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24/09/1999 | FRANCE | N°1995-282

France | France, Cour d'appel de Versailles, 24 septembre 1999, 1995-282


FAITS ET PROCEDURE

Suivant convention écrite su 4 octobre 1991, la CNAVTS a donné à bail à Monsieur et Madame X... un logement situé à NEUILLY SUR SEINE xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx, pour une durée de 6 années à compter du 15 mars 1991, moyennant un loyer initial annuel de 109.200 Francs et un dépôt de garantie de 18.200 Francs.

Les lieux ont été restitués le 3 mai 1993.

Par acte du 7 décembre 1993, la CNAVTS a fait assigner Monsieur et Madame X... devant le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE afin d'obtenir leur condamnation solidaire à lui verser 43.1

43,94 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 17 juin 1993, réparations l...

FAITS ET PROCEDURE

Suivant convention écrite su 4 octobre 1991, la CNAVTS a donné à bail à Monsieur et Madame X... un logement situé à NEUILLY SUR SEINE xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx, pour une durée de 6 années à compter du 15 mars 1991, moyennant un loyer initial annuel de 109.200 Francs et un dépôt de garantie de 18.200 Francs.

Les lieux ont été restitués le 3 mai 1993.

Par acte du 7 décembre 1993, la CNAVTS a fait assigner Monsieur et Madame X... devant le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE afin d'obtenir leur condamnation solidaire à lui verser 43.143,94 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 17 juin 1993, réparations locatives, ainsi que 6.000 Francs sur le fondement de

l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les époux X... ont conclu au débouté et sollicité, à titre subsidiaire, une mesure d'expertise d'enquête ou la désignation d'un expert.

Ils contestaient devoir la moindre somme au titre des réparations locatives, reconnaissaient devoir 21.091,59 Francs au titre des échéances de mars et avril 1993, mais réclamaient à titre reconventionnel 67.300 Francs correspondant aux travaux qu'ils avaient fait effectuer dans le logement et 10.000 Francs de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Par jugement déféré en date du 13 juillet 1994, le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEIN a condamné les époux X... à payer à

la CNAVTS la somme de 2.891,59 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 17 juin 1993.

Au soutien de l'appel qu'elle a interjeté contre cette décision, la CNAVTS fait valoir que le premier juge a fait une application erronée de l'article 3 de la loi du 6 juillet 1989. Selon elle, en effet, lorsque l'état des lieux a été dressé de façon non contradictoire, ses énonciations font foi jusqu'à preuve du contraire. Dans ces conditions, elle estime qu'il est parfaitement possible, en examinant l'état des lieux d'entrée et celui de sortie, de constater les nombreuses dégradations faites par les époux X.... Elle fait valoir que, compte-tenu de ces dégradations, le coût de remise en état est de 39.410,39 Francs. Elle souligne que les travaux qu'ils ont faits dans les lieux, sans son autorisation, en ont modifié la nature et qu'ainsi ils doivent conduire à une réfection des locaux. En outre au paiement de cette somme, elle demande condamnation des époux X... à lui payer 14.028,44 Francs d'arriérés de loyers, 841,96 Francs (moitié du coût du constat d'état des lieux) et le terme de mars 1991, soit 31.401,40 Francs. Elle demande ainsi paiement de ces sommes, sous déduction du dépôt de garantie, soit une somme globale de 43.143,94 Francs. Elle sollicite enfin la condamnation des époux X... à lui payer 15.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les époux X... qui précisent que l'état des lieux d'entrée correspond non à l'appartement qu'ils ont occupé, mais à un autre appartement situé dans le même immeuble, font valoir que la CNAVTS a refusé de procéder à un état des lieux contradictoire lors de la remise des clés et n'y a procédé, de façon unilatérale, que vingt six jours après. Ils soulignent que les travaux qu'ils ont réalisés dans les lieux suffiraient à justifier une indemnisation à leur profit et estiment que les nombreuses entreprises qui sont intervenues durant ces vingt six jours peuvent, elles-mêmes, avoir causé des dégradations. En toute hypothèse, ils estiment que compte-tenu du dépôt de garantie, ils ne restent devoir qu'une somme de 2.891,59 Francs.

Reconventionnellement, les époux X... demandent 67.300 Francs de remboursement des travaux d'embellissement qu'ils ont effectués dans les lieux. Ils demande, en outre, la condamnation de la CNAVTS à leur payer 10.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Par arrêt contradictoire en date du 28 février 1997, la Cour de céans a :

- infirmé le jugement déféré et statuant à nouveau,

- condamné les époux X... à payer, à titre de provision, la somme de 2.891,59 Francs avec intérêts au taux légal à compter du 17 juin 1993,

- débouté la CNAVTS de sa demande de remise en état pour dégradations,

- l'a dit bien fondée dans sa demande de remise en état pour transformations non autorisées,

- avant dire plus ample droit, ordonné une consultation et désigné à et effet Monsieur Pierre Y..., expert, demeurant 5, rue Louis Armand 92600 ASNIERES, avec pour mission de :

* convoquer les parties et entendre leurs explications,

[* se faire remettre tous documents utiles et notamment des devis,

*] donner à la cour tous éléments pour lui permettre de chiffrer le coût de remise en état de la pièce dans laquelle les époux X... ont installé une douche et des lieux qu'ils ont transformé en salle de bains,

- dit que les époux X... devront à cette fin, consigner la somme de 3.000 Francs dans un délai de trois mois, faute de quoi, la présente mission deviendra caduque, la cour tirant toutes conséquences de droit de l'abstention des époux X... et, en telle hypothèse, invité la CNAVTS à verser aux débats tous devis qu'elle estimerait utiles,

- dit que le consultant devra déposer son rapport dans un délai de trois mois,

- dit qu'au vu de ce rapport, les parties devront reconclure par conclusions récapitulatives (article 954 du nouveau code de procédure civile).

L'expert a déposé son rapport le 4 novembre 1997.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 26 mai 1999, la CNAVTS prie la Cour de :

- infirmer la décision entreprise,

Et statuant à nouveau,

- condamner conjointement et solidairement Monsieur et Madame X... au paiement de la somme de 33.198,66 Francs correspondant aux loyers et charges impayés et aux réparations rendues nécessaires suite aux transformations non autorisées de l'appartement dont ils étaient locataires, au 23, boulevard d'Argenson à NEUILLY SUR SEINE, avec intérêts de droit à compter du 17 juin 1993,

- débouter les époux X... de toutes leurs demandes, fins et

conclusions,

- condamner les époux X... solidairement à payer à la CNAVTS la somme de 15.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- les condamner solidairement aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Monsieur et Madame X... demandent à la Cour de :

- donner acte aux concluants de ce qu'ils ont réglé la somme de 2.891,59 Francs augmentée des intérêts au taux légal soit 3.362,84 Francs conformément aux dispositions de l'arrêt de la cour d'appel de céans en date du 28 février 1997,

- confirmer en toutes ces dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE en date du 13 juillet 1994, rectifié par décision du 28 septembre 1994,

- constater que la CNAVTS ne rapporte pas la preuve du préjudice qui lui aurait occasionné l'exécution des travaux non autorisés,

- dire et juger qu'en relouant les lieux en leur état, la CNAVTS a

renoncé à une remise en état, comme ayant implicitement mais nécessairement opté pour l'appropriation des travaux exécutés par les époux X...,

Par conséquent,

- débouter de plus la CNAVTS de l'ensemble de ses demandes et la condamner aux entiers dépens de l'instance y compris les honoraires de l'expert,

- voir la CNAVTS condamnée au paiement de la somme de 15.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- statuer ce que précédemment requis quant aux dépens et admettre la SCP LAMBERT DEBRAY CHEMIN, avoué, au bénéfice de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 3 juin 1999 et l'affaire plaidée à l'audience du 22 juin 1999.

SUR CE LA COUR

I/ Considérant qu'il est certes constant que les locataires avaient l'obligation, en exécution des clauses de leur contrat de bail et des dispositions de l'article 7)f) de la loi du 6 juillet 1989, de ne pas transformer les lieux sans l'accord écrit du propriétaire, et que cet article de cette loi ajoute que : "à défaut de cet accord, le propriétaire peut exiger du locataire, à son départ des lieux, leur remise en l'état ou conserver à son bénéfice les transformations effectuées sans que le locataire puisse réclamer une indemnisation des frais engagés" ;

Mais considérant qu'il est patent, en la présente espèce, que la bailleresse a choisi depuis cinq années de conserver le bénéfice des travaux de transformation litigieux dont elle n'a d'ailleurs jamais dit qu'ils mettaient "en péril le bon fonctionnement des équipements ou la sécurité du local", au sens de cet article 7)f) ; que de plus, il est manifeste que ces lieux ont été reloués, en leur état, et que la CNAVTS appelante, ne fait pas état d'une diminution des nouveaux loyers qu'elle aurait été obligées de consentir aux nouveaux preneurs, en raison des transformations faites dans les lieux loués ; que tout démontre, en la cause, que la CNAVTS a opté pour l'appropriation de ces transformations qui, sont, à l'évidence, des améliorations du confort et de l'habitabilité de ces locaux et qui ne lui ont donc causé aucun préjudice actuel certain et direct ;

Considérant, en droit, que l'obligation, à la fois contractuelle et légale pesant sur les époux X..., constitue une obligation de faire (ou de ne pas faire) et que son inexécution se résout en dommages-intérêts en vertu des articles 1142 et 1145 du code civil qui est un texte de portée générale, ce qui suppose donc nécessairement que la bailleresse ait fait la preuve qui lui incombe du préjudice direct et certain qu'elle aurait ainsi subi ; qu'une telle preuve n'est toujours pas faite par elle et qu'elle ne justifie donc pas d'un intérêt à agir (article 31 du nouveau code de procédure civile) pour demander cette remise en état qui - il l'est souligné à nouveau - porte sur des transformations et non pas sur un défaut d'entretien ni sur des dégradations ; que le précédent arrêt de cette 1ère chambre - 2ème section a rappelé en la page 6 de sa motivation ce droit que peut exercer le bailleur, mais qu'il n'a pas exclu pour autant l'obligation pour celui-ci de démontrer l'existence d'un préjudice et de justifier donc d'un intérêt à agir ;

Considérant que la CNAVTS, appelante, est par conséquent déboutée de sa demande en paiement de la somme totale de 53.803,36 Francs de frais de remise en état ; qu'en outre, et en tout état de cause, cette somme comprend 5.925,16 Francs TTC au titre d'une vitrification, laquelle n'avait jamais été invoquée, ni réclamée avant les conclusions de l'appelante signifiées postérieurement au rapport de l'expert judiciaire ; qu'il s'agit donc là d'une demande nouvelle au sens de l'article 564 du nouveau code de procédure civile et qui est donc irrecevable ; II)

Considérant en ce qui concerne les loyers dus et demeurés impayés, que les époux X... n'ont rien dit à leur sujet et qu'ils n'ont formulé aucune contestation au sujet de ce chef de demande pourtant expressément formulé contre eux ; que les intimés sont donc condamnés solidairement à payer à l'appelante la somme fondée et justifiée de

21.091,59 Francs correspondant à 14.028,44 Francs de loyers et de charges impayés au 3 mai 1993 et celle de 7.063,15 Francs du mois de mars 1993 ;

Considérant par ailleurs que l'arrêt du 28 février 1997 (page 5) a déjà définitivement jugé que le bailleur qui n'avait pas respecté les prescriptions de l'article 3 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989 n'était pas fondé à se prévaloir de cet article de loi pour réclamer un partage des frais de constat d'huissier ; que l'appelante est donc déboutée de sa demande en paiement de 841,96 Francs de ce chef ; III)

Considérant enfin que compte-tenu de l'équité, les parties sont déboutées de leurs demandes respectives en paiement de sommes en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant que la cour donne acte aux époux X... de ce qu'ils ont réglé la somme de 2.891,59 Francs augmentée des intérêts au taux légal (soit 3.362,84 Francs) en exécution de l'arrêt du 28 février 1997. 1ère chambre B du 24/09/1999 R.G N° 282/95 AFFAIRE : CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE DES TRAVAILLEURS SALARIES "CNAVTS"....................... SCP FIEVET C/ Epx X... SCP LAMBERT ------------------------------------------------------

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Vu l'arrêt de cette cour (1ère chambre - 2ème section) du 28 février 1997 :

Vu le rapport d'expertise de l'expert judiciaire Monsieur Y..., du 4 novembre 1997 :

- DEBOUTE la CNAVTS des fins de son appel et des dernières demandes que celui-ci comporte, au sujet des frais de remise en état ; DECLARE

nouvelle et irrecevable la demande relative à une vitrification ;

- CONDAMNE solidairement les époux X... à payer à la CNAVTS la somme de 21.091,59 Francs de loyers et de charges impayés au 3 mai 1993 ;

- DEBOUTE l'appelante de sa demande en paiement de 841,96 Francs de frais de constat d'huissier,

- DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- DONNE acte aux époux X... de ce qu'ils ont payé la somme en principal et intérêts de 3.362,84 Francs en exécution de l'arrêt du 28 février 1997 ;

- FAIT MASSE de tous le dépens de première instance et d'appel (qui comprendront les frais de la consultation judiciaire) qui seront supportés pour 1/3 par les époux X... et pour les 2/3 par la CNAVTS, et qui seront recouvrés directement contre eux dans cette proportion par la SCP d'avoué FIEVET ROCHETTE LAFON et par la SCP d'avoué LAMBERT DEBRAY CHEMIN, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : LE GREFFIER qui a assisté au prononcé

LE PRESIDENT B. TANGUY

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1995-282
Date de la décision : 24/09/1999

Analyses

BAIL (règles générales) - Preneur - Travaux, modifications ou transformations

En application de l'article 7 f de la loi du 6 juillet 1989, le locataire a l'obligation de ne pas transformer les lieux sans l'accord écrit du propriétaire et, à défaut de cet accord, celui-ci peut soit exiger du locataire, à son départ des lieux, leur remise en l'état, soit conserver à son bénéfice les transformations effectuées sans indemnisation du locataire pour les frais engagés. En conséquence, dès lors que le bailleur n'a jamais soutenu que les travaux de transformations effectués, sans son accord, par un locataire ayant quitté les lieux depuis cinq ans mettaient en péril le bon fonctionnement des équipements ou la sécurité du local, et qu'il est établi que les lieux ont été reloués sans qu'une quelconque diminution de loyer ait été imputable aux transformations litigieuses, il convient de considérer qu'il a opté pour la conservation des transformations opérées et que celles-ci ne lui ont causé aucun préjudice actuel, certain et direct


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-09-24;1995.282 ?
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