août 1996 pour régulariser la cession de créance entre B.T.P. BANQUE et elle-même ne saurait rendre cette cession inopposable à la Société DUMEZ GTM ; considérant qu'au surplus, il est acquis aux débats que l'acte de mainlevée susvisé a été régulièrement signifié le 22 août 1996 à la SA DUMEZ, prise en la personne de madame MAILLOT Y..., Secrétaire, laquelle a déclaré être habilitée à le recevoir ; considérant que, par ailleurs, il apparaît que cet acte de signification contient l'indication du montant de la créance initialement cédée, lequel est exactement identique au montant du marché ayant déjà fait l'objet de la cession "DAILLY" intervenue le 12 décembre 1990 entre STEREC et B.T.P BANQUE;

considérant que, pour conclure à l'irrecevabilité des prétentions formulées à son encontre, la Société DUMEZ GTM fait valoir que ce document ne porte pas mention du montant du prix réel de la cession intervenue entre BTP BANQUE et STEREC, compte tenu des règlements intervenus depuis le 12 décembre 1990, et qu'il ne renseigne donc nullement sur l'étendue du droit pour la société appelante d'obtenir un paiement de la part de la société intimée ; mais considérant qu'il est admis que la signification prescrite par l'article 1690 du Code Civil peut résulter également de tout acte de procédure répondant aux

conditions d'informations précitées, dès lors que cet acte contient tous les éléments qui permettent d'y voir incidemment une signification du transport ; or considérant qu'en l'occurrence, aux termes de l'assignation qu'elle a fait délivrer au débiteur cédé le 18 octobre 1996, la Société STEREC a pris soin de rappeler que la B.T.P. BANQUE lui avait donné mainlevée entière et définitive de sa garantie, qu'elle lui avait restitué sa créance sur la SA DUMEZ, et que cette mainlevée avait été officiellement signifiée à celle-ci suivant acte d'huissier du 22 août 1996 ; considérant qu'au surplus, il doit être observé que cette assignation contient la liste détaillée des factures non réglées par la Société DUMEZ, ce pour un montant total de 2.691.117,91 francs TTC ; considérant qu'il s'ensuit que cette notification par voie d'assignation donne au débiteur cédé tous renseignements lui permettant de connaître l'existence de la cession ainsi que le montant effectivement cédé, et donc l'étendue du droit du cessionnaire à l'encontre de ce débiteur ; considérant que la société intimée apparaît d'autant moins fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas reçu les informations nécessaires sur le montant exact de la créance cédée et sur le prix de la cession, qu'il résulte des documents annexés à sa déclaration de créance en date du 12 novembre 1991 qu'elle avait alors reconnu qu'au titre du solde du prix du marché, elle était redevable envers la Société STEREC de la différence entre la somme de 10.948.730 francs TTC, représentant le montant total des factures de cette société, et la somme de 8.257.612,50 francs TTC, correspondant aux règlements effectués, soit un solde égal à : 2.691.118 francs TTC, exactement identique au montant qui lui est réclamé dans le cadre de la présente procédure ; considérant que, dès lors qu'il est démontré par les éléments qui précèdent que la notification de la cession de créance de B.T.P BANQUE à STEREC répond suffisamment aux prescriptions de l'article

1690 du Code Civil, il convient de réformer le jugement déféré et de déclarer recevable l'action de la Société STEREC en paiement du solde du marché de sous-traitance ; è Sur la contestation relative au montant de la créance de la Société STEREC : Considérant qu'à titre subsidiaire, la Société DUMEZ fait valoir que la Société STEREC est particulièrement mal fondée à réclamer le paiement des sommes visées dans son assignation introductive d'instance et reprises dans ses écritures d'appel, dans la mesure où il est établi qu'elle a failli à ses obligations contractuelles et qu'elle a même abandonné le chantier, ce qui devait contraindre la société intimée à résilier le marché de sous-traitance suivant courrier en date du 02 septembre 1991 ; considérant qu'elle relève que la partie adverse a d'ailleurs admis le caractère injustifié des sommes revendiquées par elle, puisqu'elle a communiqué un rapport d'expertise amiable, effectué sur sa demande, le 22 octobre 1992 par Monsieur Claude Z..., et qu'à la suite du dépôt de ce rapport d'expertise, STEREC avait, dans le cadre de la précédente procédure, accepté de réduire sa demande à la somme de 1.615.577,88 francs TTC ; considérant que, compte tenu de la retenue de garantie des travaux devant également venir en déduction de la créance de la société appelante à concurrence de la somme de 434.611,17 francs, la société intimée conclut à titre subsidiaire qu'elle ne saurait être tenue au paiement d'une somme supérieure à 1.180.966,71 francs TTC ; mais considérant qu'aux termes de l'arrêt prononcé le 09 février 1995, la Cour d'Appel de VERSAILLES a déjà mis en évidence que la Société DUMEZ se prévalait d'un manquement de la Société STEREC à ses obligations concernant l'exécution d'un contrat antérieur à la date du redressement judiciaire, et que cette prétendue créance était donc soumise à déclaration conformément à l'article 50 de la loi du 25 janvier 1985 (article L 621-43 du Code de Commerce) ; considérant que, s'il est constant que la société

intimée a, le 12 novembre 1991, procédé à sa déclaration de créance pour la somme de 704.452 francs, il est également établi que ladite créance a été rejetée par le représentant des créanciers, et que cette décision de rejet n'a fait l'objet d'aucun recours de la part de la SA DUMEZ ; considérant qu'il s'ensuit que, ainsi que la Cour de ce siège l'a énoncé dans son précédent arrêt devenu définitif, la Société DUMEZ ne justifie d'aucune créance exigible sur la Société STEREC et qu'elle se trouve mal fondée à invoquer une quelconque compensation ; considérant qu'il y a donc lieu de rejeter les prétentions formulées à titre subsidiaire par la société intimée, et d'accueillir la réclamation de la Société STEREC à l'encontre de celle-ci à concurrence de la somme totale de 2.691.117,91 francs TTC, correspondant au solde du marché à ce jour non acquitté ; considérant que le point de départ des intérêts sur ladite somme ne saurait être fixé au 03 janvier 1992, date de l'assignation diligentée dans le cadre de la précédente procédure, dès lors qu'à cette date, la Société STEREC n'était titulaire d'aucun titre régulier à l'encontre de la Société DUMEZ ; considérant que, par voie de conséquence, il convient d'assortir la somme principale des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 1996, date de l'assignation délivrée dans le cadre de la présente procédure, et d'ordonner la capitalisation de ces intérêts par année entière, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil, ce à compter du 02 juillet 1998, date des écritures de la société appelante contenant pour la première fois cette demande. è Sur les demandes annexes : Considérant que, faute par elle d'établir que la résistance opposée par la Société DUMEZ GTM a généré en abus de droit, et qu'elle a causé à l'appelante un préjudice distinct de celui qui sera normalement indemnisé par l'allocation des intérêts légaux, la Société STEREC et ses mandataires judiciaires doivent être déboutés de leur demande de

dommages-intérêts ; considérant que l'équité commande d'allouer à la Société STEREC, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité égale à 20.000 francs, en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par elle tant en première instance qu'en appel ; considérant qu'il n'est en revanche pas inéquitable que la société intimée conserve la charge de l'intégralité des frais non compris dans les dépens qu'elle a dû engager dans le cadre de la présente procédure ; considérant que la Société DUMEZ GTM doit être condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, DONNE ACTE à Maître André-F. BACH de son intervention volontaire dans la présente procédure, en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la SA STEREC ; DONNE ACTE à Maître MARTIN-TOUCHAIS de son intervention volontaire dans la présente procédure, en sa qualité de représentant des créanciers de la SA STEREC ; DECLARE recevable l'appel interjeté par la Société STEREC SA, le dit bien fondé ; INFIRME en toutes ses dispositions le jugement déféré, et statuant à nouveau : DIT que les notifications de cession de créance, telles qu'elles résultent de l'acte extrajudiciaire du 22 août 1996 et de l'assignation introductive d'instance du 18 octobre 1996, répondent aux prescriptions de l'article 1690 du Code Civil ; En conséquence, CONDAMNE la Société DUMEZ GTM SA à régler à la SA STEREC, en redressement judiciaire, la somme de 2.691.117,91 francs TTC en principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 1996, date de l'assignation délivrée dans le cadre de la présente procédure ; ORDONNE la capitalisation des intérêts sur ladite somme principale par année entière, conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil, ce à compter du 02

juillet 1998, date des écritures de la société appelante contenant pour la première fois cette demande ; CONDAMNE en outre la Société DUMEZ GTM SA à régler à la SA STEREC, en redressement judiciaire, sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité globale de 20.000 francs, venant en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par la société appelante tant en première instance qu'en appel ; DEBOUTE la SA STEREC, en redressement judiciaire, assistée de ses mandataires judiciaires, de ses autres et plus amples demandes ; REJETTE l'ensemble des demandes présentées tant à titre principal qu'à titre subsidiaire par la Société DUMEZ GTM SA ; CONDAMNE la Société DUMEZ GTM SA aux entiers dépens de première instance et d'appel, et AUTORISE Maître BINOCHE, Avoué, à recouvrer directement la part le concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET REDIGE PAR MONSIEUR FEDOU, CONSEILLER PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT M. THERESE A...

F. LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-1841
Date de la décision : 01/03/2001

Analyses

CESSION DE CREANCE - Formalités de l'article 1690 du Code civil

La restitution d'une créance au cédant par le cessionnaire constitue, au sens de l'article 1689 du code civil, un transport de créance dont l'opposabilité au cédé est subordonnée au respect des formalités prescrites par l'article 1690 du code civil, à savoir une signification com- portant des éléments précis et non équivoques permettant à celui-ci d'être complétement informé des mogalités du transfert. Dès lors, d'une part, que l'article 1690 du code civil n'impose aucun délai pour accomplir les formalités qu'il édicte, la circonstance que le cédant ait attendu trois ans pour signifier le transport de créance intervenu entre lui et le cession- naire, n'a pas pour effet de rendre celui-ci inopposable au cédé; d'autre part, qu'il est de tout acte de procédure répondant aux conditions d'information évoquées, sous réseve que cet acte contienne tous tous les éléments permettant d'y voir incidemment une signification du tran- sport, une assignation qui, délivrée par le cessionnaire au cédé, précise que le cédant a donné mainlevée entière et définitive de sa garantie, a restitué sa créance sur le cédé et a signifié la mainlevée à ce dernier, répond suffisamm- ent aux prescriptions de l'article 1690 du code civil. Il s'ensuit que le cession- naire, un sous traitant, rétabli dans ses droits sur la créance, est recevable à agir contre l'entrepreneur principal en paiement du solde de marché de sous- traitance


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-03-01;1998.1841 ?
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