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21/04/2000 | FRANCE | N°1998-3954

France | France, Cour d'appel de Versailles, 21 avril 2000, 1998-3954


FAITS ET PROCEDURE, Monsieur et Madame X... sont locataires depuis le 1er juin 1973 d'un appartement, propriété de Madame Y... Z... dite A... Z..., sis à NEUILLY SUR SEINE, 35 boulevard d'Inkermann (superficie 188,54 m). Le bail a été régularisé suivant un acte sous seing privé en date du 7 novembre 1983 pour une durée de trois années renouvelables à compter du 1er novembre 1982. Par jugement en date du 29 novembre 1989, confirmé sur ce point par un arrêt de la Cour de céans en date du 20 mars 1992, le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE a jugé que ledit contrat était rép

uté renouvelé pour trois ans à compter du 24 juin 1989. Par acte...

FAITS ET PROCEDURE, Monsieur et Madame X... sont locataires depuis le 1er juin 1973 d'un appartement, propriété de Madame Y... Z... dite A... Z..., sis à NEUILLY SUR SEINE, 35 boulevard d'Inkermann (superficie 188,54 m). Le bail a été régularisé suivant un acte sous seing privé en date du 7 novembre 1983 pour une durée de trois années renouvelables à compter du 1er novembre 1982. Par jugement en date du 29 novembre 1989, confirmé sur ce point par un arrêt de la Cour de céans en date du 20 mars 1992, le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE a jugé que ledit contrat était réputé renouvelé pour trois ans à compter du 24 juin 1989. Par acte d'huissier en date du 5 décembre 1994, le bailleur a donné congé pour vendre aux époux X... pour le 23 juin 1995. Le congé valait offre de vente destinée aux locataires pour un montant de 6.350.000 francs, offre que Monsieur et Madame X... n'ont pas acceptée. Par assignation en date du 23 juin 1995, Monsieur et Madame X... ont fait citer Madame B... devant le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE afin d'obtenir l'annulation du congé qui leur a été délivré le 5 décembre 1994 au nom de Madame Marguerite C..., ainsi que l'allocation de la somme de 5.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. A l'appui de leurs prétentions, ils ont soutenu que le congé précité était entaché d'une nullité de fond, Madame Marguerite C... ne justifiant pas de sa qualité, le bail initial et tous les actes subséquents ayant été établis au nom de Madame Paulette B.... Subsidiairement, ils ont invoqué le caractère frauduleux du congé en raison du prix manifestement prohibitif proposé dans l'offre ; se sont prévalus du bénéfice du droit de substitution et ont sollicité la fixation d'une indemnité d'occupation à une somme équivalente au montant du loyer courant. Madame B... a fait valoir que le congé était parfaitement

valable ; que, divorcée de Monsieur A..., elle avait de longue date, usé du double patronyme B... qui figure sur ce bail et que par conséquent, le congé délivré le 5 Décembre 1994, n'est pas nul. Elle a par ailleurs contesté toute intention frauduleuse et soutenu que les demandeurs ne rapportaient pas la preuve du caractère manifestement excessif du prix de vente de l'immeuble proposé dans l'offre faite aux époux X.... Reconventionnellement, elle a sollicité l'expulsion des locataires et leur condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation de 25.000 francs par mois, outre les charges, à compter du 24 juin 1995 ; leur condamnation au paiement de la somme de 12.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par jugement contradictoire en date du 22 janvier 1997, le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE a : - rejeté l'exception de nullité du congé pour vendre en date du 5 décembre 1994, - sursis à statuer sur sa validité et ses effets, - et désigné un consultant, Monsieur D..., pour donner un avis estimatif circonstancié de la valeur vénale du bien loué notamment au dernier trimestre 1994. L'expert a déposé son rapport le 4 juin 1997, duquel il résulte que la valeur vénale de l'appartement pouvait être évaluée à la somme de 6.565.400 francs. Dans leurs conclusions en ouverture de rapport, Monsieur et Madame X... ont critiqué la méthode d'évaluation utilisée par l'expert, produisant aux débats un rapport d'estimation amiable établi par l'Office Notarial POISSON le 25 septembre 1997, estimant la valeur vénale de l'appartement à la somme de 5.890.000 francs ; ils en ont donc déduit que le prix de vente contenu dans l'offre était exorbitant. Madame B... a conclu à l'homologation du rapport et a porté sa demande au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à la somme de 25.000 francs. Par jugement contradictoire en date du 11 mars 1998, le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE a rendu la décision

suivante : - homologue le rapport de consultation déposé par Monsieur D... le 4 juin 1997, - déclare les époux Bernard X... mal fondés en leur action en contestation de congé, - faisant droit aux demandes reconventionnelles de Madame Marguerite Y... - Z..., - valide le Congé qu'elle a fait délivrer aux époux X... le 5 décembre 1994 pour le 23 juin 1995, En conséquence, - ordonne l'expulsion de Monsieur et Madame Bernard X... ainsi que celle de tous occupants de leur chef des lieux sis à NEUILLY SUR SEINE 35 Boulevard INKERMANN (rez-de- chaussée 1er étage) et de leurs dépendances, avec le concours de la Force Publique et d'un serrurier en tant que de besoin conformément aux articles 62 et suivants de la loi du 9 juillet 1991. - autorise le transport et la séquestration du mobiliers trouvé sur place dans les formes et conditions des articles 65 et 66 de la même loi, - condamne Monsieur et Madame Bernard X..., in-solidum, à payer à Madame Marguerite C..., dite A...- Z..., une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 17.000 francs, charges et taxes en sus, à compter rétroactivement du 24 juin 1995 et jusqu'à totale libération du logement. - déboute les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires excepté du chef de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile mais en faveur de la défenderesse exclusivement. - ordonne l'exécution provisoire, - condamne les époux Bernard X... à supporter les dépens comprenant les frais de la consultation judiciaire, de même qu'à payer à la défenderesse une indemnité de 6.000 francs en vertu de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par déclaration en date du 27 avril 1998, Monsieur et Madame X... ont relevé appel de cette décision. Ils soutiennent que la surface pondérée totale de l'appartement est de 211,42 m et celle de 225 m retenue par Monsieur D..., expert ; que la technique d'évaluation utilisée par l'expert est très contestable ; qu'en tout état de cause, le prix

proposé par le bailleur était manifestement excessif afin de d'évincer les locataires, ce qui témoigne de l'intention frauduleuse de Madame B.... Par conséquent, ils demandent à la Cour de : - dire et juger recevable l'appel régularisé le 27 avril 1998 par les époux X..., du jugement prononcé par le Tribunal d'Instance de Neuilly sur Seine le 11 mars 1998, et signifié par Madame Z... le 30 mars 1998, - constater que les époux X... renoncent à l'exception de nullité de fond relative à l'identité de la requérante au droit du congé ; - dire et juger que l'intention frauduleuse dans la détermination du prix de vente de l'appartement dans le simple but de nuire aux locataires, En conséquence, - annuler le congé avec offre de vente, - au regard de l'expulsion effective au titre de l'exécution provisoire, - condamner Madame Z... au paiement d'une somme de 350.000 francs à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel et moral subi par les époux X..., - condamner l'intimée à une somme de 15.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, dont recouvrement sera opéré par la SCP FIEVET, ROCHETTE ET LAFON, Avoués aux offres de droit, Madame B... soutient que les époux X... ne rapportent pas la preuve de la fraude alléguée, celle-ci ne se présumant pas ; qu'en tout état de cause, l'expertise a démontré que le prix proposé dans l'offre de vente n'était pas excessif, que le rapport de l'office notarial sollicitée par les époux X... conclut à une valeur vénale inférieure de 7% au prix proposé dans l'offre de vente du 5 décembre 1994, ce qui ne révèle pas une surévaluation excessive, pas plus qu'une fraude caractérisée ; que les appelants, qui procèdent par voie d'affirmation, ne rapportent pas la preuve que la technique utilisée par l'expert judiciaire serait inapropriée à l'espèce. Par conséquent elle prie la Cour de : - déclarer irrecevables, subsidiairement sans

fondement les époux X... en leur appel, - confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions, - débouter Monsieur et Madame X... de toutes leurs demandes, - les condamner au paiement de la somme de 15.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant recouvrés par la SCP DELCAIRE ET BOITEAU, Avoués à la Cour, dans les conditions prévues par l'article 699 du Code précité. L'ordonnance de clôture a été signée le 2 mars 2000. Le 8 mars 2000, Madame B... a fait signifier des conclusions de rejet des débats des conclusions des appelants du 2 mars 2000, comportant une demande additionnelle en paiement de dommages-intérêts. Le 10 mars 2000, les époux X... ont conclu en réponse pour demander à la Cour de recevoir les conclusions signifiées le 2 mars 2000. L'affaire a été appelée à l'audience du 10 mars 2000. SUR CE, LA COUR, E... qu'il convient de donner acte aux époux X... de leur renonciation à invoquer l'exception de nullité de fond relative à l'identité de la requérante au congé; 1) Sur la recevabilité des conclusions signifiées par les appelants le 2 mars 2000 E... que ces conclusions ont été signifiées la veille de la date de clôture, intervenue 7 jours avant l'audience, de sorte que l'intimée n'a pas été en mesure d'y apporter une réponse; que ces conclusions reprennent essentiellement les prétentions et moyens développés dans les précédentes conclusions des appelants du 27 août 1998, mais que la demande en paiement de dommages-intérêts y a été portée de 50.000 Francs à 350.000 Francs; que dans ces conditions, le principe du contradictoire n'ayant pas été respecté, il convient de rejeter des débats les conclusions litigieuses; 2) Sur le caractère frauduleux du congé pour vendre délivré par Madame A... Z... E... qu'il est de droit constant que si le bailleur est libre dans la détermination du prix de vente de son logement, une

fraude de sa part peut cependant résulter de la fixation délibérée d'un prix excessif par rapport à la valeur vénale du logement et au marché, manifestement dissuasif pour les locataires et pour tous les acquéreurs potentiels, et ce dans le but de porter atteinte au droit de préemption des locataires; E... qu'en l'espèce, Madame D..., expert judiciaire désigné en qualité de consultant par le premier juge, aux termes d'un rapport en date du 30 mai 1997, détaillé et argumenté, illustré par des photographies et comportant de nombreuses annexes avec des références de prix dans l'immobilier, conclut à une valeur 1994 du bien litigieux, y compris le parking et après abattement pour chauffage au sol et situation de l'appartement par rapport au soleil, de 6.565.400 Francs et à une valeur 1997 de 5.529.500 Francs; E... que les critiques formulées par les appelants contre ce rapport portent sur la pondération du jardin, les critères de comparaison et l'aire de stationnement; que ces critiques ne sont pas pertinentes dans la mesure où elles ne s'appuient pas sur des éléments concrets et techniques; que notamment, concernant les références dont ils dénoncent l'insuffisance dans le rapport de Monsieur D..., Monsieur et Madame X... ne citent que deux références de prix de vente, alors que l'expert judiciaire a cité 14 références pour la valeur 1994 et 4 références pour la valeur 1997, sans compter les recherches par Minitel et les références parues dans le journal "De particuliers à particuliers"; E... que dans ces conditions, c'est à juste titre que le premier juge, retenant que le rapport du consultant était exempt de critiques tant sur la forme que les méthodes d'évaluation, a fait sien l'avis estimatif proposant une valeur vénale du bien en cause à hauteur de 6.565.400 Francs en 1994, de sorte que le prix de vente figurant au congé pour 6.350.000 Francs n'était pas exorbitant puisqu'inférieur à cette valeur vénale; que les appelants ne démontrent donc pas l'intention frauduleuse de

Madame A... Z... lors de la délivrance du congé pour vendre; E... que par conséquent, la cour confirme le jugement déféré qui a validé le congé délivré le 5 décembre 1994 pour le 23 juin 1995, ordonné l'expulsion, autorisé le transport et séquestre des meubles et condamné Monsieur et Madame X... à payer une indemnité d'occupation mensuelle de 17.000 Francs, charges en sus, outre 6.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; que les époux X... seront déboutés de toutes leurs demandes; E... qu'il résulte du procès-verbal de reprise des lieux du 25 juin 1999, versé aux débats, que Monsieur et Madame X... ont quitté les lieux; 3) Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile E... qu'eu égard à l'équité, il y a lieu d'allouer à Madame Y... Z... dite A... Z... la somme de 8.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; PAR CES MOTIFS La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort: Donne acte aux époux X... de leur renonciation à invoquer l'exception de nullité de fond relative à l'identité de la requérante au congé; Rejette des débats les conclusions signifiées par les époux X... le 2 mars 2000; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions; Et y ajoutant: Constate qu'il résulte du procès-verbal de reprise des lieux du 25 juin 1999, versé aux débats, que Monsieur et Madame X... ont quitté les lieux; Déboute Monsieur et Madame X... des fins de toutes leurs demandes; Condamne Monsieur et Madame X... à payer à Madame Y... Z... dite A... Z... la somme de 8.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; Les condamne à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre eux par la SCP DELCAIRE BOITEAU, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Et ont signé le présent arrêt: Le

Greffier qui a assisté au prononcé

Le Président, C. DE GUINAUMONT

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-3954
Date de la décision : 21/04/2000

Analyses

BAIL A LOYER (loi du 6 juillet 1989) - Congé - Congé pour vendre - Validité

Un bailleur qui délivre un congé pour vendre est libre dans la détermnation du prix de son logement dés lors que n'est pas constaté une fraude de sa part tendant à faire échec au droit de préemption du locataire par la fixation d'un prix délibérement excessif. Lorsqu'il résulte d'une expertise judiciaire non con- testée que le prix de vente proposé dans le congé n'était pas excessif, l'intention frauduleuse du bailleur ne peut être établie


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-04-21;1998.3954 ?
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