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16/06/2000 | FRANCE | N°1998-7179

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16 juin 2000, 1998-7179


FAITS ET PROCEDURE En date du 7 juin 1996, Monsieur Robert X... souscrivait deux contrats de vente à domicile portant sur l'acquisition auprès de la société CENTRE DE PROTECTION DU FEU d'une centrale de détection et de dissuasion individuelle de foyer pour un prix de 12.000 francs et d'un transphone de centrale de foyer individuel moyennant paiement d'une somme de 13.000 francs. Monsieur et Madame X... souscrivaient le même jour auprès de la Banque SOFINCO un contrat de crédit d'un montant de 25.000 francs en vue de financer les biens acquis auprès de la société CENTRE DE PROTECTION

DU FEU. Par acte d'huissier en date du 19 décembre 1997, ...

FAITS ET PROCEDURE En date du 7 juin 1996, Monsieur Robert X... souscrivait deux contrats de vente à domicile portant sur l'acquisition auprès de la société CENTRE DE PROTECTION DU FEU d'une centrale de détection et de dissuasion individuelle de foyer pour un prix de 12.000 francs et d'un transphone de centrale de foyer individuel moyennant paiement d'une somme de 13.000 francs. Monsieur et Madame X... souscrivaient le même jour auprès de la Banque SOFINCO un contrat de crédit d'un montant de 25.000 francs en vue de financer les biens acquis auprès de la société CENTRE DE PROTECTION DU FEU. Par acte d'huissier en date du 19 décembre 1997, Monsieur X... assignait la société CENTRE DE PROTECTION DU FEU et la Banque SOFINCO aux fins de voir le tribunal d'instance de MONTMORENCY, par une décision assortie de l'exécution provisoire, constater l'inexécution par le vendeur de ses obligations contractuelles, ce dernier n'ayant pas respecté le délai de livraison de 15 jours stipulé aux contrats de vente, et de prononcer par conséquent la résiliation judiciaire du contrat de vente et l'annulation du contrat de crédit souscrit auprès de la Banque SOFINCO. Il demandait en outre de condamner la société CENTRE DE PROTECTION DU FEU au paiement d'une somme de 3.000 francs versée à titre d'acompte. Devant le premier juge, Monsieur et Madame X... ont réitéré leurs prétentions et ont sollicité le paiement d'une somme de 12.000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, en raison des renvois de l'affaire. La société CENTRE DE PROTECTION DU FEU a conclu au rejet des prétentions adverses aux motifs qu'en ayant livré le 04 juillet 1996, elle avait respecté le délai de livraison, le contrat ne stipulant pas une livraison de 15 jours après la commande mais une expédition à compter du 15ème jour, et que le délai de livraison n'était pas une cause de résiliation du contrat. Elle a sollicité la condamnation de Monsieur X... au paiement d'une somme de 5.000

francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre les dépens. La Banque SOFINCO a fait sienne l'argumentation de la société CENTRE DE PROTECTION DU FEU ; à titre reconventionnel, elle a demandé la condamnation des consorts X... au paiement d'une somme de 25.322,53 francs majorée des intérêts contractuels à compter du 22 novembre 1996, ainsi qu'à celle de 3.000 francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre les dépens. A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où les contrats de vente seraient annulés, elle a sollicité des consorts X... ou de la société C.P.F., au cas où elle aurait reçu le paiement, la restitution du capital prêté ainsi que leur condamnation au paiement d'une somme de 3.322 francs correspondant aux intérêts et pénalités de retard et représentant le préjudice subi par elle en raison de l'annulation du contrat. Après jugement avant-dire-droit en date du 19 mars 1998, invitant les parties à s'expliquer sur le non-respect des articles L.121-23, L.121-25 et L.1311-20 du code de la consommation. Monsieur et Madame X... ont demandé au tribunal de prononcer la nullité des contrats de vente intervenus en raison de l'absence de mentions reproduisant les conditions de renoncement ; ils dénonçaient en outre la violation de l'article L.311-25 du code de la consommation, le prêteur n'ayant pas informé les emprunteurs de l'attribution du crédit dans un délai de 7 jours. Ils ajoutaient que les articles L.121-26 et L.311-23, L.311-27 et L.311-28 du code de la consommation n'avaient pas été respectés dans la mesure où la société C.P.F. avait perçu un acompte de 3.000 francs. Ils précisaient que la première échéance du crédit avait été prélevé avant la livraison des biens achetés. Au vu de ces éléments, ils demandaient de constater la résiliation de plein droit des contrats et sollicitaient la restitution de la somme de 3.000 francs assorties des intérêts au taux légal, outre une somme en vertu de l'article 700 du nouveau code

de procédure civile. La Banque SOFINCO a indiqué avoir débloqué les fonds pour financer les achats à la réception de la demande de financement de la société C.P.F. en date du 07 juin 1997, laquelle certifiait la livraison des biens stipulés aux bons de commande. Estimant ainsi ne pas avoir commis de faute en débloquant les fonds, elle a réitéré ses prétentions à l'égard des parties, et a demandé à être garantie de toutes les condamnations pouvant être prononcées à son encontre et du remboursement d'une somme de 22.000 francs par la société C.P.F. La société C.P.F. a répliqué que les mentions de l'article L.121-25 du code de la consommation figuraient aux contrats de démarchages ; elle a indiqué que Monsieur X... avait attesté du commencement d'exécution du contrat. Le tribunal d'instance de MONTMORENCY, par jugement contradictoire en date du 11 juin 1998, aux motifs notamment que la nullité des contrats de vente à domicile signés par Monsieur X... devait être prononcée en application de l'article L.121-23 du code de la consommation, il convenait d'annuler le contrat de crédit souscrit par Monsieur X... le 07 juin 1996 auprès de la Banque SOFINCO ; que la Banque SOFINCO n'avait commis aucune faute dans le déblocage des fonds, que les époux X... ne contestaient pas ne pas avoir reçu les fonds ou ne rapportaient pas la preuve de les avoir reversés à la société C.P.F. ; que les intérêts et pénalité de retard stipulés au contrat en cas de défaillance des emprunteurs ne pouvaient recevoir application en raison de l'annulation dudit contrat, a rendu la décision suivante :

- prononcé la nullité des contrats de démarchage souscrit par Monsieur Robert X... auprès de la société C.P.F. en date du 07 juin 1996, - condamné la société C.P.F. à payer à Monsieur et Madame X... la somme de 3.000 francs versée à titre d'acompte, - condamné Monsieur et Madame X... à verser la somme de 22.000 francs à la Banque SOFINCO, - rejeté le surplus des demandes, - débouté Monsieur

et Madame X... de leur demande en paiement d'une indemnité fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile à l'encontre de la Banque SOFINCO, - débouté la Banque SOFINCO de sa demande en paiement d'une indemnité fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile à l'encontre de Monsieur et Madame X..., - condamné la société C.P.F. à verser à Monsieur et Madame X... la somme de 2.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamné la société C.P.F. aux entiers dépens. Le 10 septembre 1998, Monsieur et Madame X... ont interjeté appel. Ils font notamment valoir que les fonds avaient été versés à la société C.P.F., et qu'ils ne sauraient être condamnés à rembourser une somme qu'ils n'ont jamais perçue. Ils prient en conséquence la cour de : - déclarer recevable et fondé leur appel, Y faisant droit, - infirmer la décision entreprise en ce qu'elle les a condamnés à verser à la société BANQUE SOFINCO la somme de 22.000 francs en remboursement du crédit annulé, Et, statuant à nouveau, - constater que la Banque SOFINCO a commis une faute en débloquant prématurément et en violation des dispositions des articles L.311-20 et suivants, et plus particulièrement des articles L.311 et L.311-28 du code de la consommation, les fonds entre les mains de la société C.P.F., - la déclarer irrecevable, et, en toute hypothèse, mal fondée en ses demandes à leur encontre, - les décharger des condamnations prononcées contre eux en principal, intérêts, frais et accessoires, - condamner la société Banque SOFINCO et la société C.P.F. "CENTRE DE PROTECTION DU FEU" à porter et payer aux concluants la somme de 8.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - condamner la société Banque SOFINCO et la société C.P.F. "CENTRE DE PROTECTION DU FEU", en tous les dépens, - dire que ceux d'appels pourront être recouvrés directement par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux

dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. La Banque SOFINCO, intimée, faisant valoir qu'elle a entièrement respecté ses obligations contractuelles, prie la cour de : - dire et juger Monsieur et Madame X... mal fondés en leur appel, les en débouter, En conséquence, confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, Y ajoutant, - dire et juger que le paiement de la somme de 22.000 francs à la Banque SOFINCO sera assorti des intérêts au taux légal à compter du 22 novembre 1996, - ordonner la capitalisation des intérêts, année par année, en application des dispositions de l'article 1154 du code civil, Vu les dispositions des articles L.311-21 et L.311-22 du code de la consommation, - dire et juger qu'au cas où la cour confirmerait la décision entreprise du chef de ses dispositions relatives à la résolution des contrats de vente et à la condamnation des époux X... à lui rembourser le montant du crédit souscrit, cette dernière est bien fondée à solliciter la condamnation de la société C.P.F. à garantir Monsieur et Madame X... de toutes les condamnations mises à leur charge, - condamner tout succombant à lui régler une somme de 6.000 francs en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, - les condamner aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par la SCP DELCAIRE BOITEAU, avoués associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. La société ARSI (C.P.F.) a été assignée par acte d'huissier en date du 23 mars 2000, remis à personne habilitée. Elle n'a cependant pas constitué avoué. L'arrêt sera donc rendu réputé contradictoire. L'ordonnance de clôture a été signée le 04 mai 2000 et l'affaire a été plaidée à l'audience du 16 mai 2000. SUR CE, LA COUR, Considérant qu'aux termes de l'article L.311-21 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même

judiciairement résolu ou annulé ; Considérant que dans la présente espèce, il est constant que le contrat principal du 07 juin 1996 conclu par les époux X... avec la société C.P.F. (aujourd'hui société ARSI) l'a été selon les articles L.121-21 et suivants du code de la consommation relatifs au démarchage, et qu'en droit, il résulte de l'article 6 du code civil que la méconnaissance des dispositions d'ordre public de l'article L.121-26 dudit code est sanctionnée par la nullité au contrat, outre les sanctions pénales édictées par cet code (article L.121-28) ; Considérant que par une motivation pertinente que la cour adopte entièrement, et qui, de plus, n'est pas critiquée par la Banque SOFINCO qui sur ce point s'en rapporte à justice, le premier juge a exactement prononcé la nullité des deux contrats principaux de démarchage, et ce par une juste application des dispositions légales ci-dessus analysées ; que le jugement est par conséquent confirmé de ce chef ; Considérant qu'il appartenait donc au juge de faire d'office application des dispositions d'ordre public de l'article L.311-21 du code de la consommation, et par conséquent de constater que le contrat de crédit avec la Banque SOFINCO était annulé de plein droit ; que la cour réformant de ce chef et statuant à nouveau, constate donc la nullité de plein droit de ce contrat de crédit ; qu'aucune condamnation de ce chef ne peut donc être prononcée contre les époux X... ; Considérant par ailleurs qu'il est manifeste que la somme de 22.000 francs maintenant réclamée par la Banque SOFINCO n'a jamais été débloquée et remise aux époux X... eux-mêmes, et qu'il en résulte que ceux-ci ne peuvent être condamnés à restituer cette somme à cette banque ; que le jugement déféré est donc infirmé sur ce point ; qu'en raison de l'annulation de plein droit de ce contrat de prêt, il appartiendra à la banque d'agir contre la société ARSI (CENTRE DE PROTECTION DU FEU - "C.P.F.") en répétition de l'indu, mais qu'elle ne peut invoquer le

bénéfice des dispositions de l'article L.311-22 du code de la consommation, puisque celui-ci vise le cas d'une garantie due à l'emprunteur au sujet du remboursement du prêt, alors qu'ici, les époux X... qui n'ont rien reçu personnellement de la Banque n'ont rien à lui rembourser, et qu'ils ne font donc l'objet d'aucune condamnation de ce chef ; que la Banque SOFINCO est déboutée de sa demande de garantie fondée sur cet article L.311-222, contre la société ARSI, ainsi que de sa demande tendant à obtenir la capitalisation des intérêts échus, en vertu de l'article 1154 du code civil ; Considérant, que compte tenu de l'équité, la société ARSI (CENTRE DE PROTECTION DU FEU - "C.P.F.") est condamnée à payer 5.000 francs à la Banque SOFINCO et 8.000 francs aux époux X..., en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. PAR CES MOTIFS LA COUR statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la nullité de deux contrats signés par les époux X... avec la société ARSI (CENTRE DE PROTECTION DU FEU - "C.P.F."), REFORMANT et STATUANT A NOUVEAU, SUR LE SURPLUS : CONSTATE la nullité de plein droit du contrat de crédit ; VU l'article L.131-22 du code de la consommation : DEBOUTE la société Banque SOFINCO de sa demande de garantie contre la société ARSI ; DIT et JUGE qu'aucune condamnation à paiement ne peut être prononcée contre les époux X... ; DEBOUTE la Banque SOFINCO de sa demande de capitalisation des intérêts échus (article 1154 du code civil) ; CONDAMNE la société ARSI (CENTRE DE PROTECTION DU FEU - "C.P.F.") à payer 5.000 francs à la Banque SOFINCO et 8.000 francs aux époux X..., en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; LA CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre elle par la SCP d'avoués LISSARRAGUE DUPUIS ET ASSOCIES et par la SCP d'avoués DELCAIRE BOITEAU conformément aux

dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, C. DE GUINAUMONT

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-7179
Date de la décision : 16/06/2000

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Interdépendance du contrat principal et du crédit accessoire - Résolution ou annulation judiciaire du contrat principal - Résolution de plein droit du contrat de crédit.

En application de l'article L. 311-21 du Code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé. Dès lors qu'il résulte de l'article 6 du Code civil que la méconnaissances des dispositions d'ordre public des articles L. 121-21 et suivants du Code de la consommation, relatifs au démarchage à domicile, est sanctionnées par la nullité du contrat afférent, il appartient au juge qui prononce la nullité d'un contrat sur ce fondement de faire application, d'office, des dispositions d'ordre public de l'article L. 311-21 précité et de constater que le contrat de crédit affecté au règlement du contrat principal se trouvait nécessairement annulé de plein droit à sa suite

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Crédit à la consommation - Interdépendance du contrat principal et du crédit accessoire - Résolution ou annulation judiciaire du contrat principal - Résolution de plein droit du contrat de crédit.

Lorsque consécutivement à l'annulation d'un crédit affecté, il est établi que l'emprunteur lui-même n'a rien reçu de la banque, il ne peut être condamné à restituer des sommes qui ne lui ont pas été versées, et s'il appartient à la banque d'agir en répétition de l'indu contre le prestataire qui a reçu les fonds, la banque ne peut invoquer les dispositions de l'article L. 311-22 du Code de la consommation, dès lors que la garantie de remboursement du prêt, susceptible d'être mise à la charge du vendeur, au profit de l'emprunteur, implique que ce dernier a reçu personnellement les fonds, ce qui n'est pas le cas en l'espèce


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-06-16;1998.7179 ?
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