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30/09/1999 | FRANCE | N°1997-668

France | France, Cour d'appel de Versailles, 30 septembre 1999, 1997-668


FAITS ET PROCEDURE

La société EDITIONS DE LUDIS (ci-après désignée société LUDIS) exerce une activité de vente de matériel pédagogique avec le concours de commerciaux.

Dans le but de restructurer ses services, elle a conclu le 05 juillet 1995 avec la société CERES RESSOURCES HUMAINES (ci-après dénommée société CERES) une convention de Conseil et d'Assistance en vue du recrutement de plusieurs responsables régionaux des ventes.

Après règlement d'un acompte de 21.250 francs H.T. soit 25.202,50 francs T.T.C., la société LUDIS a refusé d'honorer la fac

ture définitive que lui a présentée la société CERES motif pris que cette dernière n'aur...

FAITS ET PROCEDURE

La société EDITIONS DE LUDIS (ci-après désignée société LUDIS) exerce une activité de vente de matériel pédagogique avec le concours de commerciaux.

Dans le but de restructurer ses services, elle a conclu le 05 juillet 1995 avec la société CERES RESSOURCES HUMAINES (ci-après dénommée société CERES) une convention de Conseil et d'Assistance en vue du recrutement de plusieurs responsables régionaux des ventes.

Après règlement d'un acompte de 21.250 francs H.T. soit 25.202,50 francs T.T.C., la société LUDIS a refusé d'honorer la facture définitive que lui a présentée la société CERES motif pris que cette dernière n'aurait pas rempli ses obligations contractuelles.

Sur demande de la société CERES, la société LUDIS a été condamnée par ordonnance de référé en date du 11 mai 1996 à verser à titre provisionnel à sa cocontractante une indemnité provisionnelle de 103.775 francs.

La société LUDIS a interjeté appel de cette décision et parallèlement, elle a introduit une action au fond tendant à obtenir remboursement de l'acompte versé.

La société CERES s'est opposée à cette prétention et a formé une demande reconventionnelle.

*

Par jugement en date du 11 septembre 1996 auquel il est renvoyé pour plus ample exposé des éléments de la cause, le Tribunal de Commerce de VERSAILLES a statué dans les termes ci-après :

- condamne la société des Editions LUDIS à payer à la société CERES Ressources Humaines la somme de quarante deux mille cinq cents francs (42.500 francs H.T.) et, en outre, les intérêts de cette somme calculés au taux légal à compter du 25 octobre 1995 ;

- dit n'y avoir lieu à dommages et intérêts ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- condamne les deux parties à payer les dépens par moitié.

*

Appelante de ce jugement, la société LUDIS fait grief au premier juge d'avoir mal apprécié les éléments de la cause en retenant que la société CERES n'avait souscrit qu'une obligation de moyen alors que, selon elle, elle s'est engagée sur un résultat concret (le recrutement de 10 responsables commerciaux qui n'a pas été atteint). Elle ajoute qu'en tout état de cause, et même dans le cadre d'une simple obligation de moyen, la société LUDIS n'a pas correctement rempli sa mission contrairement à ce qu'elle prétend et qu'elle a facturé des prestations complémentaires qu'elle n'établit pas avoir effectuées et ce, de surcroît, sans avoir obtenu l'accord préalable du client, comme le prévoyait la convention. Pour l'ensemble de ces

motifs, elle demande que la société CERES soit condamnée à lui payer la somme de 16.277 francs perçue au titre du premier acompte, avec intérêt de droit à compter du 16 mars 1996, outre celle de 116.733,96 francs versée en exécution de l'ordonnance de référé avec intérêts de droit à compter du 16 janvier 1996. Elle réclame également la somme de 100.000 francs en réparation du préjudice que lui a occasionné la société CERES par la résistance abusive dont celle-ci a fait preuve à son égard et en raison de son comportement particulièrement procédurier, de même qu'en couverture des frais d'annonces qu'elle a dû faire paraître dans la presse eu égard à l'insuffisance de son cocontractant.

Enfin, elle sollicite une indemnité de 20.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

La société CERES estime pour sa part, dépourvue de tout fondement l'argumentation développée par la société LUDIS au soutien de son recours. Elle fait grief cependant au premier juge de n'avoir pas satisfait intégralement à sa demande et elle sollicite, dans le cadre d'un appel incident, la condamnation de la société LUDIS à lui payer

la somme de 103.775 francs T.T.C., représentant le montant intégral de sa facture, avec intérêt de droit à compter du 25 octobre 1995, outre le bénéfice de la capitalisation des intérêts de retard. Elle réclame aussi la somme de 30.000 francs à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et une indemnité de 20.000 francs en couverture des frais de procédure qu'elle a été contrainte d'exposer. *

MOTIFS DE LA DECISION

Considérant qu'aux termes du contrat conclu le 05 juillet 1995, il était prévu que "la société CERES se voyait confier une mission de conseil et d'assistance au recrutement de plusieurs responsables régionaux des ventes" avec un ajout manuscrit reproduit sur

l'original produit devant la Cour et ainsi libellé "objectif - recrutement de 10 responsables régionaux des ventes opérationnels dès le 04 septembre 1995" ;

Qu'il était cependant clairement stipulé plus loin "(que) CERES est tenue contractuellement d'une obligation de moyen à laquelle elle apporte toute son expérience et sa compétence" et "(que) les prestations décrites ci-dessus ne feront l'objet d'aucune garantie contractuelle d'achèvement et de reprise et seront facturés au temps de travail effectué au tarif de 7.500 francs H.T./jour/consultant (plus frais s'il y a lieu), quelque soit le nombre de candidats embauchés par l'intermédiaire de CERES" ;

Considérant qu'il s'infère de ses dispositions claires et précises qui font la loi des parties que la société CERES n'a souscrit qu'une obligation de moyen, comme l'a retenu à bon droit le premier juge, dans le but de recruter 10 agents commerciaux mais qu'elle n'a pris aucun engagement ferme et définitif sur ce point comme le montrent les réserves ci-dessus rappelées ;

Que les seules questions à résoudre en l'espèce sont celles de savoir

si, comme elle s'y était obligée, la société CERES a mis en ouvre tous les moyens nécessaires et toute sa compétence pour exécuter la mission confiée et si la facturation définitive qu'elle a établie, et dont elle réclame le paiement, est justifiée au regard notamment des stipulations contractuelles ;

Considérant qu'en ce qui concerne le premier point, il est désormais établi par les pièces produites en cause d'appel que la société CERES a reçu 226 candidatures, alors qu'elle s'était engagée sur une base de 150 candidatures, et qu'elle a soumis 22 candidatures à la société LUDIS, laquelle en a retenu 12 sur lesquelles 5 embauches ont pu être réalisées ; qu'il s'infère de là que la société CERES a mis en ouvre des moyens suffisants et appropriés au regard de ses engagements contractuels et que s'agissant d'une obligation de moyen, il ne saurait lui être reproché à faute, le fait que l'objectif de l'embauche de 10 candidats n'a pas été atteint, étant observé que la société LUDIS ne s'explique pas sur les modes de sélection par elle retenus pour écarter les autres candidats proposés ;

Considérant en revanche qu'en ce qui concerne le montant des

honoraires facturés et dont le paiement intégral est réclamé par la société CERES dans le cadre de son appel incident, force est de constater qu'il excède le montant prévisionnel arrêté par les parties lors de la signature du contrat qui s'établit à 63.750 francs T.T.C. ;

Que s'il est vrai que le contrat prévoit que "les temps de travail évalués ne constituent pas une base contractuelle (et que) ils peuvent varier en fonction, notamment, du nombre de candidatures reçues, le réajustement des honoraires (étant) effectué sur le solde" il n'en reste pas moins qu'il est précisé plus loin que "toute prestation complémentaire fera l'objet d'un devis préalable et d'éventuels frais supplémentaires ne seront engagés qu'après l'accord du client" ;

Qu'il en résulte que, dès lors que même dans le doute quant à la portée qu'il convient de donner à cette dernière clause par rapport à la précédente, ladite clause doit s'interpréter en faveur du débiteur, les prétendus travaux supplémentaires réalisés par rapport aux prévisions initiales et facturés par la société CERES, ne peuvent être pris en compte faut pour celle-ci d'avoir reçu l'accord préalable du client ;

Que c'est dans ces conditions à bon droit que le premier juge, après

déduction de l'acompte versé, a condamné la société LUDIS à payer à la société CERES un solde de 42.500 francs H.T. augmenté des intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 1995 ;

Que la société CERES est en outre fondée à réclamer le bénéfice de la capitalisation des intérêts de retard conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil et ce, à compter du 21 août 1998, date de la première demande formée par voie de conclusions ; que la société CERES sera néanmoins tenue de restituer l'éventuel trop perçu à la société LUDIS avec intérêts de droit, non pas à compter de la date du versement effectué en vertu d'une décision de justice exécutoire (l'ordonnance de référé), mais à compter de la notification valant mise en demeure de la présente décision ouvrant droit à restitution ;

Considérant par ailleurs que la société LUDIS ne justifie pas du préjudice complémentaire qu'elle allègue ; qu'en effet, elle ne saurait utilement reprocher à la société CERES d'avoir mis en ouvre les voies de droit qui lui étaient ouvertes pour parvenir au recouvrement de sa créance pas plus qu'elle n'établit que la facture d'annonces qu'elle ne justifie pas avoir réglée, serait liée, comme il a été vu précédemment, à une mauvaise exécution de la mission confiée à la société CERES ; que cette dernière société ne justifie

pas non plus d'un préjudice complémentaire tenant à la résistance que lui aurait opposée la société LUDIS laquelle était au demeurant en partie fondée ;

Considérant par ailleurs que, eu égard à la solution du litige, l'équité ne commande pas qu'il soit fait application devant la Cour de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que les dépens d'appel seront entièrement supportés par la société LUDIS qui succombe dans l'examen du recours qu'elle a cru devoir initier, le jugement étant confirmé du chef de la répartition par moitié des frais de première instance ;

* PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- REOEOIT la société EDITIONS LUDIS en son appel principal et la société CERES Ressources Humaines en son appel incident ;

- DIT ces appels mal fondés et les rejette ;

- CONFIRME en conséquence en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

Y AJOUTANT,

- AUTORISE la société CERES Ressources Humaines à capitaliser les intérêts de retard, conformément à l'article 1154 du Code Civil, à compter du 21 août 1998, date de la première demande ;

- CONDAMNE en temps que de besoin et sur justification du paiement, la société CERES Ressources Humaines à restituer à la société LUDIS les sommes en trop perçu en exécution de l'ordonnance de référé et ce, avec intérêts de droit à compter de la notification du présent arrêt ;

- REJETTE les demandes en dommages et intérêts formés par les parties ;

- DIT n'y avoir lieu en la cause à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

- LAISSE les entiers dépens d'appel à la charge de la société LUDIS EDITIONS et AUTORISE la SCP d'avoués LISSARRAGUE-DUPUIS etamp; Associés, à en poursuivre directement le recouvrement, comme il est dit à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.

ARRET PRONONCE PAR MONSIEUR ASSIÉ, PRESIDENT ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET

LE GREFFIER

LE PRESIDENT

M. Thérèse X...

F. ASSIÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-668
Date de la décision : 30/09/1999

Analyses

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de moyens

Dès lors que le contrat par lequel une agence de recrutement s'est engagée à sélectionner dix vendeurs au profit d'une société précise qu'il s'agit d'une obligation de moyens à laquelle elle apporte toute son expérience et sa compétence, ladite société ne peut lui reprocher de ne pas avoir atteint cet objectif dans la mesure où il est établi que l'agence a mis en oeuvre des moyens suffisants et appropriés au regard de son engagement


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-09-30;1997.668 ?
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