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17/09/1999 | FRANCE | N°1997-7195

France | France, Cour d'appel de Versailles, 17 septembre 1999, 1997-7195


FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 29 août 1988, conclu pour une durée initiale de 3 ans, reconduit tacitement, par deux fois, à compter du 1er septembre 1991, la société SELECTIPIERRE a donné à bail à Monsieur X... et Madame Y... née Z..., alors concubins, un appartement sis xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxà NEUILLY SUR SEINE (92), moyennant un loyer mensuel fixé à 12.000 Francs et outre les charges s'élevant à 600 Francs.

Constatant des impayés, la société SELECTIPIERRE leur a fait délivrer, par acte d'huissier en date du 17 novembre 1995, un c

ommandement de payer la somme de 34.764 Francs, visant la clause résolutoire i...

FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé en date du 29 août 1988, conclu pour une durée initiale de 3 ans, reconduit tacitement, par deux fois, à compter du 1er septembre 1991, la société SELECTIPIERRE a donné à bail à Monsieur X... et Madame Y... née Z..., alors concubins, un appartement sis xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxà NEUILLY SUR SEINE (92), moyennant un loyer mensuel fixé à 12.000 Francs et outre les charges s'élevant à 600 Francs.

Constatant des impayés, la société SELECTIPIERRE leur a fait délivrer, par acte d'huissier en date du 17 novembre 1995, un commandement de payer la somme de 34.764 Francs, visant la clause résolutoire insérée au bail.

Par acte d'huissier en date du 26 décembre 1995, Madame Y... a fait citer la société SELECTIPIERRE, Monsieur X... et la société ABEILLE VIE devant le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE. Elle a sollicité les plus larges délais pour se libérer de sa dette locative et par conséquent la suspension des effets de la clause résolutoire ; elle a requis la réduction des effets de la clause pénale, la condamnation de Monsieur X... à exécuter ses obligations de co-preneur solidaire, ainsi que la condamnation solidaire des défendeurs à lui payer une indemnité de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Devant le premier juge elle a fait état de son départ des lieux loués le 7 mai 1996 et a porté sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile à la somme de 8.000 Francs.

Par jugement contradictoire en date du 4 juin 1997, le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE a :

- rejeté la fin de non recevoir opposée par la société SELECTIPIERRE, - déclaré Madame Y... recevable en son action exercée en vertu de l'article 24 alinéa 2 de la loi du 6 juillet 1989,

- constaté que les lieux ont été restitués au bailleur le 23 mai 1996,

- déclaré parfait le désistement implicite partiel de la demanderesse du chef de la suspension des effets de la clause résolutoire et de ses conséquences,

- déclaré la société SELECTIPIERRE bien fondée en son action en paiement en vertu de l'article 7 de la loi précitée,

En conséquence,

- condamné solidairement Madame Y... et Monsieur X... à lui payer les sommes de :

[* 73.956,57 Francs au titre de sa créance locative outre les intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 1995 sur la somme de 14.300 Francs et du 12 juin 1996 sur le complément,

*] 7.395 Francs au titre de la clause pénale après application de l'article 1152 du code civil,

- condamné Monsieur X... à payer à la société SELECTIPIERRE une indemnité de 2.500 Francs en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné tout aussi solidairement Madame Y... et Monsieur X... aux dépens.

Le 25 juillet 1997, Madame Y... a interjeté appel de cette décision, le 30 juillet 1997, Monsieur X... a fait de même. Par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 27 novembre 1997, les deux appels ont été joints.

Madame Y..., faisant état de sa situation financière difficile et du préjudice grave que lui a causé sa séparation d'avec Monsieur X..., dont les revenus sont plus que confortables, demande à la Cour de :

- infirmer le jugement rendu le 4 juin 1997 par le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE en ce qu'il a refusé l'appel en garantie formulé par Madame Y...,

- fixer la clause pénale à 10 % du montant des arriérés,

- principalement, condamner Monsieur X... à garantir Madame Y... de l'intégralité des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre dans le cadre de la présente procédure et fixer la clause pénale au franc symbolique,

- subsidiairement, constater que compte-tenu de la cotitularité du bail, Madame Y... ne peut être tenue qu'à la moitié du paiement de la dette locative,

- constater l'état financier plus que précaire de Madame Y...,

- en conséquence, lui octroyer les délais les plus larges dans la limite de deux années, pour assumer le remboursement de la moitié de la dette locative,

- condamner la société SELECTIPIERRE et Monsieur X... à verser la somme de 8.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens dont distraction pour ceux d'appel au profit de la SCP MERLE CARENA DORON, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

Monsieur X... fait valoir que les demandes formulées à son encontre par Madame Y... sont irrecevables et mal fondées dès lors qu'elle a occupé seule le local litigieux depuis juin 1992 ; qu'il a donné congé au bailleur le 8 juin 1995, congé dont la validité n'est pas subordonnée, par application des dispositions de l'article 1780 du code civil, à l'accord du co-preneur ; que par conséquent, le congé délivré le 8 juin 1995, étant parfaitement opposable au bailleur, il doit être libéré de son obligation de preneur conjoint et solidaire à compter du 31 mai 1995 ; qu'en outre, la solidarité ne se présumant pas, si le bail initial comportait un engagement solidaire, celui-ci n'a pu se reconduire tacitement avec le bail, que donc la solidarité a cessé dès le 31 août 1991 ; qu'il convient de lui restituer la somme de 12.000 Francs représentant la moitié du dépôt de garantie, ainsi que des meubles lui appartenant conservés par Madame Y... depuis leur séparation.

Il prie donc la Cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

En conséquence,

- infirmer le jugement du tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEIN du 4 juin 1997 dans sa totalité,

- dire et juger Madame Y... et la société SELECTIPIERRE irrecevables et en tout cas mal fondés en leurs demandes,

Statuant à nouveau,

- débouter Madame Y... et la société SELECTIPIERRE de l'ensemble de leurs demandes,

- dire et juger que Madame Y... sera tenue à garantir Monsieur X... de toute condamnation à son encontre au profit de la société SELECTIPIERRE au titre du bail du 29 août 1988,

- condamner Madame Y... à verser à Monsieur X... la somme de 30.000 Francs à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- ordonner à Madame Y... de restituer à Monsieur X... les biens meubles lui appartenant, ce sous astreinte définitive de 500 Francs par jour de retard et par meuble à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- ordonner à Madame Y... de restituer à Monsieur X... la quote part du dépôt de garantie, soit la somme de 12.000 Francs,

- condamner solidairement Madame Y... et la société SELECTIPIERRE à verser à Monsieur X... la somme supplémentaire de 10.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamner solidairement la société SELECTIPIERRE et Madame Y... aux entiers dépens, lesquels seront directement recouvrés par la SCP KEIME GUTTIN, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

La société SELECTIPIERRE expose que lors de la reconduction tacite du bail, Monsieur X... occupait toujours les lieux ; que le bail s'est donc renouvelé aux conditions antérieures ; que Madame Y... ne verse au débat aucun document de nature à justifier sa demande de délai de paiement.

Elle demande donc à la Cour de :

- recevoir la concluante en ses écritures et l'en déclarer bien fondée,

- débouter Madame Y... et Monsieur X... de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE en date du 4 juin 1997 en ce qu'il a :

* condamné solidairement Madame Y... et Monsieur X... à payer à la société SELECTIPIERRE les sommes de :

73.956,57 Francs au titre de sa créance locative outre les intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 1995 sur la somme de 14.300 Francs et du 12 juin 1996 sur le complément,

7.395 Francs au titre de la clause pénale après application de l'article 1152 du code civil,

* condamné Monsieur X... à payer à la société SELECTIPIERRE la somme de 2.500 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

* condamné solidairement Madame Y... et Monsieur X... aux entiers dépens,

Et y ajoutant,

- condamner solidairement Madame Y... et Monsieur X... à payer à la société SELECTIPIERRE la somme de 225.12 Francs au titre du solde des charges relatives à l'année 1996,

- condamner in solidum Madame Y... et Monsieur X... au paiement de la somme de 6.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

- condamner solidairement Madame Y... et Monsieur X... aux dépens d'appel dont le montant pourra être recouvré par la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été signée le 6 mai 1999 et l'affaire plaidée à l'audience de plaidoiries du 18 juin 1999.

SUR CE LA COUR

Considérant qu'il est expressément spécifié dans le bail litigieux que :

"la société SELECTIPIERRE loue et donne à bail à Monsieur X... A... et Madame Y... B..., qui acceptent, conjointement et solidairement, les lieux" dont la désignation suivait ;

Qu'il était en outre précisé que le bail était consenti pour une durée de 3 ans à compter du 1er septembre 1988 et que le bail pourrait se renouveler pour une durée minimale de trois ans ;

Considérant que la loi du 6 juillet 1989 étant intervenue entre-temps, le bail, par application de l'article 10 de cette Loi d'ordre public s'est renouvelé pour une période de 6 ans, eu égard au fait que le bailleur était une personne morale ;

Qu'à l'expiration du 31 août 1991, le bail s'est renouvelé jusqu'au 31 août 1997 ;

Considérant que Monsieur X... qui déclare avoir quitté les lieux en 1992, occupait donc encore l'appartement lors du renouvellement du bail ;

Qu'il a de ce fait bénéficié de ce renouvellement au même titre que Madame Y... ;

Considérant que le 31 mai 1995, Monsieur X..., informant le bailleur qu'il était désormais séparé de Madame Y..., a notifié à ce dernier, par lettre recommandée, son congé de l'appartement, objet du bail ;

Considérant cependant que les locataires se sont engagés solidairement à exécuter les obligations découlant du bail, telles que le paiement du loyer et des charges ;

Que le fait que l'un des preneurs quitte les lieux, même après en avoir dûment informé le bailleur, ne peut mettre fin au bail ;

Que seul un congé délivré par les deux colocataires est susceptible de mettre fin au bail ;

Considérant que le tribunal a, à juste titre, jugé que la solidarité entre Monsieur X... et Madame Y... avait subsisté à l'égard de la société SELECTIPIERRE, en application des dispositions de l'article 1200 du code civil ;

Considérant qu'il est établi, par les pièces produites, que les colocataires restent devoir outre la somme de 73.956,57 Francs à laquelle ils ont été condamnés, celle de 225,12 Francs, au titre de la régularisation des charges 1996, effectuée depuis le prononcé du jugement ;

Considérant qu'une clause pénale était insérée dans le bail ;

Considérant qu'en considération de la situation de Madame Y..., le tribunal a justement réduit à 10 % le montant de l'indemnité réclamée à ce titre par la société SELECTIPIERRE et alloué à cette dernière la somme de 7.395 Francs ;

Sur la demande de garantie :

Considérant que Monsieur X... et Madame Y... étaient tenus solidairement au paiement du loyer, des charges et autres accessoires ;

Que doivent s'appliquer les règles de l'article 1213 du code civil ; Considérant que les courriers versés aux débats par Monsieur X... ne permettent pas de démontrer qu'un accord, concernant le paiement des loyers, existait entre les colocataires ;

Que dans ces conditions, Monsieur X... ne peut se prévaloir du fait qu'il aurait explicitement dénoncé ses engagements à l'égard de Madame Y... ;

Considérant que cette dernière n'établit pas que Monsieur X... a eu un comportement fautif à son égard et qu'il lui a occasionné un préjudice ;

Qu'au surplus le seul fait que Monsieur X... dispose de revenus supérieurs aux siens ne peut justifier la demande de garantie formée par Madame Y... ;

Considérant qu'il convient de débouter Monsieur X... et Madame Y... de leur demande en garantie réciproque ;

Sur la demande de délais formée par Madame Y... :

Considérant que Madame Y..., compte-tenu de sa situation financière difficile n'est pas en mesure, compte-tenu du montant de la dette de faire face à des échéances qui ne peuvent être inférieures à une somme mensuelle de 3.300 Francs, en principal ;

Qu'il y a lieu de la débouter de sa demande de délais de paiement ;

Sur la restitution des meubles et du dépôt de garantie :

duite du montant de sa créance par la société SELECTIPIERREille pas les meubles ou effets mobiliers dont il sollicite la restitution mais encore ne verse aucune pièce au soutien de sa demande ; qu'il en sera débouté ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'ordonner le remboursement de la moitié du dépôt de garantie que sollicite Monsieur X..., la somme versée par les colocataires à la signature du bail, soit 24.000 Francs ayant d'ores et déjà été déduite du montant de sa créance par la société SELECTIPIERREsomme versée par les colocataires à la signature du bail, soit 24.000 Francs ayant d'ores et déjà été déduite du montant de sa créance par la société SELECTIPIERRE ;

Sur la demande de dommages-intérêts :

Considérant que Monsieur X... ne démontre que Madame Y... a fait un usage abusif de son droit d'agir en justice ;

Qu'il convient de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Sur l'application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la société SELECTIPIERRE les sommes exposées par elle qui ne sont pas comprises dans les dépens ;

Qu'il y a lieu de condamner Monsieur X... à lui payer la somme de 4.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

- CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal d'instance de NEUILLY SUR SEINE le 4 juin 1997 ;

Y ajoutant :

- CONDAMNE solidairement Monsieur X... et Madame Y... à payer à la société SELECTIPIERRE la somme de 225,12 Francs au titre du solde des charges de l'année 1996 ;

- CONDAMNE Monsieur X... à payer à la société SELECTIPIERRE la somme de 4.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

- CONDAMNE in solidum Monsieur X... et Madame Y... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés par la SCP FIEVET ROCHETTE LAFON, titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET :

LE GREFFIER qui a assisté au prononcé

LE PRESIDENT

A. CHAIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Numéro d'arrêt : 1997-7195
Date de la décision : 17/09/1999

Analyses

BAIL (règles générales) - Congé - Pluralité de preneurs - Congé donné par l'un d'eux - Clause de solidarité

Lorsqu'un bail a été accepté conjointement et solidairement par deux colocataires, la circonstance que, postérieurement à son renouvellement, l'un des locataires quitte les lieux ou notifie son congé au bailleur n'a pas pour effet de mettre fin à ce bail, le renouvellement ayant bénéficié à chacun des deux colocataires solidaires, et ne met pas fin à la solidarité, en application de l'article 1200 du code civil, le congé délivré par les deux colocataires étant seul susceptible de mettre fin au bail


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.versailles;arret;1999-09-17;1997.7195 ?
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