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19/11/1999 | FRANCE | N°JURITEXT000006935363

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19 novembre 1999, JURITEXT000006935363


FAITS ET PROCEDURE,

Les parents de Monsieur X... se sont vus consentir un bail sur un pavillon sis 14 rue de la Flèche à SCEAUX, suivant acte sous seing privé en date du 30 juin 1943, puis c'est Monsieur X... leur fils qui en est devenu locataire.

Madame Y..., propriétaire de ce pavillon, étant décédée le 13 avril 1994, l'un de ses deux fils, Monsieur Alain Y... en est devenu le seul propriétaire suivant acte notarié de partage en date du 31 janvier 1995.

Le 31 mai 1996, Monsieur Alain Y... a fait délivrer à Monsieur et Madame X... un congé pour le 1er déc

embre 1996, en application des dispositions de l'article 19 de la loi du 1er se...

FAITS ET PROCEDURE,

Les parents de Monsieur X... se sont vus consentir un bail sur un pavillon sis 14 rue de la Flèche à SCEAUX, suivant acte sous seing privé en date du 30 juin 1943, puis c'est Monsieur X... leur fils qui en est devenu locataire.

Madame Y..., propriétaire de ce pavillon, étant décédée le 13 avril 1994, l'un de ses deux fils, Monsieur Alain Y... en est devenu le seul propriétaire suivant acte notarié de partage en date du 31 janvier 1995.

Le 31 mai 1996, Monsieur Alain Y... a fait délivrer à Monsieur et Madame X... un congé pour le 1er décembre 1996, en application des dispositions de l'article 19 de la loi du 1er septembre 1948, afin de mettre le pavillon à la disposition de deux de ses enfants, Christine Y... née le 17 octobre 1970 et Thierry Y..., né le 22 décembre 1974.

Le 22 janvier 1997, Monsieur Alain Y... a fait assigner Monsieur et Madame X... devant le tribunal d'instance d'ANTONY afin de voir valider ce congé, autoriser l'exercice du droit de reprise au bénéfice de ses enfants Christine et Thierry Y..., ordonner l'expulsion de Monsieur et Madame X... et de tous occupants de leur chef, ainsi que la séquestration du mobilier et ce, avec le bénéfice de l'exécution provisoire.

Monsieur et Madame X... ont soulevé en premier lieu la nullité de l'assignation comme délivrée moins de 15 jours avant la date de l'audience du tribunal.

Subsidiairement, ils ont conclu à la nullité du congé délivré pour le 1er décembre 1996, qui ne correspond pas à une date d'échéance du bail, signé le 30 juin 1943 et renouvelable tacitement par périodes triennales. Ils ont fait valoir en outre qu'un "congé article 19" de la loi du 1er septembre 1948 ne peut intervenir qu'après un "congé article 4" de la même loi; qu'enfin, Monsieur Y... est propriétaire d'autres biens.

Ils ont donc sollicité la désignation d'un expert chargé d'évaluer le patrimoine immobilier de Monsieur Alain Y... et de vérifier si les conditions de l'article 19 sont réunies en ce qui concerne les bénéficiaires de la reprise.

Par jugement en date du 8 septembre 1997, le tribunal d'instance d'ANTONY a rendu la décision suivante :

- reçoit la demande de Monsieur Y...,

- valide le congé régulièrement délivré le 31 mai 1996 par Monsieur Alain Y... à Monsieur et Madame X...,

- constate qu'à compter du 1er juillet 1997, Monsieur et Madame X... sont devenus occupants sans droit, ni titre par l'effet du congé délivré le 31 mai 1996,

- dit que Monsieur et Madame X... devront libérer les lieux situés à SCEAUX (92330), 14, rue de la Flèche, de leurs biens et de tous occupants de leurs chefs dans le délai de deux mois suivant le commandement de libérer les lieux,

- ordonne, à défaut de départ volontaire, l'expulsion de Monsieur et Madame X... selon les formes légales et, au besoin avec l'assistance de la force publique, ainsi que l'enlèvement des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux loués situés à SCEAUX 14, rue de la Flèche, afin de libérer ceux-ci et à leur dépôt dans un garde-meubles aux frais, risques et périls de Monsieur et Madame X... sous réserve du respect des dispositions des articles 65 et 66 de la loi du 9 juillet 1991,

- ordonne l'exécution provisoire,

- déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamne Monsieur et Madame X... aux dépens et à payer à Monsieur Y... une indemnité de 2.000 francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le 6 novembre 1997, Monsieur et Madame X... ont interjeté appel. Ils reprochent au premier juge de s'être borné à reproduire les termes du congé, sans qu'il soit démontré en quoi les bénéficiaires de la reprise ne disposaient pas d'une habitation conforme à leurs besoins, alors qu'un contrôle minimum des pièces produites par Monsieur Alain Y... aurait permis de déceler le caractère artificiel et visiblement préparé des arguments avancés à l'appui du congé.

Ils soutiennent qu'ils ne disposent à ce jour d'aucun autre logement leur permettant d'exercer normalement leur profession, qui consiste en l'exploitation d'une auto-école rue Caulaincourt à PARIS ; que leurs deux filles qui habitent avec eux travaillent également à PARIS ; qu'il n'est donc pas question qu'ils aillent habiter dans la Nièvre où ils possèdent une maison de trois pièces ; qu'ils ont fait des démarches afin de se reloger, mais que d'une part, les listes d'attente sont très longues tant à l'OPHLM 92 qu'à la Ville de Sceaux et que d'autre part, leurs ressources modestes ne leur permettent pas de se reloger dans le secteur privé.

Ils demandent à la Cour de :

- constater que Monsieur Alain Y... ne justifie pas de l'existence des conditions d'application de l'article 19 alinéa 1 de la loi du 1er septembre 1948, et notamment du fait que les bénéficiaires de la reprise ne disposent pas de logement correspondant à leurs besoins,

En conséquence, infirmer purement et simplement le jugement entrepris,

- débouter Monsieur Y... de toutes ses demandes fins et conclusions,

- débouter purement et simplement Monsieur Y... de sa demande de fixation d'astreinte,

- condamner Monsieur Alain Y... à payer à Monsieur et Madame X... la somme de 10.000 francs sur la base des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- condamner Monsieur Alain Y... aux entiers dépens de première instance et d'appel,

- ordonner la distraction des dépens au profit de la SCP GAS en application de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Monsieur Alain Y... réplique que lors du congé, sa fille Christine vivait dans un appartement de trois pièces loué à l'Office d'HLM FRANCE HABITATION avec Arno de Groot et leur fils, né le 9 mai 1995 ; que depuis le congé, Christine a épousé Arno de GROOT et qu'un second enfant leur est né le 8 janvier 1998 ; que Christine et sa famille vivent toujours dans le même appartement de trois pièces ; qu'elle ne dispose donc pas d'une habitation correspondant à ses besoins normaux et à ceux de sa famille ; que par ailleurs, lors du congé, son fils Thierry, qui poursuivait des études supérieures à l'Université de saint Quentin en Yvelines, occupait une chambre dans la maison de ses parents ; que sa situation est aujourd'hui identique; que lui non plus ne dispose pas d'un logement indépendant correspondant à ses besoins normaux.

Il demande à la Cour de :

- dire et juger l'appel interjeté par Monsieur et Madame X... à l'encontre du jugement rendu le 8 septembre 1997 par le tribunal d'instance d'ANTONY (92160), mal fondé et abusif,

- dire et juger que les dispositions de l'article 19 de la loi du 1er septembre 1948 sont réunies,

- dire et juger que les deux enfants du concluant, Christine et Thierry, bénéficiaires de la reprise, ne disposent pas d'une habitation correspondant à leurs besoins normaux, et pour l'enfant Christine aux besoins normaux des membres de sa famille,

- confirmer le jugement rendu le 8 septembre 1997 par le tribunal d'instance d'ANTONY (92160), dans toutes ses dispositions,

- débouter Monsieur et Madame X... de toutes les demandes,

Y ajouter, condamner Monsieur et Madame X... à régler au concluant le montant d'une astreinte de 800 francs par jour, à compter de la date de l'arrêt à intervenir,

- condamner Monsieur et Madame X... à régler au concluant le montant de 10.000 francs, en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

Et condamner Monsieur et Madame X... aux entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP MERLE CARENA DORON, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 7 octobre 1999 et l'affaire plaidée à l'audience du 12 octobre 1999.

SUR CE, LA COUR,

Considérant qu'aux termes de l'article 19 de la loi du 1er septembre 1948, le droit au maintien dans les lieux n'est pas opposable au propriétaire qui veut reprendre son immeuble pour le faire habiter

par ses descendants et qui justifie que le bénéficiaire de la reprise ne dispose pas d'une habitation correspondant à ses besoins normaux et à ceux des membres de sa famille vivant habituellement avec lui ; Considérant que Monsieur Alain Y... justifie, par la production du contrat de location en date du 29 juillet 1995 et par les avis d'échéance de loyers, qu'à la date du congé litigieux, sa fille Christine habitait avec Arno DE GROOT et leur fils Thoma DE GROOT, dans un appartement de trois pièces loué auprès de la SA d'HLM FRANCE HABITATION; qu'il ne peut donc être affirmé qu'elle ne disposait pas alors d'une habitation correspondant à ses besoins normaux et à ceux de sa famille, même si depuis l'époque du congé, la famille de Christine Y... s'est agrandie puisqu'elle a eu un second enfant, (événement prévisible) de sorte que l'appartement qu'elle occupe est désormais trop petit pour un couple avec deux enfants ;

Considérant que cependant, un enfant majeur n'est pas tenu d'habiter chez ses parents et peut légitimement prétendre avoir une habitation indépendante ; qu'à l'époque du congé, Thierry Y..., né le 22 décembre 1974, vivait chez ses parents et ne disposait donc pas d'une habitation indépendante ; que cette situation perdure aujourd'hui encore ; que Monsieur Alain Y... justifie ainsi que l'un de ses enfants, désigné comme bénéficiaire de la reprise, ne disposait pas d'une habitation correspondant à ses besoins normaux lors du congé ; que les appelants ne peuvent donc valablement lui opposer le droit au maintien dans les lieux ;

Considérant que par conséquent, la cour confirme le jugement déféré, notamment en ce qu'il a dit que Monsieur et Madame X... étaient occupants sans droit ni titre depuis le 1er juillet 1997 et a ordonné leur expulsion à défaut de départ volontaire ; qu'il convient d'assortir la décision de libération des lieux et d'expulsion d'une astreinte provisoire de 300 Francs par jour, passé un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt ;

Considérant qu'eu égard à l'équité, il y a lieu d'allouer à Monsieur Alain Y... la somme de 7.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

ET Y AJOUTANT :

ASSORTIT la décision de libération des lieux par les époux X... et d'expulsion, d'une astreinte provisoire de 300 Francs par jour,

passé un délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt ;

DEBOUTE Monsieur et Madame X... des fins de toutes leurs demandes ;

CONDAMNE Monsieur et Madame X... à payer à Monsieur Alain Y... la somme de 7.000 Francs (SEPT MILLE FRANCS) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

LES CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre eux par la SCP MERLE CARENA DORON, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Et ont signé le présent arrêt :

Le Greffier,

Le Président,

B. TANGUY

Alban CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006935363
Date de la décision : 19/11/1999

Analyses

BAIL A LOYER (loi du 1er septembre 1948) - Reprise - Article 19 - Conditions - Habitation ne correspondant pas aux besoins du bénéficiaire - Définition - Besoins normaux

Remplit les conditions exigées par l'article 19 de la loi du 1er septembre 1948 pour exercer une action en reprise à l'encontre de son locataire, le demandeur qui justifie que l'un de ses enfants, désigné comme bénéficiaire de la reprise, ne dispose pas d'une habitation correspondant à ses besoins normaux lors du congé


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-11-19;juritext000006935363 ?
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