FAITS ET PROCEDURE
Le 7 juin 1995, Madame X... épouse Y... a été victime du vol de son véhicule FORD alors que celui-ci était garé sur le parking de l'hôtel CLIMAT DE FRANCE, situé à ERAGNY.
Madame Y... était assurée auprès de la MACIF.
Son véhicule a été retrouvé par les services de Police, endommagé et le montant des dommages a été évalué par l'expert à la somme totale de 16.196,68 Francs.
Madame Y... a été indemnisée de son préjudice matériel par son assureur au titre de sa garantie contractuelle, sous déduction d'une franchise de 1.600 Francs.
La MACIF a, en vain, adressé une réclamation à la société HÈTEL CLIMAT DE FRANCE ainsi qu'à son assureur.
Par acte d'huissier en date du 21 octobre 1991, Madame Y... et la MACIF, la SA L'EGIDE, société de courtage d'assurances, ont assigné la SA VUIBERT HÈTEL CLIMAT DE FRANCE et la compagnie UNI EUROPE devant le tribunal d'instance de PONTOISE.
Par jugement rendu le 21 octobre 1997, ce tribunal a :
- mis hors de cause la société l'EGIDE,
- donné acte à la société UNI EUROPE de son intervention volontaire aux débats,
- déclaré la société GUY VUIBERT, exerçant sous l'enseigne CLIMAT DE FRANCE entièrement responsable des conséquences du vol du véhicule FORD appartenant à Madame Y... le 7 juin 1995 à ERAGNY SUR OISE en application de l'article 1952 du Code Civil,
- condamné in solidum la société GUY VUIBERT exerçant sous l'enseigne CLIMAT DE FRANCE et la société UNI EUROPE à payer les sommes suivantes :
[* à la MACIF subrogée dans les droits de son assurée, 14 596,68 Francs en réparation de son préjudice matériel,
*] à Madame Y... 1.600 Francs représentant le montant de sa franchise,
- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du jugement,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné les défenderesses aux dépens.
Appelantes de cette décision, la SA AXA COURTAGE venant aux droits de la SA UNI EUROPE et la société VUIBERT HÈTEL CLIMAT DE FRANCE font valoir que la responsabilité de l'hôtelier ne peut être engagée que si celui-ci a la jouissance privative du parking dans lequel le véhicule a été volé et qu'il ne peut y être débiteur d'une obligation de sécurité à l'égard de son client que dans la mesure où il y a eu dépôt.
Ils soutiennent enfin que la charge de la preuve incombe à celui qui réclame l'exécution d'une obligation et que Madame Y... doit rapporter la preuve de la jouissance privative de l'aire de stationnement sur lequel elle avait garé le véhicule.
Ils prient la Cour de :
- les recevoir en leur appel,
- infirmer le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
- débouter Madame Y... et la MACIF de toutes leurs demandes, fins et concluions,
- les condamner in solidum au paiement de la somme de 15.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
La MACIF et Madame Y... concluent à la confirmation du jugement entrepris et sollicitent en outre la capitalisation des intérêts
conformément à l'article 1154 du Code Civil ainsi que la condamnation in solidum des appelantes au paiement de la somme de 15.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture a été signée le 4 novembre 1999 et l'affaire plaidée le 9 novembre 1999.
SUR CE LA COUR
Considérant que selon l'article 1954 alinéa 2 du Code Civil, les hôteliers sont responsables des choses laissées dans les véhicules stationnées sur les lieux dont ils ont la jouissance privative, et par extension des véhicules eux-mêmes s'y trouvant ;
Qu'il est de droit constant que ces dispositions légales ne jouent pas lorsque le véhicule est stationné sur un parking non clôturé et non gardé, et donc utilisable par n'importe quel utilisateur, étranger à la clientèle de l'hôtel ;
Considérant que cet article n'édicte aucune présomption à la charge de l'hôtelier et que c'est donc à l'appelant de faire la preuve qui lui incombe qu'à la date des faits le parking dont s'agit n'était pas clôturé et qu'il n'était pas accessible à n'importe quel autre automobiliste, ou autre tierce personne, ce qui suppose donc nécessairement que la preuve est faite de l'existence d'une clôture complète avec porte et un système de fermeture, par clés ou usage de cartes magnétiques, rendant ce parking accessible qu'aux seuls clients de l'hôtel ;
Considérant que Madame Y... et la MACIF ne versent au soutien de leur réclamation qu'une seule pièce, à savoir une attestation émanant du maire d'ERAGNY ainsi rédigée :
"Je soussigné, Monsieur RAYEE Z... adjoint chargé de l'urbanisme et de l'environnement par délégation, certifie que conformément à la matrice cadastrale, le parc de stationnement de l'hôtel Climat de France, sis rue des Pinsons, cadastré section BN 158, fait partie intégrale d'un ensemble immobilier privé. Ce parc est par conséquent privatif" ;
Considérant que le seul caractère privatif des lieux ne suffit pas à engager la responsabilité de l'hôtelier ;
Qu'il appartient aux intimées de faire la preuve, notamment par la production d'un constat d'huissier, de photographies des lieux, de plans, que non seulement le parking est privatif, mais encore qu'il n'est pas accessible à d'autres usagers, ce d'autant plus que le directeur de l'hôtel atteste que des immeubles sont situés au bout de ce parking ;
Considérant que cette affirmation, au surplus, n'est pas en contradiction avec l'attestation du maire adjoint d'ERAGNY qui évoque "un ensemble immobilier" et ne fait pas état du seul édifice que constitue l'hôtel ;
Considérant que la preuve de l'existence d'une clôture ou d'un système de fermeture du parking mis à la disposition de ses clients par la société VUIBERT HÈTEL CLIMAT DE FRANCE n'est pas rapportée ;
Considérant qu'il convient d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de débouter la MACIF et Madame Y... de toutes leurs demandes ;
Sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile :
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge des intimées les sommes exposées par elles qui ne sont pas comprises dans les dépens ;
Qu'il y a lieu de leur allouer la somme de 5.000 Francs en
application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance de PONTOISE le 21 octobre 1997 ;
CONDAMNE in solidum Madame Y... et la compagnie MACIF à payer à la SA VUIBERT HÈTEL CLIMAT DE FRANCE et la SA AXA COURTAGE ASSURANCES la somme de 5.000 Francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
LES CONDAMNE en outre, sous la même solidarité, aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés par la société civile professionnelle JULLIEN-LECHARNY-ROL, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : LE GREFFIER
LE PRESIDENT B. TANGUY
A. CHAIX