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03/12/1999 | FRANCE | N°1997-9238

France | France, Cour d'appel de Versailles, 03 décembre 1999, 1997-9238


FAITS ET PROCEDURE Par acte sous seing privé en date du 3 février 1958, Monsieur et Madame Jacques X... ont acquis de Monsieur BAVOILLOT un bail commercial situé 1, passage Pilastre du Rozier à VERSAILLES, que les consorts Y..., propriétaires des lieux, avaient consenti à ce dernier..

Le bail a été renouvelé sans interruption à compter du 1er janvier 1959 jusqu'au 3 novembre 1987, en premier lieu, au profit de Monsieur et Madame X..., puis au profit de leur fils et de leur belle-fille, afin d'exploiter un fonds de commerce de laverie, de blanchisserie et de teinturerie dont l

'enseigne actuelle est "PRESSING MULTISERVICE RIVE DROITE".

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FAITS ET PROCEDURE Par acte sous seing privé en date du 3 février 1958, Monsieur et Madame Jacques X... ont acquis de Monsieur BAVOILLOT un bail commercial situé 1, passage Pilastre du Rozier à VERSAILLES, que les consorts Y..., propriétaires des lieux, avaient consenti à ce dernier..

Le bail a été renouvelé sans interruption à compter du 1er janvier 1959 jusqu'au 3 novembre 1987, en premier lieu, au profit de Monsieur et Madame X..., puis au profit de leur fils et de leur belle-fille, afin d'exploiter un fonds de commerce de laverie, de blanchisserie et de teinturerie dont l'enseigne actuelle est "PRESSING MULTISERVICE RIVE DROITE".

Par acte d'huissier en date du 13 janvier 1997, les consorts Y... ont fait citer Monsieur Thierry X... devant le tribunal d'instance de VERSAILLES aux fins notamment de :

- constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail commercial,

- ordonner l'expulsion,

- condamner Monsieur X... au paiement des sommes de :

* 16.006,03 Francs et 3.782 Francs liées à la réparation du tuyau d'évacuation des gaz brûlés de la chaudière et à la suppression du tuyau d'écoulement des eaux,

* 8.042,40 Francs au titre des charges impayées,

* 20.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

A l'audience ils se sont désistés de leur demande visant à l'acquisition de la clause résolutoire pour solliciter la résiliation judiciaire du bail, au motif que le locataire n'avait pas respecté ses obligations d'entretien et de paiement des loyers et charges locatives.

Par jugement contradictoire en date du 22 mai 1997, le tribunal

d'instance de VERSAILLES a ordonné une mesure d'expertise.

A la suite du dépôt du rapport d'expertise de Monsieur Z..., les consorts Y... ont maintenu leurs demandes.

Par jugement contradictoire en date du 11 septembre 1997, le tribunal d'instance de VERSAILLES a rendu la décision suivante :

- donne acte aux consorts Y... du désistement de leur demande d'acquisition de la clause résolutoire,

- condamne Monsieur X... à payer aux consorts Y... en deniers ou quittances, la somme de 3.867,90 Francs avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation au titre des charges impayées pour les années 1993, 1994 et 1995,

- ordonne l'exécution provisoire,

- déboute les parties du surplus de leurs demandes,

- condamne Monsieur X... à payer aux demandeurs la somme de 7.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- met les entiers dépens à la charge de Monsieur X... qui comprendront le coût des expertises de Monsieur A... et de Monsieur Z..., ainsi que le coût du commandement de payer du 6 novembre 1996 et de la sommation visant la clause résolutoire du 18 novembre 1996. A l'appui de leur appel interjeté le 10 octobre 1997, les consorts Y... font valoir dans leurs dernières conclusions parvenues au greffe le 22 juin 1999, que la résiliation du bail est parfaitement justifiée, Monsieur X... n'ayant pas satisfait à ses obligations de bailleur notamment en n'entretenant pas les locaux (tuyau de gaz, travaux relatifs à l'évacuation des eaux) malgré plusieurs expertises et sommations de faire, et en ne satisfaisant pas à l'obligation de paiement des loyers et charges, de plus, ils exposent que la destination des locaux n'a pas été respectée, pas plus que la

procédure de déspécialisation prévue au décret du 30 septembre 1953. Ils soutiennent en outre que leur demande de résiliation judiciaire du bail est recevable en cause d'appel dès lors qu'elle avait déjà été formée en première instance.

Ils prient donc la cour de :

- déclarer leur appel tant recevable que bien fondé,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de résiliation judiciaire du bail fondée sur l'article 1184 du code civil,

Statuant à nouveau,

- prononcer la résiliation du bail consenti à Monsieur X... aux torts et griefs de ce dernier,

- voir en conséquence, ordonner l'expulsion de Monsieur X... ainsi que de tout occupant de son chef, et ce, avec l'assistance du commissaire de police et de la force publique si besoin est,

- ordonner la séquestration des meubles trouvés sur place, dans tout garde-meubles, aux frais, risques et périls de Monsieur X...,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné Monsieur X... à payer aux consorts Y... la somme de 3.867,90 Francs mais élever toutefois cette somme à celle de 31.454,29 Francs,

- condamner Monsieur X... à verser aux consorts Y... la somme de 15.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens tant de première instance et d'appel qui comprendront notamment le coût des expertises de Monsieur A... et de Monsieur Z..., ainsi que le coût du commandement de payer du 6 novembre 1996 et de la sommation visant la clause résolutoire du 18 novembre 1997, dont le recouvrement s'opérera au profit de la SCP KEIME GUTTIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Monsieur X..., appelant incident, fait valoir notamment que la demande de résiliation est irrecevable dans la mesure où les appelants s'étaient désistés en première instance, de leur demande tendant à voir déclarer acquise la clause résolutoire insérée au bail ; qu'au jour où le tribunal a statué, l'intégralité des travaux afférents au local donné à bail a été effectué ; que l'adjonction d'un "POINT RELAIS 3 SUISSES" à l'activité commerciale de blanchisserie n'a pas été de nature à déspécialiser l'activité commerciale par lui exercée.

Il sollicite donc de la cour de :

- débouter les consorts Y... de leur appel, les en dire mal fondés,

- confirmer le jugement prononcé par le tribunal d'instance de VERSAILLES, le 11 septembre 1997, sauf en ce qu'il a mis à la charge du concluant une indemnité au profit des appelants au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et les frais d'expertise,

- le décharger de ces deux chefs,

Ajoutant au jugement,

Vu l'article 564 du nouveau code de procédure civile,

- déclarer irrecevable car nouvelle et au surplus injustifiée, la demande de condamnation formée pour la première fois devant la cour par les consorts Y... à l'encontre de Monsieur X..., à hauteur de la somme de 31.454,28 Francs,

- condamner les consorts Y... à lui payer une somme de 20.000 Francs au titre de dommages-intérêts et celle de 10.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel et autoriser la SCP LEFEVRE TARDY, avoué, à recouvrer directement ceux la concernant, conformément aux dispositions de l'article 699 du

nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 7 octobre 1999 après trois reports de la date de cette signature et l'affaire plaidée à l'audience du 2 novembre 1999, là encore après report de date, l'audience ayant été fixée d'abord au 16 septembre 1999.

SUR CE, LA COUR

Considérant qu'il est d'abord observé qu'en dernier les appelants reprochent à Monsieur X... de ne jamais avoir réglé régulièrement ses loyers, et ce depuis 40 ans, mais qu'ils ne font pas état de sommations de payer qu'ils lui auraient adressées avant 1995, de ce chef, et qu'ils ne communiquent rien à ce sujet ; I)

Considérant que les consorts Y... réclament en dernier la résiliation du bail et qu'ils se placent donc sur le fondement des articles 1184 et 1741 du code civil, la cour ayant à juger si les manquements imputés à Monsieur X... sont suffisamment graves pour justifier cette résiliation ; que le fondement tiré de l'application de la clause résolutoire contenue dans le contrat de bail n'a plus à être retenu maintenant puisque les consorts Y... se sont désistés devant le tribunal d'instance de leurs demandes fondées sur cette clause et que le premier juge leur a donné acte de ce désistement ; qu'ils ne sont donc plus en droit de reprendre devant la cour ce moyen auquel ils avaient expressément renoncé devant le premier juge ;

Considérant donc quant aux articles 1184 et 1741 du code civil, seuls retenus, que le premier juge a, à bon droit, considéré que l'obligation d'entretien et de réparation des installations du pressing avait été respectée par Monsieur X..., ainsi que l'avait constaté l'huissier Maître BARIANI, le 10 juin 1997 et ainsi que le démontraient les factures de la société PERRIER du 31 décembre 1996

et du 14 avril 1997 qui a procédé au remplacement du conduit d'ETERNIT ; qu'il n'y a donc plus matière à résiliation judiciaire, de ce chef ;

Considérant qu'il est constaté que dans leurs dernières conclusions, les appelants ne réclament plus le paiement de la somme de 3.782 Francs correspondant aux frais de suppression du tuyau d'écoulement des eaux ;

Considérant que les appelants font état, en dernier, de la somme de 3.867,90 Francs, qui correspond à un solde de charges locatives pour les années 1993, 1994 et 1995, exactement fixé par le premier juge dont la décision est confirmée, de ce chef ; que le tribunal a, à bon droit, retenu que la demande originaire des bailleurs devait être ramenée à de plus justes chiffres et qu'il a, notamment, motivé la réduction de leurs prétentions en explicitant que les intéressés avaient imputé, à tort, à Monsieur X... le coût du remplacement du compteur divisionnaire, et ce, contrairement aux dispositions limitatives du décret n° 87-713 du 26 août 1987 ; que cette dette, relativement modique, de 3.867,90 Francs ne représente donc pas un manquement suffisamment grave pouvant justifier le prononcé d'une résiliation judiciaire, aux torts du preneur ;

Considérant que les consorts Y... reprochent de plus à leur locataire d'avoir ajouté à son activité contractuelle de "laverie automatique, dépôt de blanchisserie et teinturerie pressing", celle de "POINT-RELAIS 3 SUISSES", certes non prévue dans le bail ; qu'il est cependant manifeste que cette dernière activité n'a qu'un caractère très accessoire et complémentaire qu'elle est très limitée et qu'elle ne porte pas atteinte directement et gravement à la destination convenue des lieux qui a été respectée puisqu'il n'est pas contesté que Monsieur X... exerce toujours dans les lieux, à titre principal, une activité de laverie, blanchisserie et

teinturerie-pressing ;

Considérant qu'il n'y a donc pas de ce chef de violation grave imputable à Monsieur X... qui pourrait justifier une résiliation du bail, à ses torts ;

Considérant enfin qu'une partie de ce litige a porté sur des retards reprochés à Monsieur X... dans le paiement de ses loyers et des charges locatives qui lui avait été réclamé par la voie de deux commandements de payer du 7 août 1995 et du 6 novembre 1996 et que certes, les causes de ces commandements ont été payés avec retard ; que cependant ces retards, eux non plus, ne sont pas suffisamment graves pour justifier une résiliation judiciaire aux torts du preneur qui est locataire depuis 40 ans et dont il n'est toujours pas démontré qu'il aurait été un mauvais payeur tout au long de son bail ; que de plus, à la date de leurs dernières conclusions du 21 juin 1999, les consorts Y... n'ont pas fait état d'un actuel retard imputable à Monsieur X... dans le paiement de ses loyers et de ses charges locatives ; qu'il n'y a donc pas lieu d'envisager une résiliation judiciaire de ce chef, et qu'en définitive, les consorts Y..., sont déboutés de ce chef de demande, quel que soit le manquement qu'ils invoquent ; que le jugement est par conséquent confirmé en ce qu'il a, à bon droit, refusé de prononcer cette résiliation ;

Considérant que les appelants sont donc déboutés de leur demande infondée et injustifiée en paiement de 31.454,29 Francs, ainsi que des fins de toutes les autres demandes qui ne sont que les accessoires d'une résiliation du bail, laquelle n'est pas prononcée ; Considérant que compte-tenu de l'équité les consorts Y... sont déboutés de leur demande en paiement de la somme de 15.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que par

contre, le jugement est confirmé en ce qu'il leur a, à bon droit, et eu égard à l'équité, accordé 7.000 Francs en vertu de cet article ; II)

Considérant que certes les consorts Y... succombent en leur appel, mais qu'ils ont fait valoir des moyens sérieux et qu'il ne peut donc leur être reprochés un abus d'ester en justice comme le soutient l'intimé qui est donc débouté de sa demande en paiement de 20.000 Francs de dommages-intérêts de ce chef ; que compte-tenu de l'équité, Monsieur X... est de plus débouté de sa demande en paiement de la somme de 10.000 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant enfin que la cour réformant juge que les frais d'expertise judiciaire seront supportés par moitié par les consorts Y... d'une part, et par Monsieur X... d'autre part ;

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Vu les articles 1184 et 1741 du code civil :

- DEBOUTE les consorts Y... des fins de leur appel ;

- CONFIRME le jugement déféré à l'exception cependant des frais d'expertise judiciaire qui seront supportés par moitié par les consorts Y..., d'une part, et par Monsieur X..., d'autre part ;

- DEBOUTE les parties des fins de toutes leurs autres demandes et CONFIRME donc le jugement en toutes ses autres dispositions non contraires aux présentes ;

- CONFIRME le jugement en ce qui concerne les dépens ;

- CONDAMNE les consorts Y... aux dépens d'appel qui seront recouvrés directement contre eux par la SCP d'avoués LEFEVRE TARDY, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : LE GREFFIER

LE PRESIDENT B. TANGUY

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-9238
Date de la décision : 03/12/1999

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Résiliation - Causes - Manquements aux clauses du bail

La circonstance qu'un locataire ajoute à son activité contractuelle de "laverie automatique, dépôt de blanchisserie et teinture pressing" celle de point de dépôt de livraison d'une société de vente par correspondance, non prévue au bail, ne constitue pas une violation grave, imputable au locataire, de nature à justifier une résiliation du bail, dès lors que ladite activité n'a qu'un caractère très accessoire, complémentaire et limitée, et qu'elle ne porte pas atteinte directement et gravement à la destination convenue des lieux, puisqu'il n'est pas contesté que le locataire exerce dans les lieux, à titre principal, l'activité spécifiée par le contrat de bail


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-12-03;1997.9238 ?
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