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04/05/2000 | FRANCE | N°1998-21992

France | France, Cour d'appel de Versailles, 04 mai 2000, 1998-21992


FAITS, PROCEDURE, DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES Selon contrat à durée déterminée de trois mois en date du 29 septembre 1971, poursuivi en contrat à durée indéterminée, Madame Fernanda X... a été engagée par la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL en qualité d'ouvrière spécialisée 1. Au cours du mois de mars 1993, Mme X... a été placée en arrêt maladie. Elle a été classée en invalidité deuxième catégorie par la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France à compter du 30 mars 1996. Le 10 avril 1996, à l'issue de la première visite médicale, le médecin d

u travail a déclaré Mme X... inapte à tous postes dans l'entreprise. Par courrie...

FAITS, PROCEDURE, DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES Selon contrat à durée déterminée de trois mois en date du 29 septembre 1971, poursuivi en contrat à durée indéterminée, Madame Fernanda X... a été engagée par la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL en qualité d'ouvrière spécialisée 1. Au cours du mois de mars 1993, Mme X... a été placée en arrêt maladie. Elle a été classée en invalidité deuxième catégorie par la Caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France à compter du 30 mars 1996. Le 10 avril 1996, à l'issue de la première visite médicale, le médecin du travail a déclaré Mme X... inapte à tous postes dans l'entreprise. Par courrier du 15 avril 1996, l'employeur a notifié à Mme X... son licenciement en raison de la décision d'invalidité du 30 mars 1996 et de la décision d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise prise par le médecin du travail le 10 avril 1996. Au moment de la rupture de son contrat de travail, Mme X... avait la qualification de façonneuse P 1 et percevait un salaire brut mensuel de 8 004,67 F. Par courrier recommandé avec accusé de réception du 16 avril 1996, l'employeur a adressé à Mme X... une convocation à un entretien préalable pour le lundi 6 mai 1996, aux fins de "respecter la procédure". Le 2 mai 1996, le médecin du travail a rendu une seconde décision d'inaptitude définitive de Mme X... à tous postes dans l'entreprise. Par courrier recommandé avec accusé de réception du 13 mai 1996, l'employeur a notifié à Mme X... son licenciement en raison de la décision d'invalidité 2ème catégorie du 30 mars 1996 de la Caisse régionale d'assurance maladie, de la première décision d'inaptitude à tous postes dans l'entreprise du médecin du travail du 10 avril 1996 et de la seconde décision d'inaptitude définitive à tous postes dans l'entreprise du 2 mai 1996 qui ne permettaient pas à l'employeur de lui proposer un éventuel reclassement dans l'entreprise. Contestant ce licenciement, Mme X... a saisi le 6 mai 1996 le Conseil de

Prud'hommes de SAINT GERMAIN EN LAYE de demande d'indemnités de rupture et de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre la remise d'un certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC. Par jugement en date du 25 juin 1996, le conseil s'est déclaré territorialement compétent, et a pris acte du contredit formé par l'employeur à l'audience. Par arrêt du 14 mars 1997, la cour d'appel de VERSAILLES a confirmé le jugement entrepris, renvoyé les parties devant le conseil des prud'hommes de SAINT GERMAIN EN LAYE et condamné la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIELS à une indemnité de procédure de 6 000 F. Par jugement du 17 mars 1998, le conseil a dit que le licenciement de Mme X... avait une cause réelle et sérieuse, condamné l'employeur à verser à la salariée la somme de 2 269.82 F au titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement et une indemnité de procédure et a débouté Mme X... du surplus de ses demandes. Pour statuer ainsi, le conseil a constaté que, l'employeur n'avait pas, dans un premier temps, respecté l'article R 241-51-1 du code du travail qui prévoit deux examens par le médecin du travail espacés de deux semaines , mais qu'il avait rempli ses obligations, au vu de l'examen des décisions d'invalidité de la caisse primaire d'assurance maladie du 30 mars 1996 et des décisions d'inaptitude définitive de Mme X... à tous postes dans l'entreprise, des 10 avril et 2 mai 1996. Mme X... a régulièrement interjeté appel le 15 avril 1998, limitant celui-ci, pour la demande principale, aux dommages intérêts et, pour la demande subsidiaire, à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité de préavis et congés payés afférents. La société a relevé appel incident limité à sa condamnation par le conseil à la somme de 2 269,82 F. au titre d'indemnité de licenciement et 4 000 F. d'indemnité de procédure. MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES Madame X... qui reprend ses conclusions de

première instance demande à la Cour de confirmer le jugement entrepris en ce qui concerne le complément d'indemnité de licenciement qui lui a été alloué et de l'infirmer pour le surplus. A titre principal, elle demande à la cour de prononcer la nullité du licenciement intervenu en contravention avec les dispositions des articles L.122-45 et R.245-51-1 du code du travail, estimant que la rétractation tardive de l'employeur qui a repris une procédure de licenciement le 16 avril 1996 est nulle et sans objet. Elle soutient que l'employeur l'a licenciée sans que soit intervenu le deuxième examen médical et l'avis du médecin du travail se prononçant définitivement sur son inaptitude au travail, en contravention avec les dispositions des article L.122-45, R.245-51 et 245-51-1 du code du travail. Elle sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 176 102.74 F à titre de dommages intérêts représentant les salaires du 15 avril 1996 au 27 janvier 1998, date de l'audience de jugement du conseil, ainsi que la somme de 16 009.34 F à titre de dommages intérêts pour détournement du pouvoir disciplinaire de l'employeur et une indemnité de procédure de 15 000 F. A titre subsidiaire, Mme X... demande à la cour de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL à lui verser la somme de 96 056,04 F à titre de dommages intérêts, 16 009,93 F à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 600,93 F à titre de congés payés afférents ainsi qu'une indemnité de procédure du 15 000 F. Elle soutient également que l'employeur a agi avec une légèreté blâmable entraînant un détournement de son pouvoir disciplinaire qu'il convient de sanctionner par l'allocation de dommages intérêts. Enfin, elle indique que n'ayant commis aucune faute, elle est fondée à solliciter une indemnité compensatrice de préavis à hauteur de deux mois de salaire. La société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL demande à la

cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions à l'exception de celles la condamnant à verser un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement et une indemnité de procédure. Elle soutient que, Mme X... réclamant expressément la nullité du licenciement du 15 avril 1996, le licenciement intervenu le 13 mai 1996 est donc parfaitement régulier ; qu'en tout état de cause, le premier licenciement est valable dans la mesure où l'article R.241-51 du code du travail exclut la deuxième visite médicale dans l'hypothèse où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ; qu'en l'espèce la réalité de ce danger est attestée par le classement en invalidité de Mme X..., par le courrier adressé par le Docteur S. Y..., médecin du travail, à l'employeur le 10 avril 1996, aux termes duquel il indique avoir reçu "Mme X... accompagnée d'une amie qui l'aide en tout et en particulier pour s'exprimer" et fait état de "son lourd dossier médical et des traitements suivis", enfin par l'attestation de ce même médecin qui indique, le 14 mars 1997, que la reprise du travail par Mme X... à un poste quelconque dans l'entreprise, eu égard à son état, représentait un danger pour sa santé et sa sécurité ; que la nullité du premier licenciement aurait pour conséquence la réintégration de Mme X... aux effectifs de l'entreprise jusqu'à son deuxième licenciement et sa prise en charge financière comme invalide deuxième catégorie et donc l'impossibilité de percevoir un salaire, le contrat de travail étant suspendu, aucun équivalent de salaire n'étant prévu. Enfin, l'employeur indique que Mme X... qui était dans l'incapacité absolue de travailler, ne peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis ; que le solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement lui a été adressé avec l'ensemble des documents sociaux par courrier recommandé avec accusé de réception qu'elle n'est pas allé cherché ; qu'un courrier simple

lui a été envoyé sans réaction de sa part ; qu'il y a lieu dès lors de ne prononcer à son encontre qu'une condamnation en deniers ou quittance et de rejeter la demande d'indemnité de procédure. SUR CE, Sur le licenciement Considérant que l'article L 122-45 du code du travail interdit de licencier un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail ; Considérant que l'article R.245-51-1 du code du travail dispose que cette inaptitude ne peut être constatée par le médecin du travail qu'après une étude du poste et des conditions de travail dans l'entreprise et deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celle des tiers ; Considérant, en l'espèce, que le 10 avril 1996, à l'issue de la première visite médicale, le médecin du travail a déclaré Mme X... inapte à tous postes dans l'entreprise ; que par courrier du 15 avril 1996, l'employeur a notifié à Mme X... son licenciement en raison de la décision d'invalidité du 30 mars 1996 et de la décision d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise prise par le médecin du travail le 10 avril 1996, sans qu'un deuxième examen médical soit intervenu ; Considérant qu'en présence d'une première décision d'inaptitude de la salariée suite à une première visite médicale du 10 avril 1996, il appartenait à l'employeur de saisir à nouveau le médecin du travail ; que le licenciement de Mme X... est intervenu en l'absence d'une seconde visite médicale et de la constatation par le médecin du travail de l'inaptitude de la salariée à reprendre l'emploi précédemment occupé ou tout emploi dans l'entreprise ; Considérant en l'espèce que les pièces versées aux débats par l'employeur, à savoir, le classement en invalidité de la salariée, le courrier adressé par le médecin du travail à celui-ci le 10 avril 1996 et l'attestation de ce même médecin établi le 14 mars

1997, postérieurement aux décisions d'inaptitude ne suffisent pas à établir qu'au jour du licenciement, il existait danger immédiat pour la santé ou la sécurité de la salariée ou celle des tiers ; que le courrier du médecin du travail adressé à l'employeur un an plus tard à la demande de celui-ci, est inopérant ; Considérant que l'argumentation de l'employeur selon laquelle Mme X... aurait, en invoquant la nullité du licenciement du 15 avril 1996, accepté que l'employeur le considère comme non avenu de telle sorte qu'il aurait pu ensuite la licencier régulièrement, sont inopérants, dès lors qu'elle avait saisi le conseil de prud'hommes d'une contestation qui ne saurait être assimilée à l'accord invoqué par l'employeur ; Considérant que l'entreprise occupe habituellement plus de dix salariés, que Mme X... avait, au jour de son licenciement, plus de 24 ans d'ancienneté, qu'il y a lieu de lui allouer, en réparation de l'intégralité du préjudice subi par elle, des dommages intérêts à hauteur de la somme de 50 000 F. Sur la demande de dommages intérêts pour détournement du pouvoir disciplinaire de l'employeur Considérant qu'il y a lieu de débouter Mme X... de sa demande de dommages intérêts pour détournement du pouvoir disciplinaire de l'employeur, le licenciement n'étant pas intervenu pour motif disciplinaire ; Sur l'indemnité compensatrice de préavis Considérant que Mme X..., dont le contrat de travail était suspendu pour maladie, n'était donc pas en mesure d'effectuer son préavis ; qu'elle ne peut en conséquence réclamer l'octroi d'une indemnité compensatrice de préavis ni les congés payés afférents. Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement Considérant que l'employeur qui ne conteste pas le montant du solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement réclamé par Mme X... et affirme l'avoir réglé ; qu'il y a lieu dès lors de condamner en deniers ou quittances celui-ci à verser à Mme X... la somme de 2 758.20 F. à titre du solde de l'indemnité

conventionnelle de licenciement. Considérant qu'il convient de condamner la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL qui succombe aux dépens, à verser à Madame X... la somme de 10 000 F. en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. PAR CES MOTIFS, La Cour, Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, Infirme le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de SAINT GERMAIN EN LAYE le 17 mars 1998 et statuant à nouveau, Prononce la nullité du licenciement de Madame Fernanda X...; Condamne la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL à verser à Mme X... la somme de 50 000 F. (CINQUANTE MILLE FRANCS) à titre de dommages intérêts. Réformant le jugement entrepris sur le complément d'indemnité de licenciement ; Condamne la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIELà payer à Madame Fernanda X... en deniers ou quittances la somme de 2 758,20 F (DEUX MILLE SEPT CENT CINQUANTE HUIT FRANCS ET VINGT CENTIMES). Confirme le jugement entrepris pour le surplus des demandes. Déboute la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL de sa demande d'indemnité de procédure ; Condamne la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL aux dépens de première instance et d'appel ; Condamne la société STANDARD PRODUCTS INDUSTRIEL à verser à Madame Fernanda X... la somme de 10 000 F. (DIX MILLE) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Et ont signé le présent arrêt Mme LINDEN, Président, et Mme Z..., Greffier. LE GREFFIER

LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-21992
Date de la décision : 04/05/2000

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Médecin du travail

L'article R.245-51-1 du code du travail dispose que cette inaptitude ne peut être constatée par le médecin du travail qu'après une étude du poste et des conditions de travail dans l'entreprise et deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour la santé ou la sécurité de l'intéressé ou celle des tiers


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-05-04;1998.21992 ?
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