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09/12/1999 | FRANCE | N°1998-8885

France | France, Cour d'appel de Versailles, 09 décembre 1999, 1998-8885


Par jugement du 6 novembre 1985, le tribunal de grande instance de PARIS a prononcé l'adoption simple de C R, née le 17 mars 1951, par J L, né le 25 janvier 1920 et dit que l'adoptée sera désormais nommée C R-L.

Par acte du 30 mai 1997, Monsieur J L a fait assigner Madame C R-L devant le tribunal de grande instance de NANTERRE aux fins de révocation de l'adoption sur le fondement de l'article 370 du code civil, demandant en outre au tribunal d'ordonner à Madame C R-L de restituer tous les bijoux en sa possession, lesquels appartenaient à son épouse décédée, et de révoquer

toutes les donations faites en vue de l'adoption.

Au soutien de ...

Par jugement du 6 novembre 1985, le tribunal de grande instance de PARIS a prononcé l'adoption simple de C R, née le 17 mars 1951, par J L, né le 25 janvier 1920 et dit que l'adoptée sera désormais nommée C R-L.

Par acte du 30 mai 1997, Monsieur J L a fait assigner Madame C R-L devant le tribunal de grande instance de NANTERRE aux fins de révocation de l'adoption sur le fondement de l'article 370 du code civil, demandant en outre au tribunal d'ordonner à Madame C R-L de restituer tous les bijoux en sa possession, lesquels appartenaient à son épouse décédée, et de révoquer toutes les donations faites en vue de l'adoption.

Au soutien de sa demande, Monsieur J L faisait valoir qu'en 1989 l'adoptée a cessé de collaborer avec lui au sein de la SCP d'Avocats où elle était associée et que ni elle ni ses enfants n'entretiennent plus de lien affectif ni n'ont de contacts avec lui.

Madame C R-L épouse LG s'est opposée à la demande, contestant que l'éloignement invoqué par Monsieur J L puisse constituer le "motif grave" prévu à l'article 370 du code civil et faisant valoir qu'en tout état de cause, cet éloignement étant le fait de Monsieur J L, la révocation de l'adoption ne pourrait intervenir qu'à ses torts exclusifs et ne pourrait avoir d'effet que pour l'avenir.

Par jugement du 20 octobre 1998, le tribunal de grande instance de NANTERRE a débouté Monsieur J L de toutes ses demandes en relevant que ni de simples querelles et des défauts de caractère, au demeurant réciproques, ni une séparation d'ordre professionnel, ni même une altération de rapports affectifs, même avec négligence et indifférence consécutives ne sauraient être qualifiés de "motifs graves" au sens de l'article 370 du code civil.

Appelant, Monsieur J L conclut à l'infirmation de la décision entreprise et demande à la Cour, en statuant à nouveau, d'ordonner la

révocation de l'adoption simple, de dire que Madame C R-L restituera les bijoux appartenant à Madame feu L et de condamner Madame C R-L à lui payer la somme de 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Madame C R-L conclut à la confirmation de la décision entreprise et subsidiairement demande à la Cour, si la révocation de l'adoption devait être prononcée, de dire qu'elle le serait aux torts de Monsieur J L.

Elle soutient que la demande en restitution des bijoux est indéterminée et dénuée de fondement en vertu des dispositions de l'article 370-2 du code civil et demande à la Cour, en tout état de cause, de dire cette demande mal fondée, s'agissant de dons manuels antérieurs à l'adoption.

Elle sollicite le paiement de la somme de 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le MINISTERE PUBLIC conclut à la confirmation du jugement entrepris aux motifs que les griefs allégués par Monsieur J L à l'encontre de Madame C R-L tels que la cessation de toute collaboration au sein de la SCP d'Avocats où elle était associée, les distances prises par celle-ci consécutives à des différends professionnels et de caractères, ne sauraient être considérés comme des motifs graves au sens de la jurisprudence, de nature à rendre l'adoption insupportable.

Il ajoute que le lien de filiation adoptive, pas plus que le lien de filiation biologique, ne peut être exposé à être anéanti par des conflits, des susceptibilités ou des humeurs qui ne sont que l'expression de dysharmonies que les aléas de la vie en commun peuvent faire naître à tout moment dans toutes les familles ; SUR CE, Considérant que Monsieur J L reprend essentiellement en appel les

griefs développés devant les premiers juges par lesquels il reprochait à Madame C R-L d'avoir rompu tous liens professionnels et affectifs, estimant que la mésentente profonde et réciproque des parties doit être considérée comme une cause grave de révocation de l'adoption ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que l'adoptée a cessé toutes relations avec l'adoptant depuis 1989 ;

Qu'il résulte des nombreuses attestations produites que la mésentente qui s'est installée entre les parties, toutes les deux dotées d'une très forte personnalité, ne tient pas exclusivement au comportement de Madame C R-L mais encore à celui de Monsieur J L qui s'immissait de plus en plus dans la vie professionnelle, alors qu'il était censé se retirer des affaires, et familiale de Madame RAMBAUD-LOYGUE, manifestant à l'égard de celle-ci autorité et brusquerie ;

Qu'il s'ensuit que la responsabilité du climat d'incompréhension entre les intéressés est partagée, et le comportement de l'adoptée excusable ;

Que par ailleurs, Monsieur J L ne rapporte pas la preuve d'une ingratitude caractérisée de Madame C R-L ;

Qu'il ne justifie pas de la situation financière particulièrement déplorable dont il fait état ni de la nécessité de recevoir une aide alimentaire que lui refuserait Madame C R-L, aide qu'il n'a manifestement pas demandée ;

Qu'en outre il est mal fondé à se plaindre de ne pas recevoir la visite de sa fille et de ses petits-enfants dans la maison de PERREUSE dont il est usufruitier et Madame C R-L nu-propriétaire dès lors qu'il a mis en demeure cette dernière de retirer tous les meubles lui appartenant ;

Que la simple mésentente, fût-elle profonde et réciproque ne constitue pas un motif grave au sens de l'article 370 du code civil,

le lien de filiation adoptive ne pouvant être anéanti par des conflits, des susceptibilités ou des humeurs qui ne sont que les aléas que la vie en commun peut faire naître dans toutes les familles ;

Qu'il s'ensuit que la décision entreprise sera purement et simplement confirmée ;

Considérant que pour des raisons d'équité, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, après débats en Chambre du Conseil,

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions,

DEBOUTE les parties de toute demande autre ou plus ample,

CONDAMNE Monsieur J L aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ARRET REDIGE PAR :

Madame Lysiane LIAUZUN, Conseiller

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier,

Le Président, Catherine CONNAN,

Colette GABET-SABATIER.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1998-8885
Date de la décision : 09/12/1999

Analyses

FILIATION - Filiation adoptive - Adoption simple - Révocation

Le fait, non contesté, qu'un adopté ait cessé toutes relations avec son adoptant depuis plusieurs années, alors que les pièces versées aux débats établissent que la responsabilité du climat d'incompréhension instauré entre les parties est partagée et que le délaissement invoqué par l'adoptant résulte de sa propre attitude. S'il traduit une mésentente, fût-elle profonde et réciproque, il ne constitue pas un motif grave, au sens de l'article 370 du Code civil, de nature à justifier la révocation de l'adoption, le lien de filiation adoptive ne pouvant être anéanti par des conflits, des susceptibilités ou des humeurs qui ne sont que les aléas que la vie en commun peut faire naître dans toutes les familles


Références :

Article 370 du Code civil

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-12-09;1998.8885 ?
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