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21/11/2000 | FRANCE | N°1998-23028

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21 novembre 2000, 1998-23028


FAITS, PROCÉDURE, DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES Statuant sur l'appel régulièrement formé par Monsieur Antoine X..., d'un jugement du conseil de prud'hommes de Cergy Pontoise, section encadrement, en date du 9 juillet 1998, dans un litige l'opposant à la société SONAUTO , et qui, sur la demande de Monsieur Antoine X... en " paiement d' indemnité de licenciement , indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ,réintégration, indemnité de préavis et autres " a : Débouté Monsieur Antoine X... de ses demandes ; Pour l'exposé des faits la Cour renvoi au jugement. ConsidÃ

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FAITS, PROCÉDURE, DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES Statuant sur l'appel régulièrement formé par Monsieur Antoine X..., d'un jugement du conseil de prud'hommes de Cergy Pontoise, section encadrement, en date du 9 juillet 1998, dans un litige l'opposant à la société SONAUTO , et qui, sur la demande de Monsieur Antoine X... en " paiement d' indemnité de licenciement , indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ,réintégration, indemnité de préavis et autres " a : Débouté Monsieur Antoine X... de ses demandes ; Pour l'exposé des faits la Cour renvoi au jugement. Considérant que Monsieur Antoine X... par conclusions écrites déposées et visées par le greffier à l'audience, conclut : à l'infirmation du jugement, à la nullité du plan social faute de recherche de reclassement dans le groupe, à la nullité du licenciement, à sa réintégration, avec paiement des salaires de 58 494,50 francs par mois jusqu'au jour de sa réintégration, subsidiairement au paiement de : 1 403 868 francs d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 87 753 francs de complément d'indemnité de préavis, et 8 775,30 francs d'indemnité de congés payés sur préavis, 24 968,75 francs de complément d'indemnité de licenciement, 20 000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; Qu'il fait valoir que la société SONAUTO était filiale du groupe Porsche AG et actuellement filiale de Porsche Holding société autrichienne, que dans le cadre du retrait des produits Chrysler une réorganisation intervient, un plan social est mis en oeuvre et il lui est confié en février 1996 un détachement provisoire auprès de la Direction Générale, ses fonctions de Responsable du Contrôle de Gestion étant confié à Monsieur Y... ; Qu'en juin 1996 il est remplacé définitivement dans ses fonctions de responsable du contrôle de gestion par Monsieur Y... par décision du Conseil de Surveillance du 6 juin 1996 et transféré chez Sonauto Financement ; qu'il est

alors sans affectation ; qu'un avenant en ce sens à son contrat de travail lui sera proposé le 21 octobre 1996 qu'il refuse le 24 octobre ; qu'il accepte un avenant au contrat de travail le 28 novembre 1996 comme chef de projet ; que le 24 février 1997 la société SONAUTO lui soumet à nouveau cet avenant dans le cadre d'une proposition de modification du contrat de travail conformément à l'article L 321-1-2 du code du travail qu'il refuse le 6 mars ; qu'il est licencié le 17 avril 1997 pour "refus d'accepter une modification du contrat de travail" ; Que le plan social ne contient aucune mesure précises et concrètes de reclassement ; qu'aucune recherche dans le groupe n'est effectuée alors que Monsieur Y..., qui était contrôleur de gestion dans la société Porche autrichienne avait été muté dans la société SONAUTO ; que ce plan est nul et emporte la nullité du licenciement qui ouvre droit à la réintégration ; Que le motif économique du licenciement n'existe pas ; qu'il n'existe pas de difficultés économiques ni dans la société SONAUTO ni dans le groupe Porsche Holding ou constructeur ; Que le poste de responsable du contrôle de gestion n'a pas été supprimé, que le plan social n'indique pas sa suppression, que ce poste a été retiré à Monsieur Antoine X... pour être confié à Monsieur Y... ; Que la lettre de licenciement n'énonce ; pas la suppression de son emploi, cette lettre est donc dépourvue de motif ; Que la lettre de la société SONAUTO du 24 février 1997 constitue une remise en cause de l'avenant précédemment signé , le refus express de Monsieur Antoine X... ne laisse rien subsister de l'avenant antérieur qui avait été souscrit en violation de l' article l 321-1-1 du code du travail faute de consultation du comité d'entreprise ; Considérant que la société SONAUTO par conclusions écrites déposées et visées par le greffier à l'audience conclut : à la confirmation du jugement, au paiement de 15 000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de

procédure civile ; Qu'elle fait valoir que Monsieur Antoine X... connaissait parfaitement de par ses fonctions le contenu et les raisons du plan social ; que le comité de direction n'a pas décidé de remplacer Monsieur Antoine X... par Monsieur Y... en juin 1996 dans les fonctions de responsable de contrôle de gestion ; Que la perte de Chrysler a causé des difficultés économiques évidentes, que le poste de responsable de contrôle de gestion a été confié à Monsieur Y... qui a été nommé par l'actionnaire majoritaire Porsche Holding , société autrichienne, et qui est devenu par la suite Directeur Général et membre du directoire ; Que la lettre de licenciement est régulièrement motivée par les difficultés économiques et le refus de Monsieur Antoine X... d'accepter une modifica- tion du contrat de travail ; Que la société SONAUTO et Porsche AG constructeur allemand ne constituent pas un groupe de société ; que le plan social contient des propositions concrètes et sérieuses de reclassement qui ont éviter des licenciements ; Que pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la Cour, conformément aux articles 455 et 954 du nouveau code de procédure civile, renvoie aux conclusions qu'elles ont déposées et soutenues à l'audience ainsi qu'à leurs prétentions orales telles qu'elles sont rappelées ci-dessus ;

SUR QUOI LA COUR Sur la validité du Plan social : Considérant que la société Porsche Holding autrichienne contrôle la société SONAUTO à 100% et la société Porsche SA allemande, que toutefois ces deux sociétés n'exercent pas dans le même secteur d'activité, la société SONAUTO étant distributeur automobile et Porsche SA constructeur automobile, l'une dans le secteur commercial et l'autre dans le secteur industriel ; Considérant que le plan social mis en place à compter du 21 novembre 1996 contenait des mesures concrètes, précises et de nature à éviter des licenciements et à favoriser un reclassement rapide des salariés concernés par les suppressions de

poste envisagées, que le plan énonce et énumère les possibilités de reclassement dans le groupe notamment avec la société mère autrichienne et les filiales françaises de la société SONAUTO, que d'ailleurs ces propositions ont conduit au reclassement effectif de 35 personnes ; que cependant le reclassement dans la société de construction automobile allemande n'avait pas à être proposée s'agissant d'un autre secteur d'activité ;

Que c'est en vain que Monsieur Antoine X... sollicite de dire le plan social nul et en conséquence son licenciement nul, qu'il doit être débouté de sa demande de réintégration ; Sur le licenciement : Considérant que, alors qu'un plan social était soumis au comité d'entreprise dès le premier trimestre 1996 pour tenir compte de la nécessité de supprimer des emplois à la suite du retrait de la distribution des véhicules Chrysler , entraînant au moins 56 licenciement après 103 transferts de salariés chez Chrysler France repreneur de l'activité distribution de la marque, la société négociait avec Monsieur Antoine X... un avenant à son contrat de travail pour obtenir son affectation dans une filiale, la société SONAUTO Financement, par modification de son contrat de travail tant dans la fonction que dans l'affectation à une nouvelle société ; que cet avenant a été conclut finalement le 22 novembre 1996 après qu'un projet ait échoué en octobre 1996 ; Que les dispositions de l'article L 321-1-2 du code du travail devant être mise en oeuvre, en application de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993, la société SONAUTO a notifié le 24 février 1997 à Monsieur Antoine X... la même proposition contractuelle de modification du contrat de travail dans le cadre de ces dispositions qui avaient été omises jusque là ; que celui-ci a refusé expressément cette modification le 6 mars 1997 ; Considérant que la lettre du 24 février 1997 constitue non une offre de reclassement en vue d'éviter un licenciement résultant de la

suppression d'un poste mais une propositions de modification du contrat de travail pour une cause économique de restructuration consécutive à la perte du contrat Chrysler ; Considérant que dans le cadre de la réorganisation de l'entreprise consécutive à la perte de la marque Chrysler, conduisant à des suppressions d'emploi, la société SONAUTO ne pouvait poursuivre par la négociation individuelle de modification de contrat de travail par affectation de Monsieur Antoine X... dans une filiale sans respecter les dispositions de l'article L 321-1-1 du code du travail et hors du plan social ; Que la modification du contrat de travail de Monsieur Antoine X... en date de novembre 1996 faite en violation de ces dispositions est donc nulle, que seule à une valeur juridique la propositions faite le 24 février et refusé le 6 mars 1997 ; Considérant que par suite de ce refus la société pouvait envisager de procéder au licenciement de ce salarié après avoir rechercher et épuisé toutes les propositions de reclassement que cette proposition de modification n'épuise pas ; Considérant que le licenciement de Monsieur Antoine X... est intervenu par lettre du 16 avril 1997 énonçant : "Nous vous confirmons que le motif économique de votre licenciement est consécutif à votre refus d'accepter notre avenant à votre contrat de travail" suivi de l'indication que la cause économique résidait dans la réorganisation de l'entreprise ; Que l'indication d'une suppression de poste ne figure pas dans cette lettre ; Que le licenciement uniquement motivé par le refus d'une modification de son contrat de travail par Monsieur Antoine X... ne peut avoir de cause réelle et sérieuse ; Qu'au surplus le poste de responsable du contrôle de gestion, emploi occupé avant toute modification régulière du contrat de travail, par Monsieur Antoine X..., existe toujours et est confié à Monsieur Y... ce que la société reconnaît dans ses conclusions et dans une lettre du 24 juin 1997 par laquelle elle

indique à Monsieur Antoine X... que "les missions de responsable du contrôle de gestion sont toujours dévolues à Monsieur Y..., nonobstant sa nomination au Poste de Directeur Général." ; Que ce cumul de fonction est compatible avec ce mandat social et il n'est pas soutenu que son contrat de travail aurait cessé de produire effet ; qu'ainsi le poste de Monsieur Antoine X... n'a pas été supprimé ce qui prive de cause réelle et sérieuse son licenciement ; Considérant qu'avant l'augmentation de rémunération résultant de l'avenant nul de novembre 1996 Monsieur Antoine X... percevait un salaire annuel de 563 550 francs ; que sur le fondement de l'article L 122-14-4 du code du travail il a droit à au moins six mois de salaire, qu'il aurait pu conserver un emploi rémunérateur chez la société SONAUTO puisque son emploi n'a pas été supprimé , qu'il était âgé de plus de cinquante ans rendant la reprise d'un emploi plus difficile comme l'atteste les réponses à ses lettres de candidature ; que la cour a des éléments suffisants pour fixer à 600 000 francs ;

Considérant que la différence entre le préavis perçu de 260 100 francs et la valeur de six mois de salaire correspondant à son dernier traitement annuel représente 21 675 francs qui lui est du à titre de complément d'indemnité de préavis majoré de 2 167 francs d'indemnité de congés payés sur complément de préavis ; Considérant que ce rappel de salaire a une incidence sur l'indemnité conventionnelle de licenciement qui aurait du être de 214 824 francs et non de 204 435 francs payés ; qu'il lui est du le complément de 10 389 francs ; Considérant que l'équité commande de mettre à la charge de la société SONAUTO une somme de 12 000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de Monsieur Antoine X... au titre de l'instance d'appel ; Que la société SONAUTO doit être débouté de sa demande en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS : La COUR, STATUANT publiquement par arrêt contradictoire, INFIRME le jugement et statuant à nouveau : CONDAMNE la société SONAUTO à payer à Monsieur Antoine X... : 600 000 francs (SIX CENT MILLE FRANCS) d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 21 675 francs (VINGT ET UN MILLE SIX CENT SOIXANTE QUINZE FRANCS) de complément d'indemnité de préavis, 2 167 francs (DEUX MILLE CENT SOIXANTE SEPT FRANCS) de complément d'indemnité de congés payés sur préavis, 10 389 francs (DIX MILLE TROIS CENT QUATRE VINGT NEUF FRANCS) de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement, DÉBOUTE Monsieur Antoine X... de ses autres demandes, DÉBOUTE la société SONAUTO de sa demande en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, CONDAMNE la société SONAUTO à payer à Monsieur Antoine X... la somme de 12.000.francs (DOUZE MILLE FRANCS) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile pour les frais en appel ; CONDAMNE la société SONAUTO aux dépens. Et ont signé le présent arrêt Monsieur BALLOUHEY, Président, et Madame Z..., Greffier. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-23028
Date de la décision : 21/11/2000

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Défaut

Un entreprise dont la réorganisation conduit à des pertes d'emplois ne peut opérer des changements d'affectation de salariés par la négociation individuelle de modifications des contrats de travail, sans respecter les dispositions de l'article L. 321-1-1 du Code du travail et hors du plan social. Il s'ensuit que c'est à juste titre qu'une entreprise, après avoir épuisé toutes les propositions possibles de reclassement, recourt à la procédure de licenciement pour cause économique à l'égard d'un salarié qui a refusé d'accepter un avenant à son contrat de travail. En revanche, dès lors que la suppression du poste de l'intéressé ne figure pas aux motifs de la lettre de licenciement pour motif économique et qu'au surplus il est établi que le poste correspondant a été dévolu à un autre, un tel licenciement, uniquement motivé par le refus d'une modification du contrat de travail, se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse


Références :

Article L. 321-1-1 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-11-21;1998.23028 ?
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