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23/11/2000 | FRANCE | N°1998-7503

France | France, Cour d'appel de Versailles, 23 novembre 2000, 1998-7503


FAITS ET PROCÉDURE Monsieur Michel X... et madame Denise Y... se sont mariés le xx xxxxxxxxxxxxx à PARIS (12ème), sans contrat préalable. Deux enfants aujourd'hui majeurs sont issus de cette union. Autorisé par une ordonnance de non-conciliation en date du 19 décembre 1996, monsieur X... a formé une demande en divorce sur le fondement de l'article 237 du code civil. Par jugement en date du 26 mai 1998, le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande instance de VERSAILLES a - prononcé le divorce aux torts du mari, - condamné monsieur X... à payer à son conjoint une prestation

compensatoire sous forme d'un capital consistant en l'aban...

FAITS ET PROCÉDURE Monsieur Michel X... et madame Denise Y... se sont mariés le xx xxxxxxxxxxxxx à PARIS (12ème), sans contrat préalable. Deux enfants aujourd'hui majeurs sont issus de cette union. Autorisé par une ordonnance de non-conciliation en date du 19 décembre 1996, monsieur X... a formé une demande en divorce sur le fondement de l'article 237 du code civil. Par jugement en date du 26 mai 1998, le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande instance de VERSAILLES a - prononcé le divorce aux torts du mari, - condamné monsieur X... à payer à son conjoint une prestation compensatoire sous forme d'un capital consistant en l'abandon des droits qu'il détient sur le bien commun situé 47 chemin du Four aux Prêtres 78250 GAILLON SUR MONTCIENT et sous forme d'une rente mensuelle viagère de 4.500 francs due la vie durant de monsieur X... et indexée, - rejeté la demande de dommages-intérêts, - condamné monsieur X... au paiement de la somme de 10.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens. Le premier juge a retenu que les époux vivaient séparés de fait depuis 1986, que monsieur X... reconnaissait avoir quitté le domicile conjugal en 1986 pour aller vivre avec celle qui est aujourd'hui sa compagne et acceptait que le divorce soit prononcé à ses torts. Les mesures financières étaient arrêtées compte tenu du fait que les ressources de monsieur X... et de madame Y..., constituées de leurs retraites, étaient respectivement de 19.100 francs et 4.400 fi-ancs par mois, que le bien commun était évalué à la somme de 550.000 francs. Madame Y... a relevé appel de cette décision. Elle demande la réformation du jugement en ce qu'il â fixé la rente mensuelle viagère due par monsieur X... à titre de prestation compensatoire à la somme indexée de 4.500 francs, la fixation de ladite rente à la somme de 6.000 francs par mois, avec indexation, en application de l'article 276-1 alinéa 2 du code civil,

la condamnation de monsieur X... au paiement de la somme de 20.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ladite somme s'ajoutant à celle fixée par le premier juge, et la condamnation de monsieur X... aux dépens. Elle déclare qu'elle est âgée de 68 ans, que le mariage a duré 45 ans, qu'elle a cessé de travailler pendant 19 ans lors du mariage pour s'occuper de l'éducation de ses deux enfants, qu'après le départ de monsieur X... du domicile conjugal en 1983, elle n'a pu retrouver une situation qu'à mi-temps dans une agence immobilière, que sa retraite s'élève à un montant moyen net mensuel de 5.871,50 francs, que monsieur X... lui a versé pour l'année 1999 -2- 72.240 francs, soit 6.020 francs par mois, à titre de pension alimentaire, que ses charges s'élèvent à la somme de 5.046 francs par mois, qu'elle contribue à l'entretien de sa mère qui a été placée en long séjour hospitalier à concurrence de 1.350 francs- par trimestre, qu'elle doit faire chaque année une cure qui lui occasionne 5.000 francs de frais de voyage et d'hébergement, qu'elle a pendant 9 années supporté seule le remboursement du prêt concernant le bien immobilier commun, qu'elle vit seule aujourd'hui. Elle ajoute que monsieur X... partage les charges de la vie courante avec sa concubine, qu'il a perçu pour l'année 1999 un montant de 232.340 francs au titre de ses retraites, soit un montant moyen mensuel net de 19.361,66 francs, qu'il n'a pas justifié des ressources de sa compagne. Dans ses dernières conclusions prises après la loi du 30 juin 2000, madame Y... reprend principalement ses demandes initiales de versement d'une rente viagère de 6.000 francs et d'abandon des droits par monsieur X... sur l'immeuble de GRILLON SUR MONTCIENT ; subsidiairement, madame Y... demande que la prestation compensatoire soit constituée par l'attribution des droits détenus par monsieur X... sur le bien commun de GRILLON SUR MONTCIENT, et par le versement d'un capital de 600.000 francs net

d'impôts, payable par mensualités de 6.000 francs minimum. Monsieur X... a formé un appel incident tendant à la réduction de la rente mensuelle allouée à madame Y... à titre de prestation compensatoire à la somme de 3.500 francs par mois, avec indexation, due durant la vie du débiteur, et à la condamnation de madame Y... aux entiers dépens. Il déclare que madame Y... se trouvera propriétaire du pavillon qu'elle occupe d'une valeur minimale de 600.000 francs par le biais de l'abandon de sa part sur le bien commun, que sa retraite s'élève à la somme de 5.500 francs par mois, que ses charges incompressibles sont de 2.000 francs, qu'elle a perçu pendant les 17 années de séparation une contribution aux charges du mariage, ce qui lui a permis de constituer de solides économies, qu'elle a pu se constituer une assurance vie. Il ajoute qu'il perçoit 19.212 francs par mois au titre de ses retraites, qu'il assume 10.887 francs de charges personnelles par mois, outre 1.545 francs de charges partagées avec sa compagne. Dans ses dernières écritures, monsieur X..., au visa de la loi du 30 juin 2000, soutient que la demande de rente viagère est irrecevable, madame X... n'établissant pas que son âge ou son état de santé ne lui permettent pas de subvenir à ses besoins, il demande que soit déclarée satisfactoire son offre à titre de prestation compensatoire, outre l'abandon des droits qu'il détient sur le bien commun situé à GAILLON SUR MONTCIENT, de versement d'un capital de 250.000 francs payable en huit annuités sous forme de versements mensuels indexés. -3- 5 SUR CE, LA COUR SUR LA PRESTATION COMPENSATOIRE Considérant que les parties ne remettent pas en cause les dispositions du jugement du 26 mai 1998 qui a constaté que la rupture du lien conjugal créerait une disparité au détriment de madame X... et lui a alloué une prestation compensatoire sous forme d'un capital consistant en l'abandon des droits détenus par monsieur X... sur le bien commun sis 47 Chemin du Four aux Prêtres -

78250 à GAILLON SUR MONTCIENT ; Que l'appel de madame Y... tend à obtenir l'augmentation de la rente viagère fixée par le premier juge ; Que monsieur X... conteste le principe de l'allocation de cette rente viagère pour deux motifs, le premier tenant à la nouvelle rédaction de l'article 274 du code civil prévoyant que la prestation compensatoire prend la forme d'un capital, il soutient que l'appelante ne peut demander à la fois une prestation compensatoire sous forme de rente viagère, et l'abandon des droits de son mari sur le bien immobilier commun; Considérant que cette interprétation des dispositions de la loi du 30 juin 2000, ne saurait être retenue, car elle aurait pour conséquence, contrairement au voeu du législateur et à la finalité de la loi, d'aggraver la condition du bénéficiaire de la prestation compensatoire ; Que le deuxième motif invoqué par monsieur X... pour s'opposer au paiement d'une rente viagère complémentaire, est tiré des dispositions de l'article 276 du code civil prévoyant que la prestation compensatoire ne peut être fixée, qu'à titre exceptionnel sous la forme d'une rente viagère "en raison de l'âge ou de l'état de santé, du créancier ne lui permettant pas de subvenir à ses besoins" ; Qu'il convient pour apprécier le bien fondé de cette argumentation, d'examiner la situation de madame Z..., que celle-ci est âgée de 69 ans ; Qu'ayant interrompu ses activités professionnelles pendant 19 années pour s'occuper de l'éducation de ses enfants, elle n'a pu retrouver qu'une activité à mi-temps ; Que sa retraite très modique ne s'élève qu'à la somme de 5.871 francs mensuels ; Que son état de santé précaire nécessite une cure thermale annuelle, dont les frais ne sont pas couverts intégralement par la Sécurité Sociale ; Qu'elle bénéficie de la jouissance gratuite du domicile conjugal et justifie de charges incompressibles mensuelles de l'ordre de 4.500 francs (y compris une pension d'ascendant due pour sa mère) ; -4- Que dans ces conditions, madame Y... ne peut

subvenir seule à ses besoins, qu'il convient de lui allouer une prestation compensatoire complémentaire sous la forme d'une rente viagère ; Considérant que pour en déterminer le montant, il convient d'examiner la situation de monsieur X... ; Que celui-ci âgé de 69 ans, perçoit en tant qu'ingénieur à l'Aérospatiale, des pensions de retraite dont le montant cumulé net mensuel s'élève à 19.212 francs ; Qu'il vit avec madame A..., elle-même travaillant à EADS l'aérospatiale pour un salaire mensuel de 17.000 francs, qu'il partage avec elle les charges de la vie quotidienne dont il fixe le montant à 6.270 francs, étant observé qu'il doit bénéficier d'un hébergement gracieux, aucune dépense de loyer ou de prêt immobilier ne figurant dans ses charges ; Qu'en considération de l'ensemble de ces éléments, y compris la durée du mariage célébré en 1954, il convient d'allouer à madame Y... pour compenser la disparité que la rupture du mariage crée à son détriment - d'une part, le capital consistant en l'abandon des droits détenus par monsieur X... sur le bien commun sis 47 Chemin du Four aux Prêtres - 78250 à GAILLON SUR MONTCIENT, - d'autre part, une rente viagère due la vie durant du débiteur d'un montant de 4.500 francs indexée dans les conditions prévues au dispositif de la présente décision, confirmant en tous points la décision du premier juge ; SUR L'ARTICLE 700 DU N.C.P.C. Considérant qu'il serait contraire à l'équité de laisser à la charge de madame Y... les frais non compris dans les dépens dont il convient de fixer le montant à 5.000 francs ; PAR CES MOTIFS, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, après débats en chambre du conseil, CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 26 mai 1998 du juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES, -5- i

o CONDAMNE monsieur X... au paiement à madame Y... d'une somme de 5.000 francs (762,25 euros) sur le fondement de l'article 700 du

nouveau code de procédure civile et aux dépens, lesquels seront recouvrés par la SCP LEFEVRE et TARDY, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-7503
Date de la décision : 23/11/2000

Analyses

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Règles spécifiques au divorce - Prestation compensatoire - Attribution - Forme - Cumul d'un capital et d'un rente - Condition - /

Les dispositions de la loi 2000-596 du 30 juin 2000, relative à la prestation compensatoire en matière de divorce, ne peuvent être interprétées, contrairement au voeu du législateur et à la finalité de cette loi, dans un sens susceptible d'aggraver la condition du bénéficiaire de la prestation compensa- toire. Il s'ensuit que, si l'article 274 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 30 juin 2000, énonce que la prestation compensatoire prend la forme d'un capital, il n'exclut pas que le versement de celle-ci puisse prendre tout à la fois la forme d'un capital, tel un abandon des droits d'un époux au pro- fit de l'autre sur un bien immobilier commun, et la forme d'une rente viagère complé- mre, sous réserve des dispositions nouvelles de l'article 276 du Code civil. Il résulte des dispositions de ce dernier article, tel qu'issu de la loi 2000-596 du 30 juin 2000, que la prestation compensatoire ne peut être fixée sous forme de rente viagère qu'à titre exceptionnel, tel semble être le cas au vu des circonstances de l'espèce


Références :

Article 274 et 276 du Code civil

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-11-23;1998.7503 ?
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