La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/01/2001 | FRANCE | N°JURITEXT000006936969

France | France, Cour d'appel de Versailles, 18 janvier 2001, JURITEXT000006936969


FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES Le 18 octobre 1996, la société B etamp; T a confié l'expédition en FLORIDE d'un lot de lentilles de contact d'une valeur de 290.755 francs à la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER commissionnaire qui a sous-traité l'exécution du transport à la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE. Le colis n'étant jamais parvenu à son destinataire, la société B etamp; T a demandé indemnisation de la marchandise perdue à la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER qui lui a opposé les limitations de garantie de cette opération de transport international aÃ

©rien. Insatisfaite de ces conditions d'indemnisation, la société B et...

FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES Le 18 octobre 1996, la société B etamp; T a confié l'expédition en FLORIDE d'un lot de lentilles de contact d'une valeur de 290.755 francs à la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER commissionnaire qui a sous-traité l'exécution du transport à la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE. Le colis n'étant jamais parvenu à son destinataire, la société B etamp; T a demandé indemnisation de la marchandise perdue à la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER qui lui a opposé les limitations de garantie de cette opération de transport international aérien. Insatisfaite de ces conditions d'indemnisation, la société B etamp; T a saisi le tribunal de commerce de NANTERRE. La société TRANSPORTS JEAN FAUCHER a appelé en garantie la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE. Par jugement en date du 16 décembre 1997, cette juridiction a dit que la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER n'avait pas commis de faute lourde mais qu'une telle faute devait être reprochée à la société FEDERAL EXPRESS qui ne pouvait en conséquence se prévaloir de limitation de garantie. Le tribunal a en conséquence condamné la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER à payer à la société B etamp; T la somme de 290.755 francs et condamné la société FEDERAL EXPRESS à garantir la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER. Il a débouté la société B etamp; T du surplus de ses demandes mais lui a alloué une indemnité de procédure de 20.000 francs. La société FEDERAL EXPRESS a interjeté appel du jugement à l'encontre de la société B etamp; T et de la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER. La société TRANSPORTS JEAN FAUCHER ayant fait l'objet du jugement de liquidation judiciaire en date du 1er avril 1998, Maître BECHERET est intervenue volontairement à l'instance en sa qualité de mandataire liquidateur. Par conclusions récapitulatives signifiées le 09 novembre 2000, la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE soutient qu'elle est intervenue en qualité de transporteur dans l'opération de transport aérien

international soumis aux dispositions de la Convention de VARSOVIE du 12 octobre 1929 ; que si le transporteur est responsable de la perte des marchandises, l'indemnité due est, hormis certaines circonstances exclusives, limitée à 17DTS par kilo. Elle dénie avoir commis, en égarant le colis, une faute inexcusable et souligne qu'elle a procédé à une recherche dès que la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER l'a avertie. Elle conteste enfin la réalité du préjudice commercial invoqué par la société B etamp; T. La société FEDERAL EXPRESS demande en conséquence à la cour d'infirmer le jugement entrepris, à titre subsidiaire si sa responsabilité devait être retenue, de limiter la demande en paiement à l'équivalent de 17 DTS par kilo et de condamner la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER au paiement de la somme de 20.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens. Par conclusions récapitulatives signifiées le 23 octobre 2000, la société B etamp; T soutient que la société FEDERAL EXPRESS avait une mission de commissionnaire de transport dès lors que la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER lui a confié la palette de 156 kg pour livraison à destination sans instructions quant aux modalités du transport. Elle souligne que la perte de la palette est survenue à ROISSY et qu'il n'est pas même établi qu'il y ait eu un transport. Elle fait valoir que le document dont se prévaut la société FEDERAL EXPRESS n'est pas une LTA car il n'est pas signé, qu'il est dépourvu de valeur probante et elle demande à la cour de l'écarter. Elle affirme que l'attitude de FEDERAL EXPRESS est constitutive d'une faute lourde du commissionnaire de transport et non celle d'un transporteur hypothétique. Elle considère que le fonctionnement normal de la société FEDERAL EXPRESS suivant la norme ISO 9001 exclut une perte par inadvertance de la palette et que la disparition ne peut résulter que d'un acte volontaire de détournement. Elle demande à la cour de

dire et juger que les sociétés TRANSPORTS JEAN FAUCHER et FEDERAL EXPRESS sont solidairement garantes des dommages, que la première a commis une faute personnelle et la seconde une faute inexcusable, de les condamner solidairement en conséquence à lui payer la somme de 290.755 francs majorée du coût de conditionnement ainsi que de la somme de 500.000 francs au titre du dédommagement de l'atteinte à sa réputation commerciale, de la perte de confiance de sa clientèle et des perturbations et des coûts encourus pour tenter de la rétablir, outre une somme de 30.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Par conclusions signifiées le 26 avril 2000, Maître BECHERET, ès-qualités, estime que la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER n'a pas commis de faute dans l'exécution de sa mission de commissionnaire du transport sous-traité à la société FEDERAL EXPRESS. Elle dément le reproche que lui fait la société B etamp; T d'avoir omis de la conseiller de souscrire une assurance qui incombait à l'acheteur américain des marchandises vendues aux conditions FCA ROISSY. Elle fait valoir qu'elle ne saurait être plus responsable que son substitué en application des dispositions de l'article 99 du code de commerce et s'estime fondée à opposer à son commettant la limitation de responsabilité. Elle soutient que la perte du colis par le transporteur ne constitue pas une faute lourde ou inexcusable. Maître BECHERET, ès-qualités, demande en conséquence à la cour de dire que le montant de la créance pour laquelle la société B etamp; T est en droit de produire au passif de la société TRANSPORTS JEAN FAUCHER ne saurait excéder la somme de 2587,05 DTS, de condamner la société FEDERAL EXPRESS à lui payer la somme de 20.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 09 novembre 2000 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 21 novembre 2000. MOTIFS DE

LA DECISION Considérant que la société B etamp; T a confié à la société TRANSPORT INDUSTRIEL JEAN FAUCHER qui ne discute pas sa qualité de commissionnaire de transport, l'exportation et l'expédition en FLORIDE d'un colis de 153 kg constitué de lentilles de contact d'une valeur de 290.755 francs ; que la société TRANSPORT INDUSTRIEL JEAN FAUCHER s'est substituée pour la réalisation de cette opération de transport la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE, société en nom collectif de droit français dont le siège social est à GENNEVILLIERS ; Considérant que la société B etamp; T soutient que cette dernière a elle-même agi en qualité, non pas de transporteur, mais de commissionnaire, et que la disparition du colis étant survenu avant l'opération de transport proprement dite, les dispositions de la convention de VARSOVIE limitatives de garantie ne trouveraient pas en l'espèce application ; Considérant toutefois que ni le montant du capital social de la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE, ni sa position de filiale de la société américaine FEDERAL EXPRESS CORPORATION, ni son objet social autorisant les opérations de commissionnaire de transport, ne sont de nature à démontrer que la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE était dans l'impossibilité d'effectuer elle-même le transport ; Considérant qu'elle justifie par le versement aux débats de sa lettre de demande d'approbation adressée le 23 février 2000 à la Direction Générale de l'aviation civile exécuter des services aériens réguliers internationaux dont elle demande périodiquement autorisation d'exploitation ; que cette activité de transporteur est mentionnée dans les formalités d'inscription au registre du commerce ; que les autorisations d'exploitation sont délivrées à la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE société française dont le siège social est à GENNEVILLIERS et ne font aucune mention de ce qu'elles seraient sollicitées ou données pour le compte de la société mère

américaine ; Considérant qu'est versé aux débats un document à l'entête FEDERAL EXPRESS, portant la mention "Utilisez cette lettre de transport aérien pour tous les envois internationaux Powerhip", renseignée du nom de l'expéditeur Monsieur X... société JEAN FAUCHER, du nom et de l'adresse du destinataire et de la description succincte du contenu, du poids du colis et de sa valeur déclarée en douane ; que ce document constitue bien une lettre de transport aérien LTA dont la société B etamp; T est mal fondée à contester la valeur probante au seul motif de l'absence d'une signature manuscrite dès lors que les dispositions de l'article 6-4 de la convention de VARSOVIE prévoient que la signature de l'expéditeur peut être imprimée ou remplacée par un timbre et que le document litigieux porte bien la mention dactylographiée A. X... dans la case "signature de l'expéditeur" ; que la LTA ne saurait être confondue, comme le fait la société B etamp; T, avec le formulaire de déclaration de valeur en douane nécessairement revêtu de la signature manuscrite du déclarant ; Que la LTA établit en conséquence clairement que la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE est intervenue dans l'opération en qualité de transporteur ; qu'elle a bien reçu du commissionnaire la société TRANSPORT INDUSTRIEL JEAN FAUCHER la délivrance du colis qu'elle était chargée de faire parvenir au destinataire en FLORIDE ; que l'absence de mention dans la case "valeur déclarée pour le transport" n'a pas pour effet de démontrer, comme tente de le faire accroire la société B etamp; T, l'absence d'opération de transport ; qu'une telle mention n'a d'effet qu'au regard des conditions spécifiques d'indemnisation au delà des limites de garanties ; Considérant que les opérations de remise de la marchandise effectuées sous couvert de la LTA constituent l'accessoire du contrat de transport ; que les circonstances et l'endroit, au demeurant ignorés, où le colis a été perdu sont sans

incidence sur les conséquences de la garde juridique qu'en avait reçue la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE par la prise en charge et l'établissement de la LTA, conformément aux dispositions de l'article 18-2 de la convention de Varsovie ; Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 22-2-a) de ladite convention la responsabilité du transporteur est limitée, en cas de perte de la marchandise, à la somme de 250 francs par kilogramme, s'agissant de francs or dont l'équivalent contemporain est de 16,5837 DTS par kilo ; que cette limite de responsabilité s'applique sauf à ce que soit prouvé que le dommage résulte d'un acte ou d'une omission du transporteur fait avec l'intention de provoquer un dommage ou témérairement et avec conscience ; que la faute, reprochée par les premiers juges, consistant en l'absence de vérification de la bonne expédition et réception du colis n'est pas la cause du dommage ; que la perte d'un colis, même pour une entreprise certifiée à la norme ISO 9001, ne constitue pas une faute inexcusable susceptible d'écarter la limitation de responsabilité au sens de l'article précité ; qu'à cet égard et à défaut du moindre élément probant, les allégations de la société B etamp; T sur un détournement volontaire du colis restent sans portée ; Considérant que la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE est en conséquence bien fondée à opposer la limites de sa garantie à la contre valeur au jour du paiement de la somme de 16,5837 x 156 kg = 2.587,05 DTS ; Qu'il convient en conséquence de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE a commis une faute lourde et l'a condamnée à payer à la société B etamp; T la somme de 290.755 francs ; Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 98 et 99 du code de commerce que le commissionnaire est garant de la perte des marchandises ; considérant toutefois que la société TRANSPORT INDUSTRIEL JEAN FAUCHER a fait l'objet d'un

jugement de liquidation judiciaire le 1er avril 1998 ; que les dispositions des articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985 interdisent que soit fait droit à la demande de la société B etamp; T de condamnation ; Que l'instance s'est trouvée suspendue par le jugement d'ouverture et ne pouvait se poursuivre qu'après que le créancier ait produit au passif de la liquidation judiciaire ; que la société B etamp; T ne précise pas si elle a procédé à la déclaration, à titre provisionnel, de la créance qu'elle allègue ; Qu'il convient en conséquence, d'ordonner la réouverture des débats de ce seul chef en invitant la société B etamp; T à en justifier et les parties à formuler leurs observations ; " PAR CES MOTIFS Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, è REFORME le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE a commis une faute lourde et l'a condamnée à payer à la société B etamp; T la somme de 290.755 francs ; Et statuant à nouveau de ce chef, è CONDAMNE la société FEDERAL EXPRESS INTERNATIONAL FRANCE à payer à la société B etamp; T l'équivalent au jour du paiement de la somme de 2.587,05 DTS ; è CONSTATE la liquidation judiciaire de la société TRANSPORT INDUSTRIEL JEAN FAUCHER intervenue le 1er avril 1998 ; è REFORME le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé à l'encontre de celle-ci des condamnations ; è REVOQUE l'ordonnance de clôture ; è ORDONNE la réouverture des débats en invitant la société B etamp; T à justifier de la déclaration de sa créance et les parties à formuler leurs observations de ce chef ; è RENVOIE l'affaire à l'audience de procédure du conseiller de la mise en état du 05 avril 2001 à 9 h 45 ; è RESERVE les dépens ; ARRET REDIGE PAR MONSIEUR COUPIN, CONSEILLER PRONONCE PAR MADAME LAPORTE, CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT M. THERESE Y...

F. LAPORTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006936969
Date de la décision : 18/01/2001

Analyses

TRANSPORTS AERIENS

ransports aériens, Marchandises, Responsabilité, Transporteur, DéfinitionLa circonstance qu'une société soit la filiale française d'une société américaine et que son objet social l'autorise pour les opérations de commissionnaire de transport, n'est pas de nature à mettre celle-ci dans l'impossibilité d'effectuer elle-même des opérations de transport.Une telle société qui, d'une part, justifie de l'exécution de services réguliers internationaux en vertu d'autorisations d'exploitation délivrées en propre, et de la mention de cette activité de transporteur au registre du commerce et des sociétés, alors que, d'autre part, elle verse aux débats une " LTA " à son en tête, portant le nom de l'expéditeur, le nom et l'adresse du destinataire, ainsi qu'un descriptif succinct de son contenu et de sa valeur déclarée en douane, établit clairement que dans l'opération afférente à cette LTA régulière, elle est intervenue en qualité de transporteur et s'est vue confier, dès la remise de la LTA, la garde juridique de la marchandise à transporter, peu importe la matérialité des opérations de remise de la marchandise ou les circonstances de sa perte ; d'où il suit qu'en sa qualité de transporteur, elle est fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 22-2-a de la Convention de Varsovie du 12 octobre 1929, limitant sa responsabilité, sauf faute inexcusable, en l'occurrence non rapportée.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2001-01-18;juritext000006936969 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award