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08/06/2000 | FRANCE | N°1998-188

France | France, Cour d'appel de Versailles, 08 juin 2000, 1998-188


FAITS ET PROCEDURE : Suivant acte sous seing privé en date du 18 novembre 1992, Monsieur Guy X... a donné à bail à Monsieur Charles LE Y... et à la SARL LUMIERE NOIRE, représentée par le même Monsieur Charles LE Y..., des locaux à usage d'atelier dépendant d'un immeuble situé, 34 rue Marius Aufan à LEVALLOIS PERRET. Par courrier en date du 21 novembre 1995, signé par le représentant du bailleur et par Monsieur LE Y..., ce dernier s'est engagé à faire divers travaux moyennant une réduction conventionnelle du loyer mensuel de 6.000 francs à 3.000 francs jusqu'à fin 1996. Suiva

nt acte d'huissier en date des 09 et 16 décembre 1996, Monsieur X....

FAITS ET PROCEDURE : Suivant acte sous seing privé en date du 18 novembre 1992, Monsieur Guy X... a donné à bail à Monsieur Charles LE Y... et à la SARL LUMIERE NOIRE, représentée par le même Monsieur Charles LE Y..., des locaux à usage d'atelier dépendant d'un immeuble situé, 34 rue Marius Aufan à LEVALLOIS PERRET. Par courrier en date du 21 novembre 1995, signé par le représentant du bailleur et par Monsieur LE Y..., ce dernier s'est engagé à faire divers travaux moyennant une réduction conventionnelle du loyer mensuel de 6.000 francs à 3.000 francs jusqu'à fin 1996. Suivant acte d'huissier en date des 09 et 16 décembre 1996, Monsieur X... a fait délivrer un commandement de payer aux deux locataires se décomposant comme suit : À loyers impayés provisoirement arrêtés au 28 novembre 1996 :

90.000,00 francs À à déduire sur justification de l'exécution des travaux pour production de factures 15 mois x 3.000 = 45.000,00 francs À provisions sur charges :

7.247,33 francs Total

97.247,33 francs Ce commandement étant demeuré sans effet à l'issue du délai d'un mois imparti, le bailleur a saisi le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de NANTERRE afin de voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, obtenir l'expulsion des locataires ainsi que leur condamnation provisionnelle au paiement de l'arriéré de loyers et charges. Monsieur LE Y... et la SARL LUMIERE NOIRE se sont opposés aux prétentions adverses en invoquant le mauvais état des locaux et la SARL EDITIONS DE CHARONNE est intervenue aux débats pour revendiquer un droit locatif sur ces mêmes locaux. Par ordonnance en date du 13 mars 1997, le juge des référés, eu égard à ces difficultés, a renvoyé les parties à se mieux pourvoir sur leurs demandes principales et reconventionnelles devant le juge du fond, tout en faisant droit à la mesure d'expertise sollicitée subsidiairement par les défendeurs, afin de vérifier l'état des

locaux et leur compatibilité avec l'exercice d'une activité commerciale, la consignation de l'avance des frais d'expertise étant toutefois mise à la charge "du demandeur", soit de Monsieur X.... Celui-ci n'a pas estimé devoir consigner et a aussitôt saisi le Tribunal d'Instance de LEVALLOIS des mêmes demandes que celles qu'il avait présenté au juge des référés. Par jugement en date du 25 septembre 1997 auquel il est renvoyé pour plus ample exposé des éléments de la cause, ce magistrat a statué dans les termes ci-après : Déclare la demande de Monsieur X... recevable et rejette les exceptions de litispendance et d'incompétence.

Se déclare compétent.

Condamne Monsieur LE Y... et la société LUMIERE NOIRE à payer

à Monsieur X... la somme de 97.247,33 francs, avec intérêts au taux légal, à compter du 16 décembre 1996 au titre des loyers et charges impayés au 28 novembre 1996.

Constate que le bail est résilié par l'effet du jeu de la clause résolutoire, en conséquence, dit que les locataires devront rendre libres de leur personne, de leurs biens et de tous occupants de leur

chef et notamment la société EDITIONS DE CHARONNE les lieux dont s'agit.

Dit que la présente décision, passée en force de chose jugée, ils pourront en être expulsés avec l'assistance de la force publique si besoin est, et les meubles se trouvant dans les lieux transportés et séquestrés dans tel garde-meubles qu'il plaira au demandeur et ce, aux frais et risques de la société LUMIERE NOIRE et Monsieur LE Y....

Condamne Monsieur LE Y... et la société LUMIERE NOIRE à payer à Monsieur X... une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du loyer ancien plus les charges et taxes.

Constate que la cession invoquée par les défendeurs et la société EDITIONS DE CHARONNE du 16 décembre 1996 est nulle et de nul effet. Dit que la société EDITIONS DE CHARONNE est occupante sans droit, ni titre. Rejette le surplus des demandes principales ou reconventionnelles. Ordonne l'exécution provisoire. Condamne la société LUMIERE NOIRE et Monsieur LE Y... à verser la somme de 5.000 francs, en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, à Monsieur X... outre les dépens. v Appelants de cette décision, Monsieur LE Y... et la SARL LUMIERE NOIRE soutiennent tout d'abord que, le bénéfice du statut instauré par le décret du 30

septembre 1953 étant en cause, le Tribunal d'Instance de LEVALLOIS PERRET aurait dû se déclarer incompétent ratione materiae pour connaître du litige et ils demandent que la cause soit renvoyée "devant le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE". Subsidiairement et "pour le cas ou la Cour userait de la faculté d'évocation". Ils font valoir que le commandement qui leur a été délivré se trouve privé de tout fondement, dès lors que, selon eux, ils se trouvaient, eu égard à la vétusté des locaux, dans l'impossibilité totale d'exercer leur commerce, et ils en déduisent qu'ils sont fondés à opposer au bailleur, qui n'a pas déféré à l'ordonnance de référé lui imposant d'avancer les frais d'expertise, l'exception d'inexécution et à lui demander réparation du préjudice qu'ils ont subi qu'ils estiment à 200.000 francs, ajoutant que la procédure introduite à leur encontre et au mépris de la décision du juge des référés, ne peut être qualifiée que de malicieuse et abusive. Ils réclament également au bailleur une indemnité de 10.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. v La société LES EDITIONS DE CHARONNE, placée entre temps en liquidation judiciaire et désormais représentée par Maître Laurence RIFFIER, désignée en qualité de liquidateur, entend s'en rapporter à justice sur le mérite de l'appel, le mandataire liquidateur précisant toutefois qu'il n'entend revendiquer un quelconque droit de maintien dans les locaux en litige. v Monsieur X... fait valoir tout d'abord en réplique que l'appel interjeté par Monsieur LE Y... et la SARL LUMIERE NOIRE doit être déclarée irrecevable faute pour les intéressés de justifier d'une quelconque immatriculation au Registre du Commerce et des Sociétés ou à la Chambre des Métiers. Subsidiairement, il estime l'appel dépourvu de tout fondement sérieux et fait plus particulièrement valoir que la prétendue impossibilité d'exploiter n'est nullement démontrée en la cause. Il conclut donc à la

confirmation en toutes ses dispositions du jugement déféré, sauf à voir porter l'indemnité d'occupation à 25.000 francs par mois. Plus subsidiairement, il demande à la Cour de prononcer la résiliation judiciaire du bail. Enfin, il réclame aux appelants une indemnité de 25.000 francs en couverture des frais qu'il a été contraint d'exposer. v MOTIFS DE LA DECISION v Sur la recevabilité de l'appel :

Considérant que, aux termes de l'article 546 du nouveau code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé ; considérant en la cause que Monsieur LE Y... et la SARL LUMIERE NOIRE, co-titulaires du bail qui leur a été consenti par Monsieur X..., justifient incontestablement d'un intérêt à l'appel dès lors que le jugement déféré a constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et ordonné leur expulsion des lieux loués ; que le fait allégué que Monsieur LE Y... ne serait pas immatriculé au Registre des Métiers et la SARL LUMIERE NOIRE au Registre du Commerce et des Sociétés, s'il est susceptible de conditionner le droit éventuel de ces derniers au bénéfice du statut, ne saurait être cependant d'aucune influence, s'agissant d'une question de fond, sur la recevabilité de leur appel ; que ledit appel sera dès lors déclaré recevable ; vSur la compétence du juge d'instance : Considérant que le premier juge a cru devoir à tort retenir sa compétence alors qu'il était saisi d'une demande de constatation d'acquisition de la clause résolutoire sur la base d'un commandement prétendument délivré de mauvaise foi, ainsi que, subsidiairement d'une demande de résiliation judiciaire d'un bail commercial et que la société LES EDITIONS DE CHARONNE revendiquait la compétence du Tribunal de Grande Instance en alléguant qu'elle était cessionnaire du bail, comme successeur dans le commerce des locataires d'origine, question qui relevait de l'évidence de l'application du statut instauré par le décret du 30

septembre 1953 ; mais considérant que la Cour, qui est juridiction d'appel aussi bien du Tribunal d'Instance que du Tribunal de Grande Instance dont la compétence est revendiquée, a plénitude de compétence et que, même infirmant du chef de la compétence, elle est tenue néanmoins de statuer sur le fond du litige comme le lui impose l'article 79 du nouveau code de procédure civile, de sorte que l'exception reprise par les appelants devant la Cour est désormais dépourvue d'intérêt ; vSur le fond du litige : Considérant qu'il est constant que Monsieur LE Y... et la société LUMIERE NOIRE, co-locataires, n'ont pas satisfait aux causes du commandement de payer qui leur a été délivré les 09 et 16 décembre 1996 dans le délai imparti ; considérant que, pour voir déclarer sans fondement ce commandement, les appelants soutiennent que les locaux étaient inexploitables compte tenu de leur mauvais état d'entretien, notamment au niveau de gros-oeuvre, et en déduisent qu'ils sont fondés à se prévaloir de l'exception d'inexécution ; mais considérant que les appelants ne justifient pas avoir, avant la délivrance du commandement, mis en demeure le bailleur d'exécuter des travaux ; qu'il apparaît au contraire des pièces produites que les locataires s'étaient engagées à exécuter un certain nombre de travaux d'isolation moyennant une réduction temporaire du loyer et qu'ils n'ont jamais donné suite à leur engagement ; que les appelants sont par ailleurs mal venus à prétendre que l'état des locaux interdisait tout exercice d'une activité commerciale et à se prévaloir de l'exception d'inexécution alors qu'il est établi qu'une partie de ces locaux a été sous-louée à la société COMPO MECA et l'autre à la société EDITIONS DE CHARONNE, devenue par la suite prétendument cessionnaire du bail, sans pour autant que le bailleur ait été informé de ces sous-locations pourtant interdites par le bail ou rendu destinataire de l'acte de cession, ce qui montre suffisamment

que les locaux étaient parfaitement exploitables commercialement ; que, de même, il ne saurait être utilement reproché au bailleur de n'avoir pas consigné l'avance nécessaire à la mise en oeuvre de l'expertise ordonnée par le juge des référés, alors que cette mesure n'était pas sollicitée par ce dernier et que les locataires, s'ils avaient été de bonne foi, auraient pu se substituer au bailleur avec l'autorisation du juge chargé du contrôle de l'expertise ; considérant que dans ces conditions et dès lors qu'il est suffisamment établi que les locataires ont gravement manqué à leurs obligations en s'abstenant de payer tout loyer, la clause résolutoire ne peut être que déclarée acquise et l'expulsion desdits locataires ou de tous occupants de leur chef ordonnée, si besoin est, avec le concours de la force publique dans le délai d'un mois suivant la signification de la présente décision ; considérant en outre que Monsieur LE Y... et la société LUMIERE NOIRE seront solidairement condamnés à payer à Monsieur X..., la somme de 97.247,33 francs visée au commandement, avec intérêt de droit à compter du 16 décembre 1996, au titre des charges et loyers laissés impayés arrêtés au 28 novembre 1996 ; que, de même, ils seront condamnés à payer au bailleur, à compter du 16 janvier 1997, date à laquelle le bail s'est trouvé résilié de plein droit et sans préjudice de l'arriéré de loyer susceptible d'être encore dû, une indemnité d'occupation correspondant au montant du loyer alors en cours, majorée de 30 %, charges en sus ; considérant également qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X... les frais qu'il a été contraint d'exposer ; que les appelants seront condamnés à lui payer une indemnité de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; considérant enfin que les appelants qui succombent supporteront les entiers dépens. v PAR CES MOTIFS La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, DIT

recevable l'appel interjeté par Monsieur Charles LE Y... et la SARL LUMIERE NOIRE, REOEOIT en son intervention Maître Laurence RIFFIER, prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL EDITIONS DE CHARONNE, et lui donne acte de ce qu'elle ne revendique plus ès-qualités aucun droit d'occupation dans l'immeuble en litige, INFIRME le jugement déféré du chef de la compétence, Et statuant au fond en vertu de la dévolution opérant de plein droit en vertu de l'article 79 du nouveau code de procédure civile, CONSTATE que le bail se trouve résilié par l'effet de l'acquisition de la clause résolutoire à compter du 16 janvier 1997, ORDONNE l'expulsion des locaux loués de la SARL LUMIERE NOIRE et de Monsieur Charles LE Y... ou de tous occupants de leur chef dans le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt, et ce, si besoin est avec le concours de la force publique, AUTORISE le bailleur à faire transporter et séquestrer dans tel garde meuble de son choix les meubles se trouvant dans les locaux en litige, et ce, aux frais et risques des appelants, CONDAMNE solidairement les appelants à payer à Monsieur Guy X... la somme de 97.247,33 francs, représentant l'arriéré de loyers et charges arrêté au 28 novembre 1996, avec intérêts de droit à compter du 16 décembre 1996, CONDAMNE également solidairement les appelants, sous réserve du reliquat du loyer restant dû, à payer à Monsieur Guy X... à compter du 16 janvier 1997 une indemnité mensuelle d'occupation correspondant au montant du dernier loyer en cours, majorée de 30 %, outre les charges courantes et ce jusqu'à complète libération des lieux, CONDAMNE aussi les appelants à payer à Monsieur Guy X... une indemnité de 10.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, DIT la présente décision opposable à Maître Laurence RIFFIER, ès-qualités, CONDAMNE enfin les appelants, qui succombent pour l'essentiel, aux entiers dépens exposés jusqu'à ce jour et AUTORISE

les avoués des autres parties en cause concernés à poursuivre directement le recouvrement de la part les concernant, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET LE GREFFIER

LE PRESIDENTLE GREFFIER

LE PRESIDENT M.Thérèse GENISSEL

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-188
Date de la décision : 08/06/2000

Analyses

BAIL COMMERCIAL

Lorsque le jugement dont appel a constaté l'acquisition de la clause résolutoire d'un bail commercial, suite à la délivrance d'un commandement de payer resté infructueux, l'appelant qui invoque l'exception d'inexécution, en raison du caractère inexploitable des lieux loués, pour faire déclarer le commandement sans fondement, doit justifier avoir mis le bailleur en demeure d'exécuter des travaux. Un locataire qui s'était engagé à effectuer des travaux, en contrepartie d'une minoration de loyer, auxquels il ne justifie pas avoir donné suite et qui, contrairement aux clauses du bail, a sous loué une partie des lieux, est malvenu à soutenir que l'état des locaux interdisait tout exercice d'une activité commerciale pour se prévaloir de l'exception d'inexécution


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-06-08;1998.188 ?
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