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09/03/2000 | FRANCE | N°JURITEXT000006935867

France | France, Cour d'appel de Versailles, 09 mars 2000, JURITEXT000006935867


Le 28 juillet 1989, la société IBERTRANS a souscrit un contrat d'assurance collective auprès de la compagnie PFA VIE, garantissant ses cadres contre les risques décès, invalidité totale ou incapacité temporaire. Monsieur Roland X..., président directeur général de la société, né le 3 août 1947, a adhéré à cette assurance le 15 septembre 1989. A partir du 25 février 1991 il a été en arrêt de travail et, après avoir versé des indemnités journalières jusqu'en novembre 1992, la compagnie PFA a demandé l'examen de Monsieur X..., notamment par un médecin psychiatre. Celui-

ci a conclu que soit Monsieur X... n'était pas malade, soit qu'il l'était ...

Le 28 juillet 1989, la société IBERTRANS a souscrit un contrat d'assurance collective auprès de la compagnie PFA VIE, garantissant ses cadres contre les risques décès, invalidité totale ou incapacité temporaire. Monsieur Roland X..., président directeur général de la société, né le 3 août 1947, a adhéré à cette assurance le 15 septembre 1989. A partir du 25 février 1991 il a été en arrêt de travail et, après avoir versé des indemnités journalières jusqu'en novembre 1992, la compagnie PFA a demandé l'examen de Monsieur X..., notamment par un médecin psychiatre. Celui-ci a conclu que soit Monsieur X... n'était pas malade, soit qu'il l'était dès avant la souscription du contrat. Par ordonnance de référé, en date du 9 avril 1993, une expertise médicale a été ordonnée et a révélé des perturbations caractérielles remontant à l'année 1988, manifestées notamment par de la boulimie et une obésité massive. Par jugement en date du 14 février 1995, le tribunal de grande instance de NANTERRE a dit que la compagnie devait reprendre le versement de ses indemnités. Par arrêt en date du 4 avril 1996 la présent Cour a désigné un collège de trois experts. Ceux-ci ont retenu l'existence de troubles psychiatriques ayant justifié des périodes d'arrêt de travail mais ont retenu une consolidation au 13 avril 1994. Ils ont estimé que l'affection endocrinologique, découverte fortuitement en 1993, et traité uniquement par médicament, ne faisait apparaître aucun élément justifiant une incapacité totale de travail. Postérieurement à cette expertise, le Professeur Y..., qui suit Monsieur X..., a conclu après examen des 18 mai et 10 juillet 1994, que celui-ci était dans l'impossibilité d'exercer une profession, non seulement du fait de son état médical mais également à raison des autres problèmes médicaux et de leurs thérapeutiques en cours. Par arrêt du 15 janvier 1998, et compte-tenu de ces éléments, la Cour a ordonné une nouvelle mesure d'expertise confiée aux docteurs NYS et BORSTEIN avec pour

mission d'indiquer si son état justifiait les arrêts totaux ou partiels d'activité prescrits et de préciser si son état est médicalement consolidé avec fixation de sa date. Z... experts ont encore reçu mission d'évaluer le taux d'IPP en fonction des dispositions contractuelles. Z... experts ont déposé leur rapport le 2 juillet 1998. Il ressort de cette expertise que Monsieur X... a consulté le professeur A..., pour la première fois, le 17 février 1988 pour obésité réfractaire et ancienne. Il enregistrait alors un poids de 134 kgs. Il a ensuite consulté le docteur B..., pour la première fois le 15 novembre 1993 et ce dernier a diagnostiqué une tumeur de l'hypophyse sécrétant de façon excessive de l'hormone de croissance et de la prolactine avec diabète. Sur le plan psychiatrique, les experts relèvent, outre des composantes mélancoliques et de l'asthénie, des attaques de panique, de phobies pouvant survenir en milieu clos ou entouré par la foule. Monsieur X... a renoncé à toute activité, a perdu toute sa dentition et son poids oscille entre 144 et 164 kgs. Z... experts notent que, lors de la souscription du contrat, Monsieur X... ignorait qu'il était probablement porteur d'un adénome hypophysaire d'évolution insidieuse et alors silencieux. "En février 1991, ce self made man, habitué à la fuite en avant, à une existence brillante, entreprenante, s'effondre, en proie à un état asthénodépressif intense avec taedium vital, confronté à une impuissance sexuelle qui le terrasse, lui enlève toute velléité d'activité et qu'il tente de rompre par des troubles du comportement et du caractère qui surprennent ou irritent ceux qui l'approchent". Il est alors totalement pris en charge et ce n'est qu'en 1993 que le diagnostic d'acromégalie sera porté, toute intervention neurochirurgicale étant exclue. Selon les experts les troubles psychiques sont allés en s'amplifiant. Le 30 juin 1993, il a été placé en invalidité par la COTOREP. Z... experts précisent qu'il

est en arrêt continu et les perspectives réelles d'amélioration sont illusoires. Il prend au moins 22 comprimés par jour. Z... conclusions des experts sont les suivantes : son état justifiait les arrêts totaux ou partiels d'activité prescrits. Monsieur X... a été placé en invalidité COTOREP le 30 juin 1993. Cette date pourrait servir de consolidation théorique en sachant que la symptomatologie ne peut qu'être évolutive en l'absence du traitement chirurgical lui-même facteur de risque. La pathologie intriquée et complexe de la victime est responsable d'une incapacité fonctionnelle de 85 % en-dehors de toute considération professionnelle, à partir du barème du Concours médical. Elle est responsable d'une incapacité fonctionnelle de 100 % par rapport à la profession exercée. Concluant après expertise, Monsieur X... demande à la Cour de : - constater qu'il n'a effectué aucune fausse déclaration au sens des articles L 113.8 du Code des assurances et/ou de l'article 1116 du Code civil, - rejeter les demandes de la compagnie PFA, - condamner cette dernière à verser les indemnités contractuellement prévues, jusqu'à la fin du contrat, - condamner la compagnie PFA au paiement de la somme de 200.000 francs pour résistance abusive et au paiement de la somme de 30.000 francs au titre des frais irrépétibles. La compagnie PRÉSERVATRICE FONCIÈRE VIE, dite PFA, demande à la Cour de : - faire application des dispositions de l'article L 113.8 du Code des assurances et/ou de l'article 1116 du Code civil, - d'infirmer le jugement déféré et de condamner Monsieur Roland X... à lui rembourser les sommes versées à ce jour et celles qui seront ultérieurement versées, arrêtées au jour du prononcé de l'arrêt, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance et application des dispositions de l'article 1154 du Code civil, - condamner Monsieur X... au paiement de la somme de 100.000 francs à titre de dommages-intérêts pour mauvaise foi et procédure abusive, - l'autoriser à conserver les primes d'assurances

à titre de réparation complémentaire, - subsidiairement, ordonner une mesure de contre-expertise judiciaire confiée à un collège d'experts composé notamment d'un psychiatre, d'un endocrinologue et d'un médecin spécialisé en médecine légale, - condamner Monsieur X... au paiement de la somme de 30.000 francs au titre des frais irrépétibles. SUR CE, Considérant que deux questions sont présentement soumises à la Cour : - Monsieur X... s'est-il rendu coupable de réticences ou de fausses déclarations lors de la souscription du contrat, susceptibles de justifier l'annulation de celui-ci ' ; - dans la négative, les arrêts de travail successifs étaient-ils justifiés et Monsieur X... pouvait-il et peut-il reprendre une activité professionnelle normale ' ; Sur la demande d'annulation du contrat pour réticence ou fausses déclarations de l'assuré Considérant qu'au soutien de ses demandes, la société PFA soulève, par voie d'exception, la nullité du contrat pour fausse déclaration de Monsieur X... sur le fondement des articles L 113.8 du Code des assurances et/ou 1116 du Code civil ; Que l'article L 113.8 sus-visé dispose que :

"Indépendamment des causes ordinaires de nullité et sous réserve des dispositions de l'article ..., le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre ..." ; Que l'assureur fait valoir que la nullité du contrat suppose la réunion de deux conditions : une réticence intentionnelle et une modification de l'opinion du risque pour l'assureur ; Qu'il rappelle que lors de la souscription du contrat, en septembre 1989, Monsieur X... a déclaré peser 98 kilogrammes pour 1 mètre 84, ne pas suivre de traitement ou régime médical, être actuellement et habituellement en

bonne santé, avoir consulté un médecin dans les trois ans passés et subi un arrêt de travail de plus de quinze jours dans les deux ans ; Que la compagnie PFA ne fait pas grief à Monsieur X... de son poids, alors qu'il avait une constitution athlétique et un passé sportif, mais lui reproche de ne pas avoir fait état de son obésité cyclique ; qu'elle relève que le 17 février 1988 le poids de Monsieur X... était de 134 kgs, le 22 avril 1989 de 99 kgs pour passer à 121 kgs le 22 novembre 1989 alors que le 12 janvier 1989 il déclare à la compagnie un poids de 98 kgs ; Qu'elle reproche encore à Monsieur X... d'avoir passé sous silence une "dépression nerveuse profonde ayant justifié un traitement par antidépresseurs" et en 1988 et surtout en 1989, "un traitement par anti-dépresseurs majeurs", ainsi que le retrace le professeur A..., médecin qui suivait Monsieur GUEZ ; Que selon la compagnie PFA, Monsieur X... a menti sur son obésité, sa prise massive d'antidépresseurs, avant, lors et après la souscription du contrat, ainsi que sur des troubles psychologiques remontant à 1984 ; Considérant que pour mettre à néant les affirmations de Monsieur X..., selon lequel il n'aurait consulté le professeur A... qu'en février 1988, la compagnie PFA invoque le dossier médical du docteur A..., l'expertise du 6 janvier 1997 et l'étude du rapport du professeur C... du 12 septembre 1997 ; Qu'en ce qui concerne l'incidence de ces réticences sur la prise en charge du risque, la compagnie PFA fait valoir qu'elle n'aurait pas accepté la prise en charge de Monsieur X... face à une aussi lourde pathologie qui confine à l'absence d'aléa ; Que l'ensemble de ces éléments suffit, selon la compagnie PFA, à justifier l'annulation du contrat ; Considérant que la compagnie PFA critique le rapport des experts NYS et BORSTEIN dans la mesure où les conclusions de ce rapport ne tiennent compte quasiment que des déclarations de Monsieur X... et contiennent des inexactitudes patentes ; Que si les experts affirment

que Monsieur X... ne sort plus, ne se déplace plus et n'a plus de vie extérieure, il était cependant présent aux multiples audiences auxquelles le litige a donné naissance et qu'il se déplaçait normalement et de manière autonome ; Qu'elle considère que la confusion constante, reprise par les derniers experts, sur la chronologie des pathologies et sur leur retentissement propre sur l'état de Monsieur X..., ne permet pas d'entériner les conclusions du dernier rapport ; Considérant que Monsieur X... rappelle que dans la demande d'adhésion remplie par lui le 12 juin 1989, il déclarait peser 98 kgs, mesurer 1 mètre 84, avoir consulté un médecin au cours de ces trois dernières années, ne pas être inapte au travail, ne pas être atteint d'une infirmité ou d'une maladie chronique, avoir interrompu son travail plus de quinze jours au cours des deux dernières années et enfin ne pas être titulaire d'une pension d'invalidité et ne pas avoir eu de maladie grave et ne pas avoir subi d'opération chirurgicale ; Que selon lui ces déclarations répondaient aux questions posées et étaient parfaitement exactes et que nul autre renseignement ne lui était demandé ; que pareillement à partir des éléments indiqués, la compagnie n'a jamais jugé utile de solliciter des renseignements complémentaires ni de le soumettre à un examen ; Qu'il reconnaît avoir rencontré, avant la souscription, le Professeur A..., à raison de ses variations de poids et dans le contexte de relations amicales et que ce médecin n'a jamais pu constater une quelconque dépression nerveuse en 1984 puisqu'il n'est entré en relation avec lui qu'en février 1988 ; que de plus ce médecin est nutritionniste et non psychiatre ; Qu'aucun document médical n'établit qu'il prenait des anti-dépresseurs ni avant 1989 ni avant 1991 ; Considérant en conclusion, selon Monsieur X..., que rien n'établit aucune fausse déclaration, aucune réticence et que la nullité du contrat ne saurait être prononcée ; Qu'en tout état de

cause l'affection hypophysaire révélée postérieurement lui interdit toute activité professionnelle et a justifié les arrêts de travail ordonnés à ce jour ; qu'en conséquence la compagnie PFA ne peut, pour aucun des motifs vainement allégués, refuser de respecter le contrat ; Mais considérant que Monsieur X... a rempli, le 12 juin 1989, le questionnaire suivant : "Quels sont :

votre taille ' votre poids ', "Suivez-vous un traitement ou un régime médical ' réponse NON, "Etes vous actuellement et habituellement en bonne santé ' réponse OUI, "Pendant les trois dernières années avez-vous consulté un médecin ' pour quelles maladies et à quelles date ' réponse OUI, "Etes-vous actuellement en arrêt de travail ' réponse NON, "Souffrez-vous d'une infirmité ou d'une maladie chronique, laquelle ' depuis quelle date ' réponse NON, "Avez-vous interrompu votre travail pendant plus de 15 jours au cours des deux dernières années ' réponse OUI, "Etes-vous titulaire d'une pension d'invalidité ' réponse NON, "Avez-vous eu des maladies graves ou subi des opérations chirurgicales ' Lesquelles ' A quelles dates ' réponse NON, Que ce questionnaire est suivi de la mention préimprimée suivante "Je soussigné, déclare avoir répondu avec sincérité et exactitude aux questions ci-dessus, n'avoir rien caché qui puisse induire en erreur au sujet de mon état de santé. Toute fausse déclaration entraîne la nullité des garanties" ; Que dans le cadre intitulé "réservé au siège" figurent les indications suivantes : "VH + examen de sang" ; Que l'article L 113.2 du Code des assurances prévoit notamment que l'assuré est obligé de "2°- répondre exactement aux questions posées par l'assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l'assureur l'interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l'assureur les risques qu'il prend en charge" ; Considérant qu'il est de droit constant que la sincérité et l'exactitude des déclarations de l'assuré doivent s'apprécier en

fonction des questions posées ; Considérant que la compagnie PFA reproche à Monsieur X... les réponses données aux questions suivantes : - "Suivez-vous un traitement ou régime médical '", - "Etes-vous actuellement et habituellement en bonne santé '", - "Souffrez-vous d'une infirmité ou d'une maladie chronique '", - "Avez-vous eu des maladies graves ou subi des opérations chirurgicales '", Que Monsieur X... a répondu négativement à l'exception de la deuxième question à laquelle il a donné une réponse affirmative ; Qu'en ce qui concerne la question formulée de la manière suivante "pendant les trois dernières années avez-vous consulté un médecin ' Pour quelles maladies et à quelle dates '", Monsieur X... a répondu affirmativement mais n'a donné aucune autre indication ; Qu'aucune demande d'explication complémentaire n'a été formée par l'assureur ; Qu'en ce qui concerne l'arrêt de travail de quinze jours celui-ci concernait un épisode bronchopathique viral et n'est pas en cause présentement ; Que l'appelante reproche à Monsieur X... de ne pas avoir fait état de son comportement boulimique, de son obésité et de ses variations importantes de poids ; qu'elle retient encore une dépression nerveuse profonde en 1984, mentionnée par le Professeur C..., médecin intervenu à sa demande et sur pièces et le fait de ne pas avoir indiqué la prise d'anti-dépresseur ; Mais considérant qu'il ressort de l'ensemble des rapports produits que le seul médecin consulté par Monsieur X..., avant 1989, a été le docteur A..., médecin nutritionniste ; que les constatations de ce dernier sont rapportées par le docteur C..., médecin mandaté par la compagnie d'assurances, qui n'a jamais reçu Monsieur X... et précise clairement avoir travaillé sur dossier ; que ce médecin fait état du "dossier du professeur A... particulièrement révélateur à cet égard", ce dossier n'ayant jamais été porté à la connaissance des experts judiciaires successivement désignés ; que selon le docteur C... il

y est fait mention d'une dépression nerveuse profonde en 1984 et qu'en 1988 et surtout en avril 1989, il fait état d'un traitement par "anti-dépreseurs majeurs", "le compte-rendu de consultation du professeur A... en avril 1989 se termine d'ailleurs par une "nouvelle prescription de Floxyfral" ; Que si le docteur A... a confirmé le poids déclaré par Monsieur X... lors de l'établissement du questionnaire d'assurance, il n'existe aucun document émanant de ce médecin, confirmant le contenu des notes révélées par le docteur C... ; Que selon le rapport des docteurs CANETTI, PECKELS et de TINGUY, sur désignation judiciaire, il ressort que le 22 avril 1989 le docteur A... ne note pas de dépression ; Qu'il ne ressort d'aucun rapport des différents experts désignés, qu'en 1989, ceux-ci ont été en mesure de reconstituer l'historique d'un état dépressif antérieur à 1989 ni d'établir que dès cette date, les variations importantes de poids de Monsieur X... étaient liées, de manière alors certaine et reconnue, à une affection postérieurement révélée ou à tout autre trouble médicalement constaté ; Que tous les experts ne font que des références aux données contenues dans le rapport non judiciaire du docteur C..., lequel indique avoir fait usage des notes personnelles du docteur A..., notes demeurées inconnues de tout autre médecin et non confirmées par le docteur A... ; Qu'il ressort de l'ensemble des expertises qu'aucune certitude n'est établie concernant l'existence d'un syndrome dépressif, médicalement traité, lors de la signature du questionnaire, ni dans la période antérieure ; qu'un état dépressif éventuellement existant en 1984 et soigné par un médecin nutritionniste, ne permet pas de déduire la persistance de cet état ni l'existence d'une thérapeutique certaine appliquée postérieurement et notamment en 1988 et en 1989 ; Que de la même manière il n'est absolument pas établi que les variations de poids de Monsieur X... aient été prises en charge en tant que

manifestation d'une maladie décelée et décelable, au moment de l'adhésion au contrat ; Que médicalement, la compagnie PFA ne rapporte pas la preuve certaine de ce que Monsieur X..., en juin 1989, était "en mauvaise santé" et sous prescription médicamenteuse ; Que si à la question "pendant les trois dernières années, avez-vous consulté un médecin", Monsieur X... a répondu par l'affirmative, il n'a pas répondu aux questions subséquentes inscrites sur le questionnaire, savoir "pour quelles maladies et à quelles dates '", sans que la compagnie ait alors recherché de plus amples explications, pas plus qu'à la question concernant l'arrêt de travail signalé pour quinze jours, elle ne se soit préoccupée de l'absence de réponse aux questions subsidiaires ainsi formulées "motifs" et "durée" ; Considérant en conséquence que la compagnie PFA VIE n'est pas fondée à soutenir que Monsieur X... s'est, lors de la souscription au contrat, rendu coupable de réticences ou de fausses déclarations, en établissant le questionnaire soumis par la compagnie pas plus qu'elle ne démontre une réticence dolosive ou des déclarations mensongères au sens plus général de l'article 1116 du Code civil ; Qu'à bon droit le tribunal a dit que la garantie du risque invalidité était acquise à Monsieur X... ; que le jugement sur ce point doit être confirmé ; Sur la pertinence des arrêts de travail successifs et la possibilité pour Monsieur X... de reprendre une activité professionnelle Considérant qu'aux termes de leur rapport établi le 6 janvier 1997, les docteurs CANETTI, PECKELS et de TANGUY retenaient que la consolidation pouvait être fixée au 14 avril 1994, qu'aucun traitement médical ne justifiait de façon certaine l'impossibilité pour Monsieur X... de poursuivre une activité professionnelle pendant les périodes intermédiaires , jusqu'en 1994, et que la reprise du travail apparaissait possible depuis la consolidation malgré la poursuite du traitement et le risque de

rechute ; Que ces conclusions étant en contradiction avec celles du docteur Y..., la Cour dans son précédent arrêt a ordonné une mesure d'expertise complémentaire ; Que les docteurs NYS et BORNSTEIN ont conclu en ces termes: - l'état de Monsieur X... justifiait les arrêts totaux ou partiels d'activité prescrits, - Monsieur X... a été placé en état d'invalidité par la COTOREP le 30 juin 1993, - la pathologie intriquée et complexe de la victime est responsable d'une incapacité fonctionnelle de 85 % en- dehors de toute considération professionnelle, à partir du barème médical. Elle est responsable d'une incapacité fonctionnelle de 100 % par rapport à la profession exercée ; Que pour critiquer cette expertise, la compagnie PFA invoque à nouveau les conclusions du docteur C..., "dans son rapport critique du 31 janvier 1999", et le fait que celui-ci reproche aux derniers experts désignés de ne pas avoir fait la part des manifestations diverses existantes avant 1989 et après cette date et d'insister sur l'acromégalie sans aucune preuve sur sa participation dans le diabète alors qu'il s'agit d'une manifestation bien connue de l'obésité andro'de et que le dernier dosage de somathormone est normal avec un dosage d'IGF à peine élevé qui ne revêt jamais l'aspect ni la gravité des troubles présentés par Monsieur X... ; Que l'appelante argue de ces mêmes conclusions pour solliciter, à titre subsidiaire, une mesure de contre-expertise ; Considérant que Monsieur X... invoque les nombreux rapports établis par les médecins par lui contactés ou qui assurent sa prise en charge qui tous, comme les experts NYS et BORSNTEIN, concluent à une impossibilité radicale de toute reprise d'une activité professionnelle ; Que l'ensemble de ces constatations, nombreuses et argumentées de façon claire et précise sont reprises et explicitées par les docteurs NYS et BORSTEIN ; que les médecins et experts retiennent tous que l'adénome hypophysaire dont est porteur Monsieur

GUEZ est évolutif et que les troubles qui en résultent ne peuvent qu'être stabilisés par la poursuite d'un traitement médical, tout pronostic d'un traitement chirurgical étant exclu unanimement ; que les médecins consultés et experts désignés notent encore de façon concordante que la maladie dont Monsieur X... est atteint entraîne des troubles psychologiques tels qu'asthénie et dépression et que ces troubles psychiques vont s'amplifiant avec déchéance somatique, modification morphologique, surpoids considérable, limitation des mouvements ; Que ces éléments permettent, sans que les affirmations constamment péremptoires et isolées du docteur C... justifient une mesure de contre-expertise, de retenir que les arrêts de travail prescrits depuis 1991 doivent être pris en charge par la compagnie PFA et l'impossibilité pour Monsieur X... de reprendre une activité professionnelle normale, la compagnie PFA devant assurer la prise en charge de cet état d'invalidité totale ; Sur la demande de dommages-intérêts Considérant que Monsieur X... demande la somme de 200.000 francs en réparation du préjudice moral qui résulte pour lui de l'attitude de l'assureur, de la multiplication des procédures judiciaires et du refus de prendre acte de son état ; Qu'il convient de rappeler que plus de dix instances judiciaires ont dû être initiées ou suivies par Monsieur X... dans le contexte du présent litige, alors que le docteur Y..., dans son rapport du 23 septembre 1994, notait un appel téléphonique de Monsieur D... lui précisant qu'il "obéit à des consignes de la PRÉSERVATRICE lui demandant de faire un contentieux et de faire traîner cette expertise" ; Que la compagnie PFA, loin de se livrer à une étude précise et technique des différents rapports, s'est bornée, à deux reprises, à centrer sa défense sur les seules assertions du docteur C... qui n'a jamais vu Monsieur X... et s'est toujours limité à une étude de dossier, dossier dont il a tenu partiellement secret des

éléments tenus par lui pour essentiels ; Que par-delà la maladie, Monsieur X... a subi, à raison de cette longue et éprouvante procédure, un préjudice moral certain qu'il convient de réparer par l'allocation de la somme de 100.000 francs ; Sur les frais irrépétibles Considérant que succombant en ses prétentions, la compagnie PFA est irrecevable en ce chef de demande ; Qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X... les frais irrépétibles exposés ; que la somme de 20.000 francs doit lui être allouée en cause d'appel ; PAR CES MOTIFS, LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, Y AJOUTANT, CONSTATE ET DIT que Monsieur X... est en état d'incapacité totale de travail, CONDAMNE la compagnie PFA VIE à verser à Monsieur X... Z... indemnités contractuellement prévues jusqu'à la fin du contrat en date du 15 septembre 1989, LA CONDAMNE au paiement de la somme de 100.000 francs (CENT MILLE FRANCS) à titre de dommages-intérêts, LA CONDAMNE au paiement de la somme de 20.000 francs (VINGT MILLE FRANCS) au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, DÉBOUTE la compagnie PFA de toutes ses demandes, LA CONDAMNE aux entiers dépens, en ce compris tous les frais d'expertises judiciaires, et dit que Maître TREYNET pourra recouvrer directement les frais avancés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile. ET ONT SIGNE LE PRÉSENT ARRÊT :

Le Greffier ayant

Le Président, assisté au prononcé,

Laurent LABUDA

Colette GABET-SABATIER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006935867
Date de la décision : 09/03/2000

Analyses

ASSURANCE DE PERSONNES


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;2000-03-09;juritext000006935867 ?
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