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22/06/2000 | FRANCE | N°1998-1326

France | France, Cour d'appel de Versailles, 22 juin 2000, 1998-1326


FAITS ET PROCEDURE : La société FISHER a confié à la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL (ci-après désignée société KUHNE et NAGEL) le transport, depuis la gare de VALENTON jusqu'aux établissements DARTY à MARSEILLE, de soixante dix sept colis contenant des matériels "HI-FI" en provenance D'EXTREME-ORIENT. La société KUHNE et NAGEL s'est substituée, pour l'acheminement final de la marchandise, la société TRANSPORTS EXPRESS DE PROVENCE (ci-après désignée société TEP) dans les entrepôts de laquelle les colis ont été volés. Les circonstances du vol n'ayant pu être c

lairement établies, malgré la désignation d'un expert en référé et aucun acc...

FAITS ET PROCEDURE : La société FISHER a confié à la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL (ci-après désignée société KUHNE et NAGEL) le transport, depuis la gare de VALENTON jusqu'aux établissements DARTY à MARSEILLE, de soixante dix sept colis contenant des matériels "HI-FI" en provenance D'EXTREME-ORIENT. La société KUHNE et NAGEL s'est substituée, pour l'acheminement final de la marchandise, la société TRANSPORTS EXPRESS DE PROVENCE (ci-après désignée société TEP) dans les entrepôts de laquelle les colis ont été volés. Les circonstances du vol n'ayant pu être clairement établies, malgré la désignation d'un expert en référé et aucun accord amiable n'ayant pu être trouvé, la société FISHER, à laquelle s'est par la suite substituée la compagnie d'assurance la CONCORDE, subrogée dans les droits de ladite société pour l'avoir indemnisée de ses préjudices, a fait assigner les sociétés KUHNE et NAGEL, et TEP pour obtenir paiement de la somme de 319.110,60 francs en principal, représentant la valeur des matériels dérobés. La société KUHNE et NAGEL s'est opposée aux prétentions adverses et elle a assigné à toutes fins en garantie la société TEP et la compagnie HELVETIA, assureur de cette dernière. Par jugement en date du 05 novembre 1991, le Tribunal de Commerce de CRETEIL a, entre autres dispositions, mis hors de cause la société KUHNE et NAGEL et la compagnie HELVETIA et a condamné la société TEP à payer à la compagnie LA CONCORDE la somme de 319.110,60 francs, avec intérêt au taux légal à compter du 21 août 1989, ainsi qu'une indemnité de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Statuant sur l'appel formé par la compagnie LA CONCORDE à l'encontre de cette décision et dirigée à l'encontre de la seule société KUHNE et NAGEL, prise en sa qualité de commissionnaire de transport, laquelle a, ultérieurement, formé un appel provoqué à l'encontre de la société TEP, entre temps placée en liquidation judiciaire et représentée par son liquidateur Maître

ARNAUD, ainsi qu'à l'encontre de la compagnie HELVETIA, la Cour d'Appel de PARIS a, par arrêt en date du 13 septembre 1995, déclaré l'appel principal irrecevable ainsi que par voie de conséquence les appels provoqués venus se greffer sur cet appel principal. Statuant sur le pourvoi formé par la compagnie la CONCORDE, la Chambre Commerciale, Financière et Economique de la Cour de Cassation a, par arrêt du 06 janvier 1998, cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de PARIS, en relevant, après avoir visé l'article 553 du nouveau code de procédure civile et les articles 99 et 103 du Code du Commerce, que : "Pour déclarer irrecevable l'appel de la CONCORDE dirigé contre la société KUHNE et NAGEL , faute d'avoir intimé en même temps la société TEP, l'arrêt énonce que, si la responsabilité du commissionnaire de transport était retenue, elle tiendrait non à sa propre faute, mais à la garantie du transporteur auquel il a fait appel, et qu'il en résulte que ce lien indissociable constitue l'indivisibilité prévue par l'article 553 du nouveau code de procédure civile ; (Que), en statuant ainsi, alors que si le commissionnaire est tenu envers son commettant en raison du fait de ses substitués, le commettant peut ne demander réparation qu'au commissionnaire de transport sur le fondement de l'article 99 du Code de Commerce, sans avoir à mettre en cause le transporteur en vertu de l'article 103 du même code, aucune indivisibilité n'existant entre les deux actions, la Cour d'Appel a violé les textes susvisés". " Devant la Cour de ce siège, désignée comme Cour de Renvoi, la société Compagnie GENERALI FRANCE, venue entre temps aux droits de la compagnie LA CONCORDE, demande qu'il soit tiré toutes conséquences de droit de l'arrêt rendu par la Cour de Cassation et que son appel soit dit recevable dès lors que la responsabilité du commissionnaire de transport résultant de l'article 99 du Code de Commerce peut parfaitement être appréciée même si le

voiturier n'est pas dans la cause et qu'il est parfaitement artificiel, comme l'a rappelé la Cour de Cassation, de prétendre à une indivisibilité entre l'action dirigée contre le commissionnaire et celle qui aurait pu être poursuivie contre le transporteur substitué en raison de son fait personnel. Sur le fond, elle rappelle que le commissionnaire de transport est garant de la bonne exécution du contrat de transport et elle estime que la société KUHNE et NAGEL ne saurait valablement lui opposer la limitation instaurée par le contrat type messagerie à raison de 150 francs par kilos avec un maximum de 4.500 francs par colis, soit 61.350 francs en l'espèce, et ce, en raison des circonstances du vol, telles que reconstituées par l'expert BARRAL désigné en référé, qui démontrent amplement, selon elle, l'incurie et même la totale mauvaise foi de la société TEP qui n'a pas hésité à faire de fausse déclaration à la compagnie d'assurance HELVETIA. Elle demande, en conséquence, que la société KUHNE et NAGEL, prise en sa qualité de commissionnaire de transport, soit condamnée à lui payer la somme de 319.110,60 francs en principal, correspondant à l'indemnisation versée à la société FISHER en raison du préjudice subi, et ce, avec intérêt au taux légal à compter du 21 août 1989, ainsi qu'une indemnité de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. " La compagnie HELVETIA fait valoir en réplique que, dans sa déclaration de saisine, la société GENERALI FRANCE l'a intimée en qualité "d'assureur de la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL" alors qu'il est constant qu'elle était l'assureur de la société TEP, actuellement en liquidation judiciaire. Elle déduit de là que, ayant été intimée sous une qualité qui n'était pas la sienne, elle est fondée à se prévaloir d'une fin de non recevoir qui ne peut plus être régularisée dès lors que le délai de saisine de quatre mois prévu par l'article 1034 du nouveau code de procédure civile est épuisé et que

la Cour de renvoi n'a pas été valablement saisie de l'appel principal dirigé à son encontre, ce que la compagnie GENERALI a, au demeurant admis puisqu'elle s'est désistée du recours exercé à son encontre. Elle en tire pour deuxième conséquence que l'appel provoqué formé ultérieurement tant à son encontre qu'à l'encontre de la société TEP, représentée par son liquidateur, par la société KUHNE et NAGEL alors qu'elle-même n'avait pas été mise en cause valablement, est tardif et qu'une demande ne peut désormais prospérer contre elle, prise en sa qualité d'assureur de la société TEP. Elle sollicite donc à titre principal sa mise hors de cause. Subsidiairement sur le fond et comme l'a relevé le tribunal, elle soutient que, eu égard aux circonstances de l'espèce, telles que rétablies par l'expert, sa garantie n'a pas à s'appliquer dans la mesure où les marchandises ont été transbordées dans un véhicule qu'elle n'assurait pas et pour lequel la société TEP a tenté abusivement, le lendemain du vol, d'obtenir une extension de garantie. Enfin, elle demande que la compagnie HELVETIA soit condamnée à lui payer une indemnité de 20.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et la société KUHNE et NAGEL une indemnité au même titre de 15.000 francs. " La société KUHNE et NAGEL estime tout d'abord que, s'il était fait droit à l'exception d'irrecevabilité des appels provoqués qu'elle a dirigés tant contre la compagnie HELVETIA que contre la société TEP, en liquidation, la compagnie GENERALI FRANCE ne pourrait être que déboutée de l'appel principal dirigée à son encontre, dès lors que, par son fait (saisine irrégulière de la Cour), elle l'a privé de son recours contre l'assureur de TEP, et condamnée à lui payer une indemnité de 20.000 francs en couverture des frais par elle exposés. Subsidiairement, elle soutient qu'aucun élément ne permet en la cause d'imputer une faute lourde à son substitué, la société TEP, et en déduit qu'elle est fondée à se prévaloir de la limitation de

responsabilité instaurée par le contrat type qui s'établit en l'espèce à 61.350 francs, étant précisé que la compagnie LA CONCORDE, devenue GENERALI FRANCE, ne couvrant que 50 % du risque, ladite compagnie ne saurait prétendre à une réparation excédant 30.675 francs, soit la moitié du plafond. Par ailleurs, elle fait valoir que la société TEP, qu'elle s'est substituée, étant incontestablement responsable du sinistre, elle est fondée, sous la réserve ci-dessus mentionnée, à se prévaloir de la garantie de la compagnie HELVETIA, assureur de TEP, dont le contrat d'assurance à vocation à s'appliquer, et à l'encontre de laquelle elle a formé un appel provoqué, réclamant en outre à celle-ci une indemnité de 20.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Enfin, il convient de noter que Maître ARNAUD, pris en sa qualité de mandataire liquidateur de la société TEP, bien que régulièrement assigné à sa personne en appel provoqué, n'a pas constitué avoué. MOTIFS DE LA DECISION " Sur l'étendue de la saisine de la Cour :

Considérant que, dans sa déclaration de saisine de la présente Cour de renvoi, la compagnie LA CONCORDE, devenue GENERALI FRANCE, a intimé d'une part la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL et d'autre part, la compagnie HELVETIA "prise en sa qualité d'assureur de la société KUHNE et NAGEL" ; or, considérant qu'il est acquis que la compagnie HELVETIA n'est nullement l'assureur de la société KUHNE et NAGEL, mais celui de la société TEP, étant rappelé que c'est en cette qualité qu'elle a été attraite devant le Tribunal de Commerce de CRETEIL et la Cour d'Appel de PARIS ; qu'il en résulte que la déclaration de saisine ne contient pas les mentions exigées à peine de nullité par l'article 1033 du nouveau code de procédure civile et que, s'agissant d'une nullité de fond affectant la validité même de l'acte qui n'a pas été régularisée dans le délai de quatre mois de la notification de l'arrêt de cassation, la Cour n'a pas été valablement

saisie du recours exercé par la compagnie GENERALI FRANCE à l'encontre de la compagnie HELVETIA, prise en sa qualité d'assureur de la société TEP, et que ce recours, dont la compagnie GENERALI FRANCE a proposé de se désister, doit être déclaré irrecevable ; considérant que la compagnie HELVETIA en tire par ailleurs pour conséquence que l'appel provoqué, dirigé à son encontre et à l'encontre de Maître ARNAUD, liquidateur de TEP, par la société KUHNE et NAGEL, doit être déclaré irrecevable dès lors que cet appel est tardif et qu'il vient se greffer sur un appel principal qui doit être tenu désormais pour inexistant ; mais considérant que cette argumentation ne saurait être suivie ; considérant en effet que, si la Cour n'a pas été régulièrement saisie de l'appel principal dirigé contre la compagnie HELVETIA et que la compagnie GENERALI FRANCE ne peut plus, en raison de l'irrecevabilité de cet appel, émettre la moindre prétention à l'égard d'HELVETIA qui est fondée à lui opposer sa mise hors de cause, décidée par le premier juge, il n'en reste pas moins que la société KUHNE et NAGEL, qui elle a été régulièrement intimée à l'acte de saisine, est recevable à former un appel provoqué contre la société TEP, représentée par son liquidateur, et par voie de conséquence, contre l'assureur de celle-ci, comme elle aurait été fondée à le faire dans l'hypothèse ou l'appelant principal, la compagnie GENERALI FRANCE, n'aurait dirigé initialement son recours qu'à l'encontre de ladite société KUHNE et NAGEL ; qu'il s'ensuit que l'appel provoqué formé par la société KUHNE et NAGEL dans les formes et conditions prévues à l'article 550 du nouveau code de procédure civile, doit être déclaré recevable ; " Sur la responsabilité encourue par la société KUHNE et NAGEL : Considérant que la société GENERALI FRANCE recherche la responsabilité de la société KUHNE et NAGEL, prise en sa qualité de commissionnaire de transport, du fait de son substitué, la société TEP ; que la société KUHNE et NAGEL ne

conteste pas, ensuite de l'arrêt de cassation, être tenue envers son donneur d'ordre, aux droits duquel se trouve la société GENERALI FRANCE, sur le fondement des articles 98, 99 et 103 du Code de Commerce ; qu'elle entend cependant se prévaloir de la limitation de responsabilité instaurée par l'article 14 du contrat type Messagerie applicable au transport en cause dès lors que les circonstances du vol n'ont pas été clairement élucidées ; que la société GENERALI FRANCE soutient au contraire qu'en raison de la faute lourde commise par la société TEP, ainsi qu'il résulte selon elle des investigations conduites par l'expert BARRAL, aucune limitation de responsabilité ne peut lui être valablement opposée ; qu'il appartient donc à la Cour de rechercher dans quelles circonstances a pu être commis le vol ; considérant qu'il résulte des pièces des débats que, le 20 octobre 1988, la société TEP, représentée par son directeur Monsieur X..., a déposé plainte auprès des services de police de MARSEILLE pour vol de soixante dix sept colis commis la veille dans ses entrepôts entre 12 et 14 heures ; que, selon les termes de la plainte, un ou plusieurs inconnus ont cassé le cadenas d'une porte latérale de la semi- remorque contenant le matériel HI-FI qui devait être livré chez DARTY à MARSEILLE et l'ont transbordé dans une camionnette MERCEDES 385 DZM 75, véhicule qui se trouvait dans la Cour de la société TEP et qui a été également volé ; considérant que l'expert BARRAL qui a reçu mission notamment de déterminer les circonstances du vol des marchandises et de faire toutes autres constatations utiles, n'a pu parvenir, malgré des investigations approfondies, à des conclusions permettant de reconstituer avec certitude lesdites circonstances ; qu'en effet, s'il a relevé des incohérences et des inexactitudes dans les différentes déclarations des représentants de la société TEP, il a estimé néanmoins que, même s'il ne pouvait confirmer que la version finale de la société TEP fût bien conforme à la réalité, il ne

disposait cependant pas d'une preuve formelle permettant d'affirmer que le lieu et l'heure du vol ont été différents de ceux avancés par la société TEP (cf : conclusions du rapport) ; qu'il en résulte, dès lors que la matérialité du vol n'est pas discutée et que la partie demanderesse est dans l'incapacité de rapporter la preuve qui lui incombe que le vol a été commis grâce à une complicité ou à des négligences graves du personnel de la société TEP ou qu'il résulterait d'un défaut de surveillance pendant la pose de midi de ce personnel qui aurait facilité la commission du délit, s'agissant là de simples hypothèses qui n'ont pu être suffisamment étayées par l'expert, la société KUHNE et NAGEL est fondée à se prévaloir de la limitation de responsabilité instaurée par l'article 14 du contrat type messagerie qui régit automatiquement le transport en cause à défaut de convention écrite y dérogeant ; que le jugement déféré, qui a retenu une faute lourde à l'encontre de la société TEP, du seul fait des contradictions et incohérences sus-évoquées, sera donc infirmé de ce chef de même qu'en ce qu'il a exonéré de toute responsabilité la société KUHNE et NAGEL, alors que celle-ci, comme elle l'admet au demeurant, était garante de son substitué et de la bonne exécution du contrat de transport, cette société n'étant cependant tenue, comme il a été dit précédemment, que dans la limite de responsabilité instaurée par le contrat type qui s'établit en la cause à 61.350 francs, soit 409 kg x 150 = 61.350 francs ; considérant toutefois qu'il apparaît des pièces des débats que, comme le soutient la société KUHNE et NAGEL, que celle-ci avait souscrit l'assurance des marchandises transportées auprès de deux compagnies, à savoir la CONCORDE et la compagnie AICA, chacune de ces compagnies couvrant le risque à hauteur de 50 % ; Que, s'il n'est pas contestable que la compagnie la CONCORDE devenue GENERALI FRANCE a indemnisé en totalité la société FISHER, il n'en reste pas moins que

la compagnie GENERALI FRANCE n'a pas qualité pour poursuivre le paiement de la totalité de l'indemnité et qu'elle ne justifie pas d'un mandat ou d'un droit à agir pour ce faire, la lettre produite en cours de délibéré selon laquelle la police "Fisher" aurait été, par suite d'une dissolution AICA, reprise par la CONCORDE, ne pouvant être prise en considération d'autant que cet élément, à supposer même qu'il soit suffisant à établir les droits de la société GENERALI FRANCE, aurait pu être aisément produit avant la clôture des débats, pour permettre un débat contradictoire, et ce aussitôt que la société KUHNE et NAGEL s'est prévalue de ce moyen nouveau ; qu'elle était fondée à faire valoir même dans ces dernières écritures ; Que la société KUHNE et NAGEL sera, en conséquence, condamnée à indemniser la compagnie GENERALI FRANCE à due concurrence de la moitié de l'indemnité plafonnée soit à hauteur de 30.675 francs, outre les intérêts de droit ayant couru sur cette somme à compter du 21 août 1989, date de l'assignation introductive d'instance valant mise en demeure ; " Sur le recours en garantie exercé par la société KUHNE et NAGEL à l'encontre de la compagnie HELVETIA : Considérant que la société KUHNE et NAGEL entend obtenir, dans le cadre de son appel provoqué, la garantie de la compagnie HELVETIA, prise en sa qualité d'assureur de la société TEP, directement responsable du dommage ; considérant que la société HELVETIA lui oppose que, n'ayant pas la qualité de tiers lésé au sens de l'article L 124-3 du Code des assurances, elle ne bénéficie pas de l'action directe contre l'assureur instaurée par ce texte et que sa demande doit être déclarée irrecevable, faute pour elle d'avoir déclaré sa créance ; mais considérant qu'une partie assignée en justice est en droit d'en appeler une autre en garantie des condamnations qui pourrait être prononcées contre elle et qu'une telle demande en garantie étant distincte de l'action directe instaurée par le Code des Assurances,

la partie qui l'exerce n'a pas à justifier d'un paiement préalable et donc d'une déclaration de créance dans le cas d'une procédure collective ouverte contre le tiers responsable, et ce, d'autant que la compagnie GENERALI FRANCE a régulièrement déclaré sa créance au passif de la société TEP et que, par l'effet du présent arrêt la société KUHNE et NAGEL se trouve automatiquement subrogée dans les droits de GENERALI FRANCE à l'encontre de la société TEP et de son liquidateur ; que le moyen d'irrecevabilité invoqué sera dès lors écarté ; considérant que la société HELVETIA soutient, par ailleurs, que, eu égard aux circonstances du vol, sa garantie n'a pas vocation à s'appliquer ; qu'elle en veut notamment pour preuve le fait que les marchandises dérobées ont été transférées dans un fourgon MERCEDES de location qui a permis de perpétrer le forfait et pour lequel, la société TEP a tenté frauduleusement le lendemain du vol d'obtenir une extension de garantie "vol" ; mais considérant qu'il est constant que la police d'assurance HELVETIA couvrait la garantie vol pour les marchandises transportées dans la semi-remorque ; qu'il résulte des déclarations faites aux services de police et à l'expert que les marchandises ont, dans un premier temps, été frauduleusement soustraites dans un véhicule, même si elles ont été par la suite transbordées dans le fourgon MERCEDES de location ; qu'il en résulte que la garantie de la compagnie HELVETIA à vocation à s'appliquer en la cause dès lors que le vol a été commis alors que les marchandises se trouvaient encore dans le véhicule de la société TEP et donc sous la responsabilité directe de cette dernière, étant rappelé que le vol est un délit instantané ; que la société KUHNE et NAGEL, à qui aucune faute personnelle n'est imputée, est dans ces conditions recevable et fondée à réclamer la garantie de la compagnie HELVETIA à due concurrence de la condamnation mise à sa charge ; " Sur les autres demandes : Considérant que l'équité ne commande pas, eu égard aux

circonstances particulières de la cause, qu'il soit fait application en la cause, au profit de l'une ou l'autre des parties, de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; considérant enfin que la société KUHNE et NAGEL, qui succombe pour l'essentiel, supportera les entiers dépens, en ce encore garantie par la compagnie HELVETIA. " PAR CES MOTIFS La Cour statuant publiquement après cassation, par décision réputée contradictoire et en dernier ressort, DIT recevable l'appel principal de la SA GENERALI FRANCE, mais uniquement en ce qu'il est dirigé contre la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL, DIT recevable l'appel provoqué formé par la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL à l'encontre de Maître ARNAUD, ès-qualités de liquidateur de la société TRANSPORTS EXPRESS PROVENCE "TEP", et de la Compagnie HELVETIA, assureur de ladite société, INFIRMANT en toutes ses dispositions le jugement déféré et statuant à nouveau, DIT la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL, prise en sa qualité de commissionnaire de transport, responsable du vol commis dans les locaux de son substitué, la société TRANSPORTS EXPRESS PROVENCE "TEP", DIT la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL fondée à se prévaloir de la limitation de responsabilité instaurée par le contrat type "Messagerie", CONDAMNE, en conséquence, la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL à payer à la SA GENERALI FRANCE, venant aux droits de la Compagnie LA CONCORDE, subrogée dans les droits de la société FISHER, et compte tenu du fait que ladite compagnie ne couvrait que cinquante pour cent du risque, la somme de 30.675 francs avec intérêts de droit à compter du 21 août 1989, date de l'assignation introductive d'instance, CONDAMNE la compagnie HELVETIA, assureur de la société TRANSPORTS EXPRESS PROVENCE "TEP", à relever et garantir la société DES TRANSPORTS KUHNE et NAGEL de cette condamnation, DIT n'y avoir lieu en la cause à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, CONDAMNE la société DES TRANSPORTS KUHNE et

NAGEL, en ce encore garantie par la compagnie HELVETIA, aux entiers dépens et AUTORISE les avoués en cause intéressés à poursuivre directement le recouvrement de la part les concernant, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENT C. DAULTIER

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-1326
Date de la décision : 22/06/2000

Analyses

CASSATION - Juridiction de renvoi - Saisine.

Une déclaration de saisine qui ne contient pas les mentions exigées à peine de nullité par l'article 1033 du NCPC et qui n'a pas été régularisée dans le délai de quatre mois de la notification de l'arrêt de cassation, est nulle, s'agissant d'une nullité de fond affectant la validité même de l'acte. Si un tel appel principal est irrecevable, faute pour la Cour de renvoi de ne pas avoir été valablement saisie du recours de l'appelant contre l'intimé irrégulièrement désigné, il ne saurait en être déduit qu'un appel provoqué à l'encontre, notamment de cet intimé mis hors de cause, doit être déclaré irrecevable. En effet, la nullité évoquée n'affecte pas la validité de l'appel afférent à la mise en cause d'un tiers régulièrement intimé à l'acte de saisine ; il s'ensuit que cette partie, qui a été régulièrement intimée est recevable à former, dans les formes et conditions prévues par l'article 550 du NCPC, un appel provoqué à l'encontre de l'intimé irrégulièrement cité par l'appelant principal

TRANSPORTS TERRESTRES - Marchandises - Commissionnaire de transport - Responsabilité - Responsabilité du fait de son substitué.

En application des articles 98, 99 et 103 du Code de commerce, le commissionnaire de transport est responsable du fait de son substitué envers son donneur d'ordres, notamment en cas de vol des marchandises, et s'il peut invoquer une clause contractuelle limitative de responsabilité, encore faut-il que son substitué n'ait pas commis une faute lourde exclusive de toute limitation de responsabilité. Dès lors que, consécutivement à un vol de marchandises commis dans les locaux du transporteur substitué, l'expertise n'a pas permis de reconstituer les circonstances précises de survenue du sinistre, et faute pour l'assureur, subrogé dans les droits de l'ayant droit de la marchandise, de rapporter la preuve, lui incombant, qu'une faute lourde serait imputable au transporteur substitué, le commissionnaire est fondé à se prévaloir de la clause limitative de responsabilité instaurée par l'article 14 du contrat type Messagerie, applicable au vol de marchandises transportées dont les circonstances n'ont pas été clairement élucidées

APPEL EN GARANTIE - Applications diverses.

Une partie appelée en justice est en droit d'en appeler une autre en garantie des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle.Une telle demande étant distincte de l'action directe contre l'assureur, instaurée par le Code des assurances, la partie qui exerce l'appel en garantie n'a pas à justifier d'un paiement préalable et donc d'une déclaration de créance dans le cas d'une procédure collective ouverte contre le tiers responsable. A fortiori, lorsque l'assureur de la victime d'un sinistre a régulièrement déclaré sa créance dans le cadre de la procédure collective ouverte contre le tiers responsable du sinistre - un transporteur substitué - et que, par l'effet du présent arrêt, le commissionnaire de transport, appelant en garantie, est automatiquement subrogé dans les droits de cet assureur à l'encontre du substitué et de son liquidateur. Il s'ensuit que le moyen d'irrecevabilité tiré d'un défaut de déclaration de créance doit être écarté


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-06-22;1998.1326 ?
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